Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossiers : 2010-2938(CPP)

2010-2939(EI)

 

ENTRE :

 

DOUGLAS NORMAN,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Appel entendu le 13 avril 2011, à Edmonton (Alberta)

 

Devant : L’honorable juge Judith Woods

 

Comparutions :

 

Représentante de l’appelant :

Mme Joan Bone

 

Avocate de l’intimé :

Me Mary Softley

 

 

 

JUGEMENT

L’appel des décisions prises par le ministre du Revenu national en vertu de la Loi sur l’assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada selon lesquelles Kevan Simms exerçait auprès de l’appelant un emploi assurable et ouvrant droit à pension pendant la période du 1er juin au 8 septembre 2009 est accueilli, et les décisions sont annulées. Chaque partie assumera ses propres dépens.

 

 

       Signé à Ottawa (Ontario), ce 19e jour d’avril 2011.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de juin 2011.

 

Marie-Christine Gervais

 


 

 

Référence : 2011 CCI 217

Date : 20110419

Dossiers : 2010-2938(CPP)

2010-2939(EI)

 

 

ENTRE :

 

DOUGLAS NORMAN,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

La juge Woods

 

[1]              Dans le présent appel interjeté en vertu de la Loi sur l’assurance‑emploi et du Régime de pensions du Canada, Douglas Norman conteste les décisions du ministre du Revenu national (le « ministre ») selon lesquelles M. Norman a engagé Kevan Simms (le « travailleur ») à titre d’employé. L’appelant soutient que le travailleur était un entrepreneur indépendant.

 

[2]              La période en cause est du 1er juin au 8 septembre 2009.

 

[3]              Les principes juridiques à appliquer dans un cas comme celui-ci sont bien connus. En fait, il faut se demander si le travailleur exploitait une entreprise pour son propre compte. Les critères exposés dans l’arrêt Wiebe Door, souvent cité, à savoir le contrôle, les chances de bénéfice et le risque de perte ainsi que la propriété des instruments de travail doivent figurer parmi les facteurs à prendre en compte. Par ailleurs, si les parties s’entendent pour que leur relation soit régie par un contrat d’entreprise ou bien par un contrat de louage de services, l’intention des parties régira leur relation à condition que la relation effective s’accorde avec cette intention.

 

Analyse

 

[4]              L’appelant exploite une entreprise de couverture en tant qu’entreprise individuelle. Les travaux de couverture sont réalisés en équipes d’environ deux à sept personnes. Le travailleur fréquentait l’école secondaire à l’époque, et il a travaillé pour l’appelant pendant l’été.

 

[5]              L’entreprise est organisée en fonction du fait que tous les membres de l’équipe sont des entrepreneurs indépendants. L’appelant a affirmé qu’il voulait éviter autant de travaux d’écriture que possible. Les membres de l’équipe comprennent qu’ils sont tenus aux obligations relatives à l’impôt sur le revenu, au Régime de pensions du Canada et à la taxe sur les produits et services.

 

[6]              De manière générale, les activités de l’entreprise s’accordent avec cette intention. En particulier :

 

a)                 Les membres de l’équipe ne sont nullement tenus de travailler exclusivement pour l’appelant ni de travailler à des travaux particuliers.

 

b)                Le travail provient généralement d’un petit nombre d’entrepreneurs qui sont bien connus de l’appelant et des autres travailleurs anciens. L’appelant choisit les travaux de couverture parmi les demandes qu’il reçoit.

 

c)                 Les travaux sont réalisés en équipe. Les membres de l’équipe participent généralement à la prise de décisions sur le chantier.

 

d)                Chaque travailleur est rémunéré selon un taux horaire qui varie en fonction de son expérience. Les membres de l’équipe se partagent ensuite à parts égales le profit net restant tiré de la réalisation des travaux particuliers.

 

e)                 Les instruments de travail sont achetés par l’appelant, mais ils font partie des dépenses qui sont partagées également entre les travailleurs. Les membres de l’équipe sont libres d’utiliser ces instruments de travail pour d’autres travaux.

 

[7]              Il est clair à mon avis que la plupart des membres de l’équipe ne sont pas engagés à titre d’employés. Leur intention est très claire, et les conditions de travail ont été établies de manière à s’accorder avec cette intention.

 

[8]              La question qui demeure est celle de savoir si le travailleur relève d’une catégorie différente. La difficulté découle du fait que le travailleur est jeune et inexpérimenté et qu’il exerçait des fonctions de bas niveau. L’avocate de l’intimée soutient qu’à cause de cela, la relation ne présente pas les caractéristiques d’un contrat d’entreprise. 

 

[9]              Je conviens avec l’intimé que le travailleur se trouvait dans une situation différente de celle des membres d’expérience de l’équipe. Il était un jeune membre de l’équipe, et sa capacité à participer au processus décisionnel général était assez limitée.

 

[10]         Cependant, bien que la situation du travailleur ait été différente, je suis d’avis qu’il était lui aussi un entrepreneur indépendant. J’examinerai tout d’abord certaines des hypothèses formulées par le ministre. Bon nombre des hypothèses ont été réfutées par le témoignage du travailleur, qui était le propre témoin de l’intimé.

 

[11]         Premièrement, le ministre a présumé que l’appelant assurait le transport du travailleur jusqu’aux chantiers. Compte tenu du témoignage du travailleur, je reconnais que cette hypothèse a été réfutée.

 

[12]         Deuxièmement, le ministre a présumé que le travailleur recevait des instructions quant à ses heures et à ses jours de travail. Or, le travailleur a affirmé qu’il avait généralement la liberté de ne pas participer à la réalisation de travaux particuliers, sauf lorsqu’il s’agissait de travaux importants. Il a également mentionné qu’il n’y avait aucune conséquence s’il n’arrivait pas au chantier à l’heure à laquelle l’équipe avait convenu de commencer à travailler. Cette hypothèse a également été réfutée.

 

[13]         Troisièmement, le ministre a présumé que l’appelant donnait des instructions au travailleur et le supervisait. Or, de par leur nature, les tâches que le travailleur accomplissait ne demandaient pas beaucoup de supervision. Ces tâches étaient définies de façon précise – arracher des bardeaux et nettoyer le chantier. Le travailleur a affirmé qu’il recevait des instructions générales au début des travaux mais qu’après cela, il n’y avait aucune supervision. Cette hypothèse a également été réfutée par le témoin de l’intimé.

 

[14]         Quatrièmement, le ministre a présumé que le travailleur recevait un salaire horaire fixe. Or, le travailleur a affirmé qu’il avait touché des primes importantes, qui avaient augmenté sa rémunération en faisant en moyenne passer son taux horaire de 16 $ à plus de 21 $. Le travailleur ne savait pas précisément comment la prime était calculée, mais il savait que la prime dépendait de ce que les travaux en particulier avaient rapporté. L’hypothèse a été réfutée.

 

[15]         Cinquièmement, le ministre a présumé que le travailleur entendait exercer un emploi. Or, son témoignage a clairement indiqué que tel n’était pas le cas.

 

[16]         J’ai demandé au travailleur s’il avait demandé des prestations d’assurance‑emploi relativement à son travail pour l’appelant. Le travailleur a affirmé que oui, mais seulement parce qu’un gestionnaire de cas l’avait exhorté à le faire même si le travailleur croyait qu’il n’y avait pas droit.

 

[17]         L’avocate de l’intimé soutient que l’appelant pouvait contrôler les modalités d’exécution du travail étant donné le manque d’expérience du travailleur, et que les profits n’étaient pas importants parce que le travailleur avait peu d’influence sur l’ampleur des profits qui étaient réalisés.

 

[18]         Ces arguments ont un certain mérite, mais je suis d’avis qu’ils fixent la barre trop haut. L’appelant exploite une entreprise établie de longue date qui a clairement été organisée de manière à éviter d’établir des relations employeur-employé avec les membres de l’équipe. À mon avis, l’appelant a pris suffisamment de mesures pour faire en sorte que la relation avec le travailleur soit sur un même pied que celle avec les autres membres de l’équipe.

 

[19]         L’appel sera accueilli, et les décisions du ministre selon lesquelles Kevan Simms exerçait un emploi assurable et ouvrant droit à pension seront annulées. Chaque partie assumera ses propres dépens

 

 

 

       Signé à Ottawa (Ontario), ce 19e jour d’avril 2011.

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 23e jour de juin 2011.

 

Marie-Christine Gervais

 


RÉFÉRENCE :                                  2011 CCI 217

 

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR : 2010-2938(CPP)

                                                          2010-2939(EI)

 

INTITULÉ :                                       DOUGLAS NORMAN c. MINISTRE DU REVENU NATIONAL

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 13 avril 2011

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge J.M. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 19 avril 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Représentante de l’appelant :

Mme Joan Bone

 

Avocate de l’intimé:

Me Mary Softley

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                      S/O

 

                          Cabinet :                 

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa (Ontario)

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