Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

Dossier : 2007-2261(IT)I

ENTRE :

 

MICHELE BAPTISTE,

appelante,

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus le 31 janvier 2011, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge Lucie Lamarre

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Scott Robertson

Avocat de l’intimée :

Me Justin Kutyan

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          Les appels des cotisations ou des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 1995, 1998, 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005 sont rejetés sans qu’aucuns dépens soient adjugés.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 9e jour de juin 2011.

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 12e jour de septembre 2011.

 

Marie-Christine Gervais

 


 

 

 

Référence : 2011 CCI 295

Date : 20110609

Dossier : 2007-2261(IT)I

 

ENTRE :

MICHELE BAPTISTE,

appelante,

 

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Lamarre

 

[1]              Les présents appels résultent de cotisations ou de nouvelles cotisations que le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») pour les années d’imposition 1995, 1998, 1999, 2000, 2001, 2002, 2003, 2004 et 2005 de l’appelante.

 

 

Point litigieux et remarques préliminaires des parties

 

[2]              La question en litige est de savoir si, au cours des années ici en cause, le revenu d’emploi de l’appelante était imposable suivant les articles 2, 3 et 5 de la LIR, ou s’il était exonéré d’impôt suivant l’alinéa 81(1)a) de la LIR. L’appelante estime que son revenu d’emploi devrait être considéré comme un bien meuble d’un Indien situé dans une réserve, au sens de l’article 87 de la Loi sur les Indiens (la « LI ») de sorte qu’il devrait être exonéré d’impôt. L’appelante invoque principalement la décision que la Cour suprême du Canada a rendue dans l’arrêt Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29, pour soutenir que le situs de son revenu d’emploi était une réserve parce que la résidence de son employeur était située dans une réserve.

 

[3]              Pour sa part, l’intimée fait valoir que les présents appels font partie de plus de 1 000 appels interjetés devant la Cour canadienne de l’impôt, concernant des travailleurs de la même agence de placement, Native Leasing Services (« NLS »), ou de la société sœur de cette agence, O.I. Employment Leasing Inc. (« OI »). La présente cour, la Cour d’appel fédérale et la Cour suprême du Canada ont examiné la question soulevée en l’espèce; les règles de droit applicables sont bien établies. Pour savoir si le revenu d’emploi est situé dans une réserve, il faut tenir compte de divers facteurs de rattachement, dont l’emplacement ou le lieu de résidence de l’employeur. Les autres facteurs comprennent la nature et l’emplacement du travail accompli par l’employé (y compris la nature de tout avantage que la réserve a tiré de ce travail), les circonstances y afférentes ainsi que le lieu de résidence de l’employé. L’intimée soutient que dans les arrêts Horn c. La Reine, 2008 CAF 352, et Rachel Shilling c. M.R.N., 2001 CAF 178, il a été décidé que l’interposition de NLS à titre d’employeur ne rattache pas sensiblement le revenu d’emploi à une réserve d’une façon pertinente quant à l’article 87 de la LI. De l’avis de l’intimée, l’appelante exerçait ses activités rémunérées sur le « marché » et le revenu d’emploi qu’elle a reçu n’était pas situé dans une réserve au sens de l’article 87 de la LI.

 

 

Faits admis sur consentement au moyen de la production de l’exposé conjoint des faits (pièce A‑3)

 

[4]              L’appelante travaillait pour NLS, société dont Roger Obonsawin, qui est un Indien inscrit pour l’application de la LI, était le propriétaire-exploitant. Le bureau principal de NLS est situé dans la réserve des Six nations de rivière Grand (les « Six nations ») et fait partie d’un groupe de sociétés qui appartiennent toutes à M. Obonsawin (le « groupe OI »). M. Obonsawin est membre de la Première nation d’Odanak, dans la réserve d’Odanak, mais il n’a jamais habité dans cette réserve. Le groupe OI fournit des services de consultation et de placement sur le marché du travail à des employeurs et à des employés des communautés autochtones du Canada. La société NLS a été créée en 1991 en vue de louer les services d’employés, Indiens inscrits ou non, à des organismes autochtones. Selon ce concept, NLS loue les services d’employés et fournit, à titre d’employeur, tous les services de soutien pour ce qui est de l’administration et des ressources humaines. Les employés reçoivent leurs instructions de l’organisme pour lequel ils travaillent et dont ils relèvent. La société NLS est responsable de la paie et facture les salaires à l’organisme en fonction des feuilles de temps des employés, approuvées par le superviseur sur place. Quant aux opérations bancaires, les comptes d’exploitation de NLS étaient situés hors réserve jusqu’en 1996. Par la suite, NLS avait des comptes bancaires dans la réserve. Les principales fonctions relatives au louage de services d’employés étaient accomplies dans la réserve des Six nations par un personnel administratif composé de huit à quinze personnes, selon l’année. Tous les dossiers de NLS étaient conservés au bureau de la réserve des Six nations. Pour les années 1995 et 1996, le loyer versé au conseil de la bande des Six nations ainsi que les salaires et les avantages sociaux accordés au personnel de la réserve, lesquels représentaient les avantages directs conférés à celle‑ci, ont atteint un montant d’environ 230 000 à 240 000 $. La formation du personnel qui habitait dans la réserve a donné lieu à d’autres avantages directs, mais il est difficile de quantifier ces avantages. La totalité du revenu brut de NLS est générée hors réserve. Selon les estimations, le groupe OI comptait environ 800 employés en 1997, 1 000 en 1999 et jusqu’à 1 400 entre les années 1999 et 2006. Seules les fonctions administratives étaient accomplies dans la réserve. En 1995 et en 1996 respectivement, les revenus bruts de NLS s’élevaient à 15 692 945 $ et à 13 344 801 $ et ces revenus provenaient en entier du travail des employés de NLS accompli hors réserve. Les frais de NLS se rapportaient, dans une proportion de 95 p. 100, aux salaires et aux avantages accordés aux employés dont les services étaient sous‑traités à des organismes hors réserve. Ces frais (rémunération et avantages) sont financés par les clients au moyen de ce qui est essentiellement un transfert dans le cadre duquel le client dépose la paie et les avantages des employés dans le compte bancaire de NLS, le montant y afférent devant être retiré (une fois déduits les frais de gestion) aux fins du financement de la paie des employés de NLS dont les services sont loués au client. Roger Obonsawin n’a pas à sa disposition les états financiers de NLS postérieurs à l’année 1997, bien que l’entreprise soit encore exploitée.

 

 

Les dispositions législatives pertinentes

 

Loi de l’impôt sur le revenu

 

81(1) Sommes à exclure du revenu – Ne sont pas inclus dans le calcul du revenu d’un contribuable pour une année d’imposition :

 

a) Exemptions prévues par une autre loi [notamment la Loi sur les Indiens] – une somme exonérée de l’impôt sur le revenu par toute autre loi fédérale, autre qu’un montant reçu ou à recevoir par un particulier qui est exonéré en vertu d’une disposition d’une convention ou d’un accord fiscal conclu avec un autre pays et qui a force de loi au Canada;

 

Loi sur les Indiens

 

87(1) Biens exempts de taxation – Nonobstant toute autre loi fédérale ou provinciale, mais sous réserve de l’article 83 et de l’article 5 de la Loi sur la gestion financière et statistique des premières nations, les biens suivants sont exemptés de taxation :

 

a) le droit d’un Indien ou d’une bande sur une réserve ou des terres cédées;

 

b) les biens meubles d’un Indien ou d’une bande situés sur une réserve.

 

                                                                           [Non souligné dans l’original.]

 

 

Les faits

 

[5]              Mme Baptiste est une Indienne inscrite; elle est membre de la Première nation des Algonquins de Pikwakanagan (Golden Lake), en Ontario. Elle est née à Toronto; ses parents sont retournés vivre dans la réserve pendant un certain temps lorsqu’elle était jeune. Elle a été élevée [traduction] « un petit peu » dans la réserve, mais son père, un monteur de charpentes métalliques, était obligé de déménager souvent à cause de son travail. Ils ont vécu à Ottawa, à Toronto, à Cleveland et à Port Perry. Mme Baptiste vit elle-même maintenant à Toronto (transcription, page 13). Certains membres de sa famille vivent encore dans la réserve, et elle s’y rend au moins deux fois l’an. Elle vote aux élections du conseil de bande, mais elle a une faible maîtrise de la langue autochtone. Elle possède, avec son frère, une parcelle de terre dans la réserve. Elle a achevé ses études en gestion du marketing, au collège Centennial, en 1989.

 

[6]              En 1993, le Conseil canadien pour le commerce autochtone a remis à Mme Baptiste une lettre de présentation à l’égard d’un emploi auprès de Miziwe Biik, qui est un organisme fournissant des services de formation et d’emploi à la communauté autochtone de la région du Grand Toronto, aidant les Autochtones urbains à obtenir un emploi et à se prévaloir des programmes de formation fédéraux et provinciaux (voir le nouvel avis d’appel modifié, paragraphe 10). Mme Baptiste a posé sa candidate au poste, à Miziwe Biik; cet organisme (autrefois connu sous le nom de Greater Toronto Aboriginal Management Board) lui a ménagé une entrevue et lui a directement offert un emploi. Mme Baptiste a été embauchée à titre d’agente de marketing et elle a signé une entente concernant le contrat de travail avec NLS le 21 juin 1993. Elle était une employée de NLS, mais elle recevait ses instructions de Miziwe Biik. Son salaire était versé par NLS depuis le bureau de cet organisme, situé dans la réserve des Six nations de rivière Grand (voir l’entente concernant le contrat de travail, pièce R‑1, onglet 2). Mme Baptiste a expliqué que NLS (désignée sous le nom d’OI) administrait la paie et les avantages sociaux pour Miziwe Biik et que les employés (qui étaient tous autochtones) étaient [traduction] « des employés dont les services avaient été loués par l’entremise de l’organisme [NLS/OI] » (transcription, pages 17 à 20). En sa qualité d’agente de marketing, Mme Baptiste aidait les clients des Premières nations à trouver des emplois dans la région du Grand Toronto. Elle travaillait auprès d’employeurs éventuels à l’élaboration de programmes de formation et elle collaborait avec des organismes autochtones des environs à l’égard du placement des candidats. Le lieu de son travail était situé à Toronto, mais elle participait à un nombre passablement élevé de réunions conjointes avec d’autres organismes, lesquelles avaient lieu ailleurs qu’à son bureau. Les clients de Miziwe Biik étaient des Autochtones, soit des Indiens inscrits et des Indiens non inscrits (voir la transcription, page 23).

 

[7]              Au mois de mars 1996, Mme Baptiste s’est vu offrir un poste de directrice adjointe, Équité en matière d’emploi, dans le cadre d’un projet pilote, à la Banque de Nouvelle‑Écosse. Son mandat consistait à recruter principalement des Autochtones, mais aussi des personnes atteintes d’une déficience, qui travailleraient dans des succursales de la Banque de Nouvelle‑Écosse situées à Toronto. La banque avait embauché Mme Baptiste pour une période d’un an. Mme Baptiste a de son propre chef communiqué avec la banque et demandé à travailler par l’entremise d’OI. Cette proposition a été acceptée, et OI a signé avec la banque, le 8 juillet 1996, une entente de placement par laquelle OI s’engageait à payer le salaire de Mme Baptiste, à l’aide des frais que la banque lui versait (pièce R‑1, onglet 5, paragraphes 1 à 4). Le même jour, Mme Baptiste a signé une entente concernant le contrat de travail avec OI (pièce R‑1, onglet 6). Mme Baptiste a expliqué qu’elle préparait des feuilles de temps, qui étaient ensuite approuvées par son supérieur à la banque (des échantillons de feuilles de temps ont été produits sous la cote R‑1, onglet 57) et qu’elle envoyait régulièrement par télécopieur ces feuilles à OI, qui établissait ensuite une facture à l’intention de la banque (transcription, page 33). Le salaire de Mme Baptiste était déposé directement par OI dans le compte bancaire que celle‑ci avait dans la réserve. Au cours de la première année, Mme Baptiste se déplaçait pour se rendre aux bureaux de divers organismes (notamment dans certaines communautés des Premières nations), ainsi que dans des universités et dans des collèges, afin de faire savoir que la banque, à Toronto, recrutait des Autochtones et de trouver des candidats (transcription, pages 29 et 30).

 

[8]              Le contrat de Mme Baptiste était prorogé d’une année à l’autre. En 1997, la banque avait créé un programme sur la diversité nationale en vue d’établir des relations avec les communautés des Premières nations partout au pays. Mme Baptiste a commencé à travailler au sein du service de la diversité à titre de directrice nationale, Emploi des Autochtones. Ses tâches consistaient à créer une stratégie de rétention des employés autochtones pour la banque et à voyager ensuite partout au Canada avec les directeurs régionaux, Diversité, afin de présenter cette stratégie aux communautés des Premières nations. Elle organisait des séances d’information sur les carrières à la banque. Elle participait également à divers salons de l’emploi, en particulier ceux qui s’adressaient expressément aux étudiants autochtones. Lors de l’interrogatoire principal, Mme Baptiste a déclaré qu’elle se déplaçait au besoin chaque mois, probablement pendant une semaine et demie, principalement dans le Nord de l’Ontario, mais aussi dans les provinces de l’Ouest. Elle effectuait son travail dans les réserves et hors réserve (transcription, pages 34 à 39). En 1998, Mme Baptiste travaillait encore à des programmes internes ayant pour objet l’embauche d’employés autochtones, mais elle a commencé à collaborer plus étroitement avec l’unité des opérations bancaires autochtones de la banque à des possibilités d’affaires dont la banque pourrait se prévaloir auprès des communautés des Premières nations, comme la prestation de services bancaires ou l’octroi de prêts commerciaux à des Autochtones. On demandé à Mme Baptiste de participer, sur le plan des ressources humaines, à la discussion de la stratégie de la banque visant à permettre à cette dernière de faire des affaires avec ces communautés (transcription, pages 39 à 41 et page 47). Dans son rapport d’évaluation du rendement de 1999, Mme Baptiste a fait remarquer que la rétroaction reçue des membres des communautés autochtones indiquait que la banque était considérée comme investissant dans le bien‑être général des Autochtones et comme recherchant des avantages à long terme. Dans ce même rapport, l’évaluateur faisait remarquer que Mme Baptiste avait fortement contribué à améliorer le profil de la banque auprès de la communauté autochtone, qu’elle avait créé des partenariats avantageux entre cette communauté et la banque, et ce, bien que les partenaires internes, à la banque, n’aient pas toujours été entièrement d’accord avec elle (voir la pièce R‑1, onglet 20, page 2, responsabilité clé no 2). Lors de son interrogatoire principal, Mme Baptiste a déclaré que la communauté susmentionnée comprenait des membres des Premières nations vivant dans les réserves et hors réserve ainsi que des Autochtones urbains (transcription, page 46).

 

[9]              En 2000, Mme Baptiste a été mutée à un nouveau secteur de service – Services partagés – RH – créé par la banque, et elle est devenue directrice nationale, Emploi des Autochtones (transcription, pages 50 à 54, et pièce R‑l, onglet 21). Elle s’occupait de différents programmes d’initiatives autochtones parrainés par la banque à l’intention des étudiants (comme des symposiums sur le choix de carrière, le mentorat, les jeunes entreprises et un programme de bourses d’études) ainsi que du soutien d’activités culturelles autochtones telles que les rassemblements des Anciens, de sorte qu’elle voyageait davantage pour se rendre sur place. De plus, on avait communiqué avec la banque au sujet du financement de casinos situés dans des réserves, en Alberta, l’une des raisons étant le fait que le principal client de la banque était le casino situé dans la réserve de la Première nation de Rama, où la banque avait une succursale (transcription, page 57, et rapport d’évaluation du rendement de l’année 2001, pièce R‑1, onglet 22, responsabilité clé no 2). Mme Baptiste a également mentionné qu’elle avait eu un rôle de premier plan, en 2003, lorsque s’étaient présentées des possibilités d’affaires avec la Première nation de Siksika, en Alberta, d’une valeur de plus de 82 millions de dollars. Mme Baptiste a déclaré qu’à cause de la relation qu’elle entretenait avec des personnes clés de la réserve des Siksika, on avait demandé à la banque de présenter un exposé sur la façon d’établir un compte en fiducie concernant le règlement des revendications territoriales (voir le rapport sur la mesure du succès de Mme Baptiste de l’année 2003, pièce R‑l, onglet 23, objectif/responsabilité no 3). Lors du contre-interrogatoire, Mme Baptiste a expliqué que son rôle avait consisté à aider la banque à préparer l’offre et qu’elle s’était rendue dans les communautés pour donner aux Premières nations un aperçu général des modalités d’exploitation de la banque au sein des communautés des Premières nations (transcription, pages 109 et 110). Les rapports d’évaluation de Mme Baptiste indiquaient, en tant que conclusion générale, que son supérieur estimait qu’elle jouait un rôle important lorsqu’il s’agissait de combler certains écarts culturels et de rendre crédible le message de la banque, à savoir que la banque tenait à établir des relations étroites avec les communautés autochtones (voir le rapport sur la mesure du succès de Mme Baptiste pour les années 2004 et 2005, pièce R‑1, onglets 24 et 25).

 

[10]         En 2005, la banque a créé un budget spécial pour les voyages de Mme Baptiste, de façon que celle‑ci puisse voyager sans avoir à présenter au préalable une demande à la banque. Avant l’année 2005, Mme Baptiste devait obtenir l’approbation des ressources humaines (transcription, pages 64 à 66). Mme Baptiste a déclaré qu’au cours des années où elle avait travaillé à la banque, elle avait visité environ 40 à 45 réserves, comme le montre la pièce A‑2, qui est un document créé pour les besoins de l’instruction à partir de ce que Mme Baptiste se rappelait. La banque a mis fin à son emploi en 2009 (pièce R-1, onglets 54 et 55).

 

[11]         Lors du contre-interrogatoire, Mme Baptiste a reconnu que les avis de postes de stagiaire à pourvoir à la banque étaient distribués dans les universités et auprès de différents organismes situés en milieu urbain (pièce R‑1, onglet 30). Quant aux voyages effectués dans des réserves, Mme Baptiste ne les consignait pas par écrit (transcription, page 77). Mme Baptiste a déclaré qu’il était arrivé à plusieurs reprises qu’elle voyage avec d’autres personnes pour visiter des communautés et qu’elle ne présente pas de demande de remboursement de ses kilomètres parcourus. Elle a reconnu que ses frais de voyages d’affaires étaient débités de la carte de crédit commerciale de la banque qui lui avait été remise (transcription, page 79). Dans son nouvel avis d’appel modifié, Mme Baptiste a déclaré au paragraphe 16 qu’elle visitait des réserves 70 p. 100 du temps. Toutefois, les relevés mensuels de la carte commerciale qui ont été produits sous la cote R‑1, onglets 26 à 29, permettent de constater qu’elle restait dans des hôtels situés en milieu urbain et qu’elle ne voyageait pas à l’extérieur de Toronto plus d’une semaine par mois (transcription, page 96). Selon son rapport sur les [traduction] « activités et réunions fréquentes » au sein de la communauté autochtone, produit sous la cote R‑1, onglet 21, la plupart des activités énumérées avaient lieu à Toronto et il y en avait fort peu qui étaient tenues dans des réserves (transcription, pages 99 à 102). Lors du réinterrogatoire, Mme Baptiste a mentionné que les documents qui avaient été produits devant la Cour ne comprenaient pas tous les états de frais (transcription, page 104). Elle a également dit que les demandes de remboursement des kilomètres parcourus ne figuraient pas dans les relevés de la carte commerciale parce qu’elle n’utilisait pas la carte à cette fin (transcription, pages 105 et 106).

 

[12]         Mme Gertrude Saulnier, directrice des ressources humaines à la Banque de Nouvelle‑Écosse, a témoigné. Mme Saulnier a déclaré que jusqu’en 2001, Mme Baptiste relevait des directeurs, Diversité, qui de leur côté relevaient d’elle. Ils travaillaient ensemble à des initiatives intéressant la communauté autochtone ou à la diversité en général. La banque travaillait à la question de l’équité en matière d’emploi en vue de diversifier sa main‑d’œuvre et de profiter ainsi en fin de compte à son entreprise. Comme Mme Saulnier l’a elle‑même dit : [traduction] « Il ne s’agissait pas simplement des gens; c’était également une question d’affaires » (transcription, page 117). En 2001, le rôle de Mme Baptiste a été divisé en différentes composantes. Elle travaillait à la rétention des employés autochtones et à des programmes parrainés par la banque à l’intention des Autochtones. Elle agissait également à titre de conseillère des partenaires commerciaux, à la banque, et les aidait à comprendre la communauté autochtone en général (transcription, pages 118 et 119). À compter de l’année 2001, Mme Baptiste relevait directement de Mme Saulnier. Mme Saulnier recommandait toute augmentation de salaire ou toute prime de rendement, qui était fixée en fonction de la cote de rendement de Mme Baptiste. Une fois que le montant de la rémunération était fixé, Mme Saulnier faisait savoir à OI qu’une facture pouvait être envoyée à la banque (voir par exemple la pièce R‑1, onglets 43 et 44, et la transcription, page 120). OI ne participait pas à la détermination du salaire de Mme Baptiste. Mme Saulnier estimait, compte tenu de l’ensemble des frais de stationnement engagés par Mme Baptiste à Toronto, que cette dernière passait 40 p. 100 de son temps dans son bureau, à Toronto (transcription, pages 122 et 127). Selon Mme Saulnier, il n’existait aucun document d’entreprise pour les voyages, sauf les relevés de la carte de crédit commerciale (transcription, page 129). La banque payait tous les frais de voyage; ce n’était pas OI qui le faisait. Le mandat de Mme Baptiste consistait à établir des relations avec les Autochtones et à trouver des possibilités d’affaires pour la banque (transcription, pages 122 et 123). Mme Baptiste accompagnait les banquiers dans les réserves pour les présenter, mais son mandat ne consistait pas à aller dans les réserves pour recruter des clients (transcription, page 123). Ainsi, ce n’était pas Mme Baptiste qui avait négocié le marché d’une valeur de 82 millions de dollars avec la Première nation de Siksita, en Alberta. Mme Baptiste était l’experte quant aux engagements de la banque envers la communauté autochtone, mais non en ce qui concerne le marché qui avait été conclu au sujet de la question de la fiducie. C’étaient les banquiers eux‑mêmes qui avaient mené les négociations. Le travail effectué par Mme Baptiste dans le cadre de ce projet avait en général était fait par téléphone. Mme Baptiste s’était rendue dans la réserve peut‑être deux ou trois fois au cours de l’année pour ce projet (transcription, pages 132 et 133).

 

 

Les arguments de l’appelante

 

[13]         L’appelante a fait valoir qu’en édictant l’article 87 de la LI, le législateur voulait protéger les Indiens contre l’érosion de leurs biens dans une réserve et qu’une interprétation libérale s’applique à toute loi concernant les Indiens (il a été fait mention de l’arrêt Mitchell c. Bande indienne Peguis, [1990] 2 R.C.S. 85 (QL), paragraphes 15 et 87). Tout en reconnaissant que les tribunaux ont adopté une approche fondée sur les facteurs de rattachement pour déterminer l’emplacement du revenu d’emploi aux fins de l’impôt, l’appelante a affirmé que cette approche est un exercice particulièrement lié aux faits (il a été fait mention de l’arrêt Horn c. la Reine, 2008 CAF 352, paragraphe 8). À son avis, les faits de la présente affaire sont uniques et ne sont pas assimilables aux faits des affaires invoquées par l’intimée. Mme Baptiste a soutenu qu’elle avait démontré qu’elle travaillait dans des réserves pour des Indiens inscrits.

 

[14]         Quant aux facteurs de rattachement, l’appelante a déclaré que la résidence du débiteur est un facteur important et pourrait même être le seul facteur. En se fondant sur l’arrêt Williams c. Canada, [1992] 1 R.C.S. 877 (QL), paragraphe 18, l’appelante a fait valoir que, selon le principe directeur, un Indien inscrit devrait être en mesure d’exercer un choix en vue de situer ses biens de façon qu’ils soient protégés par la LI ou qu’ils ne le soient pas. Dans son cas, Mme Baptiste a délibérément décidé de situer son revenu d’emploi dans une réserve, étant donné qu’elle a décidé de travailler pour OI ou pour NLS, ces employeurs étant situés dans une réserve. L’intimée a admis que l’employeur de Mme Baptiste était OI ou NLS et cela ne peut plus être contesté de quelque façon que ce soit (transcription, pages 149 et 150, et pages 153 et 154).

 

[15]         Quant aux autres facteurs de rattachement, l’appelante a affirmé que son employeur apportait des avantages importants à la communauté des Premières nations en général. L’intimée ne conteste pas qu’environ huit à 15 membres de la bande des Six nations travaillent à un moment donné pour le groupe NLS et OI afin d’administrer les activités de louage de services d’employés depuis la réserve (transcription, page 161, et exposé conjoint des faits, pièce A‑3, paragraphe 6). Selon les statistiques les plus récentes, les salaires et les avantages sociaux du personnel de bureau situé dans la réserve des Six nations représentaient en tout près de 250 000 $. Le groupe de sociétés OI et NLS louait également ses locaux du conseil de la bande des Six nations et apportait des avantages indirects importants aux communautés des Premières nations en général. L’un des buts du groupe de sociétés NLS et OI était de participer au développement d’un réseau autonome d’organismes clients et d’employés autochtones éventuels au Canada. Cette approche permettait d’améliorer les compétences des organismes autochtones au moyen de la prestation de services de formation, de gouvernance et de perfectionnement des compétences, et Mme Baptiste travaillait précisément dans ce domaine (transcription, pages 161 à 163).

 

[16]         Quant au lieu du travail et aux circonstances y afférentes, les tâches de Mme Baptiste étaient directement liées au recrutement d’Autochtones et visaient à aider ceux‑ci à acquérir des compétences en gestion et à avoir accès au financement par actions ou par des prêts, soit l’une des préoccupations exprimées dans le Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones (transcription, pages 163 à 167, et pièce A‑1). Selon Mme Baptiste, il est passablement certain que son travail constituait un atout pour la communauté autochtone du Canada, dans les réserves et hors réserve (l’avocat a fait mention de l’arrêt Canada c. Folster, [1997] 3 C.F. 269, dans lequel la Cour d’appel fédérale a laissé entendre que c’est l’avantage que la communauté tire des tâches accomplies qu’il faut prendre en considération plutôt que le lieu même de l’exécution des tâches (voir la transcription, page 169). Même si Mme Baptiste ne travaillait pas directement pour une réserve, elle travaillait à la création d’une relation visant à profiter aux Premières nations (transcription, page 169). À son avis, le fait que le travail était effectué hors réserve n’empêchait pas en soi son revenu d’être protégé par l’article 87 de la LI.

 

[17]         L’appelante a également mentionné la décision que la présente cour a rendue dans Robertson c. La Reine, 2010 CCI 552 (en appel devant la Cour d’appel fédérale), où le juge Hershfield a exprimé sa pensée au sujet de la notion de « commerce général » quant à la question de savoir si un bien est situé dans une réserve. Le juge a dit ce qui suit, aux paragraphes 117 et suivants :

 

iii) Le commerce général

 

[117] J’aimerais faire remarquer à titre préliminaire que je partage le malaise exprimé par les avocats des appelants et de la Couronne à l’égard de l’idée selon laquelle les entreprises dirigées par des Autochtones devraient toutes être considérées comme ne faisant pas partie du « commerce général » du Canada simplement à cause de l’existence de certains liens avec une réserve. D’autre part, en cherchant à clarifier l’interprétation qu’il convient de donner à ces termes, je m’inspire des remarques qui ont été faites dans l’arrêt Recalma c. R., où le juge Linden a confirmé que l’analyse de l’article 87 ne devrait pas trop mettre l’accent sur le critère du « commerce général ». Au paragraphe 9, le juge a fait les remarques suivantes :

 

[...] Il convient de préciser que le concept « du marché ordinaire » n’est pas un critère ayant pour but de déterminer si les biens sont situés dans une réserve; il s’agit simplement d’un élément qui aide à l’évaluation des divers facteurs à l’étude. Ce n’est absolument pas un critère déterminant. L’exercice de raisonnement primordial est de décider, en tenant compte de l’ensemble des facteurs de rattachement et en gardant à l’esprit l’objet de l’article, de l’endroit où sont situés les biens, c’est‑à‑dire si le revenu gagné fait « partie intégrante de la vie de la réserve », s’il est « étroitement lié » à cette vie, et s’il devrait être protégé pour empêcher de porter atteinte aux biens détenus par les Indiens en tant qu’Indiens.

 

[118] Dans une autre partie de ses motifs de jugement, le juge a exprimé le même avis d’une façon légèrement différente :

 

9 [...] Dans l’évaluation des différents facteurs pertinents, il est également important de déterminer si l’activité qui a généré le revenu était « étroitement liée » à la réserve, c’est‑à‑dire si elle faisait « partie intégrante » de la vie dans la réserve, ou s’il est plus approprié de la considérer comme une activité accomplie sur « le marché ordinaire ».

[Non souligné dans l’original.]

 

[119] Le premier passage porte sur le lien entre l’activité et la vie dans la réserve, comme s’il pouvait l’emporter en tant que facteur décisif, même si l’activité est exercée dans le cadre du commerce général. Le second passage introduit une alternative qui donne à entendre qu’une activité ne peut pas à la fois faire partie intégrante de la vie dans la réserve et faire partie du commerce général. Or, je ne puis accepter que l’on ait voulu que ces deux aspects soient mutuellement exclusifs dans tous les cas. Le critère consiste à découvrir si l’activité est avant tout exercée dans le cadre du commerce général, sa contribution à la vie communautaire n’étant qu’accessoire ou imaginée. Si le critère est considéré sous cet angle, l’importance historique de l’activité pour la vie dans la réserve peut entrer en ligne de compte en tant que facteur pertinent et aider à apprécier l’aspect dominant de l’activité.

 

[18]         L’appelante est d’avis que, selon certains éléments de preuve, son travail faisait partie intégrante de la communauté indienne. Elle a cité à titre d’exemple la fiducie relative aux revendications territoriales d’une valeur de 82 millions de dollars à laquelle elle travaillait pour la banque. À son avis, cela aidait la Première nation concernée à développer et à faire croître son économie, comme les auteurs du Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones l’avaient recommandé (transcription, pages 176 et 177).

 

[19]         Enfin, l’appelante a soutenu que son travail était fort avantageux pour les communautés autochtones du fait, plus précisément, qu’elle apportait son expertise en matière financière et commerciale et que des dons de bienfaisance étaient mis à la disposition des Premières nations par l’entremise de différents organismes.

 

[20]         En résumé, Mme Baptiste est d’avis que les mesures qu’elle a prises dans le cadre de son travail en vue de maintenir et d’encourager les liens avec les communautés autochtones, en plus du fait que son employeur était situé dans une réserve et du fait qu’elle se rendait dans des réserves pour son travail, sont des facteurs importants qui devraient militer en faveur d’une exonération d’impôt à l’égard de son revenu d’emploi.

 

 

Les arguments de l’intimée

 

[21]         L’intimée est d’avis que le fait d’imposer le revenu d’emploi de Mme Baptiste ne porte pas atteinte aux biens de ceux qui vivent dans une réserve. Dans l’arrêt Monias c. la Reine, 2001 CAF 239, le juge Evans a dit ce qui suit :

 

[22] Toutefois, avant de traiter de l’application du critère des facteurs de rattachement, je veux présenter trois observations préliminaires. Premièrement, comme le juge La Forest l’a déclaré dans l’arrêt Mitchell c. Bande indienne Peguis, [1990] 2 R.C.S. 85, à la page 131, l’objectif qui sous-tend l’article 87 n’est pas de remédier à la situation économiquement défavorable des Indiens « en leur assurant le pouvoir d’acquérir, de posséder et d’aliéner des biens sur le marché à des conditions différentes de celles applicables à leurs concitoyens ».

 

[23] On doit plutôt dire qu’à l’instar de la disposition connexe qu’on trouve à l’article 89, l’objectif spécifique et plus limité de l’article 87 est de protéger de toute atteinte les terres de la réserve, ainsi que les biens personnels des Indiens situés sur la réserve, afin que les bandes puissent assurer leur subsistance dans les unités économiques et sociales que sont les réserves. Par conséquent, il est tout à fait correct au vu de la politique législative d’appliquer l’article 87 aux revenus gagnés par les Indiens qui résident dans la réserve, dans le cadre d’un travail accompli dans la réserve.

 

[...]

 

[66] Le fait que le travail qui donne lieu au revenu d’emploi soit au bénéfice des Indiens dans les réserves et qu’il puisse être essentiel au maintien des réserves comme groupes sociaux viables, n’est pas en soi suffisant pour situer le revenu d’emploi dans les réserves. La politique qui sous-tend l’alinéa 87(1)b) n’a pas pour but d’offrir une subvention fiscale aux services fournis aux réserves. Il s’agit plutôt de protéger la propriété que les Indiens peuvent acquérir, conserver et utiliser dans une réserve, de toute atteinte par le biais de l’impôt, bien que dans le cas d’un bien incorporel, comme le revenu d’emploi, c’est le situs de son acquisition qui est particulièrement important.

 

[67] En édictant l’alinéa 87(1)b), le législateur a créé une exception importante au principe qui veut que les personnes qui sont dans des situations semblables doivent être traitées de la même façon aux fins de l’impôt. Toutefois, cette disposition ne peut être interprétée comme exemptant de l’impôt sur le revenu le revenu d’emploi des Indiens qui n’a pas clairement été gagné dans des circonstances qui lient son acquisition à une réserve en tant qu’unité économique.

 

[22]         L’intimée a soutenu que le cas de Mme Baptiste n’est pas très différent de celui de l’appelante dans l’affaire Rachel Shilling, précitée. Dans cette affaire‑là, Rachel Shilling avait été placée auprès d’un organisme à but non lucratif, à Toronto, en vue d’aider d’autres Autochtones, dans la région du Grand Toronto. En 1995 et en 1996, Mme Baptiste travaillait chez Miziwe Biik, un organisme qui aidait les Autochtones, dans la région du Grand Toronto, à trouver du travail et à perfectionner leurs compétences, et qui leur apportait une aide générale. L’intimée s’est reportée au rapport annuel de 2003-2004 de Miziwe Biik (pièce R‑2). En ce qui concerne la vision de cet organisme, il est déclaré que les Autochtones, à Toronto, font face à un grand nombre d’obstacles lorsqu’ils tentent d’entrer sur le marché du travail et que l’organisme s’engage à venir à bout de ces obstacles en assurant aux Autochtones l’accès à des programmes de formation et à des services d’emploi, et en établissant des partenariats au sein de la communauté autochtone et de la communauté non autochtone. La mission de l’organisme est d’aider toutes les personnes d’origine autochtone de la région du Grand Toronto à améliorer leur qualité de vie (pièce R‑2, onglet 1, page 1). Le bureau de Miziwe Biik est situé dans le centre‑ville de Toronto et les gens qui travaillent pour cet organisme travaillent à Toronto.

 

[23]         Par la suite, et pendant presque toutes les années ici en cause, Mme Baptiste a travaillé pour une banque commerciale à but lucratif. Sa supérieure a témoigné que lorsque Mme Baptiste travaillait à la banque, elle passait environ 40 p. 100 de son temps au bureau, à Toronto. Le fait que Mme Baptiste quittait son bureau pour visiter des réserves n’est pas en soi déterminant en ce qui concerne le situs du revenu (il a été fait mention de l’arrêt Monias, précité, paragraphe 37, et de l’arrêt Akiwenzie c. La Reine, 2003 CAF 469, paragraphe 3). Enfin, en ce qui concerne l’argument de la nécessité que l’appelante a invoqué au sujet du compte en fiducie relatif au règlement des revendications territoriales d’une valeur de 82 millions de dollars, à savoir qu’elle ne pouvait pas travailler tout le temps depuis la réserve, l’intimée s’est reportée à la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Desnomie c. Canada, [2000] A.C.F. no 528 (QL). Dans cet arrêt, le juge Rothstein (tel était alors son titre), a dit ce qui suit :

 

(2) La résidence de l’employeur, la résidence de l’employé et le lieu de l’emploi sont déterminés par des facteurs indépendants de la volonté de l’employeur et de l’employé.

 

[15]      L’appelant dit qu’il ne devrait pas être accordé beaucoup d’importance au fait que la résidence de l’employeur soit située à l’extérieur de la réserve lors de l’analyse des facteurs de rattachement. Tous les directeurs de la MIEA résident dans des réserves. Tous sont membres de bandes indiennes. Les assemblées de la direction se tiennent à Winnipeg pour des raisons pratiques. Un argument lié est qu’il ne devrait pas non plus être accordé beaucoup d’importance aux facteurs du lieu du travail de l’appelant et du lieu où les services sont fournis, c’est‑à‑dire à l’extérieur de la réserve. L’accès à l’éducation au-delà de la neuvième ou de la dixième année n’est pas offert dans les réserves. Les élèves doivent quitter la réserve et déménager à Winnipeg pour poursuivre leurs études. Dans ces circonstances, l’appelant fournit ses services à Winnipeg parce qu’il n’y a pas de façon de fournir concrètement les services dans une réserve. Par conséquent, l’employeur, l’employé et l’emploi sont fortement rattachés à plusieurs réserves indiennes au Manitoba.

 

[16]      Dans l’arrêt Union of New Brunswick lndians c. Nouveau-Brunswick (Ministre des Finances), un argument semblable a été présenté quant à la taxe de vente payée par des Indiens du Nouveau-Brunswick lors de l’achat à l’extérieur de la réserve de biens destinés à être utilisés dans la réserve. Il a été dit que les Indiens étaient forcés d’effectuer ces achats à l’extérieur de la réserve, de sorte que la protection offerte par l’article 87 était érodée. Le juge McLachlin (aujourd’hui juge en chef) a rejeté cet argument au nom de la majorité. Après avoir fait remarquer qu’en cas d’ambiguïté, l’interprétation la plus favorable aux Indiens devait être retenue (paragraphe 6), elle écrit, aux paragraphes 37 et 38 :

 

37. Les intimés affirment que l’art. 87 vise à soustraire les Indiens à la taxation en ce qui concerne l’utilisation de leurs biens dans la réserve. Lorsque les Indiens sont forcés d’acheter la plus grande partie de leurs biens à l’extérieur des réserves, comme c’est le cas pour la plupart d’entre eux au Nouveau-Brunswick, cette protection est érodée. Ils soutiennent donc que l’art. 87 devrait être interprété de manière à s’appliquer aux taxes sur les ventes prélevées à l’extérieur des réserves sur les biens achetés par les Indiens aux fins d’utilisation dans une réserve. C’est l’opinion adoptée par les juges majoritaires de la Cour d’appel du Nouveau‑Brunswick.

 

38. La première difficulté suscitée par cet argument, c’est qu’il élargit considérablement l’objet de l’art. 87 défini par notre Cour dans l’arrêt Williams – soit empêcher que les biens des Indiens situés dans des réserves indiennes ne soient grugés par la taxation ou ne soient revendiqués par des créanciers. Aucun argument n’a été invoqué à l’appui d’une telle extension, sauf le fait que cela avantagerait les Indiens sur le plan économique. Mais comme notre Cour l’a dit, ce n’est pas là l’objet de l’art. 87 : voir Mitchell et Williams. Dans l’arrêt Mitchell, le juge La Forest a précisément mis en garde contre l’élargissement de la portée de l’exemption de l’art. 87, à la p. 133 :

 

[...] il faut éviter d’accorder une portée trop large aux art. 87 et 89. Ces dispositions n’ont pas pour but d’accorder des privilèges aux Indiens à l’égard de tous les biens qu’ils peuvent acquérir et posséder, peu importe l’endroit où ils sont situés. Leur but est plutôt simplement de protéger des ingérences et des entraves de la société en général les droits de propriété des Indiens sur leurs terres réservées pour veiller à ce que ceux‑ci ne soient pas dépouillés de leurs droits.

 

[17]      L’argument fondé sur la nécessité dans l’arrêt New Brunswick lndians est, s’il en est, plus déterminant que dans le présent appel. Dans cet arrêt‑là, les biens achetés inévitablement à l’extérieur de la réserve étaient destinés à être utilisés dans la réserve. Toutefois, l’argument est mal fondé en ce qu’il élargit considérablement l’objet de l’art. 87 défini par l’arrêt Williams, soit d’empêcher que les biens des Indiens situés dans des réserves indiennes ne soient grugés par la taxation.

 

[18]      Ce qui est en cause dans la présente affaire est le revenu d’emploi de l’appelant. L’appelant est un membre de la bande Peepeekisis, située à vingt miles à l’est de Fort Qu’Appelle (Saskatchewan). À partir de 1989, il a vécu à l’extérieur de sa réserve, à Winnipeg, pendant neuf ou dix ans. Comme le savant juge de la Cour de l’impôt l’a souligné, ce sont les biens meubles de l’appelant qui doivent être « situés dans une réserve ». Il n’y a aucun rattachement en l’espèce entre le revenu d’emploi de l’appelant et la réserve Peepeekisis (Saskatchewan).

 

[19]      L’argument de la nécessité se fonde d’une part sur le lien entre la MIEA et les services fournis par l’appelant, et d’autre part sur le fait que les élèves viennent de plusieurs réserves du Manitoba. Cela explique pourquoi il est judicieux de la part de la MIEA et de l’appelant d’être localisés à Winnipeg, même s’ils fournissent des services à des élèves indiens venant des réserves.

 

[20]      Cependant, l’objet du critère des facteurs de rattachement est de déterminer le situs des biens incorporels pour l’application de l’article 87, à l’égard de la question de savoir si l’Indien détient les biens en vertu des droits qu’il possède à titre d’Indien sur la réserve. Dans Union of New Brunswick Indians, le juge McLachlin confirme cet objet au paragraphe 8 :

L’exemption prévue à l’art. 87 visait à « préserver les droits des Indiens sur leurs terres réservées et à assurer que la capacité des gouvernements d’imposer des taxes, ou celle des créanciers de saisir, ne porte pas atteinte à l’utilisation de leurs biens situés sur leurs terres réservées ». Cette disposition « ne vis[e] pas à conférer un avantage économique général aux Indiens » : voir Williams, précité, à la p. 885.

À l’égard des biens incorporels, elle ajoute, au paragraphe 12 :

 

Dans l’arrêt Williams, précité, la Cour a confirmé à nouveau, pour les motifs exposés par le juge Gonthier, la méthode adoptée dans l’arrêt Mitchell, alors qu’elle devait déterminer si le situs de la réception de prestations d’assurance‑chômage se trouvait à l’intérieur ou à l’extérieur d’une réserve aux fins de la taxation. Étant donné que les prestations, qui sont des biens meubles incorporels, étaient de fait dans la réserve au moment de la taxation, elles étaient exemptes d’impôt en vertu de l’art. 87.

 

[21]      En pratique dans les faits, l’argument fondé sur la nécessité veut que la résidence de l’employeur et de l’employé, comme le lieu d’emploi, seraient dans la réserve si cela était possible et que, par conséquent, le revenu d’emploi devrait être considéré comme étant situé dans la réserve. Le problème avec cet argument est qu’il n’est pas lié à la question en litige dans les circonstances de la présente affaire, soit celle de savoir si le revenu d’emploi de l’appelant est un bien situé dans une réserve. Il s’agit de déterminer un lieu, un situs, en se fondant sur le lieu des opérations pertinentes effectuées. L’argument de l’appelant signifie que tant qu’un Indien travaille au profit d’un employeur indien et pour des Indiens venant de réserves, son revenu d’emploi devrait être exonéré d’impôt, indépendamment du lieu où lui‑même, son employeur ou son emploi sont situés, ou l’endroit où il est payé. Il n’y a aucun doute quant au fait que le travail de l’appelant consiste à aider des Indiens venant des réserves quand ils en déménagent. Il n’y a aucun doute non plus quant au fait que son employeur est un organisme indien. Le problème est que ces éléments ne rattachent pas le revenu d’emploi de l’appelant à une réserve déterminée. Même s’il peut être soutenu que l’exonération de l’article 87 s’applique quand les biens d’un Indien sont situés dans une autre réserve que la sienne, dans la présente affaire, la nature de l’employeur et l’emploi ne permettent pas, à eux seuls, de déterminer une réserve donnée à laquelle les biens de l’appelant peuvent être rattachés. Par conséquent, ces éléments n’aident pas à déterminer le lieu de son revenu d’emploi.

 

[22] Accepter l’argument fondé sur la nécessité comme justifiant l’application de l’article 87 pour exonérer d’impôt le revenu d’emploi de l’appelant reviendrait, comme le conclut le juge McLachlin dans Union of New Brunswick lndians, à étendre la portée de l’article 87 beaucoup plus loin que l’objet formulé dans l’arrêt Williams. Même si le fait de ne pas avoir à payer d’impôt sur le revenu constituerait sans aucun doute un avantage pour l’appelant, il ne s’agit pas de l’objet de l’article 87. Dans les circonstances de la présente affaire, l’argument fondé sur la nécessité n’aide pas l’appelant.

 

[24]         L’intimée est d’avis que le travail de Mme Baptiste était plus avantageux pour la banque que pour la communauté autochtone, comme le montre le fait que des dépôts d’une valeur de 82 millions de dollars ont été effectués en 2003. La présente affaire concerne une banque commerciale qui fait des affaires dans une réserve. Il n’existe aucun lien immédiat évident entre le travail de Mme Baptiste et l’occupation de terres de réserve. En résumé, le lieu du travail, la nature du travail et les circonstances y afférentes indiquent une source de revenu hors réserve.

 

[25]         En ce qui concerne les avantages pour les réserves et l’emplacement de l’employeur, la jurisprudence concernant le même employeur a déjà tranché la question d’une façon qui n’est pas favorable à l’appelante. Enfin, Mme Baptiste ne résidait pas dans une réserve.

 

[26]         En conclusion, l’intimée a soutenu que les facteurs de rattachement étayent de fait les cotisations.

 

 

Analyse

 

[27]         La question de l’exonération d’impôt des biens meubles d’un Indien situés dans une réserve a fréquemment été examinée par nos tribunaux, au Canada.

 

[28]         Dans l’arrêt Williams, précité, le juge Gonthier a résumé l’avis que le juge La Forest avait exprimé dans l’arrêt Mitchell, précité, et il a fait sa propre analyse.

 

A – La nature et l’objet de l’exemption fiscale

 

16        Le juge La Forest a analysé en profondeur la question de l’objet des art. 87, 89 et 90 dans l’arrêt Mitchell c. Bande indienne Peguis, [1990] 2 R.C.S. 85. Il a conclu que ces articles visent à préserver les droits des Indiens sur leurs terres réservées et à assurer que la capacité des gouvernements d’imposer des taxes, ou celle des créanciers de saisir, ne porte pas atteinte à l’utilisation de leurs biens situés sur leurs terres réservées. La conséquence de cette conclusion était que les articles en question ne visent pas à conférer un avantage économique général aux Indiens (aux pp. 130 et 131) :

 

Historiquement, les exemptions de taxe et de saisie ont protégé de deux façons la capacité des Indiens de profiter de cette propriété. Premièrement, elles empêchent qu’un palier de gouvernement, par l’imposition de taxes, puisse porter atteinte à l’intégrité des bénéfices accordés par le palier de gouvernement responsable du contrôle des affaires indiennes. Deuxièmement, la protection contre les saisies assure que l’exécution de jugements obtenus par des non-Indiens en matière civile ne pourra entraver les Indiens dans la libre jouissance des avantages qu’ils ont acquis ou pourront acquérir conformément à l’exécution par la Couronne de ses obligations prévues par traité. Dans les faits, ces articles ont protégé les Indiens contre l’imposition d’obligations de nature civile qui pouvaient conduire, quoique indirectement, à l’aliénation de leurs terres à la sui te de ventes forcées et par d’autres moyens semblables; voir l’examen par le juge Brennan du but des exemptions de taxe accordées aux Indiens en contexte américain dans l’arrêt Bryan v. Itasca County, 426 U.S. 373 (1976), à la p. 391.

 

En résumé, le dossier historique indique clairement que les art. 87 et 89 de la Loi sur les Indiens, auxquels s’applique la présomption de l’art. 90, font partie d’un ensemble législatif qui fait état d’une obligation envers les peuples autochtones, dont la Couronne a reconnu l’existence tout au moins depuis la signature de la Proclamation royale de 1763. Depuis ce temps, la Couronne a toujours reconnu qu’elle est tenue par l’honneur de protéger les Indiens de tous les efforts entrepris par des non‑Indiens pour les déposséder des biens qu’ils possèdent en tant qu’Indiens, c’est‑à‑dire leur territoire et les chatels qui y sont situés.

 

Il est également important de souligner la conséquence de la conclusion que je viens de tirer. Le fait que la loi contemporaine, comme sa contrepartie historique, prenne tant de soin pour souligner que les exemptions de taxe et de saisie ne s’appliquent que dans le cas des biens personnels situés sur des réserves démontre que l’objet de la Loi n’est pas de remédier à la situation économiquement défavorable des Indiens en leur assurant le pouvoir d’acquérir, de posséder et d’aliéner des biens sur le marché à des conditions différentes de celles applicables à leurs concitoyens. Un examen des décisions portant sur ces articles confirme que les Indiens qui acquièrent et aliènent des biens situés à l’extérieur des terres réservées à leur usage le font aux mêmes conditions que tous les autres Canadiens.

 

17        Le juge La Forest souligne également que la protection contre la saisie est un bien pour un mal en ce qu’elle soustrait du cours ordinaire des opérations commerciales les biens d’un Indien situés sur une réserve (aux pp. 146 et 147).

 

18        En conséquence, en vertu de la Loi sur les Indiens, un Indien jouit d’un choix en ce qui concerne ses biens personnels. L’Indien peut situer ces biens sur la réserve, auquel cas les biens sont protégés contre la saisie et la taxation, ou il peut les situer hors de la réserve, auquel cas les biens sont situés à l’extérieur de la zone protégée et peuvent davantage être utilisés dans le cours des opérations commerciales ordinaires dans la société. Il appartient à l’Indien de décider s’il désire bénéficier du système de protection que constitue la réserve ou s’il veut s’intégrer davantage dans l’ensemble du monde des affaires.

 

19        Le critère du situs, à l’art. 87, a pour objet de déterminer si l’Indien détient les biens en question en vertu des droits qu’il possède à titre d’Indien sur la réserve. Lorsqu’il est nécessaire de choisir entre diverses méthodes de détermination de l’emplacement des biens pertinents, le choix doit se faire en tenant compte de cet objet.

 

B -- La nature des prestations et l’incidence fiscale

 

[...]

 

21        L’arrêt de notre Cour Nowegijick c. La Reine, [1983] 1 R.C.S. 29, établit que la réception d’un revenu provenant d’un salaire constitue un bien personnel aux fins de l’exemption fiscale prévue par la Loi sur les Indiens. [...]

 

22        L’arrêt Nowegijick établit également que l’inclusion d’un bien personnel dans le calcul du revenu d’un contribuable donne lieu à un impôt à l’égard de ce bien personnel au sens de la Loi sur les Indiens, bien qu’il s’agisse d’un impôt personnel plutôt que d’un impôt direct sur les biens.

 

23        En conséquence, la plupart des exigences de l’art. 87 de la Loi sur les Indiens ont clairement été remplies en l’espèce. [...] Il reste maintenant à savoir si le bien en question est situé sur une réserve.

 

[...]

 

C – Commentaires sur le critère de la « résidence du débiteur »

 

25        Selon la jurisprudence antérieure, la résidence du débiteur, c’est‑à‑dire la personne qui paie le revenu, constitue un facteur d’importance primordiale lorsqu’il s’agit de déterminer le situs de ce genre de bien. C’est ce qu’a clairement affirmé le juge en chef adjoint Thurlow dans la décision La Reine c. National Indian Brotherhood, [1979] l C.F. 103 (1re inst.), à la p. 109 :

 

Un droit incorporel, comme le droit à un traitement, n’a véritablement pas de situs. Mais lorsque, pour une fin déterminée, la loi a jugé nécessaire de lui en attribuer un, et en l’absence de toute disposition contraire dans le contrat ou dans tout autre document, les tribunaux ont établi que le situs d’une simple dette contractuelle est la résidence du débiteur ou le lieu où il se trouve. Voir Cheshire, Private International Law, 7e édition, pages 420 et suivantes.

 

26        Cette conclusion a également été citée et approuvée par notre Cour dans l’arrêt Nowegijick c. La Reine, précité, à la p. 34 :

 

Sa Majesté a reconnu au cours des plaidoiries, avec raison selon moi, que le situs du salaire de M. Nowegijick était la réserve parce que c’est là où la débitrice, Gull Bay Development Corporation, avait sa résidence ou son lieu d’affaires et parce que c’est là que le salaire devait être payé. Voir Cheshire et North, Private International Law (10e éd., 1979), aux pp. 536 et suiv. et aussi le jugement du juge en chef adjoint Thurlow dans l’affaire R. c. National Indian Brotherhood, [1979] l C.F. 103, particulièrement aux pp. 109 et suivantes.

 

27        La seule justification mentionnée, dans ces arrêts, à l’appui du choix de la résidence du débiteur comme situs d’une dette est qu’il s’agit là de la règle appliquée en droit international privé. La justification de cette règle en droit international privé est que c’est à la résidence du débiteur que l’on peut normalement faire exécuter le paiement d’une dette. Cheshire et North, dans Private International Law (11e éd. 1987), citent les propos du lord juge Atkin dans l’arrêt New York Life Insurance Co. c. Public Trustee, [1924] 2 Ch. 101 (C.A.), à la p. 119 :

 

[traduction] [...] on a choisi la résidence du débiteur pour déterminer l’emplacement de la dette parce que c’était là que le créancier pouvait véritablement faire exécuter le paiement de la dette.

 

28        Dicey et Morris adoptent la même explication dans The Conf1ict of Laws (11e éd. 1987), vol. 2, à la p. 908, ainsi que Castel dans Canadian Conf1ict of Laws (2e éd. 1986), à la p. 401. Cela peut être raisonnable pour les fins générales du droit international privé. Cependant, il faut s’interroger sur son utilité aux fins qui sous‑tendent l’exemption fiscale prévue dans la Loi sur les Indiens.

 

[...]

 

32        En répondant à cette question, il est évident qu’il serait complètement contraire à l’économie et aux objets de la Loi sur les Indiens et de la Loi de l’impôt sur le revenu d’adopter simplement les principes généraux du droit international privé dans le présent contexte. En effet, les objets du droit international privé ont peu sinon rien en commun avec ceux qui sous‑tendent la Loi sur les Indiens. On ne voit pas en quoi le lieu d’exécution normal d’une dette est pertinent pour décider si l’imposition de la réception du paiement de la dette représenterait une atteinte aux droits détenus par un Indien à titre d’Indien sur une réserve. Le critère du situs en vertu de la Loi sur les Indiens doit être interprété conformément aux objets de cette loi et non à ceux du droit international privé. En conséquence, il faut réexaminer attentivement, en fonction des objets de la Loi sur les Indiens, si l’on doit retenir la résidence du débiteur comme facteur exclusif pour déterminer le situs de prestations comme celles qui ont été versées en l’espèce. Il se peut que la résidence du débiteur demeure un facteur important, voire même le seul. Toutefois, on ne peut arriver directement à cette conclusion à partir d’une analyse de la façon dont le droit international privé tranche cette question.

 

IV – Le critère approprié

 

[...]

 

37        La méthode qui tient le mieux compte de ces préoccupations est celle qui analyse la situation sous le rapport des catégories de biens et des types d’imposition. Par exemple, la pertinence des facteurs de rattachement peut varier selon qu’il s’agit de prestations d’assurance‑chômage, de revenu d’emploi ou de prestations de pension. Il faut d’abord identifier les divers facteurs de rattachement qui peuvent être pertinents. On doit ensuite analyser ces facteurs pour déterminer le poids à leur accorder afin d’identifier l’emplacement du bien, en tenant compte de trois choses : (1) l’objet de l’exemption prévue dans la Loi sur les Indiens, (2) le genre de bien en cause et (3) la nature de l’imposition de ce bien. Il s’agit donc de déterminer, relativement à chaque facteur de rattachement, le poids qui devrait lui être accordé pour décider si l’imposition en cause de ce type de bien représenterait une atteinte aux droits de l’Indien à titre d’Indien sur une réserve.

 

38        Cette méthode conserve la souplesse de la méthode cas par cas, mais à l’intérieur d’un cadre qui identifie correctement le poids à accorder à divers facteurs de rattachement. Il est évident que ce poids ne peut être déterminé avec précision. Cette méthode a cependant l’avantage de préserver la capacité de traiter de façon appropriée les cas qui, à l’avenir, présenteront des considérations jusque‑là non évidentes.

 

[...]

 

61        Pour déterminer le situs d’un bien personnel incorporel, un tribunal doit évaluer divers facteurs de rattachement qui relient le bien à un endroit ou à l’autre. Dans le contexte de l’exemption fiscale prévue dans la Loi sur les Indiens, il y a trois facteurs importants : l’objet de l’exemption, la nature du bien en question et l’incidence fiscale sur ce bien. Compte tenu de l’objet de l’exemption, il s’agit, en fin de compte, de déterminer dans quelle mesure chaque facteur est pertinent pour décider si le fait d’imposer d’une certaine manière ce type de bien particulier porterait atteinte au droit d’un Indien à titre d’Indien de détenir des biens personnels sur la réserve.

 

                                                                               [Non souligné dans l’original.]

 

[29]         L’intimée a donc eu raison d’examiner comme elle l’a fait la question qui se pose en l’espèce. Il faut se demander si le fait d’imposer le revenu d’emploi de Mme Baptiste porte atteinte au droit à des biens que possède un Indien en sa qualité d’Indien dans une réserve. Le situs de l’employeur n’est que l’un des facteurs à prendre en considération parmi tous les autres facteurs de rattachement.

 

[30]         Dans l’arrêt Folster, précité, le juge Linden, de la Cour d’appel fédérale, a dit ce qui suit, aux paragraphes 14 et suivants :

 

14        Le juge La Forest a qualifié l’objet de la disposition créant l’exemption d’impôt essentiellement d’effort pour préserver le mode de vie traditionnel des collectivités indiennes en protégeant les biens que les Indiens possèdent en tant qu’Indiens sur une réserve. L’article 87 ne visait toutefois pas à remédier à la situation désavantageuse des Indiens sur le plan économique. Bien qu’il s’agisse d’un but louable, il n’appartient pas aux tribunaux d’essayer de l’atteindre en étirant les limites de l’exemption fiscale plus que ne le permet une interprétation de la loi fondée sur l’objet. Par conséquent, lorsqu’un autochtone décide d’entrer sur ce qu’on appelle le « marché » canadien, il n’y a aucun texte législatif qui l’exempte du paiement d’un impôt sur son revenu d’emploi, d’où l’exigence voulant que le bien meuble soit « situé sur une réserve ». La règle du situs fixe une limite interne à la portée de la disposition créant l’exemption fiscale en rattachant l’admissibilité à l’exemption à un bien détenu par un Indien sur une réserve. Par conséquent, comme je l’explique plus loin, lorsque les fonctions de l’emploi d’un Indien font partie intégrante d’une réserve, il existe une raison légitime d’appliquer la disposition créant l’exemption d’impôt au revenu provenant de l’exercice de ces fonctions.

 

[...]

 

16        […] le juge Gonthier a élaboré un nouveau critère sur le fondement de l’analyse axée sur l’objet qu’a faite le juge La Forest dans l’arrêt Mitchell. Le juge Gonthier a reconnu que, bien qu’il existe inévitablement de nombreux facteurs qui peuvent être utiles pour déterminer le situs d’un bien immatériel comme des prestations d’assurance‑chômage ou un revenu d’emploi, la pertinence de ces « facteurs de rattachement » doit être évaluée en fonction de leur capacité à réaliser l’objet de l’article 87. En outre, le poids à donner à chaque facteur peut varier en fonction des circonstances.

 

Un facteur de rattachement n’est pertinent que dans la mesure où il identifie l’emplacement du bien en question aux fins de la Loi sur les Indiens. Dans des catégories particulières de cas, un facteur de rattachement peut donc avoir beaucoup plus de poids qu’un autre. On pourrait facilement perdre cette réalité de vue en soupesant les facteurs de rattachement cas par cas.

 

[...]

 

Ce nouveau critère n’a pas été conçu pour accorder le bénéfice de l’exemption d’impôt à tous les Indiens. Il ne visait pas non plus à exempter tous les Indiens qui résident sur une réserve. En proposant qu’il convient de se fonder sur une gamme de facteurs qui peuvent être pertinents pour déterminer le situs d’un bien, le juge Gonthier a plutôt cherché à garantir que l’exemption d’impôt réalise l’objet qu’elle est censée réaliser, c’est‑à‑dire préserver les biens détenus par des Indiens en tant qu’Indiens sur des réserves afin que leur mode de vie traditionnel ne soit pas menacé.

 

[...]

 

28        [...] À mon sens, quand le bien meuble en cause est un revenu d’emploi, il est logique de tenir compte du but principal et des fonctions de l’emploi sous‑jacent dans le but précis de déterminer si l’emploi était exercé au profit des Indiens sur des réserves.

 

                                                                                                   [Non souligné dans l’original.]

 

 

[31]         Dans l’arrêt Rachel Shilling, précité, la Cour d’appel fédérale a appliqué au revenu d’emploi le critère des facteurs de rattachement qui avait été énoncé dans l’arrêt Williams, précité, et elle a récapitulé en ces termes l’état du droit sur ce point :

 

c) Emplacement du revenu d’emploi

 

29        Comme il en a déjà été fait mention, la Cour suprême n’a pas encore eu l’occasion d’appliquer au revenu d’emploi le critère des facteurs de rattachement qui a été énoncé dans l’arrêt Williams, précité. L’arrêt Williams lui‑même se rapportait à l’emplacement de prestations d’assurance‑chômage.

 

30        Toutefois, dans plusieurs cas, la présente Cour a eu à appliquer la jurisprudence de la Cour suprême afin de déterminer si le revenu d’emploi d’un Indien était situé dans une réserve et si, par conséquent, il était exempt d’impôt en vertu de l’alinéa 87(1)b) de la Loi sur les Indiens.

 

31        Ainsi, dans les arrêts Canada c. Folster, [1997] 3 C.F. 269 (C.A.); et Bell c. Canada. [2000] 3 C.N.L.R. 32 (C.A.F.), on a dit que les facteurs suivants étaient peut‑être pertinents lorsqu’il s’agissait de déterminer si le revenu d’emploi d’un Indien est situé dans une réserve: l’emplacement de l’employeur ou son lieu de résidence; la nature du travail, le lieu de travail et les circonstances dans lesquelles le travail est accompli par l’employé, et notamment la nature de tout avantage qu’en tire la réserve; le lieu de résidence de l’employé.

 

32        Le lieu où l’employé était payé a également été considéré comme un facteur de rattachement qui pouvait être pertinent, même si l’on n’a pas accordé beaucoup d’importance à ce facteur : Bell c. Canada (1998), 98 DTC 1857 (C.C.I.), aux paragraphes 45 à 47. La décision du juge de la Cour de l’impôt a été confirmée en appel et son identification des facteurs de rattachement a été approuvée : [2000] 3 C.N.R.L. 32 (C.A.F.), au paragraphe 35.

 

33        L’importance à accorder à l’un quelconque de ces facteurs peut varier selon les faits d’une affaire donnée, et ce, même si le bien en question (un revenu d’emploi) et l’impôt (un impôt sur le revenu) appartiennent à une même catégorie. Néanmoins, la jurisprudence donne à entendre qu’il faut prêter une attention particulière à la nature du travail accompli par l’employé et aux circonstances y afférentes. Comme le juge Linden l’a expliqué dans l’arrêt Folster, précité, au paragraphe 27 :

 

À mon avis, étant donné le but poursuivi par le législateur en créant l’exemption d’impôt et le genre de bien meuble en cause, l’analyse doit porter sur la nature de l’emploi de l’appelante et les circonstances qui s’y rapportent. Le genre de bien meuble en cause, c’est-à-dire le revenu d’emploi, est tel qu’on ne peut juger de sa nature sans se référer aux circonstances dans lesquelles il a été gagné. De même que le situs des prestations d’assurance‑chômage doit être déterminé par rapport à l’emploi ouvrant droit aux prestations, de même l’analyse de l’emplacement du revenu d’emploi est subordonnée à un examen de toutes les circonstances qui ont donné lieu à l’emploi.

                                                                                             [Non souligné dans l’original.]

 

[32]         Dans l’arrêt Recalma c. Canada, [1998] A.C.F. no 433 (QL), le juge Linden a dit ce qui suit, au paragraphe 9 :

 

9          En évaluant les différents facteurs pertinents, la Cour doit décider de l’endroit où il est « le plus logique » de situer les biens meubles afin d’éviter de porter « atteinte à un bien détenu par un Indien en tant qu’Indien » dans le but de protéger le mode de vie traditionnel des autochtones. Dans l’évaluation des différents facteurs pertinents, il est également important de déterminer si l’activité qui a généré le revenu était « étroitement liée » à la réserve, c’est‑à‑dire si elle faisait « partie intégrante » de la vie dans la réserve, ou s’il est plus approprié de la considérer comme une activité accomplie sur « le marché ordinaire » (voir Canada c. Folster, [1997], 3 C.F. 269 (C.A.F.)). [...]

 

[33]         Par conséquent, pour déterminer si le revenu d’emploi de Mme Baptiste est exonéré d’impôt, il faut procéder à une analyse des facteurs de rattachement et la Cour ne peut pas arriver à une conclusion fondée sur le seul fait que l’appelante a décidé de travailler pour un employeur qui est situé dans une réserve (la chose a été confirmée par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Horn, précité, paragraphe 5, où le juge Evans a dit que l’analyse des facteurs de rattachement permettant de déterminer l’emplacement du revenu d’emploi aux fins d’imposition ne doit pas être reconsidéré et est encore valable).

 

 

Analyse des facteurs de rattachement

 

[34]         Comme le juge Linden l’a dit dans l’arrêt Folster, précité, paragraphes 20 et 22, lorsqu’il s’agit de déterminer le situs du revenu d’emploi, le critère n’est pas plus magique que le fait de se demander où il est le plus logique de situer le situs de ce revenu, quels devraient être les facteurs pertinents aux fins de l’évaluation du revenu d’emploi dans les circonstances de l’espèce et quelle est l’importance relative à accorder à ces facteurs.

 

[35]         En l’espèce, l’emploi était situé dans le centre‑ville de Toronto, et ce, qu’il s’agisse de Miziwe Biik ou de la Banque de Nouvelle‑Écosse. Lorsqu’elle travaillait pour Miziwe Biik, Mme Baptiste ne voyageait pas. Elle se rendait dans des communautés indiennes pour la banque, mais selon la preuve, elle ne le faisait tout au plus qu’une semaine par mois. Mme Baptiste vivait dans le centre‑ville de Toronto. En ce qui concerne la nature de son emploi et les circonstances y afférentes, la preuve a révélé que lorsque Mme Baptiste travaillait pour Miziwe Biik, ses tâches consistaient à aider les Autochtones (Indiens inscrits ou non) à obtenir du travail en milieu urbain. Le rôle de Mme Baptiste consistait à aider ces gens à améliorer leurs compétences et à s’intégrer dans la société. Pendant qu’elle travaillait à la banque, le travail de Mme Baptiste consistait au départ à attirer des Autochtones qui travailleraient pour cet établissement en milieu urbain et à les conserver. Son rôle a ensuite changé et elle a été chargée de veiller à ce que la banque étende ses opération dans les communautés indiennes. Mme Baptiste est d’avis que ce rôle était conforme aux recommandations qui étaient faites dans le Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones.

 

[36]         Il reste à savoir si le but et les fonctions de l’emploi de Mme Baptiste visaient principalement à fournir des avantages aux Indiens dans des réserves. À mon avis, ce n’était pas le cas. D’après ce que j’ai pu constater, le rapport sur les peuples autochtones visait à protéger les biens des Indiens dans leurs réserves et à remédier à leur situation économique désavantageuse. Comme le montre la jurisprudence, la politique sous‑tendant l’article 87 de la LI ne consiste pas à remédier d’une façon générale à la situation économique désavantageuse des Indiens. L’objet de cette disposition est plutôt simplement de protéger les droits de propriété des Indiens sur leurs terres de réserve, de façon que ceux‑ci ne soient pas dépossédés de leurs droits. Comme il a été dit dans l’arrêt Monias, précité, paragraphe 66 : « Le fait que le travail qui donne lieu au revenu d’emploi soit au bénéfice des Indiens dans les réserves et qu’il puisse être essentiel au maintien des réserves comme groupes sociaux viables, n’est pas en soi suffisant pour situer le revenu d’emploi dans les réserves. La politique qui sous‑tend l’alinéa 87(1)b) [de la LI] n’a pas pour but d’offrir une subvention fiscale aux services fournis aux réserves. Il s’agit plutôt de protéger la propriété que les Indiens peuvent acquérir, conserver et utiliser dans une réserve, de toute atteinte par le biais de l’impôt. » Dans ce cas‑ci, le revenu d’emploi de Mme Baptiste n’a pas-- été gagné, à mon avis, dans des circonstances ayant pour effet de lier son acquisition à une réserve en tant qu’unité économique.

 

[37]         L’emploi de Mme Baptiste visait à aider les Autochtones à s’intégrer dans la société urbaine, plus précisément une société non située dans des réserves, et à encourager les réserves à faire des affaires avec la banque. La banque a eu recours à Mme Baptiste en vue de faire un profit, et bien que cela ait été profitable pour les communautés indiennes, on ne saurait dire que le travail de Mme Baptiste faisait partie intégrante de la vie communautaire dans les réserves. Mme Baptiste travaillait pour la banque sur le marché, en faisant des affaires avec les communautés indiennes, mais son emploi était plus étroitement lié à la banque qu’à une réserve. Il ne s’agit pas ici d’un cas dans lequel l’employée et le lieu de l’emploi (que ce soit auprès de Miziwe Biik ou de la banque) serait situé dans une réserve, si cela était possible. Au contraire, l’emploi de Mme Baptiste visait à aider les Autochtones à obtenir du travail à l’extérieur des réserves, en milieu urbain, et dans le cas de l’emploi de Mme Baptiste à 1a banque, cet emploi consistait à promouvoir l’entreprise de la banque auprès de différentes communautés.

 

[38]         À mon avis, le seul facteur qui a pour effet de rattacher le revenu d’emploi de Mme Baptiste à une réserve est le suivant : l’employeur est situé dans une réserve. Toutefois, le fait qu’un employeur soit installé dans une réserve pro forma ne contribuera pas beaucoup à rattacher le revenu d’emploi à la réserve (Monias, précité, paragraphe 50). En outre, comme la cour l’a conclu dans l’arrêt Horn c. La Reine, 2007 CF 1052, paragraphes 96 et 97, confirmé par 2008 CAF 352, le fait que la majorité des membres du personnel administratif de NLS étaient membres de la réserve des Six nations ainsi que le fait que NLS versait un loyer à la réserve ne constituent pas un facteur particulièrement important. De fait, les montants que NLS versait au titre du loyer et pour les salaires et les avantages du personnel ne représentaient qu’un pourcentage minime du revenu brut de NLS. La même conclusion a été tirée dans la décision Robinson c. la Reine, 2010 CCI 649, paragraphes 102 et 103, au sujet de personnes qui avaient été embauchées par NLS pour travailler auprès d’organismes autochtones. La Cour a conclu que les facteurs rattachant l’emploi de ces personnes à une réserve étaient fort restreints. Les personnes en cause faisaient partie du même groupe que celui dont l’intimée a fait mention dans ses remarques préliminaires. Le fait que 95 p. 100 des frais de NLS se rapportaient aux salaires et aux avantages accordés à ses employés dont les services étaient sous‑traités à des organismes hors réserve qui finançaient la paie de NLS était un facteur sur lequel la Cour s’est fondée pour conclure qu’aucun élément de preuve ne rattachait le revenu d’emploi des personnes en question à une réserve en tant qu’emplacement physique ou en tant que base économique.

 

[39]         Comme il en a été fait mention, l’objet de l’exonération d’impôt prévue à l’article 87 de la LI est de préserver les droits des Indiens à leurs terres de réserve et de faire en sorte que la capacité de l’État d’établir un impôt ne porte pas atteinte à l’utilisation de leurs biens sur les terres de réserve. Cette exonération ne vise pas à conférer un avantage économique général aux Indiens (Williams, précité, paragraphe 16). En l’espèce, je conclus que l’imposition du revenu d’emploi de Mme Baptiste ne porte pas atteinte au droit d’un Indien, en sa qualité d’Indien, à des biens dans une réserve. Par conséquent, il n’existe aucune justification ni aucun fondement légitime permettant d’exonérer d’impôt le revenu d’emploi de Mme Baptiste.

 

[40]         Je conclus que le revenu d’emploi de Mme Baptiste au cours des années d’imposition en question était imposable en vertu de la LIR. Les appels sont rejetés.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 9e jour de juin 2011.

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 12e jour de septembre 2011.

 

Marie-Christine Gervais

 


RÉFÉRENCE :                                  20011 CCI 295

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2007-2261(IT)I

 

INTITULÉ :                                       MICHELE BAPTISTE

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 31 janvier 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Lucie Lamarre

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 9 juin 2011

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

Me Scott Robertson

Avocat de l’intimée :

Me Justin Kutyan

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                             Scott Robertson

 

                   Cabinet :                         Gowling Lafleur Henderson s.e.n.c.r.l., s.r.l.

                                                          Toronto (Ontario)

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.