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Dossier : 2016-2714(GST)I

ENTRE :

GIDEON MARGOLIN,

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 12 décembre 2017, à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge Randall S. Bocock


Comparutions

Avocat de l’appelant :

Me Ari A. Lokshin

Avocat de l’intimée :

Me Alexander Hinds

 

JUGEMENT

  CONFORMÉMENT aux motifs du jugement ci-joints, l’appel est rejeté, sans dépens, au motif que l’appelant n’était pas admissible à la part provinciale du remboursement de la Taxe sur les produits et services/Taxe de vente harmonisée (TPS/TVH) pour les habitations neuves en ce qui concerne l’achat du 116, promenade Riding Mountain, Richmond Hill (Ontario).

Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de février 2018.

« R.S. Bocock »

Juge Bocock


Référence : 2018 CCI 36

Date : 20180221

Dossier : 2016-2714(GST)I

ENTRE :

GIDEON MARGOLIN,

appelant

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bocock

I. Fondement général du refus du remboursement de la TVH

a)  Motifs du refus

[1]  L’appelant, M. Margolin, s’est vu refuser la part provinciale du remboursement de la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (TPS/TVH) pour les habitations neuves (« le remboursement ») concernant l’achat d’une propriété située au 116, promenade Riding Mountain, Richmond Hill (Ontario) (« propriété concernée par le remboursement »). En refusant le remboursement de la TVH, le ministre du Revenu national (« le ministre ») a affirmé ce qui suit  :

[TRADUCTION]

(i) Lorsqu’ils sont devenus liés par l’achat de la propriété concernée par le remboursement, M. Margolin et son épouse n’avaient pas l’intention d’en faire leur résidence principale (l’intention); et/ou
(ii) Ils n’ont pas utilisé la propriété concernée par le remboursement comme lieu de résidence (« l’occupation »).

b)  Les articles pertinents de la Loi.

[2]  Compte tenu des motifs du refus du remboursement, les dispositions législatives suivantes sont pertinentes pour le présent appel.

[3]  Premièrement, la Loi sur la taxe d’accise, (L.R.C. (1985), ch. E‑15) modifiée (la LTA) prévoit que le remboursement doit être payé dans les circonstances suivantes :

[TRADUCTION]

Remboursement – habitation neuve

(2) Le ministre verse un remboursement à un particulier dans le cas où, à la fois

(b) au moment où le particulier devient responsable ou assume une responsabilité… aux termes du contrat de vente du… logement…, celui-ci acquiertle logement pour qu’il lui serve de lieu de résidence habituelle ou service ainsi à son proche,  

(g) selon le cas

(i) le premier particulier à occuper l’immeuble ou le logement à titre résidentiel, à un moment après que les travaux sont achevés en grande partie… est

(A) dans le cas de l’immeuble, le particulier ou son proche,

le remboursement est égal au montant suivant…

[4]  Deuxièmement, puisque le prix payé pour la propriété concernée par le remboursement était supérieur à 450 000 $, la disposition suivante concernant un remboursement payable en Ontario en vertu du Règlement sur le nouveau régime de la taxe à valeur ajoutée harmonisée, no 2 est pertinente :

[TRADUCTION]

SECTION 2

Remboursement pour habitations neuves – bâtiments et fonds

Définitions

Remboursement en Ontario

(2) Dans le cas où un particulier a droit au remboursement prévu au paragraphe 254(2) de la Loi au titre d’un immeuble d’habitation qui est un immeuble d’habitation à logement unique ou un logement en copropriété acquis en vue de servir en Ontario de résidence habituelle du particulier ou de son proche ou aurait droit à ce remboursement si la contrepartie totale, au sens de l’alinéa 254(2)c) de la Loi, relative à l’immeuble était inférieure à 450 000 $, pour l’application du paragraphe 256.21(1) de la Loi, le particulier est une personne visée et le montant du remboursement versé au titre de l’immeuble selon ce paragraphe est égal au montant obtenu par la formule suivante, jusqu’à concurrence de 24 000 $…

c)  Interprétation légale de l’intention et de l’occupation relativement à une propriété concernée par le remboursement

[5]  La Cour de l’impôt a interprété le cadre législatif de l’intention et de l’occupation à de nombreuses reprises. 

(i) Intention initiale d’occupation comme résidence habituelle

[6]  Le paragraphe 254(2) exige que l’intention soit mesurée de façon déterminante au moment où l’acheteur devient lié en vertu du contrat d’achat et de vente (le CAV) concernant la propriété : Wong c HMQ, 2013 CCI 23 au paragraphe 10. La détermination à ce moment critique sera orientée par l’intention déclarée du demandeur. Cependant, parfois, cette intention subjective n’est pas fiable et doit être filtrée à travers le prisme de « l’utilisation réelle » de la propriété concernée par le remboursement : Coburn Realty Ltd. c Canada, 2006 CCI 245 au paragraphe 10, citant elle-même 510 628 Ontario Ltd. c HMQ, [2000] TCJ No 451, 2000 GSTC 58 au paragraphe 11. En conséquence, une telle analyse factuelle des circonstances factuelles y découlant est nécessaire : Nahid Safar-Zadeh c HMQ, 2017 CCI 35 au paragraphe 4.

(ii) Occupation par le demandeur de la propriété comme résidence habituelle

[7]  Bien que l’intention subjective d’occuper une propriété oriente nécessairement le juge des faits vers la preuve factuelle objective qui entoure l’intention au moment où le CAV devient exécutoire, elle est également pertinente à la période subséquente où le demandeur doit être le premier à occuper la propriété comme résidence grâce aux éléments constitutifs de l’utilisation qui en font le lieu principal de résidence : Mahendran Kandiah c HMQ, 2014 CCI 276 au paragraphe 20. Par exemple, louer ou vendre le domicile avant l’occupation, peu importe l’intention initiale, invalidera une demande : Napoli c HMQ, 2013 CCI 307 au paragraphe 11. Il doit y avoir des éléments de preuve d’action positive menant à la première occupation de la propriété en tant que lieu principal de résidence : Kandiah aux paragraphes 21 et 22. Il se peut que les plans changent pour abréger les plans à long terme après une courte occupation, mais le changement ne doit pas avoir été apporté ou avoir été envisagé au moment où le CAV devient exécutoire : Montemarano c HMQ, 2015 CCI 151 au paragraphe 16.

II. La preuve dont la Cour est saisie

[8]  L’audience de la preuve a nécessité un peu moins d’une journée et demie. Cette période a été nécessaire en partie en raison de la présentation demandée d’un affidavit par l’avocat de l’intimée au cours du contre‑interrogatoire de M. Margolin. Il y avait quatre témoins en tout : M. Margolin, sa femme de ménage et son déménageur qui ont été appelés par l’appelant, ainsi que l’acheteur subséquent de la propriété concernée par le remboursement, appelé par l’intimée.

a)  Circonstances entourant l’achat et la construction de la propriété concernée par le remboursement

[9]  M. Margolin est devenu veuf en 2009. Par la suite, il a commencé une relation sérieuse avec une femme, Natalia, à la fin de l’automne 2011. Natalia ne souhaitait pas vivre dans la maison où sa première femme était décédée (Highcliffe). Par conséquent en décembre 2011, lorsque Natalia et M. Margolin ont commencé à vivre ensemble, ils ont vécu dans l’appartement d’une chambre subventionné de Natalia (« l’appartement loué »). En février 2012, M. Margolin et Natalia ont conclu un CAV pour la construction de la propriété concernée par le remboursement.

[10]  Le mariage était peu stable. Des éléments de preuve indiquaient qu’ils se sont séparés pour ensuite se réconcilier au cours de 2012 et 2013, et se sont séparés de façon permanente en 2014. Les procédures de divorce ont commencé en septembre 2015 et demeurent en suspens.

[11]  En février 2012, au cours de la période à laquelle M. Margolin exécutait le CAV pour la propriété concernée par le remboursement, le 15 février 2012, il a acheté une autre résidence dont les travaux étaient achevés. Il s’agissait d’une maison plutôt grande sur un lot de 11 acres, conformément à ce qui figure dans les inscriptions figurant dans le MLS dans un cahier de [traduction] « spécification » préparée par M. Margolin environ quatre ans plus tard. M. Margolin a payé cette propriété 2 000 000 $. Lorsqu'il a acheté cette propriété sur la rue Jane à King City (« rue Jane »), il était le courtier immobilier coopérateur inscrit au dossier qui achetait la propriété pour lui-même. La propriété sur la rue Jane avait été inscrite sous de telles conditions pour une période d’une année, soit du 13 juin 2011 au 30 juin 2012. La propriété de la rue Jane avait été inscrite selon de telles conditions pour une période d’un an, du 13 juin 2011 au 30 juin 2012. Tous ces renseignements plutôt utiles ont été divulgués dans la preuve de M. Margolin concernant le résumé de l’inscription qu’il a produit et reproduit comme par hasard. Bien qu’à ce jour il soit propriétaire sur la rue Jane, dans son témoignage, il a déclaré que cette propriété était un achat provisoire en attendant l’achèvement de la construction de la propriété concernée par le remboursement.

[12]  Avant tout cela, en mars 2010, M. Margolin avait acheté une autre propriété, une nouvelle maison construite à Vaughn (Ontario) (Lynvest). Il affirme qu’il a vécu dans cette propriété vers la fin de 2011. Il a demandé un remboursement pour habitation neuve pour cette propriété. Lynvest a été vendue le 7 décembre 2011. La date de clôture était le 1er février 2012, date qui figure comme par hasard dans une très brève lettre de rapport d’une page de l’avocat de M. Margolin. Elle faisait allusion à l’état des rajustements, au compte et au compte en fiducie. Ces documents n’ont pas été produits dans la preuve. Cependant, une convention d’inscription portant la date de vente a été produite par M. Margolin. Elle identifiait M. Margolin et sa maison de courtage comme courtier inscripteur et vendeur respectivement.   

[13]  Au cours de l’audience, on a tenté de présenter la preuve concernant la propriété Lynvest, conformément à ce qui est décrit partiellement ci-dessus, le premier jour de l’audience dans un affidavit produit par l’intimée. Cette dernière à tenté de présenter l’affidavit après que M. Margolin a témoigné qu’il résidait dans l’appartement loué de Natalia et Highcliffe au cours l’automne 2011 et de l’hiver 2012, sans mention de Lynvest. La preuve concernant la preuve sur la propriété de Lynvest a été présentée ultérieurement au cours de la deuxième journée, en raison de l’ajournement de la Cour accordant la tenue d’un examen d’une telle preuve.   

[14]  La preuve sur une autre propriété a également été présentée par l’intimée dans l’affidavit. En juin 2015, M. Margolin a acheté une maison à Aurora en Ontario (« Chouinard »). M. Margolin a conclu la transaction et a occupé Chouinard le 7 mars 2017. Un remboursement de la TVH pour les habitations neuves a été demandé. Vraisemblablement en réponse à l’affidavit, le deuxième jour d’audience, M. Margolin a produit une facture manuscrite des services de déménagement pour [traduction] « déménager vos affaires », le chèque pour payer la facture, des photographies des pièces qui, selon le témoignage de M. Margolin, étaient dans la résidence Chouinard, ainsi qu’une photographie d’un camion loué stationné dans l’entrée de Chouinard. 

b)  Occupation de la propriété concernée par le remboursement

[15]  En ce qui concerne la propriété concernée par le remboursement, M. Margolin, dans son témoignage, a déclaré que Natalia n’avait jamais emménagé une fois les travaux achevés. Le 18 mars 2014, M. Margolin a embauché des déménageurs pour déménager les biens à la propriété concernée par le remboursement. Le 15 mars, M. Margolin a acheté des appareils ménagers pour la propriété concernée par le remboursement. Il a également changé son adresse sur certains documents et enregistrements : permis de conduire (4 avril 2014); propriété d’une voiture vieille de 11 ans (14 avril 2014); un compte bancaire (11 avril 2014); une marge de crédit personnelle affichant un solde de zéro (produite le 8 mai 2014); une facture de gaz pour la propriété (datée du 24 mars 2014); une facture d’eau (datée du 10 avril 2014) et une facture d’électricité (datée du 29 avril 2014). Une facture des services de déménagement datée du 27 août 2014 liée au retour des biens de M. Margolin à la rue Jane a également été produite.  

[16]  M. Margolin mentionne que lorsqu’il a occupé la propriété concernée par le remboursement, il vivait un stress considérable. Son mariage s’effondrait . Son père est décédé le 9 avril 2014. Cela a nécessité qu’il passe beaucoup de temps à s’occuper de sa mère nouvellement veuve,tendant ainsi à des obligations familiales liées aux funérailles et au deuil. Dans son témoignage, il a déclaré avoir [traduction] « passé très peu de temps à la maison » en raison de ces obligations familiales causées par les circonstances. Par conséquent, très peu de travaux ont été effectués pour rendre la maison habitable. Il a ajouté qu’il a déménagé quelques outils pour la maison, ses livres professionnels d’ingénierie, ainsi que 50 à 60 huiles sur toile. Un matelas et une table ont également été déménagés.

[17]  M. Margolin a entrepris très peu de travaux dans la propriété concernée par le remboursement. Ses engagements familiaux nécessitaient qu’il passe des nuits à l’appartement de sa mère. Lorsqu’il dormait à la propriété concernée par le remboursement, à l’occasion, il y prenait son petit déjeuner, mais rarement les autres repas de la journée. Il ne faisait pas le ménage. Avant de vendre la propriété, il a engagé une femme de ménage.

[18]  Des factures de services publics pour la propriété concernée par le remboursement couvrant la période d’occupation ont été présentées dans la preuve. La consommation pour des périodes de service semblables au cours de l’occupation a diminué : 270 kWh en février et mars (un mois), 206 kWh de mars à mai, 117 kWh de mai à juillet et 18,94 kWh en juillet et août (un mois). La propriété était chauffée au gaz, le chauffe‑eau ainsi que la cuisinière étaient alimentés au gaz. En ce qui concerne le gaz, presque aucune consommation n’a été constatée pour les mois de mai, juin, juillet et août 2014. La consommation pour les mois d’avril et mars n’était pas élevée. C’est en février et en mars que la consommation de gaz a été la plus élevée, soit avant l’occupation. 

[19]  La femme de ménage de M. Margolin a témoigné à l’audience. Elle a nettoyé la maison afin qu’elle soit prête pour les visites et la vente en mai ou en juin 2014. Elle a souligné qu’il y avait des meubles et des toiles au sous‑sol, une table et des chaises dans la cuisine, ainsi qu'un matelas et une chaise à l’étage. Elle a aidé M. Margolin à déménager les meubles de la cuisine au sous‑sol. Curieusement, M. Margolin a témoigné que ses « maux de dos » avaient nécessité l’embauche antérieure et ultérieure de déménageurs. La femme de chambre a nettoyé la propriété concernée par le remboursement une seule fois. Elle faisait également le ménage chez la mère de M. Margolin, à l’occasion. 

[20]  Le déménageur qui a aidé M. Margolin lorsqu’il a emménagé dans la propriété concernée par le remboursement et lorsqu’il en est reparti a aussi témoigné. Même s’il n’était pas présent pendant le déménagement dans la maison, il a témoigné de ce qui a été déménagé : un appareil d’exercice (monté et démonté), des photos, des sofas, des dossiers et des classeurs.

[21]  L’acheteur à qui M. Margolin a vendu la propriété concernée par le remboursement a témoigné relativement au degré d’occupation de la maison lorsqu’il l’a visitée pendant que M. Margolin l’occupait en juin 2014. En général, ce témoin a informé la Cour que la propriété concernée par le remboursement était vide. Selon sa description, il n’y avait ni meubles, ni vêtements, ni photos, ni d’autres articles. Le sous‑sol était également vide. Seule la chaudière s’y trouvait. Des cartons recouvraient le plancher, plutôt que des tapis au sous‑sol. Pendant le contre‑interrogatoire, le propriétaire subséquent était certain que la propriété concernée par le remboursement était celle qu’il avait vue, qui était vide et qu’il a fini par acheter.

c)  la vente de la propriété concernée par le remboursement

[22]  M. Margolin a vendu la propriété concernée par le remboursement le 28 août 2014. Il a mentionné à la Cour qu’il l’avait vendue parce qu’il ne pouvait pas la garder, en plus de la propriété de la rue Jane. Ses économies et le produit de vente de Highcliffe lui ont permis d’acheter la propriété de la rue Jane (2 millions de dollars), mais il devait financer la propriété concernée par le remboursement (950 000 $). L’hypothèque de 617 000 $ pour la propriété concernée par le remboursement était valide pour une année : ouverte pour les six premiers mois et fermée pour les six derniers. La période de 12 mois débutait le 27 février 2014 et prenait fin le 1er mars 2015. M. Margolin a laissé entendre que la période de six mois ouverte suivie de la période de six mois fermée niait toute intention de revente rapide.  

d)  la possession et l’occupation d’autres propriétés par M. Margolin

[23]  Comme précisé, le travail de M. Margolin en tant que courtier immobilier était de vendre des biens immobiliers à d’autres. Il a également acheté des propriétés pour lui. Il soutient qu’il a acheté et occupé toutes les propriétés qu’il a achetées. Il a affirmé cela en ce qui concerne Lynvest, Chouinard et la propriété concernée par le remboursement. Il a demandé un remboursement de la TVH pour nouvelle habitation dans les trois cas. Les remboursements et les questions liés à d’autres propriétés ne sont pas présentés devant cette cour. Seules les questions qui traitent de la propriété concernée par le remboursement et de la crédibilité et de la fiabilité de M. Margolin concernant son témoignage sont pertinentes. C’est le contexte chronologique de son occupation, de sa possession et de son utilisation des autres propriétés relativement à la propriété concernée par le remboursement qui est utile pour la détermination de son occupation de la propriété concernée par le remboursement comme résidence principale.

[24]  Voici un tableau de comparaison de continuité élaboré par la Cour à partir de la preuve concernant les diverses propriétés possédées et occupées par M. Margolin pendant la période évaluée avant l’acquisition de la propriété concernée par le remboursement jusqu’à la date d’audience initiale devant cette cour. 

Propriété

Date de CAV (achat)

Date(s) d’occupation

Date d’inscription

Date du CAV (vente)

Date de clôture

Durée de possession

Durée d’occupation

Highcliffe

Aucun renseignement

2002

Aucun renseignement

Aucun renseignement

Novembre 2013 environ (ne s’en souvient pas précisément)

Environ 10 ans

Environ 10 ans (2002 à 2012)

Appartement loué

S.O.

1er février 2012

S.O.

S.O.

S.O.

S.O.

5,5 mois

Propriété concernée par le remboursement

Offre : 11 février 2012

Offre acceptée : 22 février 2012

Clôture : 27 février 2014/septembre 2013

18 mars 2014

10 juin 2014

1er juillet 2014

Le 27 ou 28 août 2014 probablement

Environ 5 mois

Environ 5 mois (du 18 mars 2014 au 27 août 2014)

Rue Jane

Offre : 15 février2012

Clôture : 12 juin 2012

12 juillet 2012

1re inscription le 16 août 2016

S.O. – n’a pas encore vendu

S.O. – pas encore vendue

Toujours propriétaire – 5 ans

1 an et 3 mois, et 3 ans et 2 mois

Lynvest

2 mars 2010

Peu après la clôture (18 octobre 2011)

7 décembre 2011

7 décembre 2011

1er février 2012

1 an et 9 mois

Environ 4 mois (18 octobre 2011 – 1er février 2012)

Chouinard

6 juin 2015

Possession : 8 mars 2017

20 octobre 2017 – a commencé à déménager

Demeure dans la propriété actuellement

Demeure dans la propriété actuellement

Demeure dans la propriété actuellement

Toujours propriétaire – 2 ans et 8 mois

3,5 mois à ce jour

III. Analyse et application de la preuve pour la question primaire

[25]  Conformément à ce qui est expliqué d’entrée de jeu, la question primaire dont la Cour est saisie peut être subdivisée davantage :

(i) les circonstances factuelles appuient-elles objectivement une intention d’acheter la propriété pour en faire la résidence principale? 
(ii) les faits appuient-ils un degré d’occupation habituelle correspondant à un lieu principal de résidence?

[26]  En ce qui concerne la preuve sur l’intention et l’occupation, généralement, la Cour observe ce qui suit relativement au niveau de crédibilité et de fiabilité de la preuve.  

[27]  M. Margolin n’a pas révélé qu’il était propriétaire de Lynvest jusqu’à ce que la question soit soulevée par l’intimée. Dans son témoignage, il a d’abord déclaré qu’il avait déménagé directement de Highcliffe et/ou de l’appartement loué sur la rue Yonge. Il affirme que cela était en raison sa courte occupation à Lynvest. Pourtant, cette période était égale à sa période d’occupation de la propriété concernée par le remboursement, ou plus longue. De plus, le témoignage de M. Margolin ne correspondait pas à celui des autres témoins quant à sa capacité de déplacer des meubles, les meubles déménagés dans la propriété concernée par le remboursement et l’endroit où ils ont été placés dans la résidence. Le témoignage de M. Margolin ne doit pas être écarté pour ces raisons, mais dans la mesure où il existe une preuve désintéressée d’un tiers, la documentation source ou les conclusions logiques communes du tiers, en tant que conclusion de crédibilité, de telles sources doivent être privilégiées au détriment de celle de M. Margolin.

a)  l’intention d’occuper une résidence principale

[28]  L’intention de Natalia et/ou de M. Margolin d’occuper la propriété concernée par le remboursement comme résidence principale au moment du CAV prête à confusion. Elle exige un examen des circonstances au moment de l’exécution du CAV et après celle-ci. Ces circonstances ne fournissent pas l’engagement clair et singulier habituel d’acheter une maison de rêve « à construire » pour les nouveaux mariés. Premièrement, la propriété concernée par le remboursement a été achetée au même moment que la rue Jane : la rue Jane était alors une maison construite beaucoup plus grande, à un « prix intéressant », dans laquelle M. Margolin et Natalia ont emménagé sans attendre et dans laquelle les deux demeurent à ce jour, malgré les procédures de divorce. Deuxièmement, l’achat de la propriété de Lynvest a été conclu seulement 45 jours avant l’achat de la propriété concernée par le remboursement et Lynvest a été vendue quelques jours avant l’achat de la propriété concernée par le remboursement, et tous ces renseignements n’ont pas été fournis dès le départ par M. Margolin.

[29]  Outre ces éléments de preuve conflictuels au sujet de l’intention première, avant de tirer des conclusions déterminantes, la Cour doit entreprendre une analyse du deuxième critère conjonctif, l’occupation réelle de la propriété concernée par le remboursement.

b)  M. Margolin a-t-il d’abord occupé la propriété comme lieu principal de résidence?

[30]  La Cour constate les conclusions importantes suivantes au sujet du degré d’occupation de la propriété concernée par le remboursement par M. Margolin :

(a) au mieux, il y a résidé partiellement : la consommation de services publics, la quantité de meubles déménagés, la disposition des meubles et le genre d’effets déménagés étaient tous superficiels et réduits au minimum;

(b) l’acheminement de certains courriers à la propriété concernée par le remboursement est contrebalancé par le fait que presque l’ensemble de la correspondance acheminée traitait précisément de cette propriété et M. Margolin prenait ce courrier lorsqu’il se rendait à la propriété concernée par le remboursement;

(c) le témoignage de M. Margolin au sujet de Chouinard précisait clairement son souhait de suivre les conseils de son avocat afin d’éviter d’avoir des [traduction] « problèmes » aux remboursements de la TVH. Il l’a mentionné dans son témoignage. Un témoignage sur la façon dont il a véritablement, dans les faits, occupé la propriété comme résidence principale aurait été plus convaincant. L’occupation et la preuve de cette propriété ont eu lieu [traduction] « en temps réel » après l’ajournement du premier jour d’audience dans le cas de cet appel. Il n’y avait aucune possibilité du genre pour étayer la preuve de la propriété concernée par le remboursement;

(d) même en accordant le caractère favorable le plus élevé au témoignage du déménageur et de la femme de ménage dans l’ensemble, la preuve démontre que dans la propriété concernée par le remboursement, trois pièces sur neuf étaient occupées en partie (y compris le sous‑sol) : une salle de bain, la cuisine et le sous‑sol;

(e) la propriété de moins de six mois une fois le marché conclu, et une vente tout juste avant la clôture de l’hypothèque fermée d’un an (et assujettie à des pénalités pour paiement anticipé) suggèrent une possession transitoire de la propriété concernée par le remboursement qui correspond à une occupation superficielle. La vente au cours de la période d’hypothèque ouverte suggère le contraire de ce qu’affirme M. Margolin : la période ouverte a facilité la vente précoce en réduisant les frais de paiement anticipé;

(f) en ce qui concerne les deux propriétés, la propriété concernée par le remboursement et Chouinard, pour lesquelles les frais de déménagement ont été produits, il n’y avait aucune liste des articles déménagés, une pratique courante dans le secteur du déménagement. Cela renforce la nature ponctuelle et superficielle du déménagement à la propriété concernée par le remboursement.

c)  Résumé et décision

[31]  Au bout du compte, M. Margolin doit convaincre de son intention d’occupation en tant que lieu principal de résidence, et de sa véritable occupation constante pour recevoir le remboursement. Si, dans l’ensemble, il échoue dans l’un ou l’autre des cas, l’appel sera rejeté. 

[32]  Par conséquent, la Cour se concentre sur le deuxième élément : l’exigence que M. Margolin occupe d’abord la propriété concernée par le remboursement comme lieu principal de résidence. En ce qui a trait aux exemples suivants qui sont décrits et révélés dans les présents motifs, la Cour estime que, dans l’ensemble, il échoué :

(i) la rapidité de l’inscription et de la vente de la propriété concernée par le remboursement après sa libération aux fins d’occupation;
(ii) l’absence de réinstallation et d’habitation constante de la propriété concernée par le remboursement;
(iii) les accords de financement à court terme et particulières;
(iv) l’occupation et l’habitation continues par M. Margolin et Natalia à la rue Jane tout au long de la possession et l’occupation prétendue de la propriété concernée par le remboursement;
(v) la baisse de consommation mesurable des services publics après l’achèvement de la construction et l’occupation, y compris la consommation d’électricité durant les mois les plus chauds de l’année, une période à laquelle la climatisation électrique plutôt qu’un chauffage à air chaud pulsé à gaz serait utilisée;
(vi) Natalia n’a jamais occupé la propriété concernée par le remboursement et, au mieux, M. Margolin, selon son témoignage, l’a occupée de façon sporadique, temporaire et ponctuelle;
(vii) bien que des conventions d’inscription aient été produites pour Lynvest et la rue Jane, aucune convention du genre (évidemment déjà accessible et facile à fournir par M. Margolin) n’a été produite pour la propriété concernée par le remboursement, ce qui oblige la Cour à formuler une hypothèse quant au moment où elle a été inscrite pour la vente. La propriété concernée par le remboursement devait avoir été inscrite en mai 2014, au plus tard, moins d’un mois après l’occupation prétendue. 

[33]  En conclusion, tout ce qui précède amène la Cour à conclure qu’à la date à laquelle M. Margolin est devenu le propriétaire enregistré de la propriété concernée par le remboursement et après cette date, il n’a pas été le premier à l’utiliser comme lieu principal de résidence. M. Margolin a déménagé sur la rue Jane en juin ou en juillet 2012 : son témoignage sur l’occupation de la rue Jane n’était pas tout à fait clair. Cependant, il est probable, étant donné l’ensemble de la preuve qu’après l’été 2012, la rue Jane est demeurée et demeure le lieu principal de résidence. En ce qui concerne cet appel, la seule période critique pour la détermination de l’utilisation comme lieu principal de résidence est la période d’avril à août 2014. Au cours de cette période, il est très probable que M. Margolin ait demeuré sur la rue Jane avec sa femme, c’est‑à‑dire leur résidence habituelle.    

[34]  Compte tenu de cette conclusion, M. Margolin n’est pas admissible à la part provinciale du remboursement de la TVH pour les habitations neuves relativement à la propriété concernée par le remboursement, car la preuve ne révèle aucunement qu’il l’a occupée à un degré qui s’approche d’un lieu principal de résidence. Pour ces motifs, l’appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 21e jour de février 2018.

« R.S. Bocock »

Juge Bocock


RÉFÉRENCE :

2018 CCI 36

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2016-2714(GST)I

INTITULÉ :

GIDEON MARGOLIN ET SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 12 décembre 2017

MOTIFS DU JUGEMENT :

Monsieur le juge Randall S. Bocock

DATE DU JUGEMENT :

Le 21 février 2018

COMPARUTIONS :

Avocat de l’appelant :

Me Ari A. Lokshin

Avocat de l’intimée :

Me Alexander Hinds

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

Ari A. Lokshin

 

Cabinet :

Lokshin Law Office

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa (Canada)

 

 

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