Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossiers : 2015-5215(IT)G

2016-217(IT)G

ENTRE :

AKANDA INNOVATION INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


Devant : L'honorable juge en chef Eugene P. Rossiter

 

ORDONNANCE

  Vu la requête de l'appelante présentée en vertu de l'article 12 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) afin que la Cour prolonge le délai pour demander à la Cour d'infirmer le jugement rendu en vertu du paragraphe 140(2) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale);

  Et vu les observations écrites des parties;

  La requête est rejetée conformément aux motifs de l'ordonnance ci‑joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de février 2018.

« E.P. Rossiter »

Le juge en chef Rossiter


Référence : 2018 CCI 35

Date : 20180219

Dossiers : 2015-5215(IT)G

2016-217(IT)G

ENTRE :

AKANDA INNOVATION INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

Le juge en chef Rossiter

[1]  La Cour est saisie d'une requête présentée par l'appelante en vertu de l'article 12 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) afin que la Cour prolonge le délai pour demander à la Cour d'infirmer le jugement rendu en vertu du paragraphe 140(2) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale). La question dont la Cour est saisie est donc celle de savoir s'il y a lieu que la Cour exerce son pouvoir inhérent en vertu du paragraphe 140(2) pour infirmer le jugement prononcé contre l'appelante pour son défaut de comparaître à l'audience sur l'état de l'instance le 7 mars 2017.

[2]  Les faits sont relativement simples :

a.  L'appelante, Akanda Innovation Inc., a présenté une requête en vertu de l'article 12 des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) en vue de faire prolonger le délai dont l'appelante dispose en vertu du paragraphe 140(2) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) pour faire infirmer le jugement et en vue d'infirmer ce jugement qui découle du défaut de comparaître à l'audience sur l'état de l'instance le 7 mars 2017.

b.  Aux mois de mai et de juillet 2013, le ministre a établi de nouvelles cotisations concernant l'appelante rejetant des dépenses de RSDE et des crédits d'impôt à l'investissement (CII) connexes pour les années d'imposition 2007, 2008, 2009 et 2010.

c.  L'appelante a fait appel au cabinet Barrett Tax Law. Les avis d'appel ont apparemment été rédigés en peu de temps. Le service qui rédigeait les avis d'appel a mis fin à ses travaux concernant les actes de procédure, et l'avocat qui s'occupait du dossier à Barrett Tax Law a démissionné du cabinet. Malgré cela, l'avis d'appel pour les années d'imposition 2007, 2008 et 2009 a été déposé le 18 novembre 2015. L'avis d'appel pour l'année 2010 n'a pas été déposé à temps. Une demande de prorogation du délai devait plutôt être déposée; la Cour a accueilli la demande et a accepté qu'un avis d'appel dont le contenu tenait compte de la demande soit déposé.

[3]  Le 12 septembre 2016, la Cour a rendu une ordonnance prorogeant le délai pour le dépôt de la liste de documents de l'appelante et a établi un échéancier pour les autres étapes préalables au procès. Des problèmes de communication concernant le cabinet qui représentait l'appelante ont fait en sorte qu'elle n'a jamais signifié la liste de documents. Apparemment en raison de différends irréconciliables, les avocats de l'appelante ont cessé d'occuper à compter du 6 janvier 2017, mais ont déposé le 12 janvier 2017 une requête en vue de la modification de l'ordonnance du 12 septembre 2016. Le 18 janvier 2017, l'ordonnance a été rendue, mais l'appelante devait toutefois informer la Cour du nom de son nouvel avocat avant le 10 février 2017. L'appelante ne s'est pas conformée à cette directive.

[4]  Dans un message électronique du 12 janvier 2017 de l'ancien avocat de l'appelante à celle‑ci, on indiquait que le juge peut prendre jusqu'à deux semaines pour rendre une décision, mais que, [TRADUCTION] « pour le moment, l'appelante devrait agir comme si la Cour avait accueilli sa demande ». On recommandait aussi que l'appelante obtienne les services d'un nouvel avocat. Le 7 mars 2017, une audience sur l'état de l'instance a eu lieu, et l'intimée a présenté une requête en vertu des paragraphes 125(8) et 140(1) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (procédure générale) pour que l'appel soit rejeté. Ni l'appelante ni son avocat n'étaient présents à l'audience. La requête de l'intimée a été accueillie, et l'appel a été rejeté.

[5]  Comme il a été mentionné, la seule question dont la Cour est saisie est celle de savoir s'il y a lieu que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire inhérent en vertu du paragraphe 140(2) et qu'elle infirme le jugement prononcé contre l'appelante pour le défaut de comparaître à l'audience sur l'état de l'instance le 7 mars 2017.

[6]  L'état du droit en cette matière est bien établi. La décision du juge en chef adjoint Bowman (tel était alors son titre) dans Farrow c. La Reine, 2003 CCI 885, est utile, puisqu'elle énonce les principes à examiner pour décider s'il faut infirmer un jugement par défaut :

[TRADUCTION]

Le juge d'appel Lamont, dans l'affaire Klein v. Schile, [1921] 2 W.W.R. 78, 14 Sask. L.R. 220, énonce les principes sur lesquels une cour, à sa discrétion, s'appuiera pour infirmer un jugement légalement enregistré. Ainsi, à la page 79, il affirme ce qui suit :

Les circonstances dans lesquelles une cour exercera son pouvoir discrétionnaire en vue d'infirmer un jugement consigné en toute régularité sont assez bien établies. La demande devrait être déposée dès que possible, après que le défendeur aura pris connaissance du jugement. Toutefois, un simple délai ne fera pas obstacle à la demande, sauf si un dommage irréparable est causé au demandeur ou si le délai est délibéré (Tomlinson c. Kiddo (1914), 7 W.W.R. 93, 29 W.L.R. 325, 7 Sask. L.R. 132; Mills v. Harris & Craske (1915), 8 W.W.R. 428, 8 Sask. L.R. 114). Par ailleurs, la demande devrait être appuyée par un affidavit qui doit énoncer les circonstances dans lesquelles le jugement par défaut a été prononcé et présenter une défense valable (Chitty's Forms, 13e éd., p. 83).

[7]  J'ai fait observer, dans Izumi c. La Reine, 2014 CCI 108, que le cadre analytique correct ne consiste pas à appliquer une série de critères rigides, mais plutôt d'utiliser une approche plus contextuelle.

[8]  En examinant les exigences applicables à la présente requête, je relève ce qui suit :

a.  Le fait qu'il y ait une intention constante de poursuivre l'appel. Je dirais que cette exigence semble être remplie. L'appelante semble avoir eu l'intention constante de poursuivre l'appel, et la non‑conformité avec les procédures de la Cour de l'impôt était imputable au manque de communication de la part de l'avocat inscrit au dossier sur l'évolution de l'appel. Il convient de souligner qu'une somme relativement élevée était en jeu et que l'appelante, après avoir appris que l'appel avait été rejeté, a engagé un nouvel avocat et présenté assez rapidement une requête en vue de rétablir l'appel. Il convient toutefois de souligner que l'appelante ne s'est conformée à aucune des exigences en matière de communication. Selon la jurisprudence, il faut se demander s'il y a eu carrément négligence ou absence d'intérêt, ce qui ne semble pas être le cas en l'espèce.

b.  Le fait que l'appel soit fondé. Il semble que l'appel ait un certain fondement. Il s'agit d'une norme bien peu élevée, et l'avis d'appel initial énonce clairement les questions soulevées par l'appelante. La thèse de l'appelante semble être étayée.

c.  Le fait que le retard ne cause aucun préjudice à l'intimée. Cette exigence pose des problèmes à l'appelante. L'intimée affirme que l'appelante ne semble pas avoir satisfait aux exigences en matière de communication. Il ne fait aucun doute que si la Cour accueillait la requête, l'intimée subirait un préjudice disproportionné en raison du défaut de l'appelante de s'acquitter de l'obligation fondamentale d'une partie à un litige, à savoir les obligations en matière de communication. L'appelante a l'obligation fondamentale de poursuivre l'appel en temps opportun — cela ne se produit pas.

d.  Le fait qu'il y ait une explication raisonnable pour justifier le retard. Je ne crois pas que cette exigence ait été remplie. L'appelante allègue que son manque de conformité avec les procédures de la Cour canadienne de l'impôt était imputable au message électronique reçu de son avocat indiquant que la Cour était convaincue de son intention de poursuivre l'appel. En raison de cette croyance erronée, l'appelante pensait que l'étape suivante consistait à déposer une liste de documents. En conséquence, personne n'a comparu à l'audience sur l'état de l'instance. Ce n'est tout simplement pas le cas, et le message électronique n'étaye pas cette thèse. L'appelante recevait la correspondance de la Cour canadienne de l'impôt au moins à compter de la date à laquelle son avocat avait cessé d'occuper; elle a notamment reçu l'ordonnance du 19 janvier 2017 lui enjoignant de trouver un nouvel avocat et d'informer la Cour du nom du nouvel avocat au plus tard le 10 février 2017. Le message électronique de l'avocat de l'appelante envoyé le 12 janvier 2017 n'indique pas ce que l'appelante affirme qu'il indique, puisque le message ne mentionne nullement que la question de l'état de l'instance avait été résolue, comme l'appelante l'allègue. Ce que le message électronique indique est que le juge peut prendre jusqu'à deux semaines pour rendre sa décision et que, pour le moment, l'appelante devrait agir comme si la Cour avait accueilli la demande. Bien entendu, il n'est aucunement garanti que la question a été résolue : il est seulement indiqué d'agir comme si la Cour avait accueilli la demande, jusqu'à preuve du contraire. Le message électronique suggère aussi que l'appelante trouve un nouvel avocat, conseil que l'appelante n'a suivi qu'après l'audience sur l'état de l'instance en mars.

[9]  Après avoir tenu compte de tout ce qui précède, je suis d'avis que l'appelante n'a pas rempli les exigences applicables pour que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire et accueille la requête. En conséquence, la requête est rejetée. Il n'y aura pas d'adjudication de dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 19e jour de février 2018.

« E.P. Rossiter »

Le juge en chef Rossiter


RÉFÉRENCE :

 

2018 CCI 35

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :

 

2015-5215(IT)G et 2016-217(IT)G

 

INTITULÉ :

AKANDA INNOVATION INC. c. LA REINE

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :

L'honorable juge en chef Eugene P. Rossiter

 

DATE DE L'ORDONNANCE :

Le 19 février 2018

 

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelante :

[EN BLANC]

Avocat de l'intimée :

[EN BLANC]

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

Nom :

Me David W. Chodikoff

 

Cabinet :

Miller Thomson LLP

Toronto (Ontario)

 

Pour l'intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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