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Dossier : 2010-3680(IT)I

ENTRE :

 

MARTIAL MORISSETTE,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 12 janvier 2012, à Montréal (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

 

Comparutions :

 

Avocate de l'appelant :

Me Catherine Saint-Germain

 

 

Avocate de l'intimée :

Me Marie-France Dompierre

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu, par le ministre du Revenu national pour l’année d’imposition 2009, est accueilli et la cotisation est annulée selon les motifs du jugement rendus oralement à l’audience.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de février 2012.

 

 

 

« Alain Tardif »

Juge Tardif


 

 

 

Référence : 2012 CCI 37

Date : 20120213

Dossier : 2010-3680(IT)I

 

ENTRE :

 

MARTIAL MORISSETTE,

 

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(rendus oralement à l’audience du 12 janvier 2012)

 

 

Le juge Tardif

 

[1]     Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre d’une cotisation établie à l’égard de l’appelant par le ministre du Revenu national (le « ministre ») en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2009 relative à un montant de 2 040 $ reçu à titre d’allocation imposable tiré d’une charge ou d’un emploi.

 

[2]     Dans un premier temps, il m’apparait important de souligner que les faits à l’origine du litige et pris en compte pour expliquer et justifier la cotisation qui fait l’objet de l’appel ont été admis.

 

[3]     Le litige vise essentiellement l’interprétation des faits admis et disponibles.

 

 

 

 

[4]     Les faits admis par l’appelant sont les suivants :

 

a)                  au cours de l’année d’imposition en litige, l’appelant était à l’emploi de la Corporation de la gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent (ci-après « l’employeur »);

 

b)                  la convention collective de l’employeur prévoit un montant fixe de 20 $ par repas lorsque l’appelant;

 

·        effectue plus de deux heures supplémentaires;

·        travaille hors de la localité d’affection régulière;

·        n’a pas accès à l’endroit ou il mange habituellement;

 

c)                  au cours de l’année en litige, l’appelant a reçu de son employeur une somme de 2 040 $ à titre d’allocation pour frais de repas;

 

d)                  l’employeur a inclus cette somme à titre de revenu tiré d’une charge ou d’un emploi au feuillet intitulé « État de la rémunération payée T4 ».

 

[5]     Le jugement a été rendu oralement séance tenante. D'ailleurs, la transcription est annexée au présent jugement pour en faire partie intégrante. Étant donné que le jugement pourrait avoir un impact ou des effets sur certains autres dossiers, je me permets de résumer succinctement le jugement rendu séance tenante oralement.

 

[6]     L’appel soulève deux questions; la première consiste à savoir si le fait que l’employeur traite ou qualifie une allocation de repas comme étant un avantage imposable est une indication pertinente, sérieuse et valable pour lier l’agence en ce qu’elle doit valider l’interprétation de l’employeur.

 

[7]     La réponse est négative particulièrement si elle découle d’une analyse superficielle et arbitraire.

 

[8]     En l’espèce, il semble que le traitement de l’allocation a été traité différemment au fils des ans. Au départ, les dépenses étaient simplement remboursées suivant les déboursés. Comme le tout entrainait une charge administrative, l’employeur a suggéré un traitement simplifié au niveau de la gestion, ce à quoi les travailleurs ont agréé.

 

[9]     Dans un deuxième temps, les allocations étaient payables et traitées comme non imposable. Finalement, à partir d’une directive voulant qu’une allocation supérieure à 17 $ par repas soit non raisonnable, l’employeur a alors unilatéralement conclu qu’il s’agissait là d’un avantage imposable. Ainsi, à partir de cette directive l’employeur a modifié son approche; il a alors inclus le montant sur le feuillet T-4 des travailleurs, dont l’appelant.

 

[10]    La deuxième question consiste à savoir si l’allocation est un montant raisonnable ou non.

 

[11]    La raisonnabilité du montant doit s’établir pour la période en litige et non en fonction d’aujourd’hui. Je ne crois pas qu’un montant d’une telle allocation soit un absolu. Plusieurs facteurs peuvent et doivent être pris en considération. Je fais notamment références aux salaires, à la région, aux coûts d’un repas normal moyen, le tout devant évidemment inclure les taxes et les gratuités.

 

[12]    En l’espèce, je ne crois pas que l’exercice commande une analyse très approfondie d’autant plus que j’ai pu constater que l’appelant avait souvent dû débourser un tel montant pour s’offrir des repas ordinaires, raisonnables n’incluant rien de superflu.

 

[13]    La détermination de déraisonnable retenue par l’intimée ne s’appuie sur aucun élément, facteur pertinent; elle repose sur une approche essentiellement arbitraire. Je décide donc que l’allocation de 20 $ est tout à fait raisonnable en ce qu’elle correspondre aux coûts réels déboursés tel que d’ailleurs clairement établi par la preuve.

 

[14]    Conséquemment, l’appel est accueilli et la cotisation dont il est fait appel est annulée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de février 2012.

 

 

 

 

 

« Alain Tardif »

   Juge Tardif

 

 

 

ANNEXE

 

 

COUR CANADIENNE DE L'IMPÔT

       RE : LOI SUR L'IMPÔT

 

       2010-3680(IT)I

 

ENTRE :                                  MARTIAL MORISSETTE

appelant

 

-et-

 

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée

 

 

Tenue devant l'honorable ALAIN TARDIF, Cour canadienne de l'impôt, dans les locaux du Service administratif des tribunaux judiciaires, Montréal, (Québec),

le 12 janvier 2012.

       --------------------

       MOTIFS DE JUGEMENT

 

COMPARUTIONS :

 

Me CATHERINE SAINT-GERMAIN

pour l'appelant

 

Me MARIE-FRANCE DOMPIERRE

pour l'intimée

 

Greffière/technicienne : Julie Lafrenière

 

       RIOPEL, GAGNON, LAROSE & ASSOCIÉS

       215, rue Saint-Jacques,

       bureau 1020

       Montréal (Québec)

       H2Y 1M6

IT-5577                                              JEAN LAROSE, s.o.

 

                                                          MONSIEUR LE JUGE :     Écoutez, je rends ma décision tout de suite, ça traduit, quant à moi, exprime l’absence de doute totale quant à la décision qui s’impose dans les circonstances.

                                                          À la lumière des remarques introductives des parties, il était très facile de circonscrire ce débat-là dans le sens que... ça s’est d’ailleurs avéré validé par les admissions qui portaient, visaient et ciblaient précisément les faits que l’Agence avait pris pour acquis pour établir la cotisation. Alors, tous les faits qui ont été pris pour acquis ont été admis. Donc, en autant que je suis concerné il n’y a pas beaucoup d’équivoque quant aux faits disponibles pour permettre de rendre une décision dans ce dossier-ci.

                                                          La Cour va ajouter un certain nombre de nuances, de précisions mais qui, quant à moi, ne changent en rien les faits qui ont été pris pour acquis à l’intérieur de la réponse à l’avis d’appel. La preuve a notamment fait ressortir que l’employeur, à une certaine époque, remboursait ces dépenses-là et que c’était devenu compliqué et complexe en ce que le prix des factures variait, souvent il y avait des taxis qui s’ajoutaient à ça et je pense que c’est pas exagéré que d’affirmer que dans des circonstances similaires, pour une organisation comme celle de l’employeur de l’appelant, c’était devenu, en quelque sorte, assez monstrueux sur le plan de la gestion administrative.

                                                          C’est d’ailleurs un phénomène que l’on constate de plus en plus de manière à ce que les employeurs qui ont, évidemment, comme objectif de réduire les coûts de gestion, d’administration, de retenir des formules qui sont plus faciles, moins coûteuses, plus expéditives et qui satisfont, en quelque sorte, la problématique.

                                                          Alors, en l’espèce ils ont convenu, les deux parties ont convenu que dans des circonstances précises il y aurait une allocation qui serait versée aux employés de l’employeur.

                                                          J’ai compris des remarques introductives et de la preuve documentaire qui a été déposée, que si le montant qui est en cause en litige de 20 $ avait été de 16 $, 17 $, ou 18 $, le dossier ne se serait probablement jamais rendu devant la Cour canadienne de l’impôt.

                                                          Donc, il faut se poser la question à savoir si entre 18 $ et 20 $ il y a suffisamment d’espace pour qualifier de déraisonnable ce qui a été qualifié de raisonnable au mois de juin 2009. Partir de 17 $ en 2009 et extrapoler au niveau de ce que ça peut représenter, ça fait à peu près une majoration à raison d’à peu près plus ou moins cinq pour cent (5 %) par année.

                                                          Ça m’apparaît... Écoutez, en autant que je suis concerné ça m’apparaît tout à fait, tout à fait, tout à fait rencontrer ce qu’on peut dire ou affirmer de raisonnable. C’est très certainement pas déraisonnable que de se voir attribuer un montant de 20 $ pour couvrir les dépenses inhérentes à un repas et de ce qui est sous-jacent. Je veux dire, l’exemple était bien choisi, l’appelant dans les circonstances n’a pas fait de temps supplémentaire mais il était en dehors de sa région à plus de cinquante kilomètres (50 km). Il a tout à fait raison de faire référence à ce qui entoure tout ça d’une certaine façon. La pause-café de l’avant-midi et de l’après-midi, du repas le midi, je pense qu’il ne s’agit pas de couper un cheveu en quatre, il s’agit globalement de s’interroger à savoir si 20 $ c’est abusif, c’est déraisonnable.

                                                          Avec respect pour l’opinion contraire, j’arrive à la conclusion que ça m’apparaît tout à fait, tout à fait à l’intérieur des normes acceptables de raisonnabilité, d’autant plus que c’est quelque chose qui a été négocié; c’est quelque chose que l’employeur a accepté; c’est quelque chose que l’employeur, pour des raisons qui le concernent, et ça m’oblige à ouvrir une parenthèse sur les remarques qui ont été faites par le procureur de l’Agence à savoir que le principal témoin ça aurait dû être l’employeur ce matin.

                                                          À ce sujet, je dis et j’affirme que pas nécessairement du fait que l’employeur n’est pas appelant, c’est la personne concernée par la décision qui s’est présentée ici ce matin. Je veux dire, l’employeur, à mon sens à moi, aurait pu, certes, venir témoigner mais le fardeau de la preuve ça incombe à l’appelant mais ça n’empêche pas l’intimée de faire aussi une preuve, s’il est d’opinion que la preuve à être soumise par l’appelant sera dans une direction opposée à ses prétentions. Ça ne l’empêche pas d’avoir la possibilité de faire venir un témoin de manière à contre-dire en l’espèce, notamment, l’appelant.

                                                          L’employeur, selon les explications de l’appelant, à une certaine époque remboursait le coût ou les déboursés réellement effectués. Après coup, a changé sa façon de faire, sa façon d’opérer, sa façon d’exploiter la dimension dépenses et il semblerait que pour une certaine période il n’y a pas eu de problème, on considérait ça comme étant quelque chose de raisonnable, rencontrant et respectant les normes applicables. Mais subitement, probablement à la lecture du document qui émane de l’Agence en date du onze (11) juin 2009, l’employeur a décidé de changer de façon... sa façon d’approcher ce dossier-là en décidant unilatéralement que 20 $ ce n’était pas le montant indiqué à un paragraphe où on fait effectivement... un montant jusqu’à concurrence de 17 $ sera considéré comme raisonnable.

                                                          C’est vrai, on est en 2009 pour la période visée par la cotisation mais 20 $, 17 $, c’est quand même, quant à moi, et on est dans la région de Montréal, ça m’apparaît, en autant que je suis concerné... C’est sûr que ce n’est pas quelque chose que l’on peut trancher de la même façon qu’un simple exercice mathématique, mais 20 $ en 2009-2010-2011, ça m’apparaît dans les circonstances tout à fait, tout à fait approprié.

                                                          Alors, ça répond à la question ou à la dimension raisonnabilité. Quant à la façon dont le montant a été traité par l’employeur, écoutez, l’employeur était sans doute de bonne foi, il n’a pas... je prends pour acquis qu’il n’a pas fait ça de mauvaise foi mais à mon sens à moi ce n’était pas à l’employeur à décider de façon unilatérale la façon dont ce montant-là devait être éventuellement traité fiscalement.

                                                          La façon de faire aurait été que les deux parties, et si tel avait été le cas ces deux parties dans une démarche commune s’étaient adressées à Revenu Canada, ils auraient à ce moment-là obtenu un avis qui aurait probablement fait ou donné satisfaction aux deux parties, qui aurait eu pour effet de probablement faire en sorte que le Ministère aurait plus rapidement, plus facilement collaboré aux fins d’évaluer avec les versions des deux parties en cause et aurait été en mesure de rendre une décision qui, j’en suis convaincu, aurait probablement fait l’affaire des deux parties.

                                                          Alors, que l’employeur ait décidé unilatéralement de qualifier ce montant-là comme étant un avantage imposable, quant à moi ça ne lie en aucune façon le Tribunal.

                                                          Or, pour toutes ces raisons, évidemment, j’accueille l’appel, j’annule la cotisation et je demande au Ministère de revoir le dossier aux fins qu’il soit rétabli comme... ou à l’effet que le montant qui a été traité comme étant imposable le soit comme ne l’étant pas.

FIN DES MOTIFS DE JUGEMENT 11 h 13

 

 

 

 

 

Je, soussigné, JEAN LAROSE, sténographe officiel, certifie que les feuilles qui précèdent sont et contiennent la transcription de bandes d'enregistrement mécanique, de l'audience en cette cause.  Le tout conformément à la Loi.

 

J'ai signé,

 

 

JEAN LAROSE, S.O.

 

 

 

 

 

 


 

RÉFÉRENCE :                                  2012 CCI 37

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2010-3680(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Martial Morissette c. sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 12 janvier 2012

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Alain Tardif

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 13 février 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocate de l'appelant :

Me Catherine Saint-Germain

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Marie-France Dompierre

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant :

 

                     Nom :                            Me Catherine Saint-Germain

 

                 Cabinet :                           Service juridique des TCA

                                                          Montréal (Québec)

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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