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Dossier : 2009-3734(IT)G

ENTRE :

 

PRICE WATERHOUSE COOPERS INC.

AGISSANT ÈS QUALITÉ DE SYNDIC À LA FAILLITE

DE BIOARTIFICIAL GEL TECHNOLOGIES (BAGTECH) INC.,

 

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appels entendus le 17 octobre 2011, à Montréal (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Paul Bédard

 

Comparutions :

 

Avocate de l’appelante :

Me Isabelle Pillet

Avocates de l'intimée :

Me Anne-Marie Boutin

Me Marie-Aimée Cantin

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          Les appels des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2004 et 2005 sont accueillis, avec dépens, selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour d’avril 2012.

 

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard


 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 120

Date : 20120412

Dossier : 2009-3734(IT)G

ENTRE :

 

PRICE WATERHOUSE COOPERS INC.

AGISSANT ÈS QUALITÉ DE SYNDIC À LA FAILLITE

DE BIOARTIFICIAL GEL TECHNOLOGIES (BAGTECH) INC.,

 

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Bédard

 

[1]              Durant les années d’imposition terminées les 31 décembre 2004 et 2005 (les « années pertinentes »), la société Bioartificial Gel Technologies (BAGTECH) Inc. (« Bagtech ») a engagé des dépenses courantes de recherche scientifique et de développement expérimental (« RS&DE ») et des dépenses en capital de RS&DE. Pour déterminer le crédit d’impôt à l’investissement (« CII ») de Bagtech pour la RS&DE pour les années pertinentes, le ministre du Revenu national (le « Ministre ») a conclu que Bagtech n’était pas une « société privée sous contrôle canadien » (« SPCC ») au sens du paragraphe 125(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu ( la « LIR »). En conséquence, le ministre a conclu que Bagtech, au cours des années pertinentes, était une « société non admissible » au sens du paragraphe 127(9) de la LIR et qu’elle n’avait pas droit au « crédit d’impôt à l’investissement remboursable » prévu au paragraphe 127.1(1) de la LIR.

 

[2]              La seule question en litige est la suivante : est-ce que Bagtech était une SPCC, selon le paragraphe 125(7) de la LIR? Cette définition se lit comme suit :

 

125(7) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

 

[…]

 

« société privée sous contrôle canadien » Société privée qui est une société canadienne, à l’exception des sociétés suivantes :

 

a)         la société contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, par une ou plusieurs personnes non-résidentes, par une ou plusieurs sociétés publiques (sauf une société à capital de risque visée par règlement), par une ou plusieurs sociétés visées à l’alinéa c) ou par une combinaison de ces personnes ou sociétés;

 

b)         si chaque action du capital-actions d’une société appartenant à une personne non-résidente, à une société publique (sauf une société à capital de risque visée par règlement) ou à une société visée à l’alinéa c) appartenait à une personne donnée, la société qui serait contrôlée par cette dernière;

 

c)         la société dont une catégorie d’actions du capital-actions est cotée à une bourse de valeurs désignée;

 

d)         pour l’application du paragraphe (1), des alinéas 87(2)vv) et ww) (compte tenu des modifications apportées à ces alinéas par l’effet de l’alinéa 88(1)e.2)), des définitions de « compte de revenu à taux général », « compte de revenu à taux réduit » et « désignation excessive de dividende déterminé » au paragraphe 89(1) et des paragraphes 89(4) à (6) et (8) à (10) et 249(3.1), la société qui a fait le choix prévu au paragraphe 89(11) et qui ne l’a pas révoqué selon le paragraphe 89(12).

 

 

[3]              L’appelante soutient essentiellement qu’une « personne donnée » ne contrôle pas Bagtech du seul fait qu’elle détient plus de 50 % des actions avec droit de vote, puisqu’elle est liée par la convention unanime des actionnaires (la « CUA ») qui l’empêche d’élire la majorité des administrateurs de Bagtech (voir l’annexe 1). Par ailleurs, l’intimée soutient que pour l’application de l’alinéa b) de la définition de l’expression « société privée sous contrôle canadien » au paragraphe 125(7) de la LIR, l’on ne doit pas tenir compte des conventions entre actionnaires ou des conventions unanimes des actionnaires. Dans l’éventualité où la Cour concluait qu’il faut tenir compte de l’existence d’une convention unanime des actionnaires pour vérifier si le « contrôle » prévu à l’alinéa b) de la définition de l’expression « société privée sous contrôle canadien » est exercé par la « personne donnée », l’intimée soutient que la « personne donnée » avait quand même le contrôle de jure pendant les années pertinentes. En effet, l’intimée soutient que si l’on tient compte des clauses ayant la nature d’une convention unanime des actionnaires, le contrôle de droit n’a pas été retiré des actionnaires non‑résidents qui sont, ensemble, les actionnaires majoritaires, puisque :

 

a)       les clauses ayant la nature d’une convention unanime des actionnaires n’ont pas eu pour effet de retirer le contrôle de jure des actionnaires non-résidents, qui sont majoritaires;

 

b)      la majorité des clauses de la convention unanime des actionnaires prévoient qu’elles seront mises en application par voie d’une résolution ordinaire. Les non-résidents contrôlent donc la prise de décisions quant à ces clauses.

 

[4]              Les parties ont convenu d’une « entente sur les faits, question en litige et documents » (pièce A-1) dont je reproduis ici intégralement la section sur les faits :

 

ENTENTE SUR LES FAITS, QUESTION EN LITIGE ET DOCUMENTS DÉPOSÉS DE CONSENTEMENT

 

 

1.         FAITS PERTINENTS ADMIS PAR LES PARTIES

 

1.1              La société Bioartificial Gel Technologies (BAGTECH) inc. (« Bagtech ») a été constituée le 8 mars 1996, en vertu de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (« LCSA »).

1.2              C’est une société canadienne imposable telle que définie au sens du paragraphe 89(1) de la Loi sur les impôts (Canada) (« LIR »).

1.3              Suite à l’acquisition de technologies brevetées, Bagtech s’est spécialisée dans des technologies médicales de pointes, notamment le développement de plusieurs gammes de pansements humides permettant la cicatrisation accélérée de différents types de plaies.

1.4              Depuis le début de ses opérations et tout au long des années d’imposition 2004 et 2005 se terminant chacune le 31 décembre (« années d’imposition 2004 et 2005 »), Bagtech a effectué des activités de recherche scientifique et de développement expérimental (« RS&DE »).

1.5              Au cours de l’année d’imposition 2004, Bagtech a encouru des dépenses courantes de RS&DE pour un montant de 1 017 722 $ et des dépenses de nature capital de RS&DE pour un montant de 431 517 $.

1.6              Au cours de l’année d’imposition 2005, Bagtech a encouru des dépenses courantes de RS&DE pour un montant de 1 461 189 $ et des dépenses de nature capital de RS&DE pour un montant de 69 641 $.

1.7              Le capital-actions autorisé de Bagtech se compose d’actions de catégorie A, B, C, D et E.

1.8              Seules les actions de catégorie A sont votantes et participantes.

1.9              Les actions de catégorie B et C portent un dividende non cumulatif à un taux maximum de 8% et sont rachetables au montant du capital déclaré.

1.10          Les actions de catégorie D et E portent un dividende non cumulatif à un taux maximum de 8% et sont rachetables au montant déclaré plus une prime équivalant à la différence entre le montant déclaré et la juste valeur marchande des biens reçus par la société lors de l’émission de ces actions.

1.11          Tout au long des années d’imposition 2004 et 2005, seule une action de catégorie D était en circulation et avait été émise, lors de l’incorporation, en faveur de M. Guy Fortier (« Fortier »), résident canadien, en contrepartie de certaines technologies.

1.12          Toutes les autres actions émises et en circulation étaient de catégorie A.

1.13          Lors de la première ronde de financement effectuée en 1998, le Fonds régional de solidarité de l’île de Montréal (Québec, Canada) (« FRSIM ») et le Fonds de Solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.) (Québec, Canada) (« FSTQ ») ont participé à la souscription d’actions de catégorie A de Bagtech.

1.14          Les autres investisseurs étaient un groupe représenté par les fondateurs de Bagtech, et seuls des investisseurs résidents du Canada étaient actionnaires de Bagtech.

1.15          En 1999, deux business angels européens ont souscrit au capital-actions de Bagtech, et en 2000, deux autres sociétés de capital de risque ont souscrit au capital-actions : la SGF Santé Inc. (Québec, Canada) (« SGF ») et Finedix B.V. (Amsterdam, Pays-Bas) (« Finedix »).

1.16          En 2002, les sociétés de capital de risque suivantes ont souscrit au capital-actions de Bagtech : Medco SA (Genève, Suisse) (« Medco »), Schroder & Co. Bank AG (Zurich, Suisse) (« Schroder ») et Gutrafin Limited (Londres, Angleterre) (« Gutrafin »), faisant en sorte que 45,31% des actions de catégorie A en circulation étaient alors détenues par des non-résidents du Canada.

1.17          En 2003, lors d’une ronde de financement additionnel, plusieurs actionnaires ont acquis de nouvelles actions de Bagtech de catégorie A, à savoir la société de capital de risque Auriga Ventures II (Paris, France) (« Auriga »), et deux business angels, soit M. Youri Popowski (Genève, Suisse) (« Popowski ») et Investissements Onami inc. (Québec, Canada) (« Onami »).

1.18          Le 11 septembre 2003, les actionnaires de Bagtech ont signé un document intitulé « convention unanime entre actionnaires » (« CUA ») comportant notamment les clauses suivantes :

« REGLES DE REGIE INTERNE

Article 3.1        Sous réserve des dispositions qui suivent, pendant la durée de cette Convention, les Actionnaires s’engagent à prendre les mesures nécessaires et à utiliser les droits de vote rattachés aux Actions qu’ils détiennent pour élir et maintenir au sein du Conseil d’administration sept (7) Administrateurs.

Article 3.2        En date des présentes, les Actionnaires conviennent que le Conseil d’administration sera composé des représentants désignés par les Actionnaires ci-après indiqués :

                        Groupe A   2 administrateurs (incluant Marie-Pierre Faure)

                        Groupe B   3 administrateurs (dont un désigné conjointement par FSTQ et FRSIM, un désigné par SGF et un autre par Auriga)

                        Groupe C   2 administrateurs (incluant M. André Lamotte) »

1.19          En vertu de la définition présentée à l’article 1.21 de la CUA, le Groupe A se compose des actionnaires suivants : Mme Marie-Pierre Faure (« Faure »), Fortier, M. Richard J. Deckelbaum (« Deckelbaum »), M. Jean Emmanuel Raphael Guetta (« Guetta »), Amaze par le biais de son administrateur délégué, M. Richard Émile Azera (« Amaze »), M. Jean-François Brisson (« Brisson »), Mme Marie-Claude Lévesque (« Lévesque »), Mme Marielle Robert (« Robert »), Popowski et Onami.

1.20          En vertu de la définition présentée à l’article 1.22 de la CUA, le Groupe B se compose des actionnaires suivants : SGF, FSTQ, FRSIM, Finedix et Auriga, dans lequel SGF désigne un administrateur et FSTQ et FRSIM, conjointement, en désignent un deuxième.

1.21          En vertu de la définition présentée à l’article 1.22 de la CUA, le Groupe C se compose des actionnaires suivants : Medco, Gutrafin et Schroder, lequel désigne deux administrateurs, dont M. Collin Bier qui agira à titre de président du conseil d’administration.

1.22          Au 31 décembre 2004, plus de 60% des actions de catégorie A en circulation étaient détenues par des non-résidents du Canada.

1.23          De la période du 1er janvier au 21 juillet 2005, l’actionnariat de Bagtech était le même que celui existant au 31 décembre 2004.

1.24          Le 22 juillet 2005, d’autres investisseurs ont souscrit au capital-actions de Bagtech, soit HSBC (Suisse), Auxitec (France), Ayman (Suisse) et Bagadine (France).

1.25          Suite à la souscription d’actions par ces investisseurs au capital-actions de Bagtech, les clauses 3.1 et 3.2 de la CUA furent modifiées par amendement à la CUA en date du 22 juillet 2005 pour y indiquer que le nombre d’administrateurs de Bagtech passerait de 7 à 8, et que le nombre d’administrateurs nommés par le Groupe C passerait de 2 à 3, dont l’un d’eux serait désigné par Bagadine.

1.26          Au 31 décembre 2005, plus de 70% des actions de catégorie A en circulation étaient détenues par des non-résidents du Canada.

1.27          Lors de la production de la déclaration originale de Bagtech pour ses années d’imposition 2004 et 2005, la société ne fut pas désignée à titre de « société privée sous contrôle canadien » (« SPCC »).

1.28          Le ou vers le 1er juin 2007, en vertu du paragraphe 127.1(1) de la LIR, un formulaire prescrit amendé fut produit pour les années d’imposition 2004 et 2005, afin que le statut de Bagtech soit inscrit à titre de SPCC et « société admissible », que les crédits d’impôt à l’investissement remboursables applicables au taux de 35% lui soit accordé au lieu de 20% initialement réclamé, et qu’un remboursement d’une partie de ce crédit lui soit versé.

1.29          Le 21 octobre 2008, la société Bagtech a fait cession de ses biens et la société Price Waterhouse Coopers inc. fut nommée à titre de syndic à la faillite de Bagtech.

1.30          Le 3 novembre 2008, l’ARC faisait part de sa décision à l’effet que la société Bagtech n’était pas, selon elle, une société privée sous contrôle canadien au cours des années d’imposition 2004 et 2005.

1.31          Le 9 avril 2009, l’ARC a émis un « avis de détermination de perte pour les années d’imposition 2004 et 2005.

 

Analyse et conclusion

 

[5]              Selon l’alinéa b) de la définition d’une SPCC au paragraphe 125(7) de la LIR, une société n’est pas une SPCC dans le cas où, si chaque action de la société appartenant à une personne non‑résidente ou à une société publique appartenait à une « personne donnée », la société serait alors contrôlée par cette dernière.

 

[6]              Comme le précise l’arrêt Sedona Networks Corp. c. La Reine, 2007 CAF 169, l’analyse selon l’alinéa b) doit s’effectuer en deux étapes. D’une part, il faut déterminer quelles sont les personnes non-résidentes et les sociétés publiques, et supposer que leurs actions appartiennent à une « personne donnée ». D’autre part, une fois cette attribution effectuée, il faut déterminer si la société serait contrôlée par cette « personne donnée ». En l’espèce, la preuve a révélé que le 31 décembre 2004, 62,52 % des actions de catégorie A en circulation de Bagtech (les actions de catégorie A étant durant cette année les seules actions avec droit de vote de Bagtech) étaient détenues par des non-résidents du Canada. La preuve a aussi révélé que le 31 décembre 2005, 70,42 % des actions de catégorie A en circulation de Bagtech (les actions de catégorie A étant durant cette année les seules actions avec droit de vote de Bagtech) étaient détenues par des non-résidents du Canada.

 

[7]              La question à laquelle il faut répondre maintenant est la suivante : bien que la « personne donnée » détienne 62,52 % et 70,42 % des actions en circulation de catégorie A de Bagtech le 31 décembre 2004 et le 31 décembre 2005 respectivement, est-ce que la « personne donnée » contrôlait pour autant Bagtech durant ces années? Pour répondre à cette question, nous devons déterminer le sens du mot « contrôle » aux fins de la LIR.

 

[8]              Les tribunaux ont dû se prononcer à plusieurs reprises sur le contrôle, puisqu’il n’en existe aucune définition dans la LIR.

 

[9]              La décision qui fait autorité en matière de contrôle est Buckerfield’s Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1965] 1 R.C.É. 299, dans laquelle le président Jackett a écrit :

 

[TRADUCTION] On pourrait sans doute adopter de nombreuses méthodes pour la définition du mot « contrôle » figurant dans un texte tel que la Loi de l'impôt sur le revenu. Il pourrait par exemple s'agir du contrôle exercé par les « dirigeants », lorsque les dirigeants et le conseil d'administration sont distincts, ou il pourrait s'agir du contrôle exercé par le conseil d'administration. [...] Le mot « contrôle » pourrait peut-être s'entendre du contrôle de fait exercé par un ou plusieurs actionnaires, qu'ils détiennent ou non la majorité des actions. Je suis d'avis cependant que, dans l'article 39 de la Loi de l'impôt sur le revenu, le mot « contrôlées » évoque le droit de contrôle auquel donne lieu le fait de détenir un nombre d'actions tel qu'il confère la majorité des voix à leur détenteur dans l'élection du conseil d'administration. [Je souligne.]  Voir British American Tobacco Co. v. I.R.C., [1943] 1 All E.R. 13, où le lord chancelier, le vicomte Simon, a déclaré, à la p. 15 :

 

Les détenteurs de la majorité des voix dans une société sont ceux qui ont le contrôle réel de ses affaires et de ses destinées.

 

[10]         Cet extrait de la Cour de l’Échiquier fut par la suite cité et approuvé à plusieurs reprises par la Cour suprême du Canada (la « CSC »), notamment dans les arrêts Ministre du Revenu national c. Dworkin Furs (Pembroke) Ltd., [1967] R.C.S. 223, Vina-Rug (Canada) Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1968] R.C.S. 193, R. c. Imperial General Properties Ltd., [1985] 2 R.C.S. 288, et Duha Printers (Western) Ltd. c. La Reine, [1998] 1 R.C.S. 795.

 

[11]         Il ressort clairement de cette jurisprudence qu’aux fins de la LIR, le « contrôle » d’une société s’entend du contrôle de jure et non pas du contrôle de facto. Somme toute, la décision Buckerfield’s nous enseigne que le critère consiste à décider si l’actionnaire majoritaire exerce un « contrôle réel » sur les « affaires et les destinées » de la société, contrôle qui ressort du « fait de détenir un nombre d’actions tel qu’il confère la majorité des voix à leur détenteur dans l’élection du conseil d'administration ».

 

[12]         Une précision importante fut par la suite apportée aux commentaires tenus par le président Jackett dans la décision Buckerfield’s. En effet, la CSC souligne dans l’arrêt Imperial General Properties Ltd., précité, au par. 11, que pour déterminer l'existence du contrôle de jure, « une cour n'est pas restreinte à une interprétation très formaliste et étroite des droits qui, en vertu de la loi, sont liés aux actions d'une société ». En fait, le plus haut tribunal du pays reprend l’essentiel des propos du juge Thurlow dans la décision Donald Applicators Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1969] 2 R.C. de l’É. 43, confirmée par [1971] R.C.S. v., et affirme que « la cour n'est pas astreinte non plus à examiner ces droits dans le seul contexte de leur application immédiate lors d'une assemblée de la société » et que, au contraire, « ces droits doivent s'évaluer selon leur effet "à long terme" » (Imperial General Properties Ltd, précité, au par. 11).

 

[13]         Or, bien que les administrateurs aient généralement, en vertu de la loi qui régit la société, le droit explicite de gérer les activités courantes de la société, l'actionnaire majoritaire exerce indirectement ce contrôle en raison de son droit d'élire le conseil d'administration. Ainsi, c'est sans aucun doute l'actionnaire majoritaire, et non pas les administrateurs eux-mêmes, qui exerce un contrôle « à long terme » sur la société : voir British American Tobacco Co. c. I.R.C., [1943] 1 All E.R. 13, à la p. 15.

 

[14]         Enfin, la dernière décision importante au sujet de la règle du contrôle de jure établie par Buckerfield’s est certes la décision de la CSC dans Duha Printers.

 

[15]         Dans cet arrêt, le fait que le critère pertinent était celui du contrôle de jure ne faisait pas vraiment l'objet de contestation entre les parties. Le différend portait plutôt sur les facteurs qui peuvent être pris en considération pour déterminer s'il y a contrôle de jure.

 

[16]         Le juge Iacobucci amorce son analyse en répétant que « l'application formaliste d'un critère comme celui énoncé dans Buckerfield's, qui ne tient pas compte suffisamment de la raison d'être de ce critère, peut mener à un résultat malheureusement artificiel » (Duha Printers, précité, au par. 37). À cet égard, rappelons que l’objectif central du critère de Buckerfield's est de déterminer où est situé le contrôle véritable de la société.

 

[17]         La CSC vient ensuite à la conclusion qu’en règle générale, « les conventions externes ne doivent pas être prise en considération comme constituant des facteurs déterminants quant au contrôle de jure » : aux par. 51 et 55.

 

[18]         Ce raisonnement de la CSC trouve sa justification dans le principe selon lequel le contrôle de jure demeure le contrôle conféré par la majorité des voix dans une société. Quoique la CSC ait parfois été disposée à examiner des facteurs autres que le registre des actionnaires d’une société, son examen s’est toujours limité aux actes constitutifs et non aux conventions externes. La seule exception à cette règle se trouve dans des affaires comme Ministre du Revenu national c. Consolidated Holding Co., [1974] R.C.S. 419, où la capacité même d'agir était limitée par des documents externes, mais jusqu'à ce jour, cette exception ne s’est manifestée que lorsque les actions étaient détenues par des fiduciaires : aux par. 48 à 50.

 

[19]         De plus, le juge Iacobucci accorde une certaine importance au fait que, « les contribuables comptent beaucoup sur la certitude et la prévisibilité que peut offrir la Loi de l’impôt sur le revenu ». Il est donc tout à fait souhaitable, de l’avis de la CSC, « d'utiliser un critère simple comme celui qui a été appliqué depuis Buckerfield's » : par. 52. « La notion de facto a été rejetée parce qu'elle oblige à vérifier qui exerce le contrôle de fait, ce qui peut conduire à une multitude d'indices susceptibles d'exister outre ces sources » : par. 58.

 

[20]         Par conséquent, le juge Iacobucci écarte la possibilité d’examiner les conventions externes lors de l’analyse du contrôle de jure et précise que : 

 

[…] les conventions entre les actionnaires, les conventions en matière de droits de vote, et ainsi de suite, sont généralement des ententes que les tribunaux n'examinent pas pour vérifier qui exerce le contrôle. À mon avis, cela s'explique par le fait qu'elles créent des obligations contractuelles et non des obligations juridiques ou tenant d'un acte constitutif. (par. 59)

 

[21]         Par la suite, le juge Iacobucci examine la question de savoir si une convention unanime des actionnaires doit être considérée comme étant de nature contractuelle ou comme tenant d’un acte constitutif.

 

[22]         La CSC tranche la question en déterminant qu’une convention unanime des actionnaires est « une création hybride du droit des sociétés, qui est en partie contractuelle et qui tient en partie d’un acte constitutif » (par. 66). Cela étant dit, la CSC prend bien soin de préciser par la suite que l’aspect de la convention unanime des actionnaires qui tient d’un acte constitutif est encore plus puissant que son caractère contractuel : par. 67.

 

[23]         En conséquence, si une convention peut être considérée comme une convention unanime des actionnaires (« CUA ») au sens de la Loi canadienne sur les sociétés par actions (la « L.c.s.a. »), il faut en tenir compte tout comme les actes constitutifs de la société afin de trancher la question du contrôle de jure. Le raisonnement juridique à la base du principe selon lequel une convention unanime des actionnaires peut jouer un rôle vital lors de l’analyse du contrôle de jure est bien résumé par les quelques lignes qui suivent, écrites par le juge Iacobucci :

 

Comme je l'ai affirmé, le but essentiel du critère de Buckerfield's est de déterminer où est situé le contrôle véritable de la société. À mon sens, il est impossible d'affirmer qu'un actionnaire a acquis ce contrôle du seul fait qu'il est en mesure d'élire la majorité des membres du conseil d'administration, alors que ce conseil n'a peut-être même pas réellement le pouvoir de prendre une seule décision importante au nom de la société. Le contrôle de jure d'une société par un actionnaire dépend d'une manière très réelle du contrôle exercé par la majorité des administrateurs dont l'élection est contrôlée par cet actionnaire. Quand un acte constitutif comme une CUA prévoit que le pouvoir légal de gérer la société est conféré à une autre personne qu'au conseil d'administration, le contrôle de jure véritable change nécessairement de mains et le tribunal doit reconnaître cette réalité. (par. 70)

 

[24]         En d’autres mots, le registre des actionnaires devrait être examiné en tenant compte des dispositions légales pertinentes régissant les sociétés (en l’espèce la L.c.s.a.) et des actes constitutifs de la société (auxquels les conventions unanimes des actionnaires doivent être assimilées). Les conventions externes n'ont cependant pas leur place dans cette analyse, puisqu’elles ne sont pertinentes que relativement au contrôle de facto.

 

[25]         Finalement, la CSC conclut en faisant la mise en garde que « le simple fait que les actionnaires d'une société aient conclu une CUA n'a pas automatiquement pour effet de dépouiller du contrôle de jure un actionnaire qui détient la majorité des voix pour l'élection du conseil d'administration ». Il importe d’examiner dans quelle mesure les dispositions d’une convention unanime des actionnaires restreignent ou retirent les pouvoirs des administrateurs : par. 81. « Il est possible de déterminer si le contrôle de jure a été perdu par suite d’une CUA en se demandant si cette CUA laisse à l'actionnaire majoritaire quelque moyen d'exercer un contrôle effectif sur les affaires et les destinées de la société, d'une manière analogue ou équivalente au pouvoir d'élire la majorité des membres du conseil d'administration (tel que prévu par le critère de Buckerfield's) » (par. 82).

 

[26]         Le paragraphe 85 de l’arrêt Duha Printers résume très bien l’état du droit à l’égard de la notion de « contrôle ». Ce paragraphe se lit comme suit :

 

[85]      Il peut être utile, à ce stade, de résumer les principes du droit des sociétés et du droit fiscal étudiés dans le présent pourvoi, étant donné leur importance. Ces principes sont les suivants :

 

(1)        Le paragraphe 111(5) de la Loi de l'impôt sur le revenu vise le contrôle de jure, et non pas le contrôle de facto.

 

(2)        Le critère général du contrôle de jure a été énoncé dans l'arrêt Buckerfield's, précité : il s'agit de décider si l'actionnaire majoritaire exerce un « contrôle effectif » sur « les affaires et les destinées » de la société, contrôle qui ressort de la « propriété d'un nombre d'actions conférant la majorité des voix pour l'élection du conseil d'administration ».

 

(3)        Pour décider s'il y a « contrôle effectif », il faut prendre en considération ce qui suit :

 

a)         la loi qui régit la société;

 

b)         le registre des actionnaires de la société;

 

c)         toute restriction, particulière ou exceptionnelle, imposée soit au pouvoir de l'actionnaire majoritaire de contrôler l'élection du conseil, soit au pouvoir du conseil de gérer l'entreprise et les affaires internes de la société, qui ressort de l'un ou l'autre des documents suivants :

 

(i)         des actes constitutifs de la société;

 

(ii)        d'une convention unanime des actionnaires.

 

(4)        Les documents autres que le registre des actionnaires, les actes constitutifs et les conventions unanimes des actionnaires ne doivent généralement pas être pris en considération à cette fin.

 

(5)        Lorsqu'il existe une restriction du genre visé à l'alinéa 3c), l'actionnaire majoritaire peut tout de même exercer le contrôle de jure, à moins qu'il ne dispose d'aucun moyen d'exercer un « contrôle effectif » sur les affaires et les destinées de la société, d'une manière analogue ou équivalente au critère de Buckerfield's.

 

[27]         Bien que l’arrêt Duha Printers établisse clairement qu’on doit tenir compte d’une convention unanime des actionnaires lors de l’examen du contrôle de jure, le ministre soutient qu’une telle convention ne doit pas avoir d’incidence sur la deuxième étape de l’analyse (c’est‑à‑dire la détermination du contrôle d’une société par la « personne donnée ») aux fins de l’application de l’alinéa b) de la définition d’une SPCC. Le paragraphe 21 de l’interprétation technique 2008–0265902I7 – Canadian‑Controlled Private Corporation résume assez bien l’argument du ministre à cet égard. Ce paragraphe se lit comme suit :

 

21.       Dans la Situation Donnée, comme en général d'ailleurs, nous réitérons notre position à l'effet qu'une CUA n'a aucun impact en ce qui concerne la deuxième étape de l'analyse (i.e. la détermination du contrôle d'une société par la personne hypothétique donnée) aux fins de l'application de l'alinéa b) de la définition de SPCC au paragraphe 125(7). Il nous apparaît toujours que la détermination prévue à la seconde étape de l'analyse est purement arithmétique. La jurisprudence ne contredit nullement cette approche, au contraire, la Cour d'appel fédérale affirme, sans réserve, que la simple possession d'actions par une majorité de non-résidents est suffisante pour conférer le contrôle à ces non-résidents aux fins de l'application de l'alinéa b) de la définition de SPCC au paragraphe 125(7). De toute façon, tel que mentionné dans le Document, la personne hypothétique donnée n'est partie à aucune convention unanime d'actionnaires, ni réputée l'être aux fins de l'application de l'alinéa b) de la définition de SPCC au paragraphe 125(7).

 

ARC, Interprétation technique 2008-0265902I7, “Canadian-Controlled Private Corporation” (6 mai 2008), au par. 21.

 

[28]         À ce moment, j’estime utile de résumer les circonstances dans lesquelles le législateur a ajouté l'alinéa b) à la définition d’une SPCC. Ajouté par L.C. 1998, ch. 19, paragraphe 145(2), cet alinéa va vraisemblablement à l’encontre de la décision de la Cour d’appel fédérale dans Silicon Graphics Ltd. c. La Reine, [2003] 1 C.F. 447, où celle-ci avait décidé que « la simple possession d'une majorité mathématique d'actions par un ensemble d'actionnaires pris au hasard dans une société à grand nombre d'actionnaires ayant certains éléments communs identificateurs (p. ex. le lieu de résidence) mais sans un lien commun ne constitue pas un contrôle de droit ainsi que le terme a été défini par la jurisprudence » (au par. 36). Ces commentaires de la Cour d’appel fédérale s’enregistraient alors dans une analyse du droit applicable avant la venue du nouvel alinéa b) de la définition d’une SPCC.

 

[29]         En ce sens, l'objet de la disposition est par ailleurs clairement énoncé dans les notes techniques y afférentes publiées par le ministre des Finances :

 

Actuellement, une société est une SPCC si elle est une société privée et une société canadienne (ces deux expressions étant définies au paragraphe 89(1) de la Loi) et si elle n'est pas contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, par des sociétés publiques (sauf des sociétés à capital de risque visées par règlement) ou des personnes non-résidentes, ou une combinaison de celles-ci. La modification apportée à la définition a pour effet d'exclure deux autres types de sociétés de la notion de SPCC. Il s'agit, tout d'abord, des sociétés qui, si elles ne sont pas réellement contrôlées par des non-résidents, évitent ce statut du seul fait que leurs actions sont détenues par un grand nombre d'actionnaires. Sont également exclues les sociétés dont les actions sont cotées à une bourse de valeurs à l'étranger.

 

Une société dont les actions avec droit de vote sont réparties entre un grand nombre de personnes n'est pas habituellement considérée comme étant contrôlée par un groupe donné d'actionnaires, à condition que les actionnaires n'agissent pas de concert en vue d'exercer le contrôle. Dans cet ordre d'idées, on pourrait prétendre qu'une société canadienne privée qui appartient à plusieurs non-résidents ou sociétés publiques n'est pas contrôlée par des non-résidents ou des sociétés publiques, et est donc une SPCC. Le nouvel alinéa (b) de la définition de SPCC a pour objet de réfuter cette position. En effet, il prévoit que les actions détenues par les non-résidents et les sociétés publiques -- non seulement les actions de la société en question, mais aussi de l'ensemble des sociétés -- doivent faire l'objet d'une attribution hypothétique à une personne hypothétique. Si pareille attribution donne le contrôle de la société à cette personne, la société n'est pas une SPCC.

 

Ministère des Finances du Canada, Notes explicatives concernant l'impôt sur le revenu (8 décembre 1997), art. 125(7), « société privée sous contrôle canadien ».

 

 

[30]         Donc, il en résulte concrètement que le texte de l’alinéa b) de la définition d’une SPCC crée une fiction légale. Or, ce type d’altération de la réalité fit l’objet d’un examen complet par la CSC dans l’affaire R. c. Verrette, [1978] 2 R.S.C. 838. S’exprimant au nom de la Cour, le juge Beetz qualifiait alors ce genre de fiction juridique de « disposition déterminative » et en précisait  ainsi la portée :

Une disposition déterminative est une fiction légale; elle reconnaît implicitement qu’une chose n’est pas ce qu’elle est censée être, mais décrète qu’à des fins particulières, elle sera considérée comme étant ce qu’elle n’est pas ou ne semble pas être. (p. 845)

 

[31]         Le but et l'application d'une disposition déterminative ont par la suite été examinés en détail par la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Procureur général du Canada c. Scarola, 2003 CAF 157, [2003] 4 C.F. 645, où le juge Létourneau étaya en partie ses explications sur la doctrine française suivante :

 

La fiction est un procédé qui, on l'a assez souvent signalée, appartient à la pragmatique du droit. Elle consiste d'abord à travestir les faits, à les déclarer autres qu'ils ne sont vraiment, et à tirer de cette adultération même et de cette fausse supposition les conséquences de droit qui s'attacheraient à la vérité que l'on feint, si celle-ci existait sous les dehors qu'on lui prête. (par.19)

 

[32]         Dans l’arrêt La Survivance c. La Reine, 2006 CAF 129, au par. 55, la Cour a affirmé ceci : « Dans la mesure où [une fiction légale] a pour effet de transformer la réalité, sa portée doit être limitée à ce qui est clairement exprimé. Une disposition déterminative ne peut pas autrement modifier la situation réelle qui prévaut. »

 

[33]         Ces commentaires s’inscrivent d’ailleurs dans la même ligne que ceux de la CSC dans l’arrêt Shell Canada Ltée c. La Reine, [1999] 3 R.S.C. 622, où la juge McLachlin fit cette remarque, maintes fois reprise depuis :

La Loi est un texte législatif complexe au moyen duquel le législateur tente d'établir un équilibre entre d'innombrables principes. La jurisprudence de notre Cour est constante : les tribunaux doivent par conséquent faire preuve de prudence lorsqu'il s'agit d'attribuer au législateur, à l'égard d'une disposition claire de la Loi, une intention non explicite [...]. (par. 43)

 

[34]         Dès lors, je suis d’avis que l’alinéa b) de la définition d’une SPCC, malgré ses particularités, doit être interprété dans son contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical des mots qui s’harmonise avec l'esprit de la Loi, son objet et l'intention du législateur : voir Entreprise Ludco Ltée c. La Reine, 2001 CSC 62, [2001] 2 R.S.C. 1082, au par. 36.

 

[35]         En conséquence, les effets juridiques de cette fiction légale qui se greffent à la vérité que l’on feint font en sorte que la « personne donnée » à laquelle nous faisons référence ici est réputée avoir les mêmes droits et être liée par les mêmes obligations que les non-résidents propriétaires desdites actions de la société.

 

[36]         Or, le paragraphe 146(3) de la L.c.s.a. précise que :

L’acquéreur ou le cessionnaire des actions assujetties à une convention unanime des actionnaires est réputé être partie à celle-ci.

 

[37]         Ainsi, considérant tout ce qui vient d’être soulevé, je trouve très difficile de défendre l’hypothèse selon laquelle la « personne donnée » à laquelle fait référence l’alinéa b) de la définition d’une SPCC ne peut, lors de l’examen du contrôle de jure en tenant compte de l’altération des faits imposée par la disposition, être réputée partie aux conventions unanimes des actionnaires alors en vigueur.

 

[38]         Le ministre prétend que le fait de tenir compte d’une convention unanime des actionnaires en vigueur lors de l’examen du critère de l’actionnaire hypothétique pourrait avoir comme effet de fausser l’analyse du contrôle de la société visée puisque, lors de la rédaction de la convention unanime des actionnaires en question, les actionnaires de la société ne pouvaient certes pas prévoir l’adhésion éventuelle de l’actionnaire fictif prévu par la disposition. De ce fait, afin d’éviter des résultats inusités ou indésirables, le ministre en arrive à la conclusion qu’il est préférable de ne pas réputer l’actionnaire hypothétique partie aux conventions unanimes des actionnaires alors en vigueur. Celui-ci explique :

 

[TRADUCTION]

 

Lorsque des résidents canadiens ne détiennent pas assez d'actions pour élire la majorité des administrateurs, l'objet et l'effet de la disposition déterminative à l'alinéa b) de la définition du terme « SPCC » sont que la personne donnée est réputée détenir le contrôle réel des affaires et des destinées de la société d'une façon semblable au pouvoir d'élire la majorité des administrateurs. Il en est ainsi parce que la personne donnée n'est pas partie à la convention unanime des actionnaires et n'est pas réputée en être partie. À notre avis, il serait contraire au libellé et à l'esprit de la disposition de supposer que le contrôle fictif découlant de l'application de l'alinéa b) de la définition puisse être amoindri par une entente qui retire des pouvoirs des administrateurs pour les attribuer aux actionnaires, alors que la personne donnée ne serait jamais un des actionnaires.

 

Voir : Andrew W. Dunn, Ron Durand, Phil Jolie, et Mark Symes, “Canada Revenue Agency Round Table,” Report of the Proceedings of the Sixty‑First Tax Conference, 2009 Conference Report (Toronto; Fondation canadienne de fiscalité, 2009), aux pages 3:14-3:15.

 

[39]         La réponse est selon moi incontournable. Le résultat semble incongru seulement si l'on choisit de ne pas tenir compte de la fiction. Il ne l'est pas si on donne à la fiction l'effet de la vérité.

 

[40]         À mon humble avis, il faut simplement imaginer une situation où l’ensemble des actionnaires qui sont des non-résidents ou qui sont des sociétés publiques décidaient, pour une raison quelconque, de vendre toutes leurs actions de la société à un même acquéreur. Il est indiscutable que dans un tel cas, l’acquéreur des actions serait partie à toute convention unanime des actionnaires alors en vigueur.

 

[41]         Je ne pourrais être plus d’accord avec la Cour d’appel fédérale lorsqu’elle déclare ceci : « L'on risquerait de créer une incertitude intolérable si les tribunaux pouvaient écarter une disposition déterminative d'application générale au seul motif que le résultat qu'elle produit dans un cas particulier leur semble indésirable. Le législateur est bien conscient de l'effet des présomptions qu'il édicte, et c'est à lui qu'il revient d'en délimiter la portée » (La Survivance, précité, au par. 79).

 

[42]         Dans l’espèce, l’alinéa b) de la définition d’une SPCC est une disposition d’application générale et le rôle des tribunaux consiste à y donner effet. 

 

[43]         En conclusion, je suis d’avis que l’actionnaire hypothétique visé à l’alinéa b) de la définition de « société privée sous contrôle canadien » figurant au paragraphe 125(7) de la LIR est lié par la CUA de Bagtech intervenue en 2003 et, par la suite, par les modifications apportées en 2005.

 

[44]         Maintenant, il convient de répondre à la question suivante : est-ce que les clauses d’une CUA régissant l’élection des administrateurs d’une société doivent être prises en compte dans la détermination du contrôle de jure d’une société?

 

[45]         Avant de répondre à cette question, il convient, à mon avis, de bien comprendre la nature d’une convention unanime des actionnaires aux fins de la L.c.s.a. Le paragraphe 146(1) de la L.c.s.a. se lit comme suit :

 

Est valide, si elle est par ailleurs licite, la convention écrite conclue par tous les actionnaires d’une société soit entre eux, soit avec des tiers, qui restreint, en tout ou en partie, les pouvoirs des administrateurs de gérer les activités commerciales et les affaires internes de la société ou d’en surveiller la gestion.

 

[46]         Il semble ressortir du paragraphe 146(1) de la L.c.s.a. quatre conditions afin qu’une convention puisse être qualifiée de convention unanime des actionnaires. D’abord, la convention doit, bien évidemment, être licite et conforme aux exigences générales de validité des contrats. Ensuite, la convention doit être écrite, et il importe de préciser que cette exigence constitue bel et bien une condition de validité et non uniquement une question de preuve. Elle doit par ailleurs être conclue par tous les actionnaires d’une société, soit entre eux, soit avec des tiers, et, enfin, elle doit restreindre en tout ou en partie les pouvoirs des administrateurs de gérer les activités commerciales et les affaires internes de la société ou d’en surveiller la gestion. Une convention signée par tous les actionnaires qui ne fait qu’augmenter, conformément au paragraphe 6(3) de la L.c.s.a., le nombre de voix nécessaires à l’adoption de certaines mesures par les actionnaires peut, exceptionnellement, être une convention unanime des actionnaires, et ce, même si elle ne restreint ou ne retire aucun pouvoir des administrateurs. Il s’agit cependant de la seule exception tant selon la loi québécoise que fédérale : voir Paul MARTEL, Entreprises et sociétés,  Collection de droit 2011‑2012, École du Barreau du Québec, vol. 9, 2011, p. 41 et ss.

 

[47]         Ces quatre conditions pour qu’une convention unanime des actionnaires soit valide sont d’ailleurs reprises par la CSC dans sa seule décision qui examine en détail les conventions unanimes des actionnaires, soit l’arrêt Duha Printers, précité.

[47]

[48]         La L.c.s.a., la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario et le Code civil du Québec prévoient tous, par exemple, une exception explicite à l’interdiction d’entraver le pouvoir des administrateurs. Ainsi donc, les diverses lois canadiennes sur les sociétés par actions prévoient la validité des conventions unanimes des actionnaires, et ce, malgré le principe en common law selon lequel les actionnaires, même à l’unanimité, ne peuvent entraver ou l’empêcher d’exercer son droit et son devoir légaux de gérer les activités commerciales et les affaires internes de la société et d’en surveiller la gestion. (L’interdiction d’entraver les pouvoirs des administrateurs semble trouver son origine dans la décision Automatic Self Cleansing Filter Syndicate Co. Ltd. c. Cuninghame, [1906] 2 Ch. 34 (C.A.). Ce principe a par la suite été repris dans les décisions Motherwell c. Schoof, [1949] 4 D.L.R. 812 (C.S. Alb.), et Atlas Development Co. c. Calof (1963), 41 W.W.R. 575 (B.R. Man.).)

 

[49]         En fait, avant l’avènement des conventions unanimes des actionnaires, la capacité des actionnaires de contrôler la société se limitait au pouvoir d’élire et de révoquer les administrateurs. La venue des conventions unanimes des actionnaires en droit des sociétés a fondamentalement modifié la situation en établissant un mécanisme par lequel les actionnaires peuvent dépouiller les administrateurs de la totalité ou d’une partie de leur pouvoir de gestion.

 

[50]         Qui plus est, la convention unanime des actionnaires ne fait pas que limiter les pouvoirs des administrateurs. Elle a un aspect positif en ce qu’elle prévoit que les actionnaires peuvent exercer les pouvoirs qu’ils ont retirés des administrateurs.

 

[51]         Les conventions unanimes des actionnaires ouvrent donc par le fait même une brèche aux actionnaires afin que ceux-ci puissent déroger considérablement au droit des sociétés conventionnel; elles permettent d’en assouplir certains des vieux principes plutôt stricts et arides.

 

[52]         En outre, eu égard à la reconnaissance légale des CUA, la CSC, tel que je l’ai mentionné un peu plus haut, a fait la lumière sur bien des aspects d’une convention unanime des actionnaires dans son arrêt Duha Printers, précité. S’exprimant au nom de la CSC, le juge Iacobucci précise notamment qu’une convention unanime des actionnaires est « une création hybride du droit des sociétés, qui est en partie contractuelle et qui tient en partie d’un acte constitutif » (Duha Printers, précité, par. 66).

 

[53]         Cela étant dit, la CSC prend soin de préciser par la suite que « l’aspect de la CUA qui tient d’un acte constitutif est encore plus puissant que son caractère contractuel » : par. 67 et 68.

 

[54]         Un autre élément important de la convention unanime des actionnaires est évidemment qu’elle peut lier les actionnaires futurs. En fait, l’acquéreur ou le cessionnaire d’actions est réputé selon une présomption absolue, être partie à la convention unanime des actionnaires : voir le paragraphe 146(3) de la L.c.s.a. Cependant, si l’acquéreur ou le cessionnaire n’est pas avisé de l’existence de la convention unanime des actionnaires par une mention sur le certificat d’actions ou autrement, il peut, dans les trente jours après avoir pris connaissance de son existence, annuler l’opération par laquelle il est devenu acquéreur ou cessionnaire : voir le paragraphe 146(4) de la L.c.s.a.

 

[55]         Enfin, il me semble primordial de terminer mon tour d’horizon sur la convention unanime des actionnaires en insistant sur le fait que la nature même de la convention unanime des actionnaires est de restreindre le pouvoir des administrateurs et d’accroître celui des actionnaires dans la gestion de la société : voir Paul MARTEL, Entreprises et sociétés, Collection de droit 2011-2012, École du Barreau du Québec, vol. 9, 2011, p. 41 et ss.; Normand RATTI, La convention unanime des actionnaires, (1986) C.P. du N. 93.  La CSC ne pouvait être plus claire à ce sujet en avançant que « contrairement aux conventions “ordinaires” des actionnaires, qui ne peuvent entraver l’exercice des pouvoirs des administrateurs, une CUA peut et doit avoir cet effet » (Duha Printers, précité, au par. 71). En fin de compte, l’effet d’une convention unanime des actionnaires restreignant le pouvoir des administrateurs doit être de substituer les actionnaires aux administrateurs quant à leurs droits, pouvoirs et responsabilités, et ce, dans la mesure de la restriction : voir le paragraphe 146(5) de la L.c.s.a. Au lieu de destituer les administrateurs, la convention unanime des actionnaires les dégage simplement de leurs pouvoirs, de leurs droits et de leurs responsabilités connexes. D’ailleurs, la L.c.s.a. prévoit que les administrateurs gèrent les activités de la société « sous réserve de toute convention unanime des actionnaires » (voir le paragraphe 102(1) de la L.c.s.a), et elle oblige expressément les administrateurs et les dirigeants à se conformer aux dispositions d’une telle convention : voir le paragraphe 122(2) et l’article 247 de L.c.s.a.

 

[56]         Il convient maintenant de répondre à la question suivante : est-ce qu’une convention unanime des actionnaires peut comprendre des clauses autres que celles relatives à la gestion d’une société? Si oui, est-ce que seules les clauses restreignant le pouvoir des administrateurs sont visées par les dispositions relatives à la convention unanime des actionnaires de la loi sur les sociétés applicable? Autrement dit, est-ce que seules les clauses restreignant le pouvoir des administrateurs créent la présomption d’opposabilité envers les nouveaux actionnaires?

 

[57]         Bien que l’entente soit décrite comme étant une convention unanime des actionnaires, il est de mise de garder à l’esprit qu’une convention signée par tous les actionnaires, mais qui n’a pas pour effet de restreindre le pouvoir des administrateurs, ne saurait être considérée comme une convention unanime des actionnaires au sens de la L.c.s.a. et ne sera pas opposable envers les futurs actionnaires : voir Paul MARTEL, La société par actions au Québec, vol. 1, Les aspects juridiques, Montréal, Wilson et Lafleur, 2011, par. 27-34.

 

[58]         Inversement, une convention conclue entre tous les actionnaires d’une société qui restreint le pouvoir des administrateurs peut être qualifiée de convention unanime des actionnaires, et ce, en dépit du fait qu’elle porte une désignation différente : voir Paul MARTEL, La société par actions au Québec, précité, par. 27‑34, Alteco c. La Reine, [1993] A.C.I. no 213 (QL), [1993] 2 C.T.C. 2087, au par. 35.

 

[59]         Qui plus est, la question de savoir si une convention constitue une convention unanime des actionnaires alors que seules certaines de ses dispositions restreignent les pouvoirs des administrateurs demeure litigieuse : voir Nathalie BEAUREGARD et François AUGER, Les conventions entre actionnaires, Journées d’études fiscales, (Montréal, Association canadienne d’études fiscales, 2010), p. 12.

 

[60]         À cet égard, le juge Iacobucci, bien avant d’être nommé juge, s’exprimait ainsi :

 

The statutory provision relating to unanimous shareholder agreements are found in ss. 2(1) and 146 of the CBCA, and ss. 1(1), 45 and 108 of the OBCA.  Note that the distinguishing feature of a “unanimous shareholder agreement” in the statutes is that it “restricts, in whole or in part, the powers of the directors to manage [or, in the OBCA, to supervise the management of] the business and affairs of the corporation”.  Suppose an agreement between all the shareholders of the corporation restricts the authority of the directors, but also contains other agreements, relating to such matters as buy-sell arrangements, requisite shareholders votes on the undertaking of fundamental changes, shareholder voting agreements, etc.  Is the whole agreement a “unanimous shareholder agreement”, or only that part that relates to the authority of the directors?  Do the words “in whole or in part” in CBCA s. 146(2) and OBCA s. 108(3) refer to the “written agreement”, or do they refer to the restriction of the powers of directors?  The distinction may be important.  For example, a transferee of shares with notice of a common law voting agreement is not bound by the agreement (because of the absence of privity of contract); see Greenhalgh v. Mallard, [1943] 2 All E.R. 234 (C.A.).  However, a transferee of shares subject to a u.s.a. is bound by the u.s.a.; see CBCA s. 146(4), OBCA s. 108(4) (although note the limitation contained in CBCA s. 49(8), OBCA s. 56(3)).

 

Voir : Frank IACOBUCCI, Canadian Corporation Law : Some Recent Shareholder Developments, The Cambridge Lecture 1981, compilé par N. Eastham et B. Krivy, 1982, p. 88, aux pages 92 à 95.

 

[61]         Plusieurs auteurs, dont Paul Martel pour ne nommer que lui, soutiennent néanmoins qu’une CUA peut comprendre des clauses autres que celles relatives à la gestion de la société mais que, toutefois, « seules les clauses restreignant le pouvoir des administrateurs sont visées par les dispositions de la loi relatives à la convention unanime, et la présomption qu’elles créent quant aux nouveaux actionnaires ne s’applique qu’à ces clauses, et non au reste de la convention » (voir Paul MARTEL, Les conventions entre actionnaires, Montréal, Wilson et Lafleur, 2007, pp. 340-341). Paul Martel avance d’ailleurs qu’il serait préférable d’insérer les deux types de clauses dans des conventions distinctes lorsqu’il écrit :

 

D’une manière générale, on devrait traiter en pratique les clauses d’administration comme des pommes et les autres comme des oranges, et en faire deux documents séparés.  Il est en effet difficile, surtout au niveau provincial, de faire adopter aux clauses d’achat-vente la forme d’une restriction au pouvoir des administrateurs, et c’est quasi impossible pour les clauses de vote et de société.  Les clauses d’administration, « convention unanime » au sens de la loi, lieront automatiquement les nouveaux actionnaires (attention aux inscriptions sur les certificats d’actions!), tandis que les autres lieront ceux qui y interviendront expressément, avec l’autorisation des signataires.

 

Voir : Paul MARTEL, Les conventions entre actionnaires, précité, à la page 341.

 

[62]         Daniel Lafortune est aussi de cet avis et écrit :

 

Ceci étant, est-ce que le tiers devenant actionnaire est lié par la convention d’actionnaires? En cette matière, une distinction s’impose. Est-on face à des dispositions de la nature de la convention unanime ou à des dispositions de toute autre nature?

 

Pour les dispositions qui ne sont pas de la nature de la convention unanime, la règle est simple. Par application du principe de l’effet relatif des contrats, le tiers n’est pas lié par la convention, à moins d’y consentir.

 

Voir : Daniel LAFORTUNE, La convention d’actionnaires (2002), 36 R.J.T. 197, à la page 217.

 

[63]         La Cour supérieure du Québec semble également d’avis qu’une convention unanime des actionnaires est divisible et résume d’ailleurs très bien cette approche dans l’arrêt Leblanc c. Fertek inc., REJB 2000‑20884, [2000] J.Q. no 4045 (QL). Dans cette décision, le juge Dalphond traite de façon différente les clauses de la nature d’une convention unanime des actionnaires qui apparaissent dans une simple convention entre actionnaires :

 

49        La convention intervenue entre les actionnaires portant date du 31 janvier 1996 a, tel qu'indiqué dans son cinquième « Attendu », un double objectif : consigner l'accord des actionnaires quant à, d'une part, la gestion de la société et, d'autre part, la détention et le transfert de leurs actions.

 

50        Le premier volet constitue une convention unanime d'actionnaires au sens de l'art. 146(2) de la L.C.S.P.A., puisqu'il s'agit d'une convention écrite, signée par tous les actionnaires et relative à la gestion des affaires tant commerciales qu'internes de la société.

 

51        Une convention unanime d'actionnaires ou une déclaration de l'actionnaire unique au même effet, a essentiellement pour objet de restreindre les pouvoirs des administrateurs de la société, et non la détention des actions. C'est d'ailleurs parce qu'elle a cet objet qu'une telle convention peut être faite par un actionnaire unique comme l'indique l'art. 146(3) de la L.C.S.P.A. Les administrateurs et dirigeants de la société, dont Tassé, sont tenus de s'y conformer (art. 122(2) de la L.C.S.P.A.).

 

52        Le deuxième volet de cette convention traite de questions reliées à la propriété des actions et non à la gestion de la société. Cette catégorie d'entente n'a pas à être agréée par tous les actionnaires. Ainsi, on en retrouve entre des actionnaires représentant uniquement une majorité, régissant par exemple leur droit de vote lors des assemblées annuelles ou encore leur conférant des droits de premier refus advenant la vente d'actions. La validité d'une telle entente est reconnue depuis longtemps (Bergeron c. Ringuet, [1960] R.C.S. 672, [1958] B.R. 222) et est régie par le droit civil des contrats, à moins de dispositions particulières dans des lois s'appliquant à la société, telle la L.C.S.P.A. ou la Loi sur les valeurs mobilières. Comme il s'agit d'un contrat, il faut au moins deux parties, car on ne saurait contracter avec soi-même.

 

53        En résumé, il ne faut pas confondre les deux volets de la convention intervenue entre les actionnaires en janvier 1996, même s'ils se retrouvent au sein d'un même document. (aux par. 49 à 53)

 

[64]         Par ailleurs, d’autres auteurs estiment qu’une convention unanime des actionnaires peut traiter de sujets incidents ne touchant pas directement la gestion interne de la société. Kevin P. McGuinness a écrit :

 

12.209       In addition, provisions are scattered throughout both the OBCA and the CBCA indicating various subjects that may be dealt with in a USA, aside from the general authority to restrict the power of the directors.

[…]

 

12.212       […] the question is sometimes raised as to whether a unanimous agreement may deal with matters outside the management of the corporation.  […] it is doubtful that the inclusion of any such collateral provisions would adversely affect the validity of a unanimous shareholder agreement or its status as such.  It has always been open to the shareholders to regulate their own relationship.

 

Voir Kevin P. McGUINNESS, Canadian Business Corporations Law, 2e éd., Markham, LexisNexis, 2007, pages 1215 à 1218

 

[65]         Après avoir souligné que, de son avis, une convention unanime des actionnaires peut comprendre diverses dispositions incidentes n’ayant pas pour objet de restreindre les pouvoirs des administrateurs sans menacer la validité de la convention, M. McGuinness énumère certaines questions incidentes pouvant être abordées dans une convention unanime des actionnaires, notamment l’élection des administrateurs (pages 1215‑1216).

 

[66]         La Cour du Banc de la Reine de l’Alberta appuie également, dans une certaine mesure, cette position dans sa décision Wood c. Wood, [2004] A.J. no 1230 (QL), 2004 ABQB 775, alors qu’elle reconnaît expressément la validité d’une clause dans une convention unanime des actionnaires portant sur l’élection du conseil d’administration :

 

8          The USA provided that the directors of the company would be Mr. Wood, Jennifer Wood and Mrs. Wood so long as each remained a shareholder. Two directors would constitute a quorum. If either Mr. Wood or Jennifer Wood ceased to be a director, the other would be "exclusively entitled to appoint a replacement director". If Mrs. Wood should cease to be a director, she would not be replaced. (au par. 8)

 

[67]         Le juge Iacobucci a fait une observation fort intéressante avant d’être nommé juge : voir Frank IACOBUCCI, Canadian Corporation Law : Some Recent Shareholder Developments, op. cit. En fait, il commence en nous rappelant simplement que la convention unanime des actionnaires est apparue en droit des sociétés au Canada à l’article 146 de la L.c.s.a. et que, par la suite, ce concept fut adopté par la majorité des lois sur les sociétés par actions notamment à l’article 146 de la loi de l’Alberta intitulée Alberta Business Corporations Act (Loi sur les sociétés par actions), RSA 2000, c. B‑9.

 

[68]         Le juge Iacobucci soulève le fait que l’article 146  de la loi albertaine semble élargir la portée de la CUA au‑delà de ce que prévoyait la L.c.s.a. Bien que l’objet principal d’une CUA, du moins selon la loi fédérale, soit de restreindre le pouvoir des administrateurs, l’article 146 de la loi albertaine, qui apparaît à l’annexe 2, semble bien avoir élargi sa portée. En bref, selon l’article 146 de la loi albertaine, le retrait des pouvoirs des administrateurs pour les attribuer aux actionnaires n’est qu’un des objets possibles de la CUA : voir l’alinéa 146(1)c). Cet article prévoit entre autre qu’une CUA peut prévoir la façon d’élire les administrateurs : voir l’alinéa 146(1)b). Après avoir fait le survol de la question, le juge Iacobucci fait les commentaires suivants :

 

The new Alberta Business Corporations Act adopts and extends the u.s.a. concept [section 146]. After acknowledging that the primary approach of the CBCA u.s.a. provisions reflected a desire to have shareholders rather than directors manage a closely-held company, the designers of the Alberta statute felt that the u.s.a. should be expanded in scope to make the device even more useful and to clarify some of the problems which were felt to be present in the CBCA provisions.

 

With respect to the expanded scope of the u.s.a., the Alberta section allows the entrenchment of any provision concerning the internal affairs and organization of the corporation. The Alberta definition of a u.s.a. includes an agreement which does any one of the following:

 

(1)        regulates the rights and liabilities of shareholders, as shareholders, among themselves or between themselves and any other party to the agreement;

 

(2)        regulates the election of directors;

 

(3)        provides for the management of the business and affairs of the corporation, including the restriction or abrogation, in whole or in part, of the powers of the directors;

 

(4)        includes any other matter that may be contained in a u.s.a. pursuant to any of other provision of the Alberta Business Corporations Act.

 

Voir : Frank IACOBUCCI, Canadian Corporation Law : Some Recent Shareholder Developments, op. cit., aux pages 92 à 95.

 

[69]         À la lecture de l’article 146 de la loi albertaine, il faut conclure que le législateur albertain a voulu élargir la portée d’une convention unanime des actionnaires. La disposition prévoit explicitement qu’une convention unanime des actionnaires peut comprendre plusieurs éléments autres que le retrait des pouvoirs du conseil d’administration : voir le paragraphe 146(1). En outre, la loi albertaine indique expressément qu’une convention unanime des actionnaires lie les actionnaires futurs, même si elle comprend des dispositions autres que celles qui limitent le pouvoir de gestion et de surveillance des administrateurs : voir les paragraphes 146(2) et (3).

 

[70]         Nous pouvons tirer quelques conclusions intéressantes de cet examen comparé des lois fédérale et albertaine.

 

[71]         D’abord, si la convention unanime des actionnaires, introduite par la L.c.s.a. pouvait d’emblée comprendre des dispositions autres que celles qui restreignent le pouvoir des administrateurs, pourquoi l’Alberta a‑t‑elle ensuite jugé bon de modifier considérablement le libellé de la L.c.s.a.? D’autres ressorts comme le Québec et le Manitoba se contentent pourtant de reprendre l’essentiel de l’article 146 de la L.c.s.a. (voir la Loi sur les sociétés par actions, LRQ, c. S‑31.1, article 213 et la Loi sur les corporations, C.P.L.M., c. C225, paragraphe 140(2)). Pourquoi un législateur aurait-il pris le temps de préciser dans sa loi sur les sociétés par actions qu’une convention unanime des actionnaires peut faire davantage que restreindre en tout ou en partie les pouvoirs du conseil d’administration si la L.c.s.a. le permettait déjà?

[71]

[72]         Ensuite, pourquoi le législateur fédéral n’a-t-il pas explicité, d’une manière semblable à l’Alberta, qu’une convention unanime des actionnaires peut comprendre des dispositions autres que celles retirant les pouvoirs de gestion et de surveillance des administrateurs? Il aurait pourtant été aisé de le faire, si tel avait été son intention.

 

[73]         Dans un autre ordre d’idées, mentionnons brièvement que certains estiment que si l’on tentait de tirer profit des avantages des conventions unanimes des actionnaires en y insérant des restrictions mineures aux pouvoirs des administrateurs simplement pour satisfaire à ce critère, le tribunal pourrait déclarer ces restrictions insuffisantes et refuser de qualifier le document de convention unanime des actionnaires : voir Nathalie BEAUREGARD et François AUGER, Les conventions entre actionnaires, op. cit., page 12. Je tiens immédiatement à souligner que je suis d’avis qu’il faut réfuter cette thèse.

 

[74]         Il ressort de cette analyse que la question de savoir si des conventions unanimes des actionnaires ne peuvent comprendre que des clauses restreignant le pouvoir des administrateurs demeure litigieuse.

 

[75]         Il convient maintenant de se poser la question suivante : lors de l’examen du contrôle de jure, doit-on tenir compte des clauses limitant le droit de l’actionnaire majoritaire d’élire les administrateurs d’une société constituée en vertu de la L.c.s.a. si ces clauses se retrouvent dans une convention unanime des actionnaires qui restreint par ailleurs le pouvoir des administrateurs?

 

[76]         Selon une école de pensée, il convient, lors de l’examen du contrôle de jure, d’examiner une convention unanime des actionnaires comme étant un tout, notamment en ce qui a trait aux clauses qui ne font que restreindre le pouvoir des actionnaires majoritaires d’élire les administrateurs. En revoyant explicitement à l’arrêt Duha Printers, les auteurs Nathalie Beauregard et François Auger indiquent notamment ce qui suit :

 

Par conséquent, une convention unanime entre actionnaires, dont les clauses restreindraient la faculté de l’actionnaire majoritaire à élire les membres du conseil d’administration ou encore qui entraveraient de façon substantielle le pouvoir des administrateurs de gérer la société, pourra avoir des répercussions sur le contrôle de jure de la société. Ce type de clauses devra donc faire l’objet d’une étude minutieuse au moment de la conclusion de la convention unanime des actionnaires.

 

Voir : Nathalie BEAUREGARD et François AUGER, Les conventions entre actionnaires, précité, p. 18

 

[77]         De façon un peu plus nuancée, d’autres auteurs affirment que, lors de l’examen du contrôle de jure d’une société, bien qu’il puisse sembler découler de l’arrêt Duha Printers que la convention unanime des actionnaires doive être prise comme indivisible, seules les dispositions restreignant concrètement les pouvoirs des administrateurs doivent être prises en considération :

It may seems strange that the restriction of the powers of directors is the feature that permits other unrelated provisions of the agreement, namely, those dealing with the election of the directors, to be taken into account in determining de jure control, especially since the very restriction of the directors' powers might make one wonder why the ability to elect them should continue to be the litmus test for “effective control”.

 

Voir : Robert COUZIN, Some Reflections on Corporate Control, 2005, vol. 53, Can. Tax. J., 305, p. 318

 

[78]         Cette ligne de pensée, ou du moins la critique qu’elle fait des conclusions de la CSC, semble davantage tenir compte de certains principes fondamentaux du droit des sociétés et converge dans une certaine mesure avec la thèse défendue par l’auteur Paul Martel, selon qui une convention unanime des actionnaires peut porter sur d’autres sujets que la gestion de la société; toutefois, « seules les clauses restreignant le pouvoir des administrateurs sont visées par les dispositions de la loi relatives à la convention unanime, et la présomption qu’elles créent quant aux nouveaux actionnaires ne s’applique qu’à ces clauses, et non au reste de la convention » (Paul MARTEL, Les conventions entre actionnaires, op. cit., p. 340‑341.).

 

[79]         Qui plus est, rappelons que la Cour supérieure du Québec a déjà clairement précisé qu’une convention unanime des actionnaires est divisible; elle résume d’ailleurs très bien cette approche dans la décision Leblanc c. Fertek inc., précité. Dans cette affaire, où l’on demandait une injonction fondée sur l’article 247 de la L.c.s.a. en raison de l’inobservation d’une convention unanime des actionnaires, le juge Dalphond a traité de façon différente les clauses de la nature d’une convention unanime des actionnaires qui apparaissaient dans une simple convention entre actionnaires. Soulignons cependant que la cause portait sur le droit des sociétés et non sur l’application de la décision Duha Printers lors de l’examen du contrôle de jure.

 

[80]         Pour ma part, je me range à la fois derrière l’interprétation de l’arrêt Duha Printers proposée par l’auteur Robert Couzin et la critique qu’il formule : voir Robert COUZIN, Some Reflections on Corporate Control, précité, aux pages 317 à 320.

 

[81]         Toutefois, un examen attentif du paragraphe 85 de l’arrêt Duha Printers m’amène à conclure qu’il faut tenir compte de toute restriction au pouvoir de l’actionnaire majoritaire d’élire les administrateurs qui apparaît dans l’acte constitutif de la société ou dans une convention unanime des actionnaires lors de l’examen du contrôle de jure.

 

[82]         Je conviens qu’il s’agit d’un résultat inusité. Une restriction quant à l’élection des administrateurs ne sera pas pertinente, à l’analyse du contrôle de jure si elle apparaît dans une entente de vote, alors que la même restriction sera pertinente si elle est dans une convention unanime des actionnaires. Ceci étant dit, nous n’avons d’autre choix que de suivre les arrêts de la CSC, même s’ils peuvent nous paraître illogiques.

 

[83]         Il aurait été aisé à la CSC d’écrire que pour décider s'il y a « contrôle réel », il faut prendre en considération, d’une part, toute restriction au pouvoir de l'actionnaire majoritaire d’élire les administrateurs qui ressort de l’acte constitutif de la société et, d’autre part, toute restriction au pouvoir des administrateurs de gérer l'entreprise et les affaires internes de la société qui ressort d’une convention unanime des actionnaires.

 

[84]         Cependant, la CSC affirme plutôt que l’on doit tenir compte de l’une ou l’autre de ces restrictions dans l’un ou l’autre de ces documents.

 

[85]         Je suis donc d’avis qu’en règle générale, il faut tenir compte d’une clause dans une convention unanime des actionnaires qui restreint la faculté des actionnaires majoritaires d’élire les administrateurs lors de l’examen du contrôle de jure d’une société, à la lumière de Duha Printers.

 

[86]         En résumé, je suis d’avis :

 

i)                   qu’il faut tenir compte d’une convention unanime des actionnaires pour l’application de l’alinéa b) de la définition de l’expression « société privée sous contrôle canadien » paragraphe 125(7) de la LIR;

 

ii)                 qu’il faut tenir compte d’une restriction au droit de l’actionnaire majoritaire d’élire les administrateur dans une convention écrite unanime des actionnaires lors de la détermination du contrôle de jure d’une société.

 

[87]         L’analyse que j’ai faite des clauses de la CUA qui sont vraiment de la nature d’une convention unanime des actionnaires (c’est‑à‑dire qui restreignent le pouvoir des administrateurs) que j’ai répertoriées (voir l’annexe 3) m’amène à conclure qu’il s’agit de restrictions mineures à leur pouvoir. À mon avis, les clauses n’ont pas pour effet de dépouiller l’actionnaire hypothétique du contrôle de jure.

 

[88]         Nous examinerons maintenant les dispositions de la CUA en vigueur au cours de l’année d’imposition 2004 qui portent sur l’élection des administrateurs.

 

[89]         Selon le paragraphe 3.2 de la CUA, l’élection des administrateurs se fait par trois groupes, soit le groupe A, le groupe B et le groupe C. Puisque la « personne donnée » aurait certaines actions de catégorie A, elle serait membre de chacun des groupes.

 

[90]         Puisque les administrateurs choisis par le groupe A sont élus par des résidents du Canada et que deux des trois administrateurs choisis par le groupe B sont élus par des résidents du Canada, la « personne donnée » visée à l’alinéa b) de la définition d’une SPCC ne pourrait nommer qu’un seul des cinq administrateurs choisis par les membres de ces groupes.

 

[91]         Puisque aucun des trois membres du groupe C n’est résident du Canada, la « personne donnée » pourrait nommer les deux administrateurs élus par ce groupe.

 

[92]         Ainsi, malgré le fait que la « personne donnée » détiendrait plus de 50 % des actions de catégorie A de Bagtech, aux termes de la CUA, elle ne pourrait élire la majorité des administrateurs. En effet, selon la CUA, ce sont des résidents du Canada qui élisent la majorité des administrateurs, soit quatre des sept administrateurs. Par conséquent, la « personne donnée » ne pourrait, au cours de l’année d’imposition 2004, contrôler la société Bagtech au sens de l’alinéa b) de la définition d’une SPCC au paragraphe 125(7) de la LIR.

 

[93]         Nous examinerons maintenant les clauses de la CUA en vigueur au cours de l’année d’imposition 2005.

 

[94]         Selon le paragraphe 3.2 de la CUA, l’élection des administrateurs se fait par trois groupes, soit le groupe A, le groupe B et le groupe C. Puisque la « personne donnée » aurait certaines actions de catégorie A, elle serait membre de chacun des groupes.

 

[95]         Puisque aucun des trois membres du groupe C n’est résident du Canada, la « personne donnée » pourrait nommer les administrateurs élus par ce groupe, soit deux administrateurs du 1er janvier au 21 juillet, et trois administrateurs à compter du 22 juillet.

 

[96]         Ainsi, malgré le fait que la « personne donnée » détiendrait plus de 50 % des actions de catégorie A de Bagtech, aux termes de la CUA, elle ne pourrait élire la majorité des administrateurs. En effet, selon la CUA, ce sont des résidents du Canada qui élisent quatre des sept administrateurs du 1er janvier au 21 juillet, et quatre des huit administrateurs du 22 juillet au 31 décembre. Par conséquent, la « personne donnée » ne pourrait, au cours de l’année d’imposition 2005, contrôler la société Bagtech au sens de l’alinéa b) de la définition d’une SPCC au paragraphe 125(7) de la LIR.

 

[97]         En conséquence, je suis d’avis que Bagtech était une « société privée sous contrôle canadien » au sens du paragraphe 125(7) de la LIR pendant les années d’imposition 2004 et 2005 et qu’ainsi elle avait droit au « crédit d’impôt à l’investissement remboursable » prévu au paragraphe 127.1(1) de la LIR.

 

[98]         Pour tous ces motifs, l’appel est accueilli avec dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour d’avril 2012.

 

 

 

« Paul Bédard »

Juge Bédard


Annexe 1

CONVENTION UNANIME DES ACTIONNAIRES

(PARTIE PERTINENTE)

 

 



 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 

 


 


 


 

 


 


 

 


 


 

 


 

 


 

 


 

 


 

 


 


 

 


 

 


 

 


 

 


 

 


 


 


 


Modifications à la convention unanime des actionnaires

 

 


 


Annexe 2

 

Province de l’Alberta

Business Corporations Act, RSA 2000, c B-9

 

Article 146Unanimous shareholder agreement”

 

(1)     A unanimous shareholder agreement may provide for any or all of the following:

(a)    the regulation of the rights and liabilities of the shareholders, as shareholders, among themselves or between themselves and any other party to the agreement;

 (b)    the regulation of the election of directors;

 (c)    the management of the business and affairs of the corporation, including the restriction or abrogation, in whole or in part, of the powers of the directors;

 (d)    any other matter that may be contained in a unanimous shareholder agreement pursuant to any other provision of this Act.

(2)     If a unanimous shareholder agreement is in effect at the time a share is issued by a corporation to a person other than an existing shareholder,

 (a)    that person is deemed to be a party to the agreement whether or not the person had actual knowledge of it when the share certificate was issued,

 (b)    the issue of the share certificate does not operate to terminate the agreement, and

 (c)    if that person is a bona fide purchaser without actual knowledge of the unanimous shareholder agreement, that person may rescind the contract under which the shares were acquired by giving a notice to that effect to the corporation within a reasonable time after the person receives actual knowledge of the unanimous shareholder agreement.

(3)     If a unanimous shareholder agreement is in effect when a person who is not a party to the agreement acquires a share of a corporation, other than under subsection (2),

(a)    the person who acquired the share is deemed to be a party to the agreement whether or not the person had actual knowledge of it when the person acquired the share, and

(b)    neither the acquisition of the share nor the registration of that person as a shareholder operates to terminate the agreement.

(4)     If

(a)    a person referred to in subsection (3) is a protected purchaser as defined in the Securities Transfer Act and did not have actual knowledge of the unanimous shareholder agreement, and

(b)    the person’s transferor’s share certificate did not contain a reference to the unanimous shareholder agreement,

that person may, within 30 days after the person acquires actual knowledge of the existence of the agreement, send to the corporation a notice of objection to the agreement.

(5)     If a person sends a notice of objection under subsection (4),

(a)    the person is entitled to be paid by the corporation the fair value of the shares held by the person, determined as of the close of business on the day on which the person became a shareholder, and

(b)    section 191(4) and (6) to (20) apply, with the necessary changes, as if the notice of objection under subsection (4) were a written objection sent to the corporation under section 191(5).

(6)     A transferee who is entitled to be paid the fair value of the transferee’s shares under subsection (5) also has the right to recover from the transferor by action the amount by which the value of the consideration paid for the transferee’s shares exceeds the fair value of those shares.

(7)     A shareholder who is a party or is deemed to be a party to a unanimous shareholder agreement has all the rights, powers and duties and incurs all the liabilities of a director of the corporation to which the agreement relates to the extent that the agreement restricts the powers of the directors to manage the business and affairs of the corporation, and the directors are thereby relieved of their duties and liabilities, including any liabilities under section 119 or any other enactment, to the same extent.

(8)     A unanimous shareholder agreement may not be amended without the written consent of all those who are shareholders at the effective date of the amendment.

(9)     A unanimous shareholder agreement may exclude the application to the agreement of all but not part of this section.

 


Annexe 3

 

Liste complète des dispositions de la convention unanime des actionnaires de Bagtech qui restreignent de façon précise le pouvoir des administrateurs :

 

·        Selon le paragraphe 3.2, « tant et aussi lomgtemps que la majorité des Actionnaires y consentent, M. Colin Bier agira à titre de président du Conseil d’administration ». On retire ainsi aux administrateurs, du moins temporairement, le pouvoir de nommer le président du conseil.

 

·        L’alinéa 3.4.1 oblige les administrateurs à tenir « au moins six réunions du Conseil d’administration par année avec un délai maximum de deux mois entre chaque réunion. »

 

·        L’alinéa 3.4.3 prévoit que « la présence d’un représentant alors en fonction du Groupe A, du Groupe B de même que du Groupe C, est nécessaire à l’établissement du quorum pour toute réunion du Conseil d’administration. »

 

·        Les paragraphes 4.2 et 4.3 prévoient deux situations dans lesquelles certains actionnaires seront autorisés à céder, sous certaines conditions, leurs actions et « les Administrateurs seront obligés d’autoriser pareille Cession malgré toute autre disposition des statuts ou règlements de la Société. »

 

·        Le paragraphe 10.2 prévoit que « dans l’hypothèse où l’appel public à l’épargne n’aurait pas été réalisée le 31 décembre 2008 et où la cession de l’ensemble des Actions ou des actifs de la Société ne serait pas intervenue, les Parties s’engagent à mandater une banque choisie à la majorité des votes par les Actionnaires Institutionnels, qui aura pour mission de les assister et d’étudier » certaines questions.

 

·        Les paragraphes 11.5 et 18.1 prévoient que si un actionnaire décide, devient affecté d’une incapacité permanente ou devient failli ou insolvable, « les coactionnaires détermineront […] à la majorité des voix […] si les Actions rachetées seront achetées par eux personnellement ou par la Société. »

 

·        Le paragraphe 13.4 stipule qu’« aucune émission de valeur mobilière de la Société ne sera réalisée sans l’accord préalable exprès des actionnaires représentant 50 % au moins du capital social sur une base non diluée. »

 

Liste complète des dispositions de la convention qui ont la nature d’une CUA en vertu du paragraphe 6 (3) de la L.c.s.a.

 

Rappelons qu’en vertu du paragraphe 6(3) de la L.c.s.a., une convention signée par tous les actionnaires qui augmente le nombre de voix nécessaires à l’adoption de certaines mesures par les actionnaires peut exceptionnellement bénéficier du statut de CUA et ce, même si elle ne restreint ou ne retire aucun pouvoir des administrateurs. Il s’agit cependant de la seule exception tant selon la loi québécoise que selon la loi canadienne.

 

·        Le paragraphe 13.1 prévoit que plusieurs décisions qui devraient normalement être ratifiées par une résolution spéciale des actionnaires (donc aux deux tiers des voies, selon le paragraphe 2(1) de la L.c.s.a.) doivent être acceptées aux trois quarts des voix.

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2012 CCI 120

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2009-3734(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              PRICE WATERHOUSE COOPERS INC. AGISSANT ÈS QUALITÉ DE SYNDIC À LA FAILLITE DE BIOARTIFICIAL GEL TECHNOLOGIES (BAGTECH) INC. c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 17 octobre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Paul Bédard

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 12 avril 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocate de l’appelante :

Me Isabelle Pillet

Avocates de l'intimée :

Me Anne-Marie Boutin

Me Marie-Aimée Cantin

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                       Nom :                          Me Isabelle Pillet

 

                   Cabinet :                         De Man, Pilotte

                                                          Montréal (Québec)

 

         Pour l’intimée :                          Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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