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Dossier : 2008-922(GST)G

 

 

ENTRE :

 

GLOBAL CASH ACCESS (CANADA) INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

________________________________________________________________

 

Appel entendu du 28 au 30 septembre et les 6 et 8 décembre 2011, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L'honorable juge Judith Woods

 

Comparutions :

 

Avocats de l'appelante :

Me Dalton J. Albrecht

Me David W. Chodikoff

Me Rahul Sharma

M. David Carter (stagiaire)

 

Avocates de l'intimée :

Me Marilyn Vardy

Me Annie Paré

Me Sharon Lee

________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L'appel d'une cotisation établie au titre de la Loi sur la taxe d'accise est accueilli, et la cotisation est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, pour le motif que 25 p. 100 de la taxe sur les produits et services payée par l'appelante à l'égard de frais versés à des casinos, à Windsor et à Niagara Falls, a été payé par erreur. Les dépens sont adjugés à l'intimée.

 

Signé à Toronto (Ontario), ce 18e jour de mai 2012.

 

 

« J. M. Woods »

Le juge Woods

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d'octobre 2012.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


 

 

 

 

Référence : 2012 CCI 173

Date : 20120518

Dossier : 2008-922(GST)G

 

 

ENTRE :

 

GLOBAL CASH ACCESS (CANADA) INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Woods

 

I.       Introduction

 

[1]             Global Cash Access (Canada) Inc. (« Global ») fournit aux clients de casinos un service leur permettant d'utiliser des cartes de crédit Visa ou Mastercard afin d'obtenir de l'argent pour des activités de jeu. Le service est appelé [TRADUCTION] « service d'accès à des fonds » ou [TRADUCTION] « transaction en quasi‑espèces ».

 

[2]             Les clients versent des frais à Global pour le service (les « frais de Global »). Global de son côté verse des frais aux casinos pour faciliter le service (les « frais des casinos »).

 

[3]             Il s'agit d'un appel interjeté en vertu de la Loi sur la taxe d'accise (la « Loi ») concernant la taxe sur les produits et services (la « TPS ») exigée sur les frais des casinos. La question est de savoir si ces frais constituent une contrepartie pour un service financier exonéré fourni par les casinos.

 

[4]             Le montant total de la TPS en litige, qui s'élève à 2 155 507,85 $, se rapporte à des transactions effectuées au cours de la période allant de l'année 1996 à l'année 2004 inclusivement, à des casinos situés dans deux villes de l'Ontario, soit à Windsor et à Niagara Falls.

 

[5]             Les casinos seront désignés comme étant le « casino de Niagara Falls » et le « casino de Windsor », et collectivement les « casinos ». Pour plus de simplicité, les mêmes termes seront employés pour décrire la Société des casinos de l'Ontario, qui exploite les casinos.

 

[6]             L'appel se rapporte à une cotisation dont Global a fait l'objet, mais le ministre avait initialement établi une cotisation à l'égard des casinos pour le motif qu'ils auraient dû percevoir la TPS de Global. Les casinos ont payé le montant des cotisations et Global les a remboursés.

 

[7]             Global a ensuite présenté une demande de remboursement pour le motif que la TPS avait été payée par erreur. En réponse, le ministre a établi à l'égard de Global une cotisation par laquelle la demande de remboursement était refusée. Le présent appel porte sur cette cotisation.

 

[8]             Je suppose que Global ne se serait pas opposée à la cotisation si elle avait eu droit à des crédits de taxe sur les intrants. Toutefois, le service d'accès à des fonds que Global fournit est un service financier, ce qui ne permet pas à Global d'être admissible à des crédits de taxe sur les intrants.

 

II.      Le contexte factuel

 

[9]             À l'audience, des témoignages ont été présentés pour le compte de Global par Darren Simmons, vice‑président principal du développement international de la société mère de Global, et par Christopher Vavricka, conseiller en affaires qui possède énormément d'expérience en ce qui concerne les opérations effectuées par cartes de crédit. L'intimée a cité deux employés des casinos : Victoria Vasiladis, chef de caisse au casino de Windsor, et Greg Yott, directeur de la cage et de la caisse au casino de Niagara Falls.

 

A. La description de l'entreprise de Global

 

[10]        Global est une filiale canadienne d'une société américaine qui est un gros fournisseur de services d'accès à des fonds dans les casinos, en Amérique du Nord.

 

[11]        Par suite d'acquisitions d'entreprises mettant en cause la société mère de Global, la dénomination sociale de Global a été changée à deux reprises au cours de la période en question. Les anciens noms, Cashcall Systems Inc. et First Data Financial Services Canada Inc., figurent dans certaines pièces.

 

[12]        Comme il en a ci‑dessus été fait mention, l'entreprise de Global permet aux clients des casinos d'utiliser leurs cartes de crédit afin d'obtenir de l'argent. Global traite avec les associations de cartes de crédit Visa et Mastercard et est un marchand en vertu des règles de ces associations. En sa qualité de marchand, Global « vend » des chèques aux clients, qui les échangent ensuite contre de l'argent. Les clients peuvent obtenir de l'argent jusqu'à la limite de leurs cartes, laquelle est habituellement beaucoup plus élevée que le montant disponible pour une avance en argent obtenue au moyen d'un guichet automatique.

 

[13]        Du point de vue des clients, l'opération est semblable à une opération normale effectuée par carte de crédit aux fins de l'achat de marchandises, sauf que des frais sont exigés. Le processus est fortement automatisé et les autorisations des banques émettrices des cartes sont obtenues rapidement.

 

[14]        Du point de vue des banques émettrices de cartes, les opérations font l'objet d'un examen plus minutieux que dans le cas d'une opération habituelle effectuée par carte de crédit. Global est en mesure de satisfaire aux exigences des banques au moyen d'une combinaison de technologies complexes, d'une infrastructure relativement importante et d'une multitude de relations d'affaires.

 

[15]        Global a conclu avec les casinos des ententes qui lui permettent de conserver du matériel dans leurs locaux et d'obtenir de l'aide de leur personnel. Les employés de Global ne sont qu'occasionnellement sur les lieux, par exemple lorsqu'ils s'occupent du matériel de Global et lorsqu'ils forment les employés des casinos en ce qui concerne le processus de transaction.

 

[16]        Habituellement, le client effectue l'opération à l'un des divers kiosques automatiques appartenant à Global, lesquels sont situés sur le plancher du casino. Chaque kiosque comporte un petit dispositif de point de vente permettant de lire la carte de crédit du client; ce dispositif est semblable, quant à l'apparence, aux lecteurs de cartes de crédit situés dans les établissements de détail. Le kiosque est également doté d'un combiné téléphonique appartenant à Global qui assure une liaison directe avec les employés hors site de Global. Les enseignes des kiosques indiquent « Visa » ou « Mastercard ».

 

[17]        La première étape exige que le client glisse une carte de crédit dans le dispositif de point de vente. Le client suit une série de messages‑guides figurant sur le dispositif; il demande un certain montant et il autorise les frais de Global. La banque émettrice de la carte peut ensuite autoriser ou refuser la demande. La banque peut également parler au client à l'aide du téléphone de Global dont le kiosque est doté à cette fin.

 

[18]        Si l'opération est autorisée, on demande au client de se rendre à l'une des cages des caisses du casino afin d'achever l'opération. Les cages des caisses servent à de nombreuses opérations financières effectuées par les casinos, comme des opérations de change et l'encaissement des jetons.

 

[19]        Au lieu d'utiliser le kiosque, le client peut effectuer une opération directement à la cage de caisse. On a expliqué que les usagers habituels du service peuvent sauter l'étape du kiosque et s'adresser directement aux caissiers.

 

[20]        Les casinos ont le droit de limiter le nombre de kiosques sur le plancher, et ils ont le droit d'indiquer l'emplacement des kiosques. À un moment donné, le casino de Niagara Falls a exigé qu'on enlève les kiosques, de sorte que les clients devaient effectuer les opérations à la cage de caisse.

 

[21]        Les cages des caisses sont également dotées d'un matériel appartenant à Global. Ce matériel est composé d'un autre terminal semblable à celui qui se trouve dans les kiosques, d'une imprimante et de stocks de formulaires de chèques.

 

[22]        Une fois que la banque émettrice de la carte a autorisé l'opération, le caissier doit suivre un processus précis de transaction, et notamment obtenir des renseignements de vérification et une autorisation écrite du client à l'égard de l'opération. Le processus de transaction comporte également l'impression d'un chèque émis par Global en faveur du casino. Une fois le processus de transaction achevé, le caissier négocie le chèque et remet l'argent (ou les jetons) au client. Les casinos déposent ensuite les chèques dans leurs comptes de banque.

 

[23]        Le règlement de la transaction a lieu quelques jours plus tard. En général, la banque émettrice de la carte remet à Global le montant de l'avance en argent et les frais de Global y afférents. Global compense ensuite le chèque déposé par le casino. Global paie les frais des casinos séparément quelques semaines plus tard.

 

[24]        En effectuant l'opération, le client a en fait reçu une avance en argent de la banque émettrice de la carte. L'avance correspond au montant que le client a reçu et aux frais de Global.

 

[25]        Les frais de Global sont relativement élevés. Le client paie environ 17 $ pour une transaction de 100 $. Les frais globaux des casinos représentent environ 50 p. 100 de l'ensemble des frais de Global.

 

[26]        Les casinos encourent un certain risque financier en raison des opérations. En plus du risque de l'insolvabilité de Global, les casinos sont exposés à un risque s'ils ne suivent pas le processus de transaction approprié ou s'ils ne déposent pas tous les chèques dans leurs comptes de banque. Si une opération effectuée par carte de crédit est annulée à cause d'un différend avec un client, les casinos pourraient avoir à assumer la perte si le caissier ne s'était pas strictement conformé au processus de transaction. Les pertes réelles subies par les casinos étaient minimes.

 

B. Les ententes conclues entre Global et les casinos

 

[27]        Les dispositions que Global prenait avec les casinos étaient régies par des ententes écrites. Quatre ententes principales sont ici en cause : deux ententes conclues avec le casino de Windsor, en vigueur en 1995 et en 1999, et deux ententes avec le casino de Niagara Falls, en vigueur en 1996 et en l'an 2000.

 

(1) Les ententes conclues en 1995, en 1996 et en 1999

 

[28]        Les deux ententes conclues avec le casino de Windsor et l'entente de 1996 conclue avec le casino de Niagara Falls sont fort similaires. Certaines des dispositions clés de l'entente de 1996 conclue avec le casino de Niagara Falls sont reproduites ci‑dessous :

 

[TRADUCTION]

 

ATTENDU que Cashcall exploite un service d'accès à des fonds par lequel le titulaire d'une carte de crédit approuvée (le « titulaire ») peut obtenir des fonds au moyen de l'achat et de la négociation d'un effet de paiement, sous réserve de la limite de crédit disponible pour le titulaire, de l'autorisation appropriée de la transaction, du paiement des frais applicables et des procédures de sécurité internes de Cashcall (les « services d'accès à des fonds »);

 

ATTENDU que Cashcall et le centre de services veulent conclure une entente par laquelle Cashcall deviendra un fournisseur de services d'accès à des fonds au centre de services;

 

PAR CONSÉQUENT, en contrepartie des engagements réciproques énoncés dans la présente entente et moyennant d'autres contreparties valables reçues, Cashcall et le centre de services s'entendent sur les dispositions suivantes :

 

1.         Statut du fournisseur. Cashcall aura le droit d'être le fournisseur exclusif des services d'accès à des fonds dans les locaux du centre de services pendant la durée de la présente entente. Cashcall reconnaît que le centre de services acceptera les cartes de crédit en utilisant les dispositifs des points de vente.

 

2.         Entretien du matériel et fournitures. Le matériel nécessaire à l'utilisation du service d'accès à des fonds de Cashcall appartient et continuera à appartenir à Cashcall. Cashcall fournira et installera le matériel et assurera son entretien. Le centre de services installera à ses frais toutes les lignes téléphoniques nécessaires à l'utilisation du service d'accès à des fonds de Cashcall et se chargera de leur entretien. Cashcall fournira à ses frais toutes les fournitures nécessaires aux fins de l'utilisation de ce matériel, y compris les effets de paiement de Cashcall.

 

3.         Processus de transaction. Les parties conviennent que le processus à suivre aux fins de la conclusion d'une transaction se rattachant au service d'accès à des fonds de Cashcall et de l'émission de l'effet de paiement sera le suivant :

 

i.          Si la carte de crédit comporte une date de validité inscrite en relief, la date de la transaction ne peut pas être antérieure à la date de validité.

 

ii.         La date de la transaction ne peut pas être postérieure à la date d'expiration inscrite en relief sur la carte de crédit.

 

iii.        Un code d'autorisation valide doit être obtenu de Cashcall, électroniquement ou manuellement (oralement).

 

iv.        Le recto de l'effet de paiement doit être rempli (manuellement ou électroniquement).

 

v.         Le titulaire doit apposer ses initiales à côté des frais de Cashcall, au recto de l'effet de paiement, en vue de reconnaître que des frais seront exigés en plus des fonds auxquels il a accès.

 

vi.        L'employé du centre de services doit inscrire les renseignements d'identification appropriés ainsi que l'adresse et le numéro de téléphone du titulaire et le numéro d'identification bancaire de la banque émettrice de la carte de crédit sur l'effet de paiement, dans les espaces réservés à cette fin.

 

vii.       Le titulaire doit apposer sa signature dans l'espace prévu à cette fin au verso de l'effet de paiement, et la signature doit correspondre à celle qui figure sur la carte de crédit.

 

viii.      L'empreinte de la carte de crédit doit apparaître sur l'effet de paiement et cette empreinte doit être lisible.

 

[...]

 

10.       Paiements de commissions. Cashcall versera pour chaque transaction une commission au centre de services, conformément à la pièce jointe A, pour chaque transaction permettant l'accès à des fonds de Cashcall effectuée au cours de la durée de la présente entente. Ces paiements seront effectués au cours du mois suivant celui pendant lequel la transaction aura été effectuée, à compter de la fin du mois suivant immédiatement la date de prise d'effet de la présente entente. Tous les paiements de commissions au centre de services régis par la présente entente seront effectués en dollars canadiens.

 

(2) L'entente conclue en l'an 2000

 

[29]        L'entente conclue avec le casino de Niagara Falls en l'an 2000 est sensiblement différente des autres ententes. Selon cette entente, le casino de Niagara Falls a le droit principal de déterminer le montant des frais à exiger du client, c'est‑à‑dire les frais de Global.

 

[30]        L'entente est également ambiguë. En particulier, une clause prévoit les frais que Global doit verser au casino, alors qu'une autre clause prévoit les frais que le casino doit verser à Global. Les deux clauses indiquent des structures de frais différentes; les parties à l'entente doivent choisir l'une d'elles. Dans ce cas‑ci, les parties ont choisi la structure de frais selon laquelle le casino de Niagara Falls doit effectuer un paiement à Global. Les structures de frais différentes ne sont pas très sensées, puisque la fourniture, en vertu de l'entente, est la même.

 

[31]        Si c'est le casino de Niagara Falls qui paie les frais, comme l'indique l'entente, l'appel interjeté par Global devrait être accueilli en ce qui concerne cette entente, parce que Global n'a pas payé une fourniture effectuée par le casino de Niagara Falls. C'est plutôt le casino de Niagara Falls qui a payé une fourniture effectuée par Global.

 

[32]        Cette interprétation semble favoriser Global dans le présent appel, mais Global ne l'a pas préconisée et, à l'audience, aucune des deux parties n'a expressément mis l'accent sur cette interprétation. La Cour a ensuite demandé aux parties de fournir des observations écrites.

 

[33]        Dans leurs observations, les deux parties ont soutenu que l'entente doit avoir le même effet que les ententes antérieures, c'est‑à‑dire que Global paie des frais au casino de Niagara Falls pour une fourniture effectuée par le casino de Niagara Falls. En fait, les deux parties affirment que le mécanisme de paiement énoncé dans l'entente ne veut pas dire ce qui est stipulé.

 

[34]        J'ai examiné la preuve dans son ensemble et je reconnais que l'entente comporte une erreur lorsqu'elle prévoit que le casino de Niagara Falls doit verser des frais à Global. Comme il en a ci‑dessus été fait mention, le fait que l'entente prévoit des mécanismes de paiement différents allant dans les deux sens n'est pas très sensé.

 

[35]        Je reconnais donc qu'en vertu de l'entente, le casino de Niagara Falls a reçu des frais pour une fourniture effectuée en faveur de Global. Cela est conforme à la position que les deux parties ont prise.

 

III.     Le régime légal

 

[36]        Les dispositions légales pertinentes sont reproduites à l'annexe.

 

[37]        Conformément au paragraphe 165(1) de la Loi, l'acquéreur d'une fourniture taxable doit payer la TPS, qui est calculée sur la valeur de la contrepartie de la fourniture.

 

[38]        La fourniture d'un « service financier », tel que cette expression est définie, est une fourniture exonérée et n'est pas taxable (annexe V, partie VII).

 

[39]        La définition du terme « service financier » est complexe (article 123 de la Loi et le Règlement sur les services financiers). Au risque de trop simplifier les choses, voici quelques aspects saillants de la Loi :

 

(i)      un service financier inclut le paiement ou le transfert d'argent, sauf le paiement d'argent en contrepartie de la fourniture d'un bien autre qu'un effet financier (alinéas a) et n) de la définition de « service financier »);

 

(ii)     un service financier inclut l'émission d'un effet financier (alinéa d) de la définition de « service financier »);

 

(iii)    un service financier inclut la prise de mesures en vue d'effectuer un service financier (alinéa l) de la définition de « service financier »);

 

(iv)    un service financier exclut certains services qui sont rendus conjointement avec un service financier, comme la collecte ou la communication de renseignements, l'établissement ou le traitement de documents, et l'assistance à la clientèle (alinéa r.4) de la définition de « service financier »);

 

(v)     un service financier exclut un bien mis à la disposition d'une personne conjointement avec la prestation par celle‑ci d'un service financier (alinéa r.5) de la définition de « service financier »);

 

(vi)    un service financier exclut un service administratif, sauf si le fournisseur de service est à risque (alinéa t) de la définition de « service financier » et paragraphe 4(3) du Règlement).

 

[40]        Il convient également de mentionner les principes que les tribunaux ont adoptés au sujet d'une fourniture unique, par opposition à des fournitures multiples. Les principes que le juge Rip (tel était alors son titre) a décrits dans la décision O. A. Brown Ltd. c. La Reine, [1995] A.C.I. no 678 (QL), no 94‑435(GST)I, 10 juillet 1995 (CCI), ont récemment été confirmés par la Cour suprême du Canada : Calgary (Ville) c. Canada, 2012 CSC 20, au par. 32. Le critère est « de savoir si, au fond et en réalité, la [prétendue] fourniture séparée fait partie intégrante ou est un élément constitutif de la fourniture globale » (par. 35). En outre, « il faudrait se demander dans quelle mesure les services qui constitueraient une fourniture unique sont liés les uns aux autres, quelle est l'étendue de leur interdépendance et de leur enchevêtrement, et si chaque service fait partie intégrante d'un ensemble [composite] » (par. 36).

 

[41]        La Loi prévoit également des règles spéciales applicables à des fournitures multiples pour une contrepartie unique.

 

[42]        Il n'est pas tenu compte d'une fourniture qui est accessoire à une fourniture principale pour les besoins de la TPS. L'article 138 de la Loi prévoit que, lorsqu'il y a des fournitures multiples pour une contrepartie unique, une fourniture accessoire est réputée faire partie de la fourniture principale. Les principes à appliquer pour arriver à cette détermination ont récemment été décrits dans l'arrêt 9056-2059 Québec Inc. c. Canada, 2011 CAF 296, [2012] 1 R.C.F. F‑3, au par. 34 :

 

[...] l'article 138 s'entend d'un élément secondaire au sens de mineur ou non essentiel. Ne suffit pas pour que la seconde condition soit remplie que la fourniture ou le service soit secondaire, faut‑il encore que cette fourniture ou service soit minime par rapport à l'activité principale. [...]

 

[43]        L'article 139 de la Loi traite des cas dans lesquels un service financier est fourni avec un service non financier pour une contrepartie unique. En général, si la partie de la contrepartie se rapportant au service financier représente plus de 50 p. 100 de la contrepartie totale, la contrepartie est entièrement exonérée de la TPS pour le motif que tous les services sont réputés être des services financiers.

 

IV.     Aperçu des thèses des parties

 

[44]        Global soutient que les casinos n'ont effectué qu'une seule fourniture et qu'il s'agit d'un service financier.

 

[45]        Global a décrit la fourniture comme étant composée de deux parties, la prise de mesures en vue de l'émission de chèques par Global et l'encaissement des chèques. Il est soutenu que chaque partie est visée par la définition du terme « service financier ». La prise de mesures en vue de l'émission de chèques est un service financier au sens de l'alinéa l) de la définition du terme. L'encaissement des chèques est un service financier en vertu de l'alinéa a) ou de l'alinéa d). Étant donné que chaque partie est décrite dans la Loi comme étant un service financier, la fourniture unique composée l'est également.

 

[46]        Le principal argument invoqué par Global est qu'il s'agit d'une fourniture unique, mais Global affirme subsidiairement que s'il y a deux fournitures, chacune est un service financier.

 

[47]        La thèse de l'intimée va complètement à l'encontre de celle de Global, c'est‑à‑dire que les casinos ne fournissaient pas de services financiers à Global. L'intimée affirme qu'il y a eu un ensemble de fournitures, ces fournitures étant toutes exclues des services financiers en vertu des alinéas r.4), r.5) et t) de la définition de ce terme.

 

[48]        Dans son argumentation, l'intimée reconnaît que l'encaissement d'un chèque peut être considéré comme un service financier. Toutefois, l'intimée affirme que l'encaissement des chèques était un service fourni directement aux clients, et non à Global. Elle soutient que ce service faisait partie des services financiers habituels des casinos qui étaient offerts aux clients sans contrepartie.

 

V.      Analyse

 

[49]        Pour les besoins du présent appel, il faut examiner la façon dont un ensemble de fournitures doit être caractérisé dans le contexte de la définition du terme « service financier ». Comme il en a ci‑dessus été fait mention, une partie soutient que toutes les fournitures sont des services financiers, alors que l'autre affirme qu'aucune de ces fournitures ne l'est. J'ai conclu que l'approche à adopter se situait entre les deux.

 

[50]        À mon avis, parmi l'ensemble de fournitures effectuées par les casinos, certaines sont des services financiers, alors que d'autres n'en sont pas. L'élément « service financier » est l'encaissement des chèques, qui est admissible en vertu de l'alinéa a) de la définition du terme « service financier ». Les alinéas r.4) et r.5) excluent le reste des fournitures.

 

[51]        Étant donné que la fourniture est une combinaison de services financiers et de services non financiers, il faut examiner la question de la répartition. Étant donné que les deux parties ont décidé de prendre uniquement des positions « tout ou rien », ni l'une ni l'autre n'a soumis des observations détaillées au sujet de la question de la répartition.

 

[52]        L'analyse effectuée ci‑dessous a été organisée sous les titres suivants :

 

A.      Quelle fourniture (ou quelles fournitures) les casinos effectuaient‑ils?

 

B.      La fourniture est‑elle un service financier au sens de l'un ou l'autre des alinéas a) à m) de la définition de ce terme?

 

C.      La fourniture est-elle exclue des services financiers au sens de l'un ou l'autre des alinéas r.4), r.5) ou t)?

 

D.      Si certains éléments de la fourniture sont des services financiers alors que d'autres n'en sont pas, de quelle façon la contrepartie devrait‑elle être répartie?

 

A. Quelle fourniture (ou quelles fournitures) les casinos effectuaient‑ils?

 

[53]        Dans cette section, j'examinerai la nature de la fourniture. Il s'agit de savoir ce que les casinos fournissaient en échange des frais des casinos qu'ils exigeaient.

 

[54]        Les ententes écrites sont cruciales dans cette analyse. Selon une condition clé de toutes les ententes, Global est le fournisseur exclusif des services d'accès à des fonds dans les locaux des casinos. Les trois ententes les plus anciennes prévoient que Global a le [TRADUCTION] « droit » d'être le fournisseur exclusif. La dernière entente prévoit que Global [TRADUCTION] « sera » le fournisseur exclusif.

 

[55]        Les attendus des ententes, ainsi que les modalités des ententes, donnent à penser que cette modalité décrit une fourniture essentielle en vertu des ententes. Par contre, M. Simmons a témoigné qu'il ne s'agissait pas d'une condition importante.

 

[56]        En ce qui concerne le témoignage de M. Simmons sur ce point, j'aimerais faire remarquer qu'il n'est pas un témoin désintéressé et qu'il n'a pas donné de raisons satisfaisantes pour dire que cette condition n'était pas importante. Je n'ai pas jugé son témoignage convaincant.

 

[57]        Toutefois, je retiens le témoignage de M. Simmons lorsqu'il a déclaré que l'octroi de l'exclusivité n'était pas une condition clé, parce qu'à ce moment‑là, Global avait peu de concurrents.

 

[58]        Un aspect essentiel des ententes est donc que les casinos autorisaient Global à exploiter son entreprise dans leurs locaux. Cela semble décrire un rôle passif pour les casinos, mais cela ne décrit pas la relation avec exactitude. Les casinos étaient passifs du fait qu'ils permettaient que des kiosques soient installés dans leurs locaux, mais ils étaient également actifs en ce qui concerne les activités menées aux cages des caisses.

 

[59]        L'intimée affirme que les services des caissiers ne faisaient pas tous partie de la fourniture que les casinos effectuaient en faveur de Global. Elle affirme que l'encaissement des chèques ne faisait pas partie de la fourniture, parce que les casinos fournissaient souvent des services financiers aux clients, sans frais.

 

[60]        La preuve sur ce point n'est pas aussi claire que je l'aurais voulu. Somme toute, j'ai conclu que l'encaissement des chèques de Global faisait partie de la fourniture que les casinos effectuaient en faveur de Global.

 

[61]        Trois ententes définissent le service de Global comme étant un service permettant aux clients d'obtenir de l'argent ou des fonds, ce qui donne à penser que le service que Global fournissait aux clients ne consistait pas uniquement à émettre des chèques. Le service comprenait la fourniture d'argent.

 

[62]        La quatrième entente, soit l'entente conclue en 1996 avec le casino de Niagara Falls, décrit le service fourni par Global comme étant [TRADUCTION] « l'accès à des fonds ou à des avances équivalant à des espèces » selon la définition figurant dans les règlements des associations de cartes de crédit. Les règlements n'ont pas été produits en preuve. En l'absence d'autres éléments de preuve, je conclus que cette entente doit être interprétée de la même façon que les autres, c'est‑à‑dire que la fourniture inclut l'encaissement de chèques.

 

[63]        Par conséquent, l'ensemble de fournitures effectuées par les casinos comporte trois principaux aspects : 1) permettre que des kiosques soient installés dans les locaux; (2) fournir des services de soutien aux cages des caisses, par exemple quant au processus de transaction et aux transactions effectuées pour le compte des clients; (3) encaisser les chèques de Global.

 

B. Les fournitures sont‑elles des services financiers visés par l'un ou l'autre des alinéas a) à m) de la définition de ce terme?

 

[64]        Il s'agit ensuite de savoir si les fournitures effectuées par les casinos sont décrites à l'un ou l'autre des alinéas a) à m) de la définition du terme « service financier ».

 

[65]        Global soutient que les alinéas a), d) et l) s'appliquent tous. Elle affirme que la prise de mesures en vue de l'émission de chèques est visée par l'alinéa l), et que l'encaissement de chèques est visé par l'alinéa a) ou par l'alinéa d).

 

[66]        Je souscris à ces arguments.

 

[67]        J'examinerai d'abord les activités des casinos à l'égard de l'émission de chèques. Cela comporte le fait de permettre que des kiosques soient installés dans les locaux et la fourniture de services de soutien aux cages des caisses, par exemple quant au processus de transaction et aux transactions effectuées pour le compte des clients.

 

[68]        L'alinéa l) de la définition du terme « service financier » est ainsi libellé :

 

l) le fait de consentir à effectuer, ou de prendre les mesures en vue d'effectuer, un service qui, à la fois :

 

(i) est visé à l'un des alinéas a) à i),

 

(ii) n'est pas visé aux alinéas n) à t);

 

[Non souligné dans l'original.]

 

[69]        L'intimée affirme que les actions des casinos étaient trop passives pour qu'il soit possible de les décrire comme constituant le fait de « prendre les mesures en vue ». À mon avis, cette interprétation est trop stricte et n'est pas étayée par le contexte ou par l'objet de la loi.

 

[70]        L'expression « prendre des mesures » dans ce contexte a été interprétée d'une façon libérale comme étant « planifier ou prévoir; faire en sorte qu'une chose se produise » : La Banque Royale du Canada c. La Reine, 2005 CCI 802, au par. 15.

 

[71]        Une interprétation libérale est également étayée par la politique administrative de l'Agence du revenu du Canada au cours de la période en question. Le passage pertinent de la politique P‑239 (abrogée depuis lors), qui était en vigueur au cours d'une partie de la période pertinente, est reproduit ci‑dessous :

 

·                     l'intermédiaire aidera le fournisseur ou l'acquéreur, ou les deux, relativement à la fourniture d'un service financier;

 

·                     le fournisseur et/ou l'acquéreur compte sur un intermédiaire (ou plusieurs) pour obtenir de l'aide au cours de la fourniture d'un service financier;

 

·                     l'intermédiaire est directement engagé dans le processus de fourniture d'un service financier et consacrera donc le temps et les efforts nécessaires pour effectuer la fourniture d'un service décrit aux alinéas a) à i) de la définition de service financier.

 

[72]        Les casinos sont directement engagés dans l'émission de chèques et s'occupent activement de le faire, puisqu'ils permettent l'installation de kiosques dans leurs locaux et qu'ils fournissent des services de soutien quant au processus de transaction et aux transactions effectuées pour le compte des clients. Par conséquent, les casinos « prennent les mesures » en vue de l'émission de chèques au sens de la politique précitée. La fourniture est visée par l'alinéa l).

 

[73]        J'examinerai maintenant le service d'encaissement des chèques de Global.

 

[74]        Global invoque la décision Elgin Mills Leslie Holdings Ltd. c. La Reine, no 98‑1950(GST)I, 4 février 2000, [2000] A.C.I. no 64 (QL) (CCI), dans laquelle il a été conclu qu'un service d'encaissement de chèques était visé par les alinéas a) et d) de la définition du terme « service financier ». Ces dispositions sont ainsi libellées :

 

a) L'échange, le paiement, l'émission, la réception ou le transfert d'argent, réalisé au moyen d'échange de monnaie, d'opération de crédit ou de débit d'un compte ou autrement;

 

[...]

 

d) l'émission, l'octroi, l'attribution, l'acceptation, l'endossement, le renouvellement, le traitement, la modification, le transfert de propriété ou le remboursement d'un effet financier;

 

[75]        L'analyse qui a été effectuée dans la décision Elgin Mills est sans aucun doute pertinente, mais j'aimerais faire remarquer que les casinos ne s'occupaient pas d'encaissement de chèques au sens habituel du terme. Les seuls chèques qui sont fournis sont ceux de Global. De plus, les ententes prévoient que Global garantit le paiement des chèques, si le processus de transaction est respecté. Le rôle des casinos, lorsqu'il s'agit d'encaisser les chèques de Global, est semblable à celui d'un payeur.

 

[76]        Même si le rôle des casinos est semblable à celui d'un payeur, cette activité est visée par le libellé général des alinéas a) et d). La nature restreinte du rôle n'exclut pas l'activité de ces dispositions.

 

C. Les fournitures sont‑elles exclues du terme « service financier » en vertu de l'un ou l'autre des alinéas r.4), r.5) ou t)?

 

[77]        La question suivante est de savoir si une partie quelconque de la fourniture est visée par les exclusions précises figurant dans la définition du terme « service financier ». J'examinerai séparément les activités en cause lorsqu'il s'agit de faciliter l'émission des chèques et l'encaissement des chèques.

 

[78]        Quant à la facilitation de l'émission des chèques, l'intimée affirme que ces activités sont exclues par les alinéas r.4), r.5) et t). Je souscris à cet argument en ce qui concerne les alinéas r.4) et r.5), mais non en ce qui concerne l'alinéa t).

 

[79]        En 2010, la définition du terme « service financier » a été modifiée rétroactivement en réponse aux décisions judiciaires. Les alinéas r.4) et r.5) faisaient partie de cette modification. Ils prévoient les exclusions suivantes :

 

r.4) le service, sauf un service visé par règlement, qui est rendu en préparation de la prestation effective ou éventuelle d'un service visé à l'un des alinéas a) à i) et l), ou conjointement avec un tel service, et qui consiste en l'un des services suivants :

 

(i) un service de collecte, de regroupement ou de communication de renseignements,

 

(ii) un service d'étude de marché, de conception de produits, d'établissement ou de traitement de documents, d'assistance à la clientèle, de publicité ou de promotion ou un service semblable;

 

r.5) un bien, sauf un effet financier ou un bien visé par règlement, qui est livré à une personne, ou mis à sa disposition, conjointement avec la prestation par celle‑ci d'un service visé à l'un des alinéas a) à i) et l);

 

[80]        À mon avis, les activités des casinos, lorsqu'il s'agissait de prendre des mesures en vue de l'émission des chèques de Global, étaient visées par ces deux dispositions. Cette fourniture a deux parties principales : (1) le fait de permettre l'installation de kiosques dans les locaux; (2) la fourniture de services de soutien aux cages des caisses, par exemple quant au processus de transaction et aux transactions effectuées pour le compte des clients.

 

[81]        En permettant l'installation de kiosques dans les locaux des casinos, ceux‑ci effectuent une fourniture de biens au sens de l'alinéa r.5). Le terme « bien » est défini en des termes généraux au paragraphe 123(1).

 

[82]        En fournissant les services de soutien des caissiers, les casinos effectuent une fourniture décrite à l'alinéa r.4). Les services sont fournis conjointement avec l'émission de chèques, un service financier, et consistent principalement en la collecte et la communication de renseignements ainsi qu'en l'établissement et le traitement de documents. Les caissiers peuvent également fournir des services d'assistance à la clientèle. Toutes ces activités sont visées par l'alinéa r.4).

 

[83]        Je conclus donc que la fourniture effectuée par les casinos conjointement avec la prise de mesures en vue de l'émission de chèques est exclue des services financiers par suite des alinéas r.4) et r.5) combinés.

 

[84]        Compte tenu de cette conclusion, je n'ai pas à examiner la question de l'exclusion des services administratifs figurant à l'alinéa t). Je tiens à faire remarquer brièvement que cette disposition ne s'applique pas, parce que les casinos sont à risque en effectuant la fourniture. Le risque comporte tout au moins la prise en charge de la perte si une opération est annulée par la banque émettrice de la carte et si le casino n'a pas respecté le processus de transaction requis.

 

[85]        Quant au service d'encaissement des chèques de Global, je conclus qu'aucune des exclusions ne s'applique à ce service. Plus précisément, l'encaissement de chèques n'est pas visé par les alinéas r.4) ou r.5). Quant à l'alinéa t), le service peut être considéré comme un service administratif, mais les casinos sont à risque à l'égard des chèques, au sens de la définition de « personne à risque » figurant dans le Règlement. Par conséquent, l'alinéa t) ne s'applique pas.

 

[86]        L'appelante affirme que l'encaissement de chèques n'est pas un service administratif, parce qu'il s'agit d'un service expressément mentionné à titre de service financier. Elle invoque la décision La Banque Royale du Canada c. La Reine, précitée, au par. 18.

 

[87]        Je suis d'accord pour dire que la décision Banque Royale étaye la thèse selon laquelle l'encaissement de chèques n'est pas un service administratif pour l'application de l'alinéa t). Toutefois, je préfère fonder ma conclusion sur le fait que les casinos sont des « personnes à risque » à l'égard des chèques.

 

[88]        Le Règlement définit une « personne à risque » comme incluant une personne qui a fourni une indemnité se rapportant à un effet. Le terme « indemnité » est général et englobe la protection que les casinos fournissent à Global à l'égard des chèques s'ils ne respectent pas le processus de transaction.

 

[89]        En outre, une « personne à risque » n'inclut pas une personne qui est à risque uniquement parce qu'elle fournit un service de compensation ou de règlement. Cette exclusion ne s'applique pas au service d'encaissement des chèques. Même si l'encaissement des chèques de Global constitue un service de compensation ou de règlement, l'« indemnité » ne se rapporte pas à ce service, mais plutôt à l'omission de respecter le processus de transaction.

 

[90]        Je conclus que les casinos sont à risque à l'égard des chèques et que l'alinéa t) ne s'applique donc pas au service d'encaissement des chèques de Global.

 

[91]        Où cela nous mène‑t‑il? J'ai conclu qu'un élément de la fourniture est compris dans la définition du terme « service financier » et qu'il s'agit de l'encaissement des chèques de Global.

 

D. De quelle façon la contrepartie devrait-elle être répartie?

 

[92]        Étant donné qu'une partie seulement de la fourniture est visée par la définition du terme « service financier », il faut se demander s'il y a des fournitures multiples pour l'application de la Loi.

 

[93]        Les principaux éléments de l'ensemble de fournitures sont les suivants : (1) permettre que des kiosques soient installés dans les locaux; (2) fournir des services de soutien aux cages des caisses, par exemple quant au processus de transaction et aux transactions effectuées pour le compte des clients; (3) encaisser les chèques de Global.

 

[94]        À mon avis, ces fournitures ne sont pas interdépendantes au point qu'elles devraient être considérées comme une fourniture unique selon les principes énoncés dans la décision O. A. Brown Ltd. Il est pratique, mais non nécessaire, que les casinos fournissent tous ces éléments. Je ferai également remarquer que cette conclusion est également davantage compatible avec la définition du terme « service financier » et avec la Loi dans son ensemble.

 

[95]        Global affirme qu'il y a une seule fourniture, parce que chaque partie de la fourniture n'est pas utile à elle seule (observations écrites de l'appelante, par. 124). Je ne suis pas d'accord. Il serait possible pour Global de fournir certaines parties de la fourniture elle‑même. Dans ce cas, l'apport d'une partie de la fourniture par les casinos serait utile à lui seul.

 

[96]        Quant à la règle de la fourniture accessoire, aucun de ces éléments ne constitue qu'une partie mineure de la fourniture, de façon à être accessoire au sens décrit dans la décision 9056‑2059 Québec Inc., précitée.

 

[97]        Il convient donc de répartir la contrepartie entre les fournitures taxables et les fournitures exonérées. Je conclus qu'il convient d'attribuer la contrepartie dans une proportion de 25 p. 100 à l'encaissement des chèques. Il s'agit d'une fourniture essentielle, mais non de la fourniture dominante. La fourniture dominante se rapporte à l'émission des chèques de Global. Cela comporte le fait de permettre l'installation de kiosques dans les locaux et la fourniture des services des caissiers, par exemple quant au processus de transaction et aux transactions effectuées pour les clients. Global reconnaît la chose dans ses observations écrites (par. 129).

 

[98]        En arrivant à ces conclusions, j'ai tenu compte du fait que, selon toute probabilité, aucune des fournitures ne comportait un coût marginal élevé pour les casinos. Les casinos avaient déjà à leur disposition les installations, les services de caissiers et des montants considérables d'argent. En outre, je ne suis pas convaincue que les casinos croyaient que les risques qu'ils assumaient étaient élevés.

 

[99]        Par conséquent, je conclus que les frais des casinos sont exonérés, dans une proportion de 25 p. 100, à titre de service financier, quant à l'encaissement des chèques de Global, et que le reste des frais des casinos sont assujettis à la TPS.

 

VI.     Conclusion

 

[100]   L'appel sera accueilli, et la cotisation sera renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, pour le motif que 25 p. 100 de la TPS a été payé par erreur. Les dépens seront adjugés à l'intimée.

 

Signé à Toronto (Ontario), ce 18e jour de mai 2012.

 

 

« J. M. Woods »

Le juge Woods

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d'octobre 2012.

 

 

 

Yves Bellefeuille, réviseur

 


ANNEXE

 

Extraits de la Loi sur la taxe d'accise, partie IX, L.C. 1990, ch. 45, dans sa forme modifiée.

 

 Définitions — (1) Les définitions qui suivent s'appliquent à l'article 121, à la présente partie et aux annexes V à X.

 

[...]

 

« argent »Y sont assimilés la monnaie, les chèques, les billets à ordre, les lettres de crédit, les traites, les chèques de voyage, les lettres de change, les bons de poste, les mandats-poste, les versements postaux et tout autre effet, canadien ou étranger, de même nature. La présente définition exclut la monnaie dont la juste valeur marchande dépasse la valeur nominale dans le pays d'origine et celle fournie ou détenue pour sa valeur numismatique.

 

« bien » À l'exclusion d'argent, tous biens — meubles et immeubles — tant corporels qu'incorporels, y compris un droit quelconque, une action ou une part.

 

« effet financier »

 

a) Titre de créance;

 

b) titre de participation;

 

c) police d'assurance;

 

d) participation dans une société de personnes ou une fiducie ou droit dans une succession, ou droit y afférent;

 

e) métal précieux;

 

f) option ou contrat, négocié dans une bourse de commerce reconnue, pour la fourniture à terme de marchandises;

 

g) effet visé par règlement;

 

h) garantie, acceptation ou indemnité visant un effet visé à l'alinéa a), b), d), e) ou g);

 

i) option ou contrat pour la fourniture à terme d'argent ou d'un effet visé à l'un des alinéas a) à h).

 

« service financier »

 

a) L'échange, le paiement, l'émission, la réception ou le transfert d'argent, réalisé au moyen d'échange de monnaie, d'opération de crédit ou de débit d'un compte ou autrement;

 

b) la tenue d'un compte d'épargne, de chèques, de dépôt, de prêts, d'achats à crédit ou autre;

 

c) le prêt ou l'emprunt d'un effet financier;

 

d) l'émission, l'octroi, l'attribution, l'acceptation, l'endossement, le renouvellement, le traitement, la modification, le transfert de propriété ou le remboursement d'un effet financier;

 

e) l'offre, la modification, la remise ou la réception d'une garantie, d'une acceptation ou d'une indemnité visant un effet financier;

 

f) le paiement ou la réception d'argent à titre de dividendes, sauf les ristournes, d'intérêts, de principal ou d'avantages, ou tout paiement ou réception d'argent semblable, relativement à un effet financier;

 

f.1) le paiement ou la réception d'un montant en règlement total ou partiel d'une réclamation découlant d'une police d'assurance;

 

g) l'octroi d'une avance ou de crédit ou le prêt d'argent;

 

h) la souscription d'un effet financier;

 

i) un service rendu en conformité avec les modalités d'une convention portant sur le paiement de montants visés par une pièce justificative de carte de crédit ou de paiement;

 

j) le service consistant à faire des enquêtes et des recommandations concernant l'indemnité accordée en règlement d'un sinistre prévu par :

 

(i) une police d'assurance maritime,

 

(ii) une police d'assurance autre qu'une police d'assurance‑accidents, d'assurance‑maladie ou d'assurance‑vie, dans le cas où le service est fourni :

 

(A) soit par un assureur ou une personne autorisée par permis obtenu en application de la législation d'une province à rendre un tel service,

 

(B) soit à un assureur ou un groupe d'assureurs par une personne qui serait tenue d'être ainsi autorisée n'eût été le fait qu'elle en est dispensée par la législation d'une province;

 

j.1) le service consistant à remettre à un assureur ou au fournisseur du service visé à l'alinéa j) une évaluation des dommages causés à un bien ou, en cas de perte d'un bien, de sa valeur, à condition que le fournisseur de l'évaluation examine le bien ou son dernier emplacement connu avant sa perte;

 

k) une fourniture réputée par le paragraphe 150(1) ou l'article 158 être une fourniture de service financier;

 

l) le fait de consentir à effectuer, ou de prendre les mesures en vue d'effectuer, un service qui, à la fois :

 

(i) est visé à l'un des alinéas a) à i),

 

(ii) n'est pas visé aux alinéas n) à t);

 

m) un service visé par règlement.

 

La présente définition exclut :

 

n) le paiement ou la réception d'argent en contrepartie de la fourniture d'un bien autre qu'un effet financier ou d'un service autre qu'un service financier;

 

o) le paiement ou la réception d'argent en règlement d'une réclamation (sauf une réclamation en vertu d'une police d'assurance) en vertu d'une garantie ou d'un accord semblable visant un bien autre qu'un effet financier ou un service autre qu'un service financier;

 

p) les services de conseil, sauf un service visé aux alinéas j) ou j.1);

 

q) l'un des services suivants rendus soit à un régime de placement, au sens du paragraphe 149(5), soit à une personne morale, à une société de personnes ou à une fiducie dont l'activité principale consiste à investir des fonds, si le fournisseur est une personne qui rend des services de gestion ou d'administration au régime, à la personne morale, à la société de personnes ou à la fiducie :

 

(i) un service de gestion ou d'administration,

 

(ii) tout autre service (sauf un service prévu par règlement);

 

q.1) un service de gestion des actifs;

 

r) les services professionnels rendus par un comptable, un actuaire, un avocat ou un notaire dans l'exercice de sa profession;

 

r.1) le fait de prendre des mesures en vue du transfert de la propriété des parts du capital social d'une coopérative d'habitation;

 

r.2) le service de recouvrement de créances rendu aux termes d'une convention conclue entre la personne qui consent à effectuer le service, ou qui prend des mesures afin qu'il soit effectué, et une personne donnée (sauf le débiteur) relativement à tout ou partie d'une créance, y compris le service qui consiste à tenter de recouvrer la créance, à prendre des mesures en vue de son recouvrement, à en négocier le paiement ou à réaliser ou à tenter de réaliser une garantie donnée à son égard; en est exclu le service qui consiste uniquement à accepter d'une personne (sauf la personne donnée) un paiement en règlement de tout ou partie d'un compte, sauf si la personne qui effectue le service, selon le cas :

 

(i) peut, aux termes de la convention, soit tenter de recouvrer tout ou partie du compte, soit réaliser ou tenter de réaliser une garantie donnée à son égard,

 

(ii) a pour entreprise principale le recouvrement de créances;

 

r.3) le service, sauf un service visé par règlement, qui consiste à gérer le crédit relatif à des cartes de crédit ou de paiement, à des comptes de crédit, d'achats à crédit ou de prêts ou à des comptes portant sur une avance, rendu à une personne qui consent ou pourrait consentir un crédit relativement à ces cartes ou comptes, y compris le service rendu à cette personne qui consiste, selon le cas :

 

(i) à vérifier, à évaluer ou à autoriser le crédit,

 

(ii) à prendre, en son nom, des décisions relatives à l'octroi de crédit ou à une demande d'octroi de crédit,

 

(iii) à créer ou à tenir, pour elle, des dossiers relatifs à l'octroi de crédit ou à une demande d'octroi de crédit ou relatifs aux cartes ou aux comptes,

 

(iv) à contrôler le registre des paiements d'une autre personne ou à traiter les paiements faits ou à faire par celle‑ci;

 

r.4) le service, sauf un service visé par règlement, qui est rendu en préparation de la prestation effective ou éventuelle d'un service visé à l'un des alinéas a) à i) et l), ou conjointement avec un tel service, et qui consiste en l'un des services suivants :

 

(i) un service de collecte, de regroupement ou de communication de renseignements,

 

(ii) un service d'étude de marché, de conception de produits, d'établissement ou de traitement de documents, d'assistance à la clientèle, de publicité ou de promotion ou un service semblable;

 

r.5) un bien, sauf un effet financier ou un bien visé par règlement, qui est livré à une personne, ou mis à sa disposition, conjointement avec la prestation par celle‑ci d'un service visé à l'un des alinéas a) à i) et l);

 

s) les services dont la fourniture est réputée taxable aux termes de la présente partie;

 

t) les services visés par règlement.

 

« titre de créance » Droit de se faire payer de l'argent, y compris le dépôt d'argent. La présente définition exclut le bail, la licence ou l'accord semblable visant l'utilisation ou le droit d'utilisation de biens autres que des effets financiers.

 

138 Fournitures accessoires — Pour l'application de la présente partie, le bien ou le service dont la livraison ou la prestation peut raisonnablement être considérée comme accessoire à la livraison ou à la prestation d'un autre bien ou service est réputé faire partie de cet autre bien ou service s'ils ont été fournis ensemble pour une contrepartie unique.

 

139 Services financiers dans une fourniture mixte — Pour l'application de la présente partie, dans le cas où au moins un service financier est fourni avec au moins un service non financier ou un bien qui n'est pas une immobilisation du fournisseur, pour une contrepartie unique, la fourniture de chacun des services et biens est réputée être une fourniture de service financier si les conditions suivantes sont réunies :

 

a) le service financier est lié au service non financier ou au bien;

 

b) le fournisseur a l'habitude de fournir ces services ou des services semblables, ou des biens et des services semblables, ensemble dans le cours normal de son entreprise;

 

c) le total des montants dont chacun représenterait la contrepartie d'un service financier ainsi fourni, s'il était fourni séparément, compte pour plus de la moitié du total des montants dont chacun représenterait la contrepartie d'un service ou d'un bien ainsi fourni, s'ils étaient fournis séparément.

 

165(1) Taux de la taxe sur les produits et services — Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, l'acquéreur d'une fourniture taxable effectuée au Canada est tenu de payer à Sa Majesté du chef du Canada une taxe calculée au taux de 6 % sur la valeur de la contrepartie de la fourniture.

 

Annexe V, partie VII — Services financiers

 

1.         La fourniture de services financiers qui ne figurent pas à la partie IX de l'annexe VI.

 

Extrait du Règlement sur les services financiers — Règlement concernant les services prévus aux alinéas m) et t) de la définition de « service financier »

 

4(1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

 

« effet » Argent, compte, pièce justificative de carte de crédit ou de paiement, ou effet financier.

 

« personne à risque » Personne exposée à un risque financier du fait de la propriété, de l'acquisition ou de l'émission par la personne d'un effet à l'égard duquel un service mentionné au paragraphe (2) est offert, ou à cause d'une garantie, d'une acceptation ou d'une indemnité se rapportant à l'effet, à l'exclusion de la personne qui s'expose à un tel risque dans le cadre et du seul fait de l'autorisation d'une opération relative à l'effet ou de la fourniture d'un service de compensation ou de règlement relativement à l'effet.

 

(2) Sous réserve du paragraphe (3), pour l'application de l'alinéa t) de la définition de « service financier », au paragraphe 123(1) de la Loi, sont visés les services suivants, sauf ceux mentionnés à l'article 3 :

 

a) la communication, la collecte ou le traitement de renseignements;

 

b) les services administratifs, y compris ceux reliés au paiement ou au recouvrement de dividendes, d'intérêts, de capital, de créances, d'avantages ou d'autres montants, à l'exclusion des services ne portant que sur le paiement ou le recouvrement.

 

(3) Pour l'application de l'alinéa t) de la définition de « service financier », au paragraphe 123(1) de la Loi, ne sont pas visés les services mentionnés au paragraphe (2) et fournis relativement à un effet par :

 

a) la personne à risque;

 

b) une personne membre du même groupe étroitement lié que la personne à risque, si l'acquéreur du service n'est ni la personne à risque ni une autre personne membre du même groupe étroitement lié que celle‑ci;

 

c) le mandataire, le vendeur ou le courtier qui prend des mesures en vue de l'émission, du renouvellement, de la modification ou du transfert de propriété de l'effet pour le compte de la personne à risque ou d'une personne membre du même groupe étroitement lié que celle‑ci.

 


RÉFÉRENCE :                                 2012 CCI 173

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :    2008-922(GST)G

 

INTITULÉ :                                      GLOBAL CASH ACCESS (CANADA) INC. c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATES DE L'AUDIENCE :             Les 28, 29 et 30 septembre et les 6 et 8 décembre 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L'honorable juge J. M. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 18 mai 2012

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l'appelante :

Me Dalton J. Albrecht

Me David W. Chodikoff

Me Rahul Sharma

M. David Carter (stagiaire)

 

Avocates de l'intimée :

Me Marilyn Vardy

Me Annie Paré

Me Sharon Lee

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l'appelante :

Nom :

Dalton J. Albrecht

Cabinet :

Miller Thomson Pouliot sencrl

Toronto (Ontario)

 

Pour l'intimée :

Nom :

Myles J. Kirvan

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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