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Dossier : 2012-1697(IT)I

ENTRE :

DARLENE A. KARN,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

Appels entendus le 8 février 2013, à Calgary (Alberta).

 

Devant : L’honorable juge Diane Campbell

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Patrick Lindsay

Avocat de l’intimée :

Me Adam Gotfried

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

Les appels interjetés à l’encontre des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2009 et 2010 sont accueillis sans dépens, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 7e jour de mars 2013.

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

 

Traduction certifiée conforme

ce 2jour de mai 2013.

Espérance Mabushi, M.A. Trad. Jur


 

 

 

 

 

Référence : 2013 CCI 78

Date : 20130307

Dossier : 2012-1697(IT)I

 

ENTRE :

 

DARLENE A. KARN,

appelante,

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

La juge Campbell

 

[1]             Pour les années d’imposition 2009 et 2010, le fils de l’appelante (qui est également désigné comme « L ») était inscrit comme élève à la Calgary Academy, une école privée qui offre des services d’éducation spécialisée, désignée et agréée par la province de l’Alberta. L’appelante a demandé un crédit d’impôt pour frais médicaux à l’égard de chacune des années d’imposition en question pour des frais de scolarité qu’elle avait payés à la Calgary Academy. Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a refusé la demande, parce que les montants payés à la Calgary Academy au titre des frais de scolarité n’étaient pas des frais médicaux au sens de l’alinéa 118.2(2)e) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

 

[2]             L’alinéa 118.2(2)e) de la Loi est ainsi libellé :

 

  

(2)         Frais médicaux. Pour l’application du paragraphe (1), les frais médicaux d’un particulier sont les frais payés :

[…]

 

e)    pour le soin dans une école, une institution ou un autre endroit — ou le soin et la formation — du particulier, de son époux ou conjoint de fait ou d’une personne à charge visée à l’alinéa a), qu’une personne habilitée à cette fin atteste être quelqu’un qui, en raison d’un handicap physique ou mental, a besoin d’équipement, d’installations ou de personnel spécialisés fournis par cette école ou institution ou à cet autre endroit pour le soin — ou le soin et la formation — de particuliers ayant un handicap semblable au sien;

 

[3]             Le contribuable doit satisfaire à certains critères pour pouvoir déduire des frais en vertu de l’alinéa 118.2(2)e) de la Loi. Ces critères ont été énoncés au paragraphe 20 de la décision Collins v. The Queen, [1998] 3 C.T.C. 2981, qui a été invoquée dans d’autres décisions de la Cour ainsi que des arrêts de la Cour d’appel fédérale. Voici la teneur du paragraphe 20 de la décision Collins :

 

20        On voit clairement en lisant cette disposition qu’il y a plusieurs critères auxquels il doit être satisfait, soit :

 

1. Le contribuable doit payer des frais pour le soin dans une école, une institution ou un autre endroit – ou le soin et la formation – du particulier.

 

2. Le particulier doit avoir un handicap mental.

 

3. L’école, institution ou autre endroit doit fournir au particulier ayant le handicap de l’équipement, des installations ou du personnel spécialisés pour le soin – ou le soin et la formation – de particuliers ayant le même handicap.

 

4. Une personne habilitée à cette fin doit attester que le handicap physique ou mental est la raison pour laquelle le particulier a besoin que l’école fournisse l’équipement, les installations ou le personnel spécialisés pour le soin – ou le soin et la formation – de particuliers ayant le même handicap.

 

[4]             Bien que le juge Campbell Miller semble avoir « peaufiné » ces critères dans les motifs qu’il a rendus dans la décision Lang c. La Reine, 2009 CCI 182, 2009 D.T.C. 1127, il s’agissait généralement d’une reformulation des critères énoncés dans la décision Collins. Je tiens également à souligner que, selon la reformulation des critères faite par le juge Miller, le contribuable doit fournir « une attestation », ce qui, je crois, suppose à tort qu’un document, un rapport ou tout autre document écrit doit être produit. Toutefois, la disposition elle‑même utilise l’expression « […] atteste être quelqu’un [...] », sous‑entendant par là que l’attestation peut être fournie sous quelque forme que ce soit, y compris par le témoignage oral à l’audience d’une personne dûment habilitée, qui est la méthode qu’il est préférable d’employer.

 

[5]             L’appelante a payé des frais de scolarité à l’école pour les deux années d’imposition en question et cela n’est pas en cause. En outre, l’intimée a concédé que la Calgary Academy est une institution spécialisée offrant des programmes conçus pour répondre aux besoins d’élèves ayant des déficiences. Par conséquent, ce critère n’est pas en cause. Pour trancher la question de savoir si l’appelante a le droit de demander la déduction des frais de scolarité, je dois décider si les attestations, ou l’une ou l’autre d’entre elles, qui ont été produites en preuve sont suffisantes et s’il a été attesté que le fils de l’appelante avait un handicap mental. À l’audience, les débats ont principalement porté sur la validité de ces attestations.

 

[6]             J’ai entendu le témoignage de deux personnes : Glen McGinitie, l’époux de l’appelante et Kim Anne McLean, la directrice de la Calgary Academy. M. McGinitie a témoigné que son fils était inscrit à la St. Catharine’s Elementary School de la première année à la troisième année, mais que, lorsque l’école est devenue une [traduction] « école source » (Transcription, à la page 6, ligne 13) pour les quartiers avoisinants et que le nombre d’élèves a considérablement augmenté, les parents de L (les « parents ») ont inscrit leur fils à la Prince of Wales School où [traduction] « […] il est devenu évident que les choses ne se passaient pas bien pour lui dans cet environnement ». (Transcription, à la page 6, lignes 21 à 22). Le fils de l’appelante a fréquenté cette école jusqu’à la fin de la sixième année. Toutefois, en sixième année, il est devenu anxieux, stressé et déprimé au cours de l’année scolaire et, [traduction] « […] nous nous sommes rendus compte qu’il se passait quelque chose d’important et que nous devions examiner la situation ». (Transcription, à la page 7, lignes 22 et 23.) À ce moment‑là, les parents ont emmené leur fils voir une psychologue agréée, la Dre Marlis Krueger, qui a fourni la première des trois attestations médicales qui ont été produites en preuve. À la suite de réunions, d’évaluations et d’entrevues qui se sont étalées sur six jours différents pendant une période de plusieurs mois, la Dre Krueger a produit un rapport approfondi et détaillé daté du 5 juin 2007 (le « rapport Krueger »).

 

[7]             Le rapport Krueger a relevé un certain nombre de préoccupations et de faiblesses en lecture, en langage écrit, en mathématiques et en compréhension orale. Dans certains domaines de chacune de ces catégories, la note de L était dans la moyenne de son niveau scolaire, mais, dans d’autres, sa note ou son évaluation était inférieure à la moyenne. Par exemple, [traduction] sa « vitesse de [l]ecture nécessaire pour atteindre une bonne compréhension était inférieure à la moyenne (12centile) et serait plus typique de celle d’un élève de troisième année ». (Le rapport Krueger, à la page 4.) La Dre Krueger a également souligné que le fils de l’appelante avait des faiblesses importantes en mathématiques, y compris [traduction] « […] en matière de vitesse, de connaissance et de mémorisation pour ce qui est des additions, des soustractions et des multiplications à un chiffre […] plus typiques d’un élève qui est à la fin de la deuxième année ». (Le rapport Krueger, à la page 4.) Là encore, dans sa compréhension orale, la [traduction] « [q]uantité de détails qu’il se rappelait n’était pas constante et il se souvenait de l’information d’une manière désordonnée ». (Le rapport Krueger, à la page 4.)

 

[8]             Au terme de l’évaluation, le diagnostic posé par la Dre Krueger à l’égard du fils de l’appelante était qu’il [traduction] « […] a des antécédents de tendance à l’anxiété, et les descriptions indiquent un développement du trouble obsessivo‑compulsif […] ». (Le rapport Krueger, à la page 7.) Étant donné que le fils de l’appelante avait des antécédents de tendance à l’anxiété au cours des premières années de scolarisation et que cette tendance s’était intensifiée en sixième année, la Dre Krueger a fait quatre recommandations à la fin de son rapport, y compris la proposition d’une autre réévaluation dans environ deux ans. Toutefois, compte tenu de l’évaluation que la Dre Krueger avait faite de la possibilité qu’il existe un trouble de l’attention, elle a conclu qu’[traduction] « [un] diagnostic de tout type de trouble d’hyperactivité avec déficit de l’attention (« THADA ») ne serait pas indiqué à ce moment‑ci compte tenu du fait qu’il y a peu de symptômes […] ». (Le rapport Krueger, à la page 6. Non souligné dans l’original.) Il est souligné dans le rapport que le fils de l’appelante avait la capacité de réussir dans un programme scolaire ordinaire, à condition que des mesures d’adaptation soient prises à l’égard des programmes scolaires qui lui étaient offerts, notamment :

 

[traduction]

 

·                     fournir des copies des notes de cours pour que la prise de notes soit réduite;

·                     mettre les renseignements importants par écrit pour [L] au lieu de les donner oralement uniquement;

·                    accorder un temps additionnel pour les travaux en classe, les épreuves et les examens;

·                     fournir l’accès à un ordinateur pour l’accomplissement des travaux écrits afin faciliter la révision;

·                     effectuer les épreuves dans un lieu plus calme.

 

(Le rapport Krueger, à la page 7.)

 

[9]             Suivant la recommandation de la Dre Krueger selon laquelle le fils de l’appelante devrait faire l’objet d’une évaluation médicale par son médecin de famille, celui‑ci a dirigé les parents de L à la Dre J.E. Besant, une psychiatre consultante. Celle‑ci a produit le deuxième rapport (le « rapport Besant »), daté du 27 septembre 2007. Bien que M. McGinitie ait témoigné que la psychiatre avait eu plusieurs entrevues avec les McGinitie et leur fils, la psychiatre ne mentionne dans son rapport qu’un seul rendez-vous et elle y signale que, compte tenu du fait qu’il était impossible d’effectuer une évaluation approfondie pour leur fils durant le temps limité de la consultation, son rapport comprenait son propre examen et ses propres observations ainsi que l’examen du rapport de la Dre Krueger établi en juin 2007. Elle a conclu que le fils de l’appelante présentait une variété de symptômes d’anxiété et certains symptômes obsessionnels, mais, contrairement au diagnostic établi par la Dre Kruger, elle a conclu qu’il ne répondait pas aux critères d’une personne atteinte du trouble obsessivo‑compulsif. À la page 2 de son rapport, la Dre J.E. Besant a fait les observations suivantes relativement au diagnostic de trouble obsessivo‑compulsif posé par la Dre Krueger :

 

[traduction

 

Dans l’ensemble, ces symptômes obsessionnels et compulsifs éventuels ne durent pas actuellement plus d’une heure par jour ou n’entraînent pas d’altération ni de dysfonctionnement considérable.

 

Elle a souligné la présence de pensées suicidaires et a entre autres posé le diagnostic suivant à l’égard du fils de l’appelante :

 

[traduction

 

I.         Trouble anxieux, sans autres précisions (généralisé pour une large part, et présentant certaines caractéristiques obsessionnelles). Possibilité de la présence d’un trouble d’adaptation et d’anxiété.

            Trouble d’apprentissage, sans autres précisions (faiblesse de la mémoire de travail, de la vitesse de traitement de l’information, de la vitesse de lecture, de la vitesse et de la qualité de productions écrites et de la vitesse en mathématiques).

 

[…]

 

(Le rapport Besant, aux pages 3 et 4.)

 

[10]        Dans la section concernant les suggestions/discussions du rapport Besant, la psychiatre a déclaré que, compte tenu du rapport Krueger, il était peu probable qu’un diagnostic de THADA soit posé. Toutefois, elle a appuyé l’idée d’obtenir une évaluation plus détaillée des compétences liées à la mémoire de travail et à la vitesse de traitement de l’information auprès d’un psychologue pour obtenir des indications plus précises en ce qui a trait à l’école et aux difficultés d’apprentissage. Au moment où le rapport a été établi, le fils de l’appelante avait commencé la 7année à la Willow Park Fine Arts School (l’« école Willow Park »). Les parents espéraient que l’environnement de cette école serait favorable à leur fils en ce qui concerne l’anxiété dont il souffrait et répondrait mieux à ses besoins compte tenu de ses difficultés d’apprentissage. Le rapport Besant mentionne que, si la nouvelle école fréquentée par L ne convenait pas, les parents devraient demander une autre évaluation psychologique.

 

[11]        En plus de ce rapport, la Dre Besant a rédigé, à l’intention de l’école que fréquentait le fils de l’appelante à l’époque, à savoir l’école Willow Park , une brève lettre d’une page faisant état du diagnostic à des fins de codage de l’école.

 

[12]        La troisième et dernière attestation (le « rapport MacPherson ») a été établie deux ans plus tard, soit le 21 septembre 2009, par la Dre Jennifer MacPherson, une consultante en pédiatrie spécialiste en matière de difficultés d’apprentissage. Étant donné que cette lettre est courte et qu’elle est essentielle à la conclusion que j’ai tirée, je la reproduis entièrement ci‑dessous :

 

[traduction

 

L est mon patient depuis avril 2008. Il est âgé de 14 ans et a reçu un diagnostic de trouble déficitaire de l’attention de type inattentif (le « TDA »). L est soigné au Strattera. Le TDA est souvent accompagné d’autres troubles d’apprentissage comorbides (qui existent ensemble), et c’est le cas pour L, qui est également atteint d’un trouble d’apprentissage avec anxiété, sans autres précisions, des troubles qui entraînent une faiblesse extrême de la mémoire de travail ainsi qu’une faiblesse de la vitesse de traitement de l’information, de la vitesse et de la qualité de productions écrites et de la vitesse en mathématiques (des faiblesses qui ont été toutes relevées dans l’évaluation de la Dre J.E. Besant, psychiatre – lettre du 9 octobre 2007). Un élément complémentaire au traitement suivi par L pour ces troubles d’apprentissage est le besoin de le placer dans une école spécialisée qui offre une formation pédagogique spécialisée et des plans de programmes individualisés très précis, qui optimise le ratio enseignant‑élève et qui fournit un soutien individualisé très important. L fréquente actuellement la Calgary Academy, une école que je recommande fortement, étant donné qu’elle fournit les installations et le personnel décrits ci‑dessus.

 

[13]        La Dre MacPherson souligne le fait que le fils de l’appelante est son patient depuis avril 2008. Selon le témoignage de M. McGinitie, L a eu de mauvais résultats en septième année à l’école Willow Park et, là encore, on a décidé de le changer d’école et de l’inscrire à la Calgary Academy pour qu’il commence sa huitième année à cette école à l’automne 2008. M. McGinitie a déclaré que la Dre MacPherson avait achevé son évaluation au cours de la période d’avril à septembre 2008. Selon le rapport, la Dre MacPherson a posé un diagnostic de trouble déficitaire de l’attention de type inattentif (le « TDA »), par opposition au type hyperactif, ainsi que d’autres troubles d’apprentissage, qui coexistaient avec le TDA. Lors du contre‑interrogatoire, M. McGinitie a affirmé que la Dre MacPherson utilisait considérablement son ordinateur portable et qu’elle y conservait d’autres dossiers et rapports. Toutefois, aucun de ces dossiers ou rapports n’a été produit en preuve. Compte tenu du fait que la lettre de la Dre MacPherson est brève et semble être presque un résumé de ses conclusions, il aurait été utile pour la Cour que ces documents justificatifs concernant les entrevues, les tests et l’évaluation qu’elle avait réalisés soient fournis à titre de documents d’appui au rapport.

 

[14]        La directrice de la Calgary Academy, Kim Anne McLean, a témoigné que, en se fondant sur le sujet de sa thèse, Metacognitive Lesson Planning for Learning Disabled Students (Planification de leçons au moyen de l’approche métacognitive pour des élèves ayant des troubles d’apprentissage), elle a élaboré un plan de cours que tous les enseignants de la Calgary Academy utilisent en fonction des exigences individuelles de chaque élève. La directrice a déclaré que les élèves qui entrent à la Calgary Academy doivent être évalués par un tiers indépendant en tant qu’élève ayant des troubles d’apprentissage. Elle a ainsi décrit le « trouble d’apprentissage » :

 

[traduction] 

 

« […] un élève qui a […] ou toute personne à l’égard de laquelle la divergence entre son potentiel et son rendement réel est telle qu’il en résulte une incapacité et dont l’origine de la divergence est neurologique. […] La définition acceptée a été rédigée en 2002 par l’Association canadienne des troubles d’apprentissage du Canada et c’est celle qui est actuellement utilisée par Alberta Education.

 

(Transcription, de la page 48, ligne 27 à la page 49, ligne 2.)

 

Elle a poursuivi ainsi :

 

[traduction] 

 

 

[…] [q]ue les troubles d’apprentissage peuvent influer sur eux dans les domaines de la lecture, du langage écrit, des mathématiques, du langage oral et sur la manière dont ils parlent. Ils résultent d’une incapacité dans la perception, le raisonnement, la mémoire ou l’apprentissage. Ce sont aussi – il peut s’agir de difficultés liées à l’organisation, aux aptitudes sociales et à l’adoption d’un point de vue et durent toute la vie. Ils découlent de facteurs génétiques ou neurobiologiques qui affectent le fonctionnement du cerveau. […]

 

(Transcription, à la page 51, lignes 7 à 14.)

 

Elle a continué la description d’un trouble d’apprentissage, dans des termes peut être plus courants, lorsqu’elle a déclaré que la plupart des élèves qui fréquentaient la Calgary Academy étaient au moins d’une intelligence moyenne et que :

 

[traduction] 

 

Lorsque les élèvent fournissent une évaluation indépendante, il y a lieu de constater qu’ils sont d’une intelligence moyenne. Ainsi, s’ils sont d’une intelligence moyenne et s’ils fréquentent un milieu scolaire moyen, ils devraient avoir un niveau de réussite moyen. Toutefois, ces élèvent qui viennent à notre école sont d’une intelligence moyenne et, selon leurs antécédents scolaires, ils ont des résultats de loin inférieurs à leurs capacités.

 

(Transcription, à la page 60, lignes 13 à 19.)

 

[15]        Compte tenu des observations de l’avocat de l’appelante et de l’intimée, je crois que j’ai reçu la plupart des décisions rendues dans ce domaine aussi bien par la Cour que par la Cour d’appel fédérale. Comme je l’ai déjà souligné dans les présents motifs, la décision Collins énonce les conditions qu’un contribuable doit remplir pour pouvoir déduire des frais en vertu de l’alinéa 118.2(2)e) de la Loi. Bien qu’une attestation n’ait pas à répondre à une présentation spéciale, elle doit être une « véritable attestation » (Canada c. Scott, 2008 CAF 286, 2008 D.T.C. 6682, au paragraphe 23). Dans cet arrêt, la juge s’est fondée sur le raisonnement suivi par la juge Sharlow dans l’arrêt Canada c. Title, Succession, 2001 CAF 106, 2001 D.T.C. 5236, au paragraphe 5, dans lequel la Cour d’appel fédérale a fait les observations suivantes :

 

 

[5]        À notre avis, une attestation prévue à l’alinéa 118.2(2)e) doit au moins préciser le handicap mental ou physique qu’a le patient, et l’équipement, les installations ou le personnel dont le patient a besoin afin d’obtenir le soin ou la formation nécessaire pour faire face à ce handicap. Les attestations en l’espèce sont tout simplement trop vagues pour répondre à cette exigence.

 

[16]        Pour décider de la validité de l’attestation proposée dans les appels susmentionnés, je dois d’abord trancher la question de savoir si un des trois rapports médicaux, ou une combinaison quelconque de ces rapports, relève un handicap mental dont souffre le fils de l’appelante et, ensuite, décider si le fils de l’appelante a besoin d’installations de soutien d’une école spécialisée, comme la Calgary Academy. Il pourrait y avoir des raisons d’accepter toutes les trois attestations ou deux d’entre elles, à condition qu’elles présentent un diagnostic clair et évolutif. Dans la décision Lucarelli c. La Reine, 2012 CCI 301, 2012 D.T.C. 1250, il a été conclu qu’une combinaison d’un rapport initial du médecin et d’une évaluation de suivi effectuée par le Dyslexia Resource Centre répondait à l’obligation de produire une attestation. Au paragraphe 22 des motifs de sa décision, la juge Woods a fait les observations suivantes :

 

[22]      Il me semble qu’il a été satisfait aux exigences prévues par la loi dans la situation où le rapport de la Dre Johnston précise la nature du handicap et le genre de formation qui est nécessaire, et la preuve établit que la TALC Academy est spécialisée pour offrir ce type de formation aux enfants ayant ce handicap.

 

[17]        Toutefois, en l’espèce, et contrairement aux observations de l’appelante, je ne crois pas qu’il y ait quoi que ce soit qui ressemble à un diagnostic évolutif dans les rapports produits. Il est toujours préférable que l’auteur d’un tel rapport soit présent pour témoigner et pour être contre‑interrogé. En l’absence d’un tel témoignage et d’un tel contre-interrogatoire, je dois décider, en fonction du contenu de ces rapports, s’il a été satisfait aux obligations énoncées à l’alinéa 118.2(2)e) de la Loi. Cela dit, les rapports doivent, à première vue, être clairs et précis et ils ne doivent laisser aucun doute dans mon esprit quant à ce qui y est déclaré. Le rapport Krueger a établi que le fils de l’appelante était atteint d’un trouble anxieux et qu’il présentait des symptômes d’un trouble obsessionnel compulsif, mais il est déclaré dans ce rapport que le fils de l’appelante devrait continuer à suivre le programme scolaire ordinaire. Le rapport en question ne satisfait pas aux obligations imposées à l’alinéa 118.2(2)e) de la Loi. Le rapport Besant fait aussi état d’un trouble anxieux, mais rejette le diagnostic de trouble obsessionnel convulsif posé par la Dre Krueger et conclut plutôt à la présence d’un trouble d’apprentissage accompagné de faiblesses, notamment dans les domaines concernant la mémoire de travail, la vitesse de traitement de l’information et de lecture, la vitesse en mathématiques ainsi que la vitesse et la qualité de productions écrites. Il s’agissait d’un diagnostic très différent de celui posé par la Dre Krueger et certainement pas évolutif, contrairement à ce que l’appelante avait laissé entendre. Le rapport Besant ne répond pas à l’obligation de produire une attestation. Il est toujours recommandé dans ce rapport que le fils de l’appelante continue de fréquenter l’école Willow Park, moyennant une aide et une supervision accrues relativement aux programmes de cette école. La Dre J.E. Besant n’a pas recommandé une école privée spécialisée comme la Calgary Academy. Toutefois, la Dre J.E. Besant reconnaît dans ce rapport que l’école Willow Park peut se révéler inadéquate pour les besoins de L, lorsqu’elle précise dans ses recommandations, au paragraphe 5, que si cela devait arriver, les parents sont fortement encouragés à continuer à chercher des solutions aux questions concernant l’école et l’apprentissage.

 

[18]        Les deux éléments communs que je vois dans le rapport Krueger et le rapport Besant sont, d’abord, la reconnaissance par les deux médecins de l’aggravation des difficultés d’apprentissage dans les mêmes domaines et de la nécessité que les écoles prennent des mesures d’adaptation pour aider et soutenir le fils de l’appelante en ce qui concerne ses difficultés d’apprentissage et, ensuite, le fait que les deux médecins aient admis qu’il y avait un risque d’aggravation des symptômes que présentait L.

 

[19]        Ni le rapport Krueger ni le rapport Besant, pris isolément ou ensemble, ne peuvent appuyer l’obligation de produire une attestation imposée par l’alinéa 118.2(2)e) de la Loi.

 

[20]        Je me penche à présent sur le troisième rapport établi deux ans après le rapport Besant. Il ressort clairement de la jurisprudence que la Cour doit être convaincue par le rapport médical même que la personne souffre d’un handicap mental. Comme le souligne la décision Lang, il n’appartient pas à la Cour de dire si, en réalité, il y a un handicap mental, parce que la tâche revient au médecin ou à une autre personne habilitée à cette fin d’évaluer, de décider et de mentionner l’existence d’un tel handicap dans son attestation présentée à la Cour. Je dois simplement trancher la question de savoir si l’attestation, présentée à la Cour, établit que la personne souffre d’un handicap physique ou (comme dans les appels susmentionnés) d’un handicap mental. Il ne m’appartient pas de scruter une telle attestation pour remettre en question un diagnostic posé. Bien que, ainsi que cela a été énoncé dans la décision Lang, l’attestation n’a pas à contenir la phrase « handicap physique ou mental », il ne doit y avoir toutefois aucun doute sur le fait qu’une personne raisonnable, qui lit cette attestation, conclurait raisonnablement que le professionnel habilité à cette fin a déclaré ou déterminé de manière certaine le handicap physique ou mental dont souffre la personne.

 

[21]        Dans la deuxième phrase du rapport MacPherson, il est déclaré que L [traduction] « […] est âgé de 14 ans et a reçu un diagnostic de trouble déficitaire de l’attention de type inattentif (le « TDA ») ». Ce diagnostic est clair et précis. La Dre MacPherson déclare ensuite que le « TDA » est souvent accompagné [traduction] « d’autres difficultés d’apprentissage » et qu’il s’agit, en fait, du diagnostic posé pour L. Ainsi donc, le fils de l’appelante souffre d’un TDA, une difficulté d’apprentissage, et a d’autres difficultés d’apprentissage. La Dre MacPherson poursuit en précisant comment ces difficultés d’apprentissage affectent L [traduction] : « […] une faiblesse extrême de la mémoire de travail ainsi qu’une faiblesse de la vitesse de traitement de l’information, de la vitesse et de la qualité de productions écrites et de la vitesse en mathématiques [...] ». La Dre MacPherson mentionne dans le rapport qu’elle s’est fondée sur l’évaluation de la Dre Besant de septembre 2007, évaluation qui a relevé des faiblesses dans ces mêmes domaines d’apprentissage. Là encore, les trois rapports reconnaissent les faiblesses de L dans les mêmes domaines d’apprentissage, bien que les conclusions tirées soient différentes en ce qui concerne la terminologie médicale qui s’appliquerait au trouble en question. Il ressort de la preuve que les symptômes de L se sont aggravés entre 2007 et 2009 et que la durée de deux ans entre le rapport Besant et le rapport MacPherson peut justifier le diagnostic différent. Quelle que soit la raison, je limite mes conclusions au rapport MacPherson. Étant donné que le diagnostic est contenu dans le rapport, cela équivaut‑il à une attestation d’un handicap mental? L’expression « handicap mental » a été définie dans la jurisprudence au moyen du sens ordinaire découlant de la définition suivante donnée par l’Oxford English Dictionary, 2éd. :

 

Un état où les capacités intellectuelles d’une personne sont diminuées de façon permanente ou sous-développées à un point tel que cette personne ne peut pas fonctionner normalement dans la société.

 

[22]        L’appelante a laissé entendre que l’expression « handicap mental » était désuète et qu’elle n’était plus utilisée à cause du stigmate qui lui est associé. La directrice de la Calgary Academy a confirmé que l’expression était passée de mode dans les milieux scolaires. Bien que cela puisse être le cas, le libellé de la disposition en question contient cette expression et le législateur n’a pas jugé bon de modifier la disposition à cet égard. Il ressort clairement de la preuve que toute difficulté d’apprentissage ne sera pas considérée comme un handicap mental. Toutefois, le diagnostic que la Dre MacPherson a établi à l’égard de L inclut une proposition de traitement pour ses difficultés d’apprentissage. La Dre MacPherson affirme sans équivoque, en tant que composante du traitement pour L, le [traduction] « […] besoin de le placer dans une école spécialisée qui offre une formation pédagogique spécialisée et des plans de programmes individualisés très précis, qui optimise le ratio enseignant‑élève et qui fournit un soutien individualisé très important ». (Non souligné dans l’original.)

 

 

[23]        Le Webster’s Ninth New Collegiate Dictionary, (Merriam‑Webster Inc., 1985) définit le terme « besoin » de la manière suivante :

 

1.         devoir nécessaire : obligation

2.         a)         absence de quelque chose de nécessaire, de désirable ou d’utile

b)        nécessité physiologique ou psychologique pour le bien‑être d’un organisme)

            3.         situation qui nécessite la fourniture d’une chose ou un soulagement

            […]

 

Le terme « besoin » est défini par le Canadian Oxford Dictionary, (Oxford University Press Canada, 1998) de la manière suivante :

 

1.         a)         désir ou nécessité

            b)         chose que l’on désire

2.         situation nécessitant qu’un acte soit posé; nécessité

3.         a)         situation de manque ou qui nécessite la satisfaction de certains besoins, physiques ou psychologiques

 

[…]

 

[24]        Il ressort clairement des définitions ci‑dessus que le terme « besoin » utilisé équivaut au terme « nécessité » et que les deux termes sont, pour des raisons pratiques, interchangeables. Cette nécessité, ou ce besoin, de placer L dans une école spécialisée, où on pouvait s’occuper de questions concernant ses troubles d’apprentissage, prise avec le témoignage de M. McGinitie et celui de la directrice de la Calgary Academy quant à la manière dont l’école en question pouvait s’occuper avec succès de situations présentant ces troubles d’apprentissage qui empêchaient L de fonctionner normalement dans la société, appuient la conclusion que j’ai tirée, conclusion selon laquelle l’attestation de la Dre Krueger répond à la définition de l’expression « handicap mental ». Selon le témoignage de la directrice et les recommandations du rapport MacPherson, les résultats scolaires de L étaient de loin inférieurs à ses capacités jusqu’à son inscription à la Calgary Academy où il achève actuellement sa 12année.

 

[25]        Il subsiste deux questions qu’il faut examiner. En premier lieu, bien que la Dre MacPherson n’ait pas exigé dans son rapport que l’appelante inscrive son fils à la Calgary Academy, elle précise bien le besoin, en tant que composante du traitement, d’inscrire L dans une école spécialisée. Au moment où la Dre MacPherson a rédigé ce rapport, L avait commencé à fréquenter la Calgary Academy et c’est l’école qu’elle [traduction] « recommand[ait] fortement ». Selon la preuve, il existe trois écoles du genre dans la région de Calgary et je crois qu’il est satisfait à l’obligation relative à l’attestation si l’inscription dans une école spécialisée répondant aux exigences d’agrément de la province est suffisante et squ’il n’est pas nécessaire que l’on impose l’école spécialisée précise que L doit fréquenter.

 

[26]        En second lieu, une question se pose concernant le moment où le rapport MacPherson a été établi, relativement aux frais de scolarité de 2009, en ce sens que l’intimée a soutenu que le rapport, étant daté du 21 septembre 2009, n’a pas été obtenu avant que l’argent ne soit dépensé dans l’année d’imposition 2009 et que, si j’étais disposée à accepter l’attestation contenue dans le rapport MacPherson, seul l’appel concernant les dépenses de 2010 pourrait être accueilli. Il existe plusieurs décisions qui semblent conclure que l’attestation doit être obtenue avant que les dépenses ne soient engagées (Vita-Finzi c. La Reine, 2008 CCI 565) ou que les attestations obtenues après coup ne seraient pas acceptables (Lang). Toutefois, la Cour d’appel fédérale a clairement précisé, au paragraphe 28 de l’arrêt Scott, que l’attestation doit être obtenue

 

[…] avant qu’elle remplisse sa déclaration d’impôt sur le revenu pour l’une ou l’autre des années pour lesquelles elle entendait déduire les frais de scolarité en tant que dépenses médicales. [...]

 

[Non souligné dans l’original.]

 

et non avant que l’argent ne soit dépensé comme le laisse entendre l’intimée. Lors du contre‑interrogatoire, M. McGinitie a déclaré qu’il avait effectué deux paiements de frais de scolarité en 2009, l’un le 19 février et l’autre le 15 septembre (transcription, à la page 24). Le rapport MacPherson est daté du 21 septembre 2009 et l’appelante a produit sa déclaration de revenus le 17 avril 2010 (réponse à l’avis d’appel de l’intimée, au paragraphe 4). En conséquence, l’attestation a été obtenue avant que l’appelante ne produise ses déclarations de revenus et elle est valide à cet égard.

 

[27]        Pour les motifs exposés ci‑dessus, les appels concernant les deux années d’imposition 2009 et 2010 sont accueillis afin de permettre à l’appelante de demander, à titre de frais médicaux, la déduction des frais de scolarité payés à la Calgary Academy dans chacune de ces années.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 7e jour de mars 2013.

 

 

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 2jour de mai 2013.

                                                

Espérance Mabushi, M.A. Trad. Jur


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 78

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :    2012-1697(IT)I

                                                                            

INTITULÉ :                                      DARLENE A. KARN c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

                                                         

LIEU DE L’AUDIENCE :                Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 8 février 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT :             L’honorable juge Diane Campbell

 

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 7 mars 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelante :

 

Me Patrick Lindsay

 

Avocat de l’intimée :

MAdam Gotfried

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

      

            Nom :                                    Patrick Lindsay

 

            Cabinet :                               Borden Ladner Gervais s.e.n.c.r.l., s.r.l.

                                                          Calgary (Alberta)

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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