Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossier : 2011-206(IT)APP

 

ENTRE :

CHRISTOS PETRATOS,

requérant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Demande de prorogation de délai entendue sur preuve commune

avec les demandes de Sylvia Petratos 2011-202(IT)APP

et de Gavin Higgins 2011-209(IT)APP, les 23 et 24 avril 2012

ainsi que les 5 et 6 septembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge J.E. Hershfield

 

Comparutions :

 

Avocat du requérant :

Me Gerald Matlofsky

 

Avocate de l’intimée :

Me Samantha Hurst

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

Après avoir entendu la demande visant à obtenir une ordonnance prorogeant le délai imparti pour signifier un avis d’opposition à la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») relativement à l’année d’imposition 2007;

 

et après avoir entendu les allégations et les arguments des parties;

 


LA COUR ORDONNE :

 

Pour les motifs de l’ordonnance ci‑joints, la demande présentée en vertu de la LIR relativement à l’année d’imposition 2007 est rejetée, avec dépens, compte tenu du fait qu’elle n’a pas été présentée dans le délai imparti.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de juillet 2013.

 

 

« J.E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour d’août 2013.

 

C. Laroche, traducteur


 

 

 

Dossier : 2011-202(IT)APP

 

ENTRE :

SYLVIA PETRATOS,

requérante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Demande de prorogation de délai entendue sur preuve commune

avec les demandes de Christos Petratos 2011-206(IT)APP

et de Gavin Higgins 2011-209(IT)APP, les 23 et 24 avril 2012

ainsi que les 5 et 6 septembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge J.E. Hershfield

 

Comparutions :

 

Avocat de la requérante :

Me Gerald Matlofsky

 

Avocate de l’intimée :

Me Samantha Hurst

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

Après avoir entendu la demande visant à obtenir une ordonnance prorogeant le délai imparti pour signifier un avis d’opposition à la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») relativement à l’année d’imposition 2007;

 

et après avoir entendu les allégations et les arguments des parties;

 


LA COUR ORDONNE :

 

Pour les motifs de l’ordonnance ci‑joints, la demande présentée en vertu de la LIR relativement à l’année d’imposition 2007 est rejetée, avec dépens, compte tenu du fait qu’elle n’a pas été présentée dans le délai imparti.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de juillet 2013.

 

 

« J.E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour d’août 2013.

 

C. Laroche, traducteur


 

 

 

Dossier : 2011-209(IT)APP

 

 

ENTRE :

GAVIN HIGGINS,

requérant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Demande de prorogation de délai entendue sur preuve commune

avec les demandes de Sylvia Petratos 2011-202(IT)APP

et de Christos Petratos 2011-206(IT), les 23 et 24 avril 2012

ainsi que les 5 et 6 septembre 2012, à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge J.E. Hershfield

 

Comparutions :

 

Avocat du requérant :

Me Gerald Matlofsky

 

Avocate de l’intimée :

Me Samantha Hurst

____________________________________________________________________

 

ORDONNANCE

Après avoir entendu la demande visant à obtenir une ordonnance prorogeant le délai imparti pour signifier un avis d’opposition à la cotisation établie au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») relativement à l’année d’imposition 2007;

 

et après avoir entendu les allégations et les arguments des parties;

 


LA COUR ORDONNE :

 

Pour les motifs de l’ordonnance ci‑joints, la demande présentée en vertu de la LIR relativement à l’année d’imposition 2007 est rejetée, avec dépens, compte tenu du fait qu’elle n’a pas été présentée dans le délai imparti.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de juillet 2013.

 

 

« J.E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour d’août 2013.

 

C. Laroche, traducteur


 

 

Référence : 2013 CCI 240

Date : 20130726

Dossier : 2011-206(IT)APP

 

 

ENTRE :

CHRISTOS PETRATOS,

requérant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée;

 

 

Dossier : 2011-202(IT)APP

ET ENTRE :

 

SYLVIA PETRATOS,

requérante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée;

 

 

Dossier : 2011-209(IT)APP

 

ET ENTRE :

 

GAVIN HIGGINS,

requérant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

Le juge Hershfield

 

[1]     Les demandes dont je suis saisi concernent le délai dans lequel les requérants ont fait connaître leur nouvelle position relativement aux avis de cotisation mis à la poste aux dates suivantes :

·        dans le cas de M. Higgins, le 20 mai 2008;

·        dans le cas de M. Petratos, le 19 mars 2009;

·        dans le cas de Mme Petratos, le 26 mars 2009.

 

[2]     Ces cotisations étaient fondées sur la position prise par les requérants dans leurs déclarations de revenus. Les requérants ont toutefois envoyé des Demandes de redressement d’une T1 (les « Demandes ») peu de temps après avoir reçu leurs cotisations, plus précisément aux dates suivantes :

 

·        dans le cas de M. Higgins, le 9 février 2009;

·        dans le cas de M. et de Mme Petratos, le 29 avril 2009.

 

[3]     Le ministre du Revenu national (le « ministre ») a rejeté les Demandes ainsi :

·        dans le cas de M. Higgins et de M. Petratos, par lettre le 9 juin 2010;

·        dans le cas de Mme Petratos, par lettre le 10 juin 2010.

 

[4]     La décision du ministre de rejeter ces demandes a fait l’objet d’avis d’opposition qui, selon les requérants, auraient été envoyés le 7 septembre 2010. L’intimée soutient que ces avis n’ont pas été envoyés avant le 16 septembre 2010.

 

[5]     Les requérants invoquent deux arguments découlant de cette chronologie des faits :

 

A.     les Demandes auraient dû être traitées comme s’il s’agissait d’avis d’opposition et/ou de demandes de prorogation du délai imparti pour déposer des avis d’opposition;

 

B.     le rejet des Demandes aurait dû faire repartir de zéro les délais impartis pour déposer des avis d’opposition et des demandes de prorogation du délai imparti pour déposer des avis d’opposition.

 

[6]     Il serait utile de rappeler un peu le contexte avant d’examiner ces questions.

 

Le contexte relatif aux cotisations

 

[7]     Les cotisations originales étaient fondées sur les déclarations de revenus des requérants pour l’année d’imposition 2007. Il semblait n’y avoir alors aucun problème.

 

[8]     Les déclarations de revenus T1 produites pour 2007 n’incluaient cependant pas les déductions que les requérants ont ensuite demandées relativement à un abri fiscal déterminé qu’ils avaient acquis (le « Programme »). Les requérants soutiennent qu’il ne s’agissait pas d’un « abri fiscal » au sens où cette expression est employée dans la LIR. L’intimée soutient le contraire. Cette question de fond ne m’est pas soumise en l’espèce.

 

[9]     Cette question est toutefois pertinente dans une certaine mesure. Il n’est pas contesté que les requérants n’ont pas initialement demandé les déductions en question, parce que l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») les avait avertis de ne pas le faire. Cet avertissement avait été formulé en raison du fait que des vérifications antérieures du Programme avaient soulevé des questions. Par suite de ses vérifications concernant les années antérieures, l’ARC estimait que les pertes subies par le Programme étaient attribuables uniquement à la paperasserie et à des écritures de journal, et elle a refusé leur déduction. Les contribuables ont été informés du fait que, s’ils réclamaient des pertes pour le même programme pour 2007, ces pertes seraient refusées et des pénalités pourraient leur être infligées au titre de l’article 163.2 de la LIR.

 

[10]   Lors d’une réunion qu’elle a eue en mars 2008 avec un représentant du Programme, l’ARC a averti que les requérants et les autres investisseurs du Programme (ils étaient des douzaines) ne devaient pas produire de formulaires T2124 de l’ARC pour 2007. À la suite de cette réunion, l’ARC a écrit aux requérants et aux autres investisseurs du Programme pour leur donner comme instruction de ne pas produire de formulaires T2124 de l’ARC pour 2007. Ces formulaires, intitulés « État des résultats des activités d’une entreprise », étaient les formulaires normalement utilisés pour réclamer des pertes d’entreprise à l’époque[1]. Les investisseurs ont d’abord tenu compte de l’avertissement, puis ils – à tout le moins les requérants – ont réclamé leur part prétendue des pertes du Programme pour 2007 en déposant les Demandes. En d’autres termes, ils ne se sont pas servis du formulaire T2124 qu’ils avaient été avertis de ne pas utiliser. Ils ont déposé les Demandes afin qu’une modification soit apportée à leurs déclarations de revenus T1 de 2007.

 

[11]   Comme il a déjà été mentionné, M. Higgins a envoyé sa Demande le 9 février 2009; M. et Mme Petratos ont envoyé les leurs le 29 avril 2009. Encore une fois, comme il a déjà été mentionné, le ministre a rejeté les Demandes de M. Higgins et de M. Petratos par lettre le 9 juin 2010 et celle de Mme Petratos par lettre le 10 juin 2010.

 

[12]   L’ARC n’a pas établi de nouvelles cotisations à l’égard des requérants relativement aux déclarations de revenus T1 qu’ils avaient produites initialement pour l’année 2007.

 

[13]   La LIR ne prévoit rien quant au statut du rejet d’une Demande de redressement d’une T1.

 

Aperçu du contexte entourant le Programme

 

[14]   Le Programme était connu sous le nom d’IBCA Joint Venture (« IBCA JV »). Trois entités en faisaient la promotion, l’exploitaient, le géraient ou y participaient : Integrated Business Concepts Inc., Synergy Group (2000) Inc. et l’Independent Business Consulting Association. Les requérants étaient des membres d’IBCA JV, et les pertes en cause en l’espèce découlaient de leur participation à cette entreprise que j’ai appelée le Programme.

 

[15]   Il était évident à mes yeux, au cours de l’audience, que Synergy Group (2000) Inc. était l’entité qui avait aidé les requérants à déposer les formulaires nécessaires pour réclamer les pertes subies du Programme. C’est Synergy Group (2000) Inc. qui a conseillé les requérants et a tenté, notamment lors de la réunion avec l’ARC en 2008, de collaborer avec cette dernière pour répondre à ses préoccupations. Les Demandes auraient été présentées à l’initiative de Synergy Group (2000) Inc.

 

[16]   De plus, si je comprends bien, c’est Synergy Group (2000) Inc. qui a réagi à la décision du ministre de refuser les déductions relatives aux pertes, ce qui explique la similitude du contexte factuel dans lequel s’inscrivent les questions dont je suis saisi dans le cas des trois requérants.

 

Analyse

 

[17]   Je vais examiner les questions en litige sous les rubriques suivantes :

 

A.   les Demandes auraient dû être traitées comme s’il s’agissait d’avis d’opposition et/ou de demandes de prorogation du délai imparti pour déposer des avis d’opposition;

 

B.   les avis d’opposition ont été déposés dans le délai imparti par la LIR.

 

A. Les Demandes auraient dû être traitées comme s’il s’agissait d’avis d’opposition et/ou de demandes de prorogation du délai imparti pour déposer des avis d’opposition

 

[18]   La LIR ne renferme aucune disposition exigeant du ministre qu’il fasse ce que les requérants m’ont demandé de faire en l’espèce. Par ailleurs, l’ARC dispose d’un très vaste pouvoir lui permettant de faire ce qu’elle estime indiqué dans un cas donné. Elle aurait pu traiter les Demandes comme des avis d’opposition. La forme du document ne doit pas toujours dicter la manière dont il doit ou devrait être traité.

 

[19]   Par exemple, il n’est pas rare que l’ARC traite des avis d’opposition déposés après l’expiration du délai applicable comme s’il s’agissait de demandes de prorogation de ce délai. En fait, la Cour a imposé ce traitement à l’ARC dans Fagbemi v Canada[2]. Dans cette décision, la juge Woods a décidé qu’un avis d’opposition devait être interprété de manière libérale et être considéré en conséquence comme une demande de prorogation. Elle a toutefois nuancé sa décision en mentionnant, aux paragraphes 5 et 6, que chaque cas dépendait des circonstances[3].

 

[20]   Dans les circonstances relatives aux demandes de prorogation de délai en l’espèce, le fait de traiter les Demandes visant à modifier les déclarations de revenus comme s’il s’agissait d’avis d’opposition constituerait un changement assez important.

 

[21]   Si des décisions comme Fagbemi montrent que la Cour a été saisie de questions comme l’utilisation des formulaires appropriés, il reste au bout du compte que, dans les faits, seul le ministre a généralement le pouvoir de faire montre de plus ou moins d’indulgence dans l’exercice de son mandat. Il en est de même de ses fonctionnaires en pratique. Quoique ceci ne soit pas approprié à mon avis, on a défendu une application stricte – ou une tendance à ne pas faire montre d’indulgence – en laissant entendre que la LIR serait vidée de sa substance si l’ARC et les contribuables ne pouvaient pas compter sur une observation rigoureuse de ses termes précis. Il est difficile de soutenir le contraire, bien que l’on espère que la LIR soit appliquée avec un mélange approprié d’uniformité et d’équité individuelle.

 

[22]   Bien que je ne sois pas impressionné en l’espèce par les tactiques employées par l’ARC, je ne peux pas faire grand-chose à part mentionner qu’il semble que chaque contribuable qui, selon l’ARC, met un revenu à l’abri sans sa bénédiction, qu’il possède un numéro d’inscription d’abri fiscal ou non, est traité comme une personne coupable d’enfreindre l’objet inhérent ou fondamental de la LIR. Les vérificateurs sont devenus des hommes de main brutaux maniant des matraques lourdes et menaçantes qui pourraient être considérées comme étant inacceptables si elles se trouvaient entre les mains de nos forces policières.

 

[23]   Cela étant dit, je ne peux me ranger du côté des requérants en m’appuyant sur l’approche indûment rigoureuse des fonctionnaires de l’ARC.

 

[24]   Quoi qu’il en soit, peu importe ce que le ministre aurait pu faire en exerçant son pouvoir discrétionnaire, je suis tenu d’accepter le précédent sur lequel l’intimée se fonde pour ne pas accepter que les Demandes soient traitées comme s’il s’agissait d’avis d’opposition et/ou de demandes de prorogation du délai imparti pour déposer des avis d’opposition.

 

[25]   L’intimée s’appuie sur Armstrong c. Canada[4]. Au paragraphe 8 de cet arrêt, la juge Sharlow indique qu’une déclaration de revenus modifiée n’impose pas l’obligation d’établir une cotisation. Alors que, selon elle, dans le contexte de l’obligation du ministre de fixer l’impôt « avec toute la diligence possible », le libellé sous‑jacent ne peut prévoir autre chose, les demandes visant à corriger une déclaration de revenus, peu importe leur forme, ne sont que cela – des demandes.

 

[26]   Cela ne signifie pas que le contribuable est livré aux caprices du ministre. Il existe un moyen de faire valoir son point de vue. Vous obtiendrez le résultat que vous souhaitez en déposant une opposition à une cotisation que vous voulez corriger, même si celle‑ci est fondée sur les renseignements fournis au ministre. Cela peut être fait en combinaison avec une demande. Les Demandes peuvent être présentées avec ce qu’on appelle une opposition de protection.

 

[27]   En fait, en dépit de la sévérité de mes propos sur les tactiques employées par le ministre en l’espèce, les requérants ont été avertis dans une lettre qu’une réponse à leurs Demandes pourrait être retardée et que, afin de protéger leur droit de faire opposition, ils [traduction] « doivent » présenter une demande de prorogation du délai imparti pour déposer un avis d’opposition. En fait, la lettre indiquait même la date à laquelle cette demande devait être présentée au plus tard et ce que les requérants devaient dire pour expliquer pourquoi la demande était nécessaire. Or, je ne puis conclure que les requérants se sont conformés à cette notification[5].

 

[28]   Quoi qu’il en soit, je ne peux convenir que les Demandes peuvent être traitées comme s’il s’agissait d’avis d’opposition et/ou de demandes de prorogation du délai imparti pour déposer des avis d’opposition.

 

B. Les avis d’opposition ont été déposés dans le délai imparti par la LIR

 

[29]   Cet aspect de l’argumentation des requérants peut être examiné en deux parties :

                            

1. les avis d’opposition seraient déposés dans le délai imparti si les lettres de refus étaient traitées comme s’il s’agissait de cotisations et si j’acceptais que le 7 septembre 2010 est la date à laquelle les avis ont été mis à la poste;

 

2. les avis d’opposition seraient déposés dans le délai imparti si les lettres de refus de l’ARC étaient traitées comme s’il s’agissait d’une détermination visée au paragraphe 152(1.1) de la LIR et si j’acceptais que le 7 septembre 2010 soit la date à laquelle les avis ont été mis à la poste.

 

          Les lettres de refus sont‑elles des cotisations?

 

[30]   Je ne peux convenir que les lettres de refus étaient des cotisations. Le montant de l’impôt à payer n’a pas été déterminé. En outre, il va sans dire que conclure qu’une réponse à une demande peut être traitée comme s’il s’agissait d’une cotisation créerait un cauchemar administratif.

 

[31]   Par conséquent, les avis de cotisation envoyés en mai 2008 et en mars 2009 l’ont été bien après l’expiration du délai imparti pour déposer une demande de prorogation du délai dans lequel un avis d’opposition doit être déposé.

 

[32]   Bien qu’il n’ait pas été contesté que le délai dans lequel une demande de prorogation du délai imparti pour déposer un avis d’opposition est d’un an et 90 jours à compter de la date de mise à la poste de la cotisation, je reproduis les dispositions pertinentes de la LIR qui prévoient ce délai :

 

Paragraphe 165(1) :

Opposition à la cotisation -- Le contribuable qui s’oppose à une cotisation prévue par la présente partie peut signifier au ministre, par écrit, un avis d’opposition exposant les motifs de son opposition et tous les faits pertinents, dans les délais suivants :

 

a) lorsqu’il s’agit d’une cotisation relative à un contribuable qui est un particulier (sauf une fiducie) ou une fiducie testamentaire, pour une année d’imposition, au plus tard le dernier en date des jours suivants :

(i) le jour qui tombe un an après la date d’échéance de production qui est applicable au contribuable pour l’année,

(ii) le 90e jour suivant la date de mise à la poste de l’avis de cotisation; […]

                                                                   [Non souligné dans l’original.][6]

 

                    […]

 

Paragraphe 166.1(1) :

Prorogation du délai [d’opposition] par le ministre -- Le contribuable qui n’a pas signifié d’avis d’opposition à une cotisation en application de l’article 165 ni présenté de requête en application du paragraphe 245(6) dans le délai imparti peut demander au ministre de proroger le délai pour signifier l’avis ou présenter la requête.

 

Alinéa 166.1(7)a) :

Conditions d’acceptation de la demande -- Il n’est fait droit à la demande que si les conditions suivantes sont réunies :

a) la demande est présentée dans l’année suivant l’expiration du délai par ailleurs imparti pour signifier un avis d’opposition ou présenter une requête;

 

             […]

 

Paragraphe 166.2(1) :

Prorogation du délai [d’opposition] par la Cour canadienne de l’impôt -- Le contribuable qui a présenté une demande en application de l’article 166.1[(1)] peut demander à la Cour canadienne de l’impôt d’y faire droit après :

a) le rejet de la demande par le ministre;

b) l’expiration d’un délai de 90 jours suivant la présentation de la demande, si le ministre n’a pas avisé le contribuable de sa décision.

Toutefois, une telle demande ne peut être présentée après l’expiration d’un délai de 90 jours suivant la date de la mise à la poste de l’avis de la décision au contribuable.

[Non souligné dans l’original.]

 

Paragraphe 166.2(5) :

Acceptation de la demande -- Il n’est fait droit à la demande que si les conditions suivantes sont réunies :

a) la demande a été présentée en application du paragraphe 166.1(1) dans l’année suivant l’expiration du délai par ailleurs imparti pour signifier un avis d’opposition ou présenter une requête;

b) le contribuable démontre ce qui suit :

(i) dans le délai par ailleurs imparti pour signifier l’avis ou présenter la requête, il n’a pu ni agir ni charger quelqu’un d’agir en son nom, ou il avait véritablement l’intention de faire opposition à la cotisation ou de présenter la requête,

(ii) compte tenu des raisons indiquées dans la demande et des circonstances de l’espèce, il est juste et équitable de faire droit à la demande,

(iii) la demande a été présentée dès que les circonstances le permettaient.

 

[33]   Lorsqu’on les lit ensemble, ces dispositions exigent, dans le cas de la LIR, que les requérants présentent les demandes de prorogation de délai dans un délai d’un an et 90 jours après la date de mise à la poste des avis de cotisation.

 

[34]   La date de la dernière cotisation (établie relativement à Mme Petratos) est le 26 mars 2009. Même si l’on suppose que les avis d’opposition ont été mis à la poste le 7 septembre 2010, comme l’affirment les requérants, le délai de prescription d’un an et 90 jours était expiré.

 

2. Les lettres de refus constituent‑elles des déterminations des pertes visées au paragraphe 152(1.1) de la LIR?

 

[35]   Les requérants s’appuient sur le paragraphe 152(1.1) de la LIR, lequel est libellé ainsi :

 

152(1.1) Détermination des pertes par le ministre. Lorsque le ministre établit le montant de la perte autre qu’une perte en capital, de la perte en capital nette, de la perte agricole restreinte, de la perte agricole ou de la perte comme commanditaire subie par un contribuable pour une année d’imposition et que le contribuable n’a pas déclaré ce montant comme perte dans sa déclaration de revenu pour cette année, le ministre doit, à la demande du contribuable et avec diligence, déterminer le montant de cette perte et envoyer un avis de détermination à la personne qui a produit la déclaration.

 

[36]   À mon avis, les Demandes pourraient être considérées comme des demandes visant à obtenir une détermination des pertes, pourvu que cette disposition permette réellement de telles demandes.

 

[37]   Pour le moment, supposons que je convienne que le ministre a établi le montant d’une perte autre qu’une perte en capital pour 2007. Il faut supposer aussi que le ministre établit un montant également lorsqu’il refuse la déduction d’une perte, de manière à l’éliminer ou à l’établir à zéro. À mon avis, la dernière hypothèse doit être correcte. Si je réclame une perte de 100 $ et que le ministre en fixe le montant à zéro, une demande visant à obtenir une détermination de la perte doit pouvoir être présentée en raison de nos positions divergentes sur le montant de la perte.

 

[38]   Cela étant dit, si le montant de la perte – zéro – qui est établi par le ministre est identique au montant que j’ai réclamé dans ma déclaration, il n’y a aucune divergence et la disposition sur laquelle s’appuient les requérants ne leur est d’aucune utilité si elle est strictement appliquée.

 

[39]   Encore une fois, les requérants sont pris dans un vide, où ils ne peuvent pas modifier leurs déclarations de revenus sans la permission du ministre, à moins de faire opposition dans le délai imparti. Ils ne l’ont pas fait. En conséquence, les demandes doivent être rejetées.

 

[40]   Avant de terminer, bien qu’il ne semble pas nécessaire que je traite actuellement de la question de la date de la mise à la poste des avis d’opposition, j’ai conclu que la date de l’envoi des avis d’opposition invoquée par l’ARC était correcte. L’intimée a produit une preuve qui établissait à ma satisfaction que la date du 16 septembre 2010 invoquée par l’ARC était fondée sur des enveloppes portant le cachet de la poste ainsi que sur l’affidavit[7] et le témoignage d’un fonctionnaire de l’ARC. Je n’ai aucun doute de la nature de ceux soulevés dans Carcone c. La Reine[8] relativement à son témoignage.

 

[41]   Quoi qu’il en soit, pour les motifs exposés ci‑dessus, je rejette les demandes, avec dépens.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 26e jour de juillet 2013.

 

 

« J.E. Hershfield »

Juge Hershfield

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour d’août 2013.

 

C. Laroche, traducteur


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 240

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :       2011-206(IT)APP; 2011-202(IT)APP;

                                                          2011-209(IT)APP

 

INTITULÉ :                                      CHRISTOS PETRATOS c. LA REINE; SYLVIA PETRATOS c. LA REINE; GAVIN HIGGINS c. LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Toronto (Ontario)

                                                                      

DATES DE L’AUDIENCE :            Les 23 et 24 avril 2012 ainsi que

                                                          les 5 et 6 septembre 2012

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :   L’honorable juge J.E. Hershfield

 

DATE DE L’ORDONNANCE :       Le 26 juillet 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des requérants :

Me Gerald Matlofsky

Avocate de l’intimée :

Me Samantha Hurst

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les requérants :

 

                          Nom :                     Gerald Matlofsky

                                                          Avocat

 

                            Cabinet :               118, avenue Eglinton Ouest, bureau 208

                                                          Toronto (Ontario)  M4R 2G4

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] Ce formulaire a été remplacé par le formulaire T2125 de l’ARC, « État des résultats d’une entreprise ou d’une profession libérale ».

[2] 2005 DTC 955.

 

[3] On a récemment fait observer, par exemple, dans l’édition du Canadian Taxpayer (TCT) du 28 juin 2013, vol. xxxv no 13, qu’un grand nombre de juges de la Cour canadienne de l’impôt se joindront au groupe de ceux qui sont [traduction] « contrariés » par la résistance démontrée par l’ARC et le ministère de la Justice lorsqu’il faut appliquer les dispositions discrétionnaires et d’équité de la LIR. Bien qu’il ne convienne peut‑être pas en l’espèce, pour diverses raisons, de formuler des remarques additionnelles sur cette question qui suscite manifestement des préoccupations, le renvoi à Poulin c. La Reine, 2013 CCI 104, dans le commentaire m’incite à ajouter les observations suivantes. Dans Poulin, il est question de l’application de la doctrine de la déduction nécessaire qui a été analysée dans R. c. Cunningham, [2010] 1 R.C.S. 331. La Cour semble indiquer dans Poulin que cette doctrine pourrait être utilisée pour favoriser de meilleures pratiques administratives dans le domaine. On a laissé entendre qu’il fallait nécessairement déduire que le ministre devait examiner à tout le moins la nécessité d’accorder un redressement discrétionnaire ou fondé sur l’équité en vertu de la LIR avant d’obtenir un jugement. Le paragraphe 220(2.1) permet au ministre de renoncer au respect du délai imparti pour déposer pratiquement tout ce qui doit l’être. Le fait que la LIR prévoit qu’une opposition peut être faite ne devrait pas empêcher l’application de cette disposition. Lorsqu’une cotisation est erronée, une opposition doit, par déduction nécessaire, être déposée. S’il en était autrement, personne n’aurait de droit d’appel. L’arrêt Cunningham laisse également entendre, par déduction nécessaire et par renvoi à la compétence inhérente, que la Cour peut avoir compétence pour établir la chronologie des faits qui sont nécessairement visés par la LIR. Quoi qu’il en soit, il pourrait être utile aux juges contrariés de réfléchir à des idées créatives et pertinentes. Il pourrait être préférable, pour favoriser le règlement des questions en litige ou pour trancher ces questions avant le jugement final, de conférer à la Cour des pouvoirs discrétionnaires additionnels.

 

[4] 2006 CAF 119.

 

[5] M. Higgins et M. Petratos ont produit des copies d’une lettre qui aurait été envoyée à l’ARC le 25 avril 2010. À première vue, la lettre semblait être une demande visant à obtenir une prorogation du délai imparti pour déposer un avis d’opposition. Or, lors de son contre‑interrogatoire, M. Higgins a reconnu que, bien qu’il ait signé la lettre, ce n’était pas lui qui l’avait rédigée ou mise à la poste. Il a dit également que la date de sa Demande indiquée dans la lettre était erronée. Aucune preuve ne démontrait que la lettre avait été envoyée et l’affidavit de l’ARC concernant chacun des requérants, qui énumère tous les documents reçus, ne faisait pas mention de ces lettres. On a laissé entendre que les lettres avaient été rédigées et vraisemblablement mises à la poste par le comptable des requérants, M. Kriarakis. Ce dernier n’a cependant pas été appelé à témoigner.

 

[6] En 2010, « la date de mise à la poste » a été remplacée par « la date d’envoi ».

 

[7] Paragraphe 244(10).

 

[8] 2011 CCI 550, [2012] 2 C.T.C. 2043 (CCI).

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