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Dossier : 2011-3160(IT)G

ENTRE :

DENIS GÉLINAS,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

Appel entendu le 21 juin 2013, à Montréal (Québec).

 

Devant : L’honorable juge Gaston Jorré

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me Mathieu Kellner

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Benoit Mandeville

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

        L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d'imposition 2009 est rejeté et les dépens sont adjugés à l’intimée, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa (Ontario), ce 8e jour d’août 2013.

 

 

 

« Gaston Jorré »

Juge Jorré


 

 

 

Référence : 2013 CCI 250

Date : 20130808

Dossier : 2011-3160(IT)G

ENTRE :

DENIS GÉLINAS,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Jorré

 

[1]             L’appelant appelle d’une cotisation établie pour l’année d’imposition 2009.

 

[2]             Il n’y a pas de désaccord quant aux faits. Le désaccord est relatif au calcul de l’impôt minimum de remplacement et, plus particulièrement, il porte sur la question de savoir si, dans le calcul de l’impôt minimum, il faut ajouter au revenu imposable un montant de 338 300 $. Ce montant représente une perte subie en 2008.

 

[3]             L’appelant détient plusieurs immeubles locatifs et les parties sont d’accord pour dire que le tableau au paragraphe 11 de l’annexe A de la réponse à l’avis d’appel reflète l’ensemble des revenus et des dépenses pour ces immeubles locatifs pour la période de 2006 à 2008 inclusivement.

 

[4]             Il y a six faits importants à noter :

 

a)    En 2008, l’appelant a eu une perte locative de 469 975 $.

b)    Dans les autres années, il a eu un revenu net variant d’environ 1 000 $ à environ 240 000 $.

c)    En 2008, l’appelant a eu une dépense exceptionnelle de presque 900 000 $ pour garder un client.

d)    Il n’est pas contesté qu’il n’y a pas eu d’autres dépenses comparables à celle de 900 000 $ dans la période de 2006 à 2010.

e)    Il y a eu une dépense d’intérêts de 1 073 792 $ en 2008.

f)     Dans les autres années de la période, les dépenses d’intérêts varient d’environ 954 000 $ à 1 113 000 $.

 

[5]             Yvon Renaud, un comptable, a témoigné et a expliqué qu’il a préparé les déclarations de revenus de l’appelant. Il a utilisé un logiciel commercial très sophistiqué pour la préparation des déclarations de l’appelant.

 

[6]             Quand il a fait le calcul de l’impôt minimum, la question s’est posée de savoir s’il devait inclure un montant à la ligne 41 du formulaire T691, formulaire où l’on calcule l’impôt minimum de remplacement. À la ligne 41, les parties pertinentes du texte sont les suivantes :

 

Si vous avez demandé un montant à la ligne 251 ou 252 de votre déclaration de 2009 pour une perte subie dans une autre année, indiquez la partie de cette perte qui est attribuable aux pertes comme commanditaire et (ou) à la DPA ou aux frais financiers demandés pour […] les biens de location […]. (Remarque 6)

 

[7]             La remarque 6 est à la fin du formulaire et ses parties pertinentes sont les suivantes :

 

Remarque 6 — Calculez les pertes comme commanditaire […] et les pertes autres que des pertes en capital d’autres années attribuables […] aux frais financiers en vous servant des règles en vigueur pour l'année. Communiquez avec nous si vous avez besoin d’aide.

 

[8]             À la ligne 252 (« pertes autres que des pertes en capital d’autres années ») du formulaire T1 de l’appelant pour 2009, il y a un montant de 338 300 $.

 

[9]             M. Renaud a conclu que cette perte de 338 300 $, qui provenait de la perte subie en 2008, n’était pas attribuable aux frais financiers, soit les intérêts, car, dans les autres années de la période de 2006 à 2010, il n’y a pas eu de perte, malgré des frais financiers plus ou moins comparables. Selon l’appelant, la perte résultait de la dépense exceptionnelle de 900 000 $ en 2008. En conséquence, il n’a pas ajouté les 338 300 $.

 

[10]        L’appelant prétend que c’est là la bonne approche et qu’en conséquence l’appel devrait être accueilli. Selon le ministre, par contre, il faut ajouter ce montant.

 

[11]        Vu le texte à la ligne 41 du formulaire T691, je comprends le raisonnement de M. Renaud quant à l’attribution de la perte, mais je dois appliquer les dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu (« LIR »).

 

[12]        Les dispositions pertinentes sont les articles de la section E.1 de la partie I de la LIR et l’alinéa 20(1)c) de la LIR.

 

[13]        Les intérêts étant généralement une dépense en capital, ils ne sont déductibles qu’en vertu de l’alinéa 20(1)c) de la LIR.

 

[14]        Je reproduis ci-dessous les dispositions applicables de la section E.1. Pour faciliter la lecture, j’en ai enlevé les parties qui n’ont pas d’application.

 

127.51 L’impôt minimum applicable à un particulier pour une année d’imposition est le montant calculé selon la formule suivante :

 

A (B - C) - D

où :

 

A         représente le taux de base pour l’année;

 

B         le revenu imposable modifié du particulier pour l’année, calculé selon l’article 127.52;

 

C         son exemption de base pour l’année, calculée selon l’article 127.53;

 

D         son crédit d’impôt minimum de base pour l’année, calculé selon l’article 127.531.

 

[…]

 

(1) […], le revenu imposable modifié d’un particulier pour une année d’imposition correspond à son revenu imposable […] déterminé pour l’année à supposer que :

 

a) […]

 

b) le total des montants représentant chacun un montant déductible en application de l'alinéa 20(1)a) ou de l’un des alinéas 20(1)c) à f) dans le calcul du revenu du particulier pour l’année relativement à un bien de location […] corresponde au total des montants ainsi déductibles par ailleurs ou, s’il est inférieur, à l’excédent éventuel du total des montants suivants :

 

(i) le total des montants représentant chacun le revenu du particulier pour l’année provenant de la location d’un bien de location dont le particulier […] est propriétaire, calculé compte non tenu des alinéas 20(1)a) et c) à f),

 

[…]

 

sur le total des montants représentant chacun la perte du particulier pour l’année provenant de la location d’un bien de location dont le particulier […] est propriétaire […] calculé compte non tenu des alinéas 20(1)a) et c) à f);

 

[…]

 

i) les seuls montants déductibles selon le paragraphe 111(1) dans le calcul, pour l’année, du revenu imposable […] du particulier soient :

 

(i) pour ce qui est de chacun des alinéas 111(1)a), c), d) et e), le montant déduit en application de ces alinéas pour l’année ou, s’il est inférieur, le total des montants qui seraient déductibles selon ces alinéas pour l’année si, à la fois :

 

[…]

 

(B) les alinéas b) à […] du présent paragraphe s’appliquaient au calcul de la perte autre qu’une perte en capital du particulier, […]

 

[…]

 

[15]        La question en litige ici concerne le calcul du revenu imposable modifié au sens de l’élément B de l’article 127.51 ci-dessus.

 

[16]        L’effet de l’alinéa 127.52(1)b) est de limiter, entre autres, les montants déduits pour l’amortissement et pour les intérêts payés. Pour le calcul du revenu imposable modifié, le total des montants déductibles assujettis à l’alinéa 127.52(1)b) est limité de façon à ce que le total déductible de ces montants ne crée pas de perte. Par exemple, s’il y a une dépense d’intérêts de 100 000 $ et qu’il y a par ailleurs une perte de 40 000 $, aux fins de l’impôt minimum la déduction d’intérêts sera limitée à 60 000 $ de façon à ce que le revenu tiré du bien locatif s’établisse à 0 $. La disposition n’exige pas que l’amortissement ou l’intérêt soit la cause de la perte.

 

[17]        D’ailleurs, si l’on examine le formulaire T1 de l’appelant pour 2008[1], on voit que c’est exactement ce qui s’est passé. À la ligne 126 de la déclaration, on constate que pour l’ensemble des immeubles locatifs il y a eu une perte locative de presque 470 000 $. Dans le formulaire T691, aux lignes 5 à 7, on voit qu’il y a eu une déduction d’intérêts d’à peu près 1 073 000 $ et qu’aux fins du calcul du revenu imposable modifié, la déduction d’intérêts a été réduite d’environ 470 000 $ et le revenu a été augmenté du même montant aux fins de l’impôt minimum de remplacement.

 

[18]        Quant à l’année faisant l’objet de l’appel, c’est l’alinéa 127.52(1)i) qui s’y applique. Cet alinéa a pour effet que, lorsqu’on tient compte de pertes subies dans d’autres années pour le calcul du revenu imposable modifié, il faut appliquer l’alinéa 127.52(1)b) au calcul des pertes subies dans ces années antérieures.

 

[19]        La perte de 338 300 $ à la ligne 252 du formulaire T1 de l’appelant pour 2009 fut subie en 2008. Il n’y aurait pas eu cette perte en l’absence de la déduction d’intérêts. Il faut donc ajouter les 338 300 $ en faisant le calcul du revenu imposable modifié pour 2009 aux fins de l’impôt minimum de remplacement.

 

[20]        Pour ces motifs, l’appel est rejeté avec dépens.

 

[21]        Je fais remarquer que, selon les circonstances, il se peut que l’appelant puisse récupérer son impôt minimum dans d’autres années d’imposition.

 

Signé à Ottawa (Ontario), ce 8e jour d’août 2013.

 

 

 

 

« Gaston Jorré »

Juge Jorré

 


RÉFÉRENCE :                                 2013 CCI 250

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :    2011-3160(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :            DENIS GÉLINAS c. SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 21 juin 2013

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :     L’honorable juge Gaston Jorré

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 8 août 2013

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelant :

Me Mathieu Kellner

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Benoit Mandeville

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                     Nom :                           Me Mathieu Kellner

 

                 Cabinet :                          Deveau, Bourgeois, Gagné, Hébert & associés

                                                          Laval (Québec)

 

       Pour l’intimée :                          William F. Pentney

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa (Ontario)

 



[1]   Pièce I-1.

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