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Dossier : 2017-2921(CPP),

2017-2922(EI)

ENTRE :

S.S.R. MAINTENANCE LTD.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé.

 [TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 5 juin 2018, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge Réal Favreau


Comparutions :

Représentant de l’appelante :

Sriruban Sripathman

Avocate de l’intimé :

Alisa Apostle

 

JUGEMENT

Conformément aux motifs de jugement ci-joints, les appels interjetés à l’encontre des décisions du ministre du Revenu national concernant l’assurabilité et le droit à pension de l’emploi des travailleurs suivants chez l’appelante pendant leur période de travail respective :

Travailleur

Période

Sureshkumar Mahendiran

Du 1er octobre 2014 au 30 avril 2015

Piramila Uruthireswaran

Du 1er janvier 2015 au 18 avril 2016

Leo Puvanendran

Du 1er février 2015 au 30 novembre 2015

Kadosan Rajakiri

Du 15 mars 2015 au 18 avril 2016

Anushiya Sipaskaran

Du 1er avril 2015 au 15 mai 2015

Mithilarajh Mohanarajah

Du 1er juin 2015 au 31 août 2015

Rex Tharmarajasingham

Du 15 août 2015 au 30 septembre 2015

sont rejetés pour la raison qu’ils occupaient chez l’appelante un emploi assurable et ouvrant droit à pension au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi et de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada.

Signé à Ottawa (Canada), ce 6e jour de novembre 2018.

« Réal Favreau »

Le juge Favreau


Référence : 2018 CCI 216

Date : 20181106

Dossier : 2017-2921(CPP),

2017-2922(EI)

ENTRE :

S.S.R. MAINTENANCE LTD.,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL

intimé.

 [TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Favreau

[1]  Les présents appels sont interjetés à l’encontre de la décision du ministre du Revenu national concernant le droit à pension et l’assurabilité de l’emploi collectif des travailleurs suivants (les « travailleurs ») durant les périodes mentionnées ci-dessous (regroupées sous « les périodes ») chez S.S.R. Maintenance Ltd.

Travailleur

Période

Sureshkumar Mahendiran

Du 1er octobre 2014 au 30 avril 2015

Piramila Uruthireswaran

Du 1er janvier 2015 au 18 avril 2016

Leo Puvanendran

Du 1er février 2015 au 30 novembre 2015

Kadosan Rajakiri

Du 15 mars 2015 au 18 avril 2016

Anushiya Sipaskaran

Du 1er avril 2015 au 15 mai 2015

Mithilarajh Mohanarajah

Du 1er juin 2015 au 31 août 2015

Rex Tharmarajasingham

Du 15 août 2015 au 30 septembre 2015

[2]  Pour rendre sa décision, le ministre du Revenu national s’est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

L’appelante

(a)  l’appelante offrait des services sanitaires et ménagers; (admise)

(b)  l’appelante exerçait ses activités à Stouffville, en Ontario; (admise)

(c)  l’appelante a été constituée le 18 juin 2013; (admise)

(d)  l’unique actionnaire de l’appelante était Sriruban Sripathman; (admise)

(e)  Sriruban Sripathman contrôlait les activités quotidiennes de l’appelante (admise)

Les travailleurs

(f)  les travailleurs ont conclu des ententes verbales avec l’appelante; (admise)

(g)  les travailleurs ont été embauchés pour effectuer des travaux de nettoyage; (admise)

(h)  les travailleurs ont obtenu leurs postes en répondant à une annonce dans le journal ou par recommandation; (admise)

(i)  les travailleurs n’ont pas négocié les conditions de leurs emplois (sic) avec l’appelante : (admise)

(j)  les tâches des travailleurs consistaient notamment à passer l’aspirateur, faire l’époussetage, nettoyer les fenêtres, collecter les ordures, nettoyer les planchers et les salles de bain; (admise)

(k)  l’appelante déterminait les tâches, les fonctions, les responsabilités, les horaires de travail et les lieux de travail des travailleurs; (admise)

(l)  l’appelante a donné une formation rémunérée aux travailleurs; (admise)

(m)  l’appelante donnait aux travailleurs des directives verbales sur le travail à effectuer; (admise)

(n)  l’appelante surveillait à l’occasion les travailleurs en visitant les lieux sans les en avertir; (niée – M. Sripathman était toujours sur place avec eux)

(o)  les travailleurs devaient aviser l’appelante s’ils voulaient prendre des congés ou des vacances; (admise)

(p)  les travailleurs effectuaient leur travail entre 19 h et 6 h; (niée)

(q)  l’appelante concluait les contrats de nettoyage avec les clients; (admise)

(r)  l’appelante garantissait le travail effectué par les travailleurs; (admise)

(s)  l’appelante était responsable de traiter les plaintes concernant la qualité du travail effectué par les travailleurs; (admise)

(t)  l’appelante fournissait les outils, le matériel et les fournitures dont les travailleurs avaient besoin pour s’acquitter de leurs tâches; (admise)

(u)  les travailleurs n’avaient pas à payer pour utiliser des outils, du matériel et des fournitures; (admise)

(v)  l’appelante était responsable de l’entretien et de la réparation des outils et du matériel; (admise)

(w)  les travailleurs étaient tenus d’effectuer le travail personnellement; (admise – M. Sripathman les remplaçait lors des jours fériés et des congés de maladie)

(x)  les travailleurs ne pouvaient pas embaucher d’adjoints; (admise)

(y)  l’appelante était responsable de l’embauche des travailleurs remplaçants; (admise)

(z)  l’appelante établissait les taux et le mode de rémunération des travailleurs; (admise)

(aa)  les travailleurs étaient rémunérés à un taux horaire de 12,50 $ l’heure; (admise)

(bb)  les travailleurs n’ont pas négocié leur taux de rémunération; (admise)

(cc)  les travailleurs étaient payés au mois; (admise)

(dd)  les travailleurs étaient payés en argent comptant ou par chèque; (admise)

(ee)  les chèques étaient tirés au nom personnel des travailleurs; (admise)

(ff)  les travailleurs n’ont pas produit de facture à l’appelante pour le travail effectué; (admise)

(gg)  les travailleurs n’ont pas facturé la TPS/TVH à l’appelante; (admise)

(hh)  les travailleurs n’exploitaient pas leur propre entreprise; (admise)

(ii)  les travailleurs n’ont pas fait d’annonce relative à leurs services; (ignorée)

(jj)  les travailleurs n’avaient pas de numéro d’entreprise de l’ARC associé à des entreprises de nettoyage; (ignorée)

(kk)  les travailleurs n’avaient pas de nom commercial; (ignorée)

(ll)  les travailleurs n’ont pas tenu de livres et de registres à des fins commerciales; (ignorée) et

(mm)  les travailleurs n’ont pas engagé de dépenses relativement au travail qu’ils ont effectué pour l’appelante; (admise : l’appelante payait le dîner et le café des employés qui travaillaient de nuit).

[3]  M. Sriruban Sripathman a témoigné à l’audience au nom de l’appelante. Il a expliqué que l’appelante est inactive depuis juin 2017, mais qu’elle n’a pas été dissoute. Il a ajouté que l’appelante est inscrite aux registres de la TPS/TVH et qu’elle a une dette de 40 000 $.

[4]  M. Sriruban Sripathman a essentiellement confirmé qu’il travaillait toujours auprès des travailleurs sur place et qu’il allait les chercher à 19 h pour les conduire aux sites où ils travaillaient. Le temps de déplacement n’était pas pris en compte dans le calcul des heures de travail. Il a déclaré que l’appelante a fourni l’ensemble des outils, du matériel et des fournitures nécessaires aux travailleurs. Il a confirmé que les travailleurs étaient payés mensuellement à un taux horaire variant entre 12 $ et 13 $ et que les travailleurs travaillaient habituellement 40 heures par semaine, cinq jours consécutifs, du lundi au vendredi, du mardi au samedi ou du mercredi au dimanche.

[5]  M. Sriruban Sripathman a également ajouté qu’il avait fourni aux travailleurs des chandails à manches courtes arborant le logo de l’appelante et que, lorsqu’un travailleur ne faisait pas son travail correctement, il l’aidait à améliorer la qualité de son travail.

[6]  Enfin, M. Sriruban Sripathman a expliqué que l’appelante devait souscrire et maintenir une police d’assurance pour les travailleurs sur place.

Analyse

[7]  La question à trancher est celle de savoir si les travailleurs occupaient un emploi assurable et ouvrant droit à pension chez l’appelante durant les périodes au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi, L.C. 1996, ch. 23 et de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada, L.R.C. 1985, ch. C-8 (le « RPC »).

[8]  Dans l’arrêt 1392644 Ontario Inc. (Connor Homes) c. Canada (Revenu national), 2013 CAF 85, la Cour d’appel fédérale a énoncé, dans les termes suivants, les critères qui sont utilisés pour répondre à la question centrale, celle de savoir si une personne fournit ou non les services à son propre compte :

[41] La question centrale à trancher reste celle de savoir si la personne recrutée pour assurer les services le fait, concrètement, en tant que personne travaillant à son compte. Comme l’expliquent aussi bien les arrêts Wiebe Door que Sagaz, aucun facteur particulier ne joue de rôle dominant, et il n’y a pas de formule fixe qu’on puisse appliquer, dans l’examen qui permet de répondre à cette question. Les facteurs à prendre en considération varient donc selon les faits de l’espèce. Néanmoins, les facteurs que spécifient les arrêts Wiebe Door et Sagaz sont habituellement pertinents, ces facteurs étant le degré de contrôle exercé sur les activités du travailleur, ainsi que les points de savoir si ce dernier fournit lui‑même son outillage, engage ses assistants, gère et assume des risques financiers, et peut escompter un profit de l’exécution de ses tâches.

[9]  Dans la présente affaire, tous les facteurs dont il est question dans les arrêts Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., 87 DTC 5025 et 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983, portent à conclure que les travailleurs étaient des employés de l’appelante.

Degré de contrôle exercé sur les activités des travailleurs

[10]  La preuve a révélé que l’appelante supervisait directement les travailleurs. Le représentant de l’appelante était toujours sur place avec les travailleurs. L’appelante a déterminé les tâches, les fonctions, les responsabilités, les horaires de travail et les lieux de travail des travailleurs. L’appelante a également donné des directives verbales aux travailleurs sur le travail à effectuer. Le travail des employés était garanti par l’appelante et cette dernière était responsable de traiter toute plainte concernant la qualité de leur travail. L’appelante déterminait les heures de travail des travailleurs en tenant compte des exigences de ses clients. Les travailleurs travaillaient huit heures par jour.

Les travailleurs ont-ils fourni leurs propres outils, matériaux et fournitures?

[11]  La preuve a révélé que l’appelante a fourni les outils, le matériel et les fournitures dont les travailleurs avaient besoin pour s’acquitter de leurs tâches.

Possibilité de profits

[12]  Les travailleurs n’ont pas négocié leur taux de rémunération. L’appelante a établi le taux et le mode de rémunération des travailleurs. Les travailleurs étaient rémunérés à un taux horaire variant entre 12 $ et 13 $. Les travailleurs n’avaient pas le droit de sous-traiter leur travail à d’autres personnes à un taux inférieur. Ce facteur porte à conclure que les travailleurs étaient des employés.

Degré de risque financier assumé par les travailleurs

[13]  La preuve démontre clairement que les travailleurs n’ont pas investi dans l’entreprise et qu’ils n’ont joué aucun rôle dans sa gestion. Ils n’ont pas investi dans le matériel ou les outils ou dans l’exploitation de l’entreprise. Par conséquent, ils n’ont pas assumé de risques financiers. L’appelante a fourni aux travailleurs le transport gratuit de leur résidence jusqu’aux lieux de travail et ils n’ont pas eu à souscrire à leur propre assurance responsabilité.

[14]  En appliquant les facteurs de l’arrêt Wiebe Door Services Ltd. à la présente affaire, on ne peut qu’arriver à la conclusion que les travailleurs étaient des employés de l’appelante durant les périodes.

[15]  Pour les motifs qui précèdent, les appels sont rejetés, parce que les travailleurs occupaient un emploi assurable et ouvrant droit à pension au sens de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi et de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada.

Signé à Ottawa, Canada, ce 6e jour de novembre 2018.

« Réal Favreau »

Le juge Favreau


RÉFÉRENCE :

2018 CCI 216

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2017-2921(CPP)

2017-2922 (EI)

INTITULÉ :

S.S.R. Maintenance Ltd. et le ministre du Revenu national

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 5 juin 2018

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Réal Favreau

DATE DU JUGEMENT :

Le 6 novembre 2018

COMPARUTIONS :

Représentant de l’appelante :

Sriruban Sripathman

Avocate de l’intimé :

Alisa Apostle

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

[EN BLANC]

Cabinet :

[EN BLANC]

Pour l’intimé :

Me Nathalie G. Drouin

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 

 

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