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Dossiers : 2013-3996(GST)G

2013-3997(GST)G

2014-4354(IT)G

ENTRE :

JOHN WALL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appels entendus les 24, 25 et 26 octobre 2016 et les 26 et 27 avril 2017 à Vancouver (Colombie-Britannique)

Devant : L’honorable juge Henry A. Visser


Comparutions :

Avocat de l’appelant :

Me George Douvelos

Avocats de l’intimée :

Me Selena Sit

[EN BLANC]

Me Johanna Russell

 

JUGEMENT

Les appels interjetés des cotisations et des nouvelles cotisations établies en application de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise et de la Loi de l’impôt sur le revenu sont accueillis, et les cotisations et nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, étant entendu que :

  • a) le revenu d’entreprise net de l’appelant pour l’année d’imposition 2006 doit être réduit de 126 000 dollars relativement à sa vente du lot vacant situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island;

  • b) le revenu de l’appelant pour l’année d’imposition 2006 doit être augmenté de 63 000 dollars relativement au gain en capital imposable découlant de la vente du lot vacant situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island;

  • c) l’appelant n’était pas tenu de percevoir ou de verser la taxe sur les produits et services relativement à la vente en 2006 du lot vacant situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island et, par conséquent, le montant net de la taxe sur les produits et services qu’il était tenu de verser à l’égard de la période de déclaration comprise entre le 1er juillet 2006 et le 30 septembre 2006 devrait être réduit de 9 000 dollars;

  • d) le revenu d’entreprise net de l’appelant pour l’année d’imposition 2006 doit être réduit de 159 370 dollars (à savoir la différence entre 810 693 dollars et 651 323 dollars), afin qu’il soit tenu compte d’une erreur qui a été reconnue par l’intimée et décrite aux paragraphes 14 et 23 de la réponse de l’intimée dans le dossier 2014-4354(IT)G;

  • e) le montant de l’intérêt et des pénalités applicables qui ont été imposées doit être réduit en conséquence des paragraphes a) à d) qui précèdent;

  • f) les appels interjetés par l’appelant sont rejetés à tous les autres égards.

Les dépens sont adjugés à l’intimée. Les parties disposent d’un délai de 30 jours suivant la date du présent jugement pour parvenir à un accord sur les dépens, faute de quoi l’intimée disposera alors d’un délai de 30 jours pour déposer ses observations écrites sur les dépens, après quoi l’appelant disposera d’un délai supplémentaire de 30 jours pour déposer sa réponse par écrit. Ces observations ne doivent pas dépasser dix pages. Si les parties n’informent pas la Cour qu’elles sont parvenues à un accord, et en l’absence de dépôt d’observations, les dépens seront adjugés à l’intimée selon ce que prévoit le tarif.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 14e jour d’août 2019.

« Henry A. Visser »

Le juge Visser

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de juin 2021.

François Brunet, réviseur


Référence : 2019 CCI 168

Date : 20190814

Dossiers : 2013-3996(GST)G

2013-3997(GST)G

2014-4354(IT)G

ENTRE :

JOHN WALL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Visser

I. APERÇU

[1] L’appelant, John Wall, exerce la profession d’agent immobilier à Vancouver depuis l’année 1977 environ. Il compte également une vaste expérience dans le domaine de l’aménagement immobilier. Il a toutefois déclaré des revenus très faibles aux fins de l’impôt sur le revenu pour chacune de ces activités. En 2006, 2008 et 2010, M. Wall a vendu quatre biens en Colombie-Britannique, pour un produit de vente total s’élevant à 5 784 000 dollars (et un bénéfice estimé à 2 234 419 dollars) et, plus précisément, trois habitations qu’il a aménagées dans le secteur ouest de Vancouver (les trois habitations) et un lot vacant à l’île Savary (le lot vacant) (les trois habitations et le lot vacant sont collectivement appelés les quatre biens dans les présentes). M. Wall n’a déclaré ni revenu ni gain pour ces ventes au cours des années d’imposition 2006, 2008 et 2010 et il n’a perçu, versé ou déclaré aucune taxe sur les produits et services (TPS) ni aucune taxe de vente harmonisée (TVH) sur la vente des quatre biens. Il a également déclaré un revenu très faible provenant d’autres sources au cours de ces années d’imposition. Concernant la vente des trois habitations, M. Wall a agi ainsi au motif qu’il avait construit et occupé chacune de ces trois habitations à titre de résidence principale. Malgré sa vaste expérience dans le monde des affaires et le secteur de l’immobilier, il a déclaré lors de son témoignage avoir omis de déclarer les gains importants découlant de la vente du lot vacant.

[2] Selon les avis de nouvelle cotisation (les nouvelles cotisations en application de la Loi de l’impôt sur le revenu (la Loi)) [1] délivrés par le ministre du Revenu national (le ministre) le 7 octobre 2013, le ministre a établi de nouvelles cotisations pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010 de M. Wall afin d’y inclure, respectivement, les montants de 810 693 dollars, de 772 403 dollars et de 651 323 dollars qui correspondent au revenu d’entreprise net non déclaré pour la vente des quatre biens (soit un total de 2 234 419 dollars). Le ministre a également imposé à M. Wall des pénalités pour faute lourde aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi à l’égard de ce revenu non déclaré.

[3] En raison d’une erreur que le ministre a reconnue [2] , les nouvelles cotisations de M. Wall établies par le ministre à l’égard du revenu d’entreprise net non déclaré en 2006 et en 2010 ont été inversées accidentellement, de sorte que le ministre a délivré un autre avis de nouvelle cotisation le 4 mai 2015, à l’occasion duquel il a établi une nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 2010 de M. Wall afin d’y inclure le montant de 159 370 dollars [3] correspondant au revenu d’entreprise net non déclaré. Le ministre a également imposé d’autres pénalités pour faute lourde aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi relativement à ce revenu non déclaré. Toutefois, le ministre a omis de délivrer un autre avis de nouvelle cotisation afin de corriger l’erreur figurant dans l’avis de nouvelle cotisation délivré le 7 octobre 2013, à savoir une surestimation de 159 370 dollars pour l’année d’imposition 2006 de M. Wall. Il n’a pas non plus réduit le montant des pénalités pour faute lourde imposées en application du paragraphe 163(2) de la Loi pour l’année d’imposition 2006 de M. Wall. À cet égard, l’intimée a reconnu qu’il était nécessaire de réduire de 159 370 dollars le revenu d’entreprise net de M. Wall pour l’année d’imposition 2006 et de réduire en conséquence l’intérêt et les pénalités applicables pour l’année d’imposition 2006 de M. Wall [4] .

[4] Selon un avis de cotisation (l’avis de cotisation no 4668 en application de la LTA) délivré par le ministre le 30 novembre 2011 en application de la Loi sur la taxe d’accise (la LTA) [5] , le ministre a établi des cotisations pour les périodes de déclaration de l’appelant comprises entre le 14 août 2009 et le 31 décembre 2010 pour un montant de 271 800 dollars correspondant à la TPS nette non déclarée, un montant de 8 833,50 dollars correspondant aux pénalités pour omission de produire une déclaration, ainsi qu’un montant de 11 892,50 dollars correspondant aux intérêts, ce qui donne un total de 292 526 dollars. L’avis no 4668 en application de la LTA concerne le bien vendu par M. Wall en 2010 [6] .

[5] Selon trois avis de cotisation en application de la LTA qui ont été délivrés par le ministre le 24 janvier 2012, le ministre a établi des cotisations pour les périodes de déclaration de l’appelant comprises entre le 1er avril 2006 et le 30 juin 2006, entre le 1er juillet 2006 et le 30 septembre 2006, ainsi qu’entre le 1er janvier 2008 et le 31 mars 2008 pour un montant de 205 810 dollars correspondant à la TPS nette non déclarée, un montant de 8 232,40 dollars correspondant aux pénalités pour omission de produire une déclaration, un montant de 4 321,20 dollars correspondant à des pénalités pour déclaration tardive, ainsi qu’un montant de 67 150,89 dollars correspondant aux intérêts, ce qui donne un total de 285 514,49 dollars [7] . Au total, le montant des quatre cotisations de la TPS visées par les présents appels s’élevait à 578 040,49 dollars au moment de l’établissement des cotisations.

[6] Lors de l’audition des présents appels, l’intimée a également reconnu que la vente par M. Wall du lot vacant situé à l’île Savary constituait une transaction imputable au capital et que, par conséquent, elle n’était pas assujettie à la TPS, de sorte que le gain découlant de cette transaction devait être pris en compte dans le revenu de 2006 de M. Wall à titre de gain de capital.

[7] M. Wall a interjeté appel devant la Cour des cotisations et des nouvelles cotisations de l’impôt sur le revenu et de la TPS qui précèdent (ainsi que des intérêts et des pénalités connexes). Ces appels ont été entendus sur preuve commune.

II. QUESTIONS EN LITIGE

[8] Outre les concessions consenties par l’intimée dans sa réponse concernant les nouvelles cotisations en application de la Loi et les concessions consenties par l’intimée lors de l’audition des présents appels concernant le lot vacant, les questions qui demeurent en litige dans les présents appels sont les suivantes :

  • a) La vente des trois habitations par M. Wall est-elle imputable au revenu ou au capital au sens de la Loi?

  • b) Si la vente des trois habitations par M. Wall est imputable au capital, l’appelant peut-il réclamer l’exemption pour résidence principale pour l’une des trois habitations en application de l’alinéa 40(2)b) de la Loi?

 

  • c) Le ministre a-t-il imposé à juste titre des pénalités pour M. Wall aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010?

  • d) Le ministre était-il en droit d’établir une nouvelle cotisation pour M. Wall après la période normale de nouvelle cotisation pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010 en application du paragraphe 152(4) de la Loi?

  • e) La vente des trois habitations est-elle assujettie à la TPS?

  • f) Le ministre a-t-il imposé à juste titre des pénalités pour omission de produire une déclaration aux termes de l’article 280.1 de la LTA?

  • g) Le ministre a-t-il imposé à juste titre des pénalités pour déclaration tardive aux termes de l’alinéa 280(1)a) de la LTA?

[9] Parmi les questions en litige qui précèdent, la principale question en litige consiste à déterminer si la vente des trois habitations par M. Wall est imputable au revenu (dans le cadre d’une entreprise d’aménagement) ou au capital. Une question secondaire consiste à déterminer si (et, le cas échéant, dans quelle mesure) M. Wall a résidé dans l’une ou l’autre des trois habitations avant leur vente. Les autres questions en litige dépendent de la résolution des deux questions qui précèdent.

[10] Pour les motifs qui suivent, je suis d’avis que la vente des trois habitations par M. Wall est imputable au revenu dans le cadre d’une entreprise d’aménagement qu’il a exploitée au cours des années visées par les présents appels et que, par conséquent, les appels interjetés par M. Wall doivent être rejetés, à l’exception de ceux portant sur les concessions consenties par le ministre concernant les points qui suivent :

  • a) l’omission de corriger la surestimation pour l’année d’imposition 2006 de M. Wall pour un montant total de 159 370 dollars;

  • b) l’imputation au capital, et non au revenu, de la vente par M. Wall du lot vacant situé à l’île Savary pour l’année d’imposition 2006;

  • c) le non-assujettissement à la TPS de la vente par M. Wall du lot vacant situé à l’île Savary en 2006, pour un montant de 9 000 dollars;

  • d) la réduction subséquente du montant de l’intérêt et des pénalités applicables aux trois concessions qui précèdent.


 

III. EXPOSÉ DES FAITS

[11] Comme je l’ai signalé précédemment, les présents appels concernent la vente par M. Wall des quatre biens au cours des années d’imposition en question. Plus précisément, M. Wall a vendu les biens qui suivent au cours des années d’imposition en question [8] :

[EN BLANC]

Date

Date

Nombre de mois en qualité

[EN BLANC]

d’achat

de vente

de propriétaire [9]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

2761, Patricia Crescent, Savary Island [10]

février 1992

15 août 2006

177

4007, West 21st Avenue

29 novembre 2004

6 avril 2006

16

4324, West 14th Avenue

13 juillet 2006

27 mars 2008

21

4668, West 14th Avenue [11]

14 août 2009

29 novembre 2010

16


 

[12] M. Wall a présenté très peu de documents concernant ces biens. Néanmoins, le ministre a autorisé certaines dépenses documentées et certaines estimations des coûts d’aménagement et il a calculé en conséquence le bénéfice ou le gain de M. Wall découlant de la vente des quatre biens comme suit [12] :

[EN BLANC]

[EN BLANC]

Coûts

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

[EN BLANC]

Prix

d’aménagement

Dépenses

Prix de

[EN BLANC]

[EN BLANC]

d’achat

admissibles

admissibles

vente

Bénéfice ou gain

2761, Patricia Crescent, Savary Island

24 000,00 $

$

$

150 000,00 $

126 000,00 $

4007, West 21st Avenue

580 000,00 $

311 676,00 $

1 001,31 $

1 418 000,00 $

525 322,69 $

4324, West 14th Avenue

890 000,00 $

287 054,00 $

1 543,34 $

1 951 000,00 $

772 402,66 $

4668, West 14th Avenue

1 127 500,00 $

325 205,00 $

1 601,69 $

2 265 000,00 $

810 693,31 $

Total

2 621 500,00 $

923 935,00 $

4 146,34 $

5 784 000,00 $

2 234 418,66 $

[13] M. Wall a témoigné lors de l’audience relative aux présents appels. Il a également présenté des éléments de preuve documentaires à l’appui de ses appels. Comme je l’explique en détail plus loin, je conclus que M. Wall n’était pas un témoin crédible. M. Wall a également cité trois autres témoins, à savoir Bryan Velve (l’agent immobilier responsable de la mise en vente des trois habitations), Alexander Wall (le fils de l’appelant) et Alfonso Daudet (le conseiller en placement de M. Wall). Voici les résumés du témoignage de chacun d’eux.

A. John Wall

1) Aperçu

[14] Comme je l’ai signalé précédemment, M. Wall exerce le métier d’agent immobilier depuis de nombreuses années et il compte une vaste expérience dans le domaine de l’aménagement immobilier, seul ou en équipe. Il a toutefois déclaré un revenu très faible aux fins de l’impôt pour chacune de ces activités, y compris au cours des années d’imposition en question. Il a néanmoins déclaré avoir construit chacune des trois habitations dans l’intention d’y résider à titre de résidence principale, même s’il est peu plausible que le revenu qu’il a déclaré aurait pu lui permettre de s’acquitter des paiements hypothécaires importants pour chacune de ces trois habitations. À cet égard, M. Wall a déclaré dans son témoignage avoir construit chacune des trois habitations dans l’intention d’y résider avec son fils, à proximité de son ancienne épouse (Karen Wall), mais avoir été contraint, en raison d’une série d’événements malheureux, de vendre ces trois habitations qu’il a construites et dans lesquelles il a résidé avec son fils, afin de rembourser les dettes qu’il avait accumulées. Je suis toutefois d’avis qu’il ressort des éléments de preuve indiquent que M. Wall avait entrepris une série d’acquisition de biens, de démolition de structures existantes, de construction de nouvelles maisons et de vente des biens, en vue d’utiliser le produit de la vente pour (i) rembourser les dettes qu’il avait accumulées (ii) générer un revenu afin de soutenir son train de vie et (iii) financer son prochain projet d’aménagement immobilier. À cet égard, compte tenu de tous les éléments de preuve et selon la prépondérance des probabilités, je suis d’avis que M. Wall a acheté et aménagé chacune des trois habitations dans l’intention de les vendre, dans le cadre d’une entreprise d’aménagement qu’il a exploitée en qualité de propriétaire unique. J’estime qu’on ne peut tirer aucune autre conclusion plausible de tous les éléments de preuve présentés à l’audition des présents appels.

[15] Je suis d’avis que le témoignage de M. Wall est en grande partie vague, intéressé et peu fiable. Par ailleurs, l’appelant n’a pas pu (ou n’a pas voulu) produire des éléments de preuve documentaires à l’appui de la majeure partie de ses affirmations. En présence d’éléments de preuve contredisant sa position, il s’est montré incrédule et il a produit des explications invraisemblables ou illogiques. En outre, face à ses propres déclarations antérieures incohérentes, il a rejeté du revers de la main ces incohérences, les qualifiant de superficielles. Il a également fait preuve d’une mémoire sélective à l’égard de certains détails concernant les trois habitations et d’autres biens qu’il a aménagés ou dont il a effectué la transaction.

[16] Par exemple, sa banque lui a accordé un financement pour soutenir ses activités de construction, vu qu’il était un agent immobilier générant un revenu à six chiffres. Devant la Cour, toutefois, il a nié avoir construit les trois habitations en qualité de constructeur et il a reproché à la banque d’avoir embelli ses demandes d’hypothèque afin de les faire approuver.

[17] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré qu’il connaissait l’exemption pour résidence principale et qu’il avait essayé d’en obtenir les grandes lignes, sans toutefois demander si l’exemption jouait dans son cas particulier. Il ressort des éléments de preuve qu’il agissait selon l’hypothèse que, dès qu’une personne réside dans une maison pendant environ un an, elle est admissible à l’exemption pour résidence principale, laquelle permet d’exonérer tout gain découlant de la vente de cette habitation.

[18] Au cours de la période pertinente, les dépenses de M. Wall ont été largement supérieures au revenu annuel qu’il a déclaré. Je suis d’avis qu’il était impossible pour M. Wall de demeurer propriétaire à long terme de chacune des trois habitations, compte tenu de ses déclarations de revenus, et en l’absence d’autres sources de capital telles que des économies ou des cadeaux. À cet égard, M. Wall a déclaré avoir utilisé ses économies et des prêts consentis par des membres de sa famille afin de financer chacune des trois habitations, mais je suis d’avis qu’il n’a produit aucun élément de preuve à l’appui de cette affirmation. M. Wall a déclaré un revenu annuel de 15 000 à 20 000 dollars environ découlant de son activité d’agent immobilier et il n’a produit aucun élément de preuve quant aux revenus découlant de ses activités d’aménagement antérieures ou d’autres sources de financement. Par ailleurs, la majeure partie du revenu découlant de son activité d’agent immobilier au cours de la période pertinente provient de transactions concernant des biens en sa possession ou des biens dont la transaction a été effectuée par son père (Henry Wall) et son [traduction] « amie », Mme Pillon (également appelée sa copine ou sa conjointe dans les éléments de preuve).

[19] On ne sait pas avec certitude si M. Wall a résidé dans une des trois habitations. Vu tous les éléments de preuve, je suis d’avis, selon la prépondérance des probabilités, que tel n’a pas été le cas. J’estime que ni l’appelant ni aucun des témoins qu’il a cités n’a pu confirmer de manière fiable les affirmations de l’appelant. Il ressort des éléments de preuve portant sur toute la période concernée par les présents appels que M. Wall a résidé dans un appartement situé dans l’une des habitations de Mme Pillon et qu’il a utilisé cette adresse à titre d’adresse postale. S’il ressort de certains éléments de preuve que M. Wall a utilisé chacune des trois habitations à titre d’adresse postale à certaines fins restreintes (par exemple, la réception de factures de gaz), ils ne suffisent pas à conclure que l’appelant a résidé dans l’une des trois habitations. Dans l’ensemble, je suis d’avis que le témoignage de M. Wall concernant sa résidence dans chacune des trois habitations (et les durées correspondantes) est intéressé et qu’il contredit les éléments de preuve documentaires qui ont été présentés au procès.

2) Les biens liés à John Wall

[20] Comme je l’ai mentionné précédemment, M. Wall compte une vaste expérience dans l’achat, l’aménagement et la vente de biens immobiliers. À cet égard, voici un résumé des divers biens liés à M. Wall dont il a été fait mention dans les éléments de preuve présentés au cours de l’audition des présents appels.

a) Le lot vacant – 2761, Patricia Crescent, Savary Island

[21] En février 1992, M. Wall et son épouse à l’époque (Karen Wall) ont acheté le lot vacant (situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island) pour 24 000 dollars. M. Wall et Karen Wall se sont séparés vers 1996. Le 24 juillet 1998, M. Wall est devenu propriétaire unique du lot vacant, après que Karen Wall lui a transféré ses droits [13] . Il a ensuite vendu le lot vacant pour 150 000 dollars le 10 août 2006 et il a utilisé le produit de la vente pour financer l’achat du bien situé au 2612, Patricia Crescent, Savary Island. En 2006, M. Wall a également participé à la vente des biens situés au 4007, West 21st Avenue et au 4067, West 19th Avenue, ainsi qu’à l’achat du bien situé au 4324, West 14th Avenue (selon les modalités décrites plus loin). Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir omis d’indiquer la vente du lot vacant dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu de 2006, malgré sa connaissance des méthodes de déclaration de ce type de transactions du fait de ses activités d’aménagement antérieures et de son expérience à titre d’agent immobilier. Par conséquent, il ne conteste pas le montant du gain découlant de la vente du lot vacant, mais il soutient que la nouvelle cotisation établie à cet égard par le ministre le 7 octobre 2013 pour l’année d’imposition 2006 était prescrite.

b) Pocido Holdings Limited, la société d’aménagement immobilier de M. Wall

[22] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré posséder une société d’aménagement immobilier du nom de Pocido Holdings Limited (la société Pocido). Entre les années 1993 et 1995, la société Pocido et une autre entreprise de construction ont aménagé environ 20 maisons en rangée à Squamish, en Colombie-Britannique. M. Wall a également déclaré que la société Pocido, qui avait pour objet l’aménagement de maisons en rangée, réclamait des crédits de taxe sur les intrants pour la TPS payée au cours de la période de construction.

[23] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré que la société Pocido avait également collaboré avec plusieurs constructeurs afin d’aménager une maison et un duplex. Il n’a pas été en mesure de se souvenir avec exactitude des dates d’aménagement de ces biens. Lorsqu’il lui a été présenté des demandes d’hypothèque, il ne s’est pas souvenu du bien auquel chaque demande visait. La maison a vraisemblablement été construite dans le secteur d’Arbutus, à Vancouver, entre le milieu et la fin des années 1990. Le duplex, lui, a vraisemblablement été construit dans le secteur de Kitsilano, à Vancouver, au début des années 2000. Les deux activités d’aménagement comprenaient la démolition de la structure existante, la construction d’une nouvelle maison ou d’un nouveau duplex, puis la vente du bien.

c) Le bien situé au 4434, West 8th Avenue

[24] M. Wall a résidé au 4434, West 8th Avenue avec son épouse (Karen Wall) et son fils (Alexander Wall). Son épouse et lui ont continué de résider dans cette maison après leur séparation vers 1996. Après cette séparation, la santé de Karen Wall s’est dégradée en raison d’une sclérose en plaques. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré qu’elle était incapable de travailler et qu’elle utilisait un fauteuil roulant. Il a affirmé avoir conclu un accord avec Mme Wall afin de prendre soin d’Alexander Wall lorsque Mme Wall n’en a plus été capable en raison de sa maladie. Selon lui, Alexander Wall a, dans un premier temps, résidé la moitié du temps chez sa mère, au 4434, West 8th Avenue, mais à mesure que la maladie de sa mère a progressé, il a graduellement réduit le temps passé auprès de sa mère pour ne conserver que les fins de semaine.

[25] Le 19 juillet 2004, M. Wall a transféré ses droits sur le bien situé au 4434, West 8th Avenue à Karen Wall à titre de pension alimentaire future. Ce transfert a eu lieu au cours d’une transaction concernant une hypothèque fictive. Cependant, M. Wall a témoigné avoir continué de payer les dépenses relatives à la maladie de Mme Wall, comme l’installation d’un ascenseur au 4434, West 8th Avenue, au coût de 30 000 dollars. Il a également déclaré avoir continué de payer des dépenses relatives au trouble de l’attention et de l’hyperactivité et à d’autres difficultés d’apprentissage d’Alexander Wall. Toutefois, M. Wall n’a produit aucun élément de preuve documentaire à l’appui de ces dépenses ou de l’accord conclu avec Mme Wall après leur séparation ou leur divorce (notamment en ce qui concerne la pension alimentaire).

d) L’appartement de M. Wall – no 908 au 2370, West 2nd Avenue

[26] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir emménagé dans l’appartement no 908 situé au 2370, West 2nd Avenue (l’appartement) aux alentours de 1996, après sa séparation avec Mme Wall. Il a indiqué par ailleurs qu’il s’agissait d’un petit logement et qu’il a décidé d’acheter et d’aménager la maison située au 4007, West 21st Avenue pour permettre à son fils Alexander Wall de vivre dans une maison. Toutefois, M. Wall a déclaré avoir décidé de conserver le bail de l’appartement même après avoir prétendument emménagé au 4007, West 21st Avenue. S’il a déclaré avoir sous-loué l’appartement afin de prendre en charge le coût de la location, il n’a toutefois appelé à témoigner aucun des soi-disant locataires et il n’a produit aucun élément de preuve documentaire d’un contrat de sous-location.

[27] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir emménagé de nouveau dans l’appartement après la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue et y avoir demeuré pendant la construction du bien situé au 4324, West 14th Avenue. Les éléments de preuve qui ont été présentés au procès ne permettent pas de déterminer précisément la date à laquelle M. Wall a résilié le bail de l’appartement, mais il a indiqué dans son témoignage y avoir résidé pendant une courte période au cours de la construction du bien situé au 4668, West 14th Avenue. Il ressort des éléments de preuve de M. Wall que l’appartement est demeuré à sa disposition en tant que résidence pendant la majeure partie de la période pertinente visée par les présents appels.

[28] M. Wall a utilisé l’appartement à titre d’adresse postale dans ses déclarations de l’impôt sur le revenu de 2006 et de 2008, dans divers documents de prêt et d’hypothèque [14] , ainsi que dans sa demande auprès du Homeowner’s Protection Office (HPO), pour le bien situé au 4324, West 14th Avenue.

e) Le bien situé au 4007, West 21st Avenue

[29] Le bien situé au 4007, West 21st Avenue a été la première des trois habitations que M. Wall a achetées. Dans son témoignage, il a déclaré que l’achat et l’aménagement de chacune des trois habitations avaient un seul et même objectif : offrir à son fils, Alexander Wall, une maison située dans le même quartier que son école et la maison de sa mère.

[30] M. Wall a acheté le bien situé au 4007, West 21st Avenue le 29 novembre 2004 pour 580 000 dollars. Après avoir obtenu un permis de démolition, il a démoli la maison existante sur ce bien. Il a également obtenu un permis de construire, qui lui a été délivré le 10 mars 2005, puis il a construit une nouvelle maison. Le bien a été mis en vente le 13 janvier 2006, puis de nouveau le 13 février 2006. M. Wall a obtenu un permis d’occuper, qui lui a été délivré le 4 avril 2006, et le bien a été vendu le 6 avril 2006 pour 1 418 000 dollars.

[31] M. Wall a financé l’aménagement du bien situé au 4007, West 21st Avenue en souscrivant une hypothèque de 812 500 dollars qui lui a été accordée par la banque HSBC. Lors du contre-interrogatoire, l’intimée a demandé à M. Wall de démontrer comment il avait été en mesure de s’acquitter de la mise de fonds et des paiements hypothécaires à long terme. À cet égard, je fais remarquer que M. Wall a déclaré aux fins d’imposition un revenu annuel de 15 000 à 20 000 dollars environ pour la plupart des années entre 1987 et 2005. Dans son témoignage, M. Wall a indiqué qu’il possédait des économies et que des amis et des membres de sa famille lui avaient consenti des prêts personnels, mais il n’a produit aucun élément de preuve à l’appui de ses affirmations.

[32] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir acheté une maison délabrée au 4007, West 21st Avenue, qu’il a démolie avant de construire une maison à trois étages dotée de cinq chambres et d’un logement au sous-sol. Il a déclaré avoir prévu initialement de rénover la maison existante, mais peu de temps après avoir acheté le bien, il a constaté qu’il serait plus rentable de construire un bâtiment tout neuf. Toutefois, M. Wall n’a mentionné aucune rénovation au cours des interrogatoires préalables. Au contraire, il a déclaré ce qui suit [traduction] : « Quand j’ai acheté [le bien situé au 4007, West 21st Avenue], la maison sur place n’était pas habitable. C’était juste une vieille maison délabrée dans laquelle on n’aurait même pas pu vivre. J’ai donc obtenu au plus vite les permis nécessaires pour la démolir. » [15]

[33] Dans son témoignage, M. Wall a signalé qu’il fallait prévoir environ six mois de construction avant qu’une maison soit habitable. À cet égard, il a déclaré que, même si des travaux de construction étaient toujours en cours, il avait emménagé au 4007, West 21st Avenue dès qu’il avait été possible d’y habiter. Dans son témoignage initial, il a déclaré avoir emménagé au 4007, West 21st Avenue aux alentours de mai 2005. Toutefois, après que l’intimée a fait remarquer, lors du contre-interrogatoire, que le permis de construire au 4007, West 21st Avenue n’avait pas été délivré avant le 10 mars 2005, M. Wall a affirmé avoir terminé les travaux préliminaires avant d’obtenir le permis de construction, ce qui expliquerait le bref délai entre l’obtention du permis et l’emménagement. Après que l’intimée eut également soutenu que M. Wall n’avait pas commencé la construction avant la délivrance du permis de construire au 4007, West 21st Avenue et que, par conséquent, il lui aurait été impossible de commencer à résider à cette adresse en mai 2005, M. Wall a reconnu que l’habitation existante sur ce bien n’avait pas été démolie avant le 10 mars 2005 et qu’il était plus probable qu’il ait commencé à y résider au plus tard en juillet ou en août 2005.

[34] Le témoignage et les éléments de preuve documentaires de M. Wall se contredisent quant à la présence ou non d’appareils électroménagers au 4007, West 21st Avenue avant la vente du bien. M. Wall a déclaré que, au moment de son emménagement, il est possible qu’il n’y ait pas eu d’appareils électroménagers. Lorsqu’il a vendu le bien au 4007, West 21st Avenue, l’annonce comprenait la mention d’un budget pour des appareils électroménagers. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré qu’il ne se souvenait pas de la présence ou non d’appareils électroménagers dans la maison. Il a soutenu que le budget pour des appareils électroménagers découlait du fait que certains acheteurs préfèrent acheter d’autres modèles. Lorsqu’on lui a fait remarquer cette incohérence, il a soutenu fermement avoir installé des appareils électroménagers bon marché au 4007, West 21st Avenue.

[35] À la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue, le contrat de vente et d’achat daté du 24 février 2006 comprenait une condition fondamentale selon laquelle tous les travaux de construction devaient être terminés avant la conclusion de la transaction. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré que les travaux de construction étaient en grande partie terminés à cette date. L’inspection finale des travaux de construction par la ville de Vancouver a eu lieu le 29 mars 2006, et le permis d’occuper a été délivré le 4 avril 2006. M. Wall n’a conservé aucun élément de preuve documentaire relatif au processus de construction ou de la date de fin des travaux. Il a insisté sur le fait que rien ne l’empêchait de résider dans chacune des trois habitations avant la fin des travaux de construction.

[36] M. Wall n’a conservé aucun registre des dépenses liées à la construction pour le bien situé au 4007, West 21st Avenue. Les seuls éléments de preuve documentaires relatifs aux dépenses qu’il a produits sont des factures de gaz de la société Terasen. M. Wall a estimé que la construction de chacune des trois maisons avait coûté environ 250 dollars au pied carré. Il a déclaré que chaque maison s’étendait sur 3 000 pieds carrés, ce qui signifie que les coûts totaux de construction se sont élevés à environ 750 000 dollars pour chacune des trois maisons.

[37] M. Wall a vendu le bien situé au 4007, West 21st Avenue le 6 avril 2006 pour 1 418 000 dollars. Il n’a pas déclaré la vente dans sa déclaration de revenu de 2006. Dans son témoignage, il a affirmé qu’il faisait appel aux services du même comptable depuis les années 1990. La société Marsh and Marsh Co. a préparé la déclaration de l’impôt sur le revenu de M. Wall pour l’année 2006. Il a déclaré ne pas avoir informé son comptable de la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue.

[38] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir vendu le bien situé au 4007, West 21st Avenue pour rembourser ses dettes. Je relève toutefois qu’il possédait d’autres biens personnels qu’il aurait pu vendre. M. Wall a déclaré avoir vendu ce bien au motif que ses dettes étaient impossibles à gérer et que la valeur nette du bien était suffisante pour rembourser ses dettes et construire une nouvelle maison. M. Wall ne disposait d’aucun document révélant le montant de ses dettes à cette époque. Dans son témoignage, il a déclaré ne pas avoir contracté un autre prêt auprès de la banque pour éviter de s’endetter davantage. Toutefois, au cours des trois mois qui ont suivi la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue, M. Wall a financé le bien situé au 4324, West 14th Avenue en souscrivant une hypothèque de 1 125 000 dollars. M. Wall a insisté sur le fait qu’il avait pris une décision financière logique en affectant la valeur nette du bien situé au 4007, West 21st Avenue au remboursement de ses dettes ainsi qu’au réinvestissement dans un nouveau bien. Malgré ses prétendues dettes insurmontables, M. Wall a cotisé à son régime enregistré d’épargne-retraite à hauteur de 13 000 dollars au cours de cette même année d’imposition. Je relève que M. Wall possédait encore le lot vacant (situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island) et un aéronef (dont la valeur a été estimée à 200 000 dollars dans sa demande d’hypothèque du 9 avril 2005) [16] . M. Wall n’a pu expliquer comment il était parvenu à faire des économies suffisantes pour financer le bien situé au 4007, West 21st Avenue, ni pourquoi il ne pouvait pas utiliser ses autres biens pour rembourser ses dettes accumulées.

f) Le bien situé au 4067, West 19th Avenue

[39] Le 10 mars 2005, M. Wall a acheté le bien situé au 4067, West 19th Avenue pour 585 000 dollars [17] . Il s’agit de la même date à laquelle il a reçu le permis de construire pour le bien situé au 4007, West 21st Avenue. Il a déclaré que, même si son nom figurait dans le contrat d’achat et de vente, son père était le véritable acheteur. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir peut-être cosigné avec son père l’hypothèque pour le bien situé au 4067, West 19th Avenue, mais il a nié que ce bien faisait partie de son entreprise d’aménagement immobilier. Il a déclaré avoir attribué le contrat d’achat de ce bien à son père au moment de la signature. Je relève que le bien situé au 4067, West 19th Avenue se trouve dans le même quartier que les trois habitations en cause dans les présents appels (4007, West 21st Avenue, 4324, West 14th Avenue et 4668, West 14th Avenue).

[40] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir démoli la maison existante au 4067, West 19th Avenue, puis avoir construit une nouvelle maison à quatre chambres pour son père (qui était âgé de 82 ans à l’époque). M. Wall était l’entrepreneur général chargé des travaux de construction. Il ne pouvait se souvenir si le plan était semblable à celui des trois habitations.

[41] Le père de M. Wall a accepté de vendre le bien situé au 4067, West 19th Avenue le 18 mai 2006 pour 1 480 000 dollars. M. Velve a versé à M. Wall une commission à l’occasion de cette vente [18] . M. Wall a déclaré que son père avait vendu la maison au motif que la santé des parents de M. Wall se dégradait et que ces derniers avaient emménagé avec la sœur de M. Wall. À la vente de la maison, il était indiqué dans le contrat d’achat et de vente qu’étant donné que le vendeur occupait la résidence, la TPS n’était pas applicable. Il est également stipulé au contrat que le vendeur devait produire un permis d’occuper à la date de la signature.

g) Le bien situé au 2612, Patricia Crescent, Savary Island

[42] Le 18 septembre 2005, M. Wall était désigné à titre d’acheteur dans un contrat de vente et d’achat pour le bien situé au 2612, Patricia Crescent, Savary Island [19] . Il a soutenu que le contrat avait été attribué à son père (Henry Wall) à la conclusion de la vente en juillet 2006. Je ne dispose d’aucun élément de preuve permettant de conclure que Henry Wall a effectué le moindre paiement pour le bien situé au 2612, Patricia Crescent. M. Wall a nié avoir été à l’époque le véritable propriétaire du bien situé au 2612, Patricia Crescent.

[43] Comme je l’ai déjà signalé, M. Wall a vendu le lot vacant (situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island) le 10 août 2006 pour 150 000 dollars, et il a utilisé le produit de la vente pour payer le bien situé au 2612, Patricia Crescent. Il a déclaré que son père avait financé le bien situé au 2612, Patricia Crescent, en souscrivant une hypothèque de 300 000 dollars, mais il ressort d’éléments de preuve documentaires contradictoires indiquent qu’il s’agissait d’une hypothèque de 485 000 dollars, et M. Wall en était le contractant.

[44] Il a déclaré que les paiements mensuels de l’hypothèque, de 821 dollars, provenaient de son compte bancaire, mais que son père le rembourserait ou qu’ils auraient mis le bien en location afin de payer l’hypothèque. Toutefois, au cours des interrogatoires préalables, M. Wall a déclaré avoir effectué lui-même la majorité des paiements pour le bien situé au 2612, Patricia Crescent, au motif qu’il prévoyait d’en devenir l’utilisateur principal.

[45] Comme je l’ai noté, M. Wall a vendu le lot vacant (situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island) en 2006 pour 150 000 dollars, et il a utilisé le produit de la vente pour acheter le bien situé au 2612, Patricia Crescent. Pourtant, à l’époque où M. Wall éprouvait prétendument des difficultés financières l’ayant contraint à vendre le bien situé au 4007, West 21st Avenue en 2006, comme il l’a déclaré dans son témoignage, il n’a ni vendu le lot vacant ni utilisé le produit de la vente pour rembourser ses dettes accumulées. Il a préféré vendre le bien situé au 4007, West 21st Avenue en 2006, puis utiliser le produit de la vente du lot vacant pour financer l’achat du bien situé au 2612, Patricia Crescent.

[46] Je suis d’avis que les éléments de preuve de M. Wall permettent de conclure à une série d’achats et de ventes de biens, ce qui contredit sa version des faits. M. Wall a acheté le bien situé au 2612, Patricia Crescent, juste après avoir vendu le bien situé au 4007, West 21st Avenue, sous prétexte de dettes prétendument insurmontables. Il a vendu le lot vacant afin de financer cet achat. Il a également acheté le bien situé au 4324, West 14th Avenue juste avant de conclure la vente du bien situé au 2612, Patricia Crescent. Henry Wall a vendu le bien situé au 4067, West 19th Avenue le mois précédant l’achat du bien situé au 2612, Patricia Crescent. Par conséquent, en dépit de ses dettes prétendument insurmontables en 2006, M. Wall a vendu deux biens (le lot vacant et le bien situé au 4007, West 21st Avenue) et il en a acheté deux autres (celui situé au 2612, Patricia Crescent et celui situé au 4324, West 14th Avenue), ce qui a exigé un investissement encore plus important que pour les deux biens qu’il avait vendus. Au cours de cette même période, il a également acheté, aménagé et vendu le bien situé au 4067, West 19th Avenue, même s’il a été en partie [traduction] « inscrit » au nom de son père (Henry Wall) et même si aucun élément de preuve ne permet de conclure que son père a, ce faisant, assumé un rôle autre que celui d’agent.

[47] Henry Wall a transféré à M. Wall le bien situé au 2612, Patricia Crescent à M. Wall pour le montant d’un dollar le 28 mars 2011 [20] . Je traiterai en détail l’acquisition de ce bien par M. Wall plus loin, car ce fait est pertinent pour les motifs invoqués par M. Wall quant à la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue.

h) Le bien situé au 4324, West 14th Avenue

[48] Le bien situé au 4324, West 14th Avenue a été la deuxième des trois habitations de M. Wall. Il l’a acheté pour 890 000 dollars le 12 juin 2006, soit trois mois après avoir vendu le bien situé au 4007, West 21st Avenue. Il a mis en vente le bien situé au 4324, West 14th Avenue le 19 janvier 2008. L’inspection finale des travaux de construction par la ville a eu lieu le 22 avril 2008. M. Wall a vendu le bien situé au 4324, West 14th Avenue le 25 mars 2008 pour 1 951 000 dollars.

[49] M. Wall a demandé à la banque HSBC une hypothèque de 1 150 000 dollars pour financer l’aménagement, ce qui lui a été accordé. Il n’a fourni à la Cour aucun document permettant d’attester de ses économies, ses dettes, sa mise de fonds ou ses dépenses à cette époque.

[50] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir acheté le bien situé au 4324, West 14th Avenue dans l’intention de la rénover, mais avoir finalement décidé qu’il serait plus logique de construire une nouvelle maison. Il a déclaré qu’il aurait été plus rentable de construire une nouvelle maison que de rénover la maison existante ou d’engager un constructeur professionnel. Au cours des interrogatoires préalables, il a déclaré que le bien situé au 4324, West 14th Avenue n’était pas habitable et que seul le terrain avait de la valeur. Il a mentionné aucun projet de rénovation.

[51] M. Wall a reçu le permis de construire pour le bien situé au 4324, West 14th Avenue le 14 août 2006. Au cours du contre-interrogatoire, il a reconnu que les travaux de construction auraient commencé à la réception du permis de construire ou après, mais il a insisté sur le fait qu’ils avaient commencé dès que possible. Il n’a présenté aucun élément de preuve quant à la date de début ou de fin des travaux de construction. Il a toutefois soutenu avoir résidé dans le bien situé au 4324, West 14th Avenue au plus tard au début de l’année 2007.

[52] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir conçu le plan du bien situé au 4324, West 14th Avenue en pensant tout particulièrement à son [traduction] « amie », Mme Pillon ainsi qu’à ses enfants à elle. Il a déclaré avoir créé une pièce spéciale à l’arrière de la maison afin de tenir son chat à l’écart des enfants de Mme Pillon, car l’un d’eux y était allergique. M. Wall a soutenu qu’il lui avait été déconseillé d’inclure dans le plan une pièce pour le chat, car cela aurait réduit l’intérêt du bien à la revente. À d’autres égards, le bien situé au 4324, West 14th Avenue était semblable à celui situé au 4007, West 21st Avenue : il comprenait trois étages, cinq chambres et un logement au sous-sol pouvant être mis en location afin de générer un revenu. Bien que la pièce spéciale ait été décrite comme une [traduction] « pièce pour le chat », rien n’indique qu’il était impossible de l’utiliser à d’autres fins. En outre, le bien situé au 4324, West 14th Avenue a été vendu deux mois seulement après sa mise en vente.

[53] M. Wall a déposé une demande auprès du HPO lorsqu’il a construit la maison au 4324, West 14th Avenue, au motif que le HPO autorise prétendument les personnes qui construisent leur propre maison à faire certaines économies en les libérant de l’exigence concernant la garantie de logement. M. Wall a présenté à la Cour ses demandes au titre de ce programme, mais il n’a pas été en mesure de produire quelque document que soit tendant à établir que ses demandes avaient été acceptées ou qu’il avait satisfait aux critères d’admission. Selon lui, ces critères comprenaient prétendument la preuve que le propriétaire avait occupé le bien pendant au moins un an. Il n’y a aucun élément de preuve confirmant le fonctionnement de ce programme. M. Wall a mentionné expressément le HPO à l’égard du bien situé au 4324, West 14th Avenue et il a signalé de manière générale qu’il s’agissait d’un élément de preuve confirmant sa résidence dans chacun des biens. Toutefois, il n’a produit aucun témoignage précis concernant le programme du HPO pour les autres biens.

[54] M. Wall a déclaré avoir attendu environ six mois avant que le bien situé au 4324, West 14th Avenue soit habitable, et y avoir emménagé dès que cela avait été possible. Dans son témoignage, il a déclaré avoir engagé des entrepreneurs pour terminer les travaux sur la maison pendant le jour, alors que son fils Alexander Wall était à l’école.

[55] M. Wall a déclaré que le bien situé au 4324, West 14th Avenue était meublé de la même manière que les autres. Dans son témoignage, il a affirmé que son fils y résidait en semaine et passait les fins de semaine à la maison de sa mère. M. Wall a déclaré que son fils entreposait ses vêtements et son matériel de sport dans le bien situé au 4324, West 14th Avenue.

[56] Il a expliqué qu’il n’avait conservé aucun document concernant ses dépenses relatives aux travaux de construction pour le bien situé au 4324, West 14th Avenue, mais qu’il pouvait produire plusieurs factures de gaz. Dans son témoignage, il a déclaré qu’il lui arrivait à l’occasion de réduire le chauffage ou de l’éteindre pour faire des économies, selon la saison. Comme pour les autres habitations, il a estimé les coûts de construction à 250 dollars au pied carré.

[57] M. Wall a vendu le bien situé au 4324, West 14th Avenue le 25 mars 2008 pour 1 951 000 dollars. Il n’a pas déclaré la vente dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu de 2008. Il a affirmé ne pas se souvenir s’il avait informé ou non son comptable de la vente de ce bien. Il a toutefois fait des déclarations vagues selon lesquelles il aurait gardé ce renseignement pour lui, au motif qu’il estimait qu’il était admissible à l’exemption pour résidence principale et qu’il n’était pas nécessaire d’en discuter avec son comptable [21] .

[58] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir vendu le bien situé au 4324, West 14th Avenue, au motif que ses dettes étaient de nouveau insurmontables et que son activité d’agent immobilier ne lui rapportait pas suffisamment. Il a dit qu’il s’attendait à ce que Mme Pillon vive avec lui et contribue aux paiements de l’hypothèque, mais cela ne s’est pas concrétisé. Il a également allégué ne pas avoir été en mesure de dégager un revenu supplémentaire de la mise en location du sous-sol. La valeur nette du bien étant en hausse, il avait alors décidé de rembourser ses dettes et de construire une autre maison.

[59] Au cours de cette période, M. Wall a continué d’effectuer des paiements mensuels de 821 dollars pour l’hypothèque du bien situé au 2612, Patricia Crescent et il a conservé le bail de son appartement. Dans un document de prêt hypothécaire daté du 28 mars 2007, M. Wall a déclaré plusieurs biens, notamment des régimes enregistrés d’épargne-retraite, des actions, des titres obligataires, des placements, un aéronef et une voiture de la marque Mercedes [22] . Il avait également accès à une ligne de crédit de 150 000 dollars. M. Wall n’a pas expliqué pourquoi il avait choisi de vendre sa maison (située au 4324, West 14th Avenue) au lieu d’utiliser ces autres biens pour gérer ses prétendues dettes.

i) Le bien situé au 4684, West 9th Avenue

[60] Le 28 février 2007, M. Wall a acheté le bien situé au 4684, West 9th Avenue. Dans son témoignage, il a déclaré avoir attribué le contrat d’achat à Maria Pillon, qui a acheté le bien pour 1 200 000 dollars. M. Wall a servi de caution pour le financement de Mme Pillon. Dans son témoignage, il a indiqué ne pas avoir entrepris de travail de construction dans ce bien. Selon sa description, il s’agissait d’une maison ancienne qui avait été rénovée. Tout comme les trois habitations, elle comprenait trois étages, cinq chambres et un logement au sous-sol. M. Wall a précisé dans son témoignage que Mme Pillon y avait habité avec ses enfants. Par ailleurs, il a déclaré avoir habité au 4684, West 9th Avenue avec son fils Alexander Wall pendant qu’il construisait la nouvelle maison au 4668, West 14th Avenue.

[61] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré que Mme Pillon avait vendu le bien situé au 4684, West 9th Avenue pour des motifs financiers liés à des placements infructueux sur le marché boursier. Ce bien a été mis en vente le 19 janvier 2008 pour 1 988 000 dollars. M. Wall ne s’est pas souvenu du prix de vente réel, mais il a déclaré que Mme Pillon n’avait pas fait d’argent grâce à cette vente. Il a convenu avec l’intimée que le prix de vente définitif devait être d’environ 1 215 000 dollars.

j) Le bien situé au 4668, West 14th Avenue

[62] Le bien situé au 4668, West 14th Avenue a été la troisième des trois habitations de M. Wall. Il l’a acheté le 12 août 2009 pour 1 127 500 dollars. Il l’a mis en vente le 7 octobre 2010. La ville de Vancouver a donné son approbation définitive le 21 octobre 2010, et le permis d’occuper a été délivré le 23 novembre 2010. M. Wall a vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue le 26 novembre 2010 pour 2 265 000 dollars.

[63] Il a financé le bien situé au 4668, West 14th Avenue en souscrivant une hypothèque de 2 100 000 dollars accordée par la banque HSBC. Il n’a produit à la Cour aucun élément de preuve documentaire attestant de ses économies, sa mise de fonds, ses dettes ou ses dépenses au moment de l’achat. Il a soutenu qu’il était en mesure de payer l’hypothèque pour les trois habitations, car il prévoyait conclure plus de ventes à titre d’agent immobilier, obtenir une aide financière de la part de Mme Pillon et mettre en location le logement au sous-sol. Ces plans ont échoué pour chacune des trois habitations. M. Wall n’a produit aucun élément de preuve de ses tentatives de mettre ces plans à exécution. Il est invraisemblable qu’il ait réellement cru pouvoir gagner suffisamment d’argent pour payer l’hypothèque, sans compter ses autres frais de subsistance, d’autant plus qu’il ne bénéficiait d’aucune autre source de revenu (comme je l’expliquerai en détail plus loin).

[64] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir envisagé de rénover le bien situé au 4668, West 14th Avenue, mais avoir finalement décidé de construire une nouvelle maison. Lors des interrogatoires préalables, M. Wall avait donné une impression sensiblement différente, car il avait déclaré : [traduction] « Encore une fois, quand j’ai acheté ces habitations, aucune des maisons n’avait un tant soit peu de valeur. Elles étaient tellement délabrées que mon intention était d’acheter les biens en raison de la valeur du terrain. »

[65] M. Wall a reçu le permis de construire pour le bien situé au 4668, West 14th Avenue le 16 septembre 2009. Il a déclaré que les travaux de construction avaient dû commencer à cette date et qu’il avait emménagé entre cinq et six mois plus tard. Toutefois, il a également déclaré avoir emménagé aux alentours de décembre 2009. Dans son témoignage, il a déclaré que des travaux de construction étaient en cours alors qu’il habitait au 4668, West 14th Avenue. Il n’a produit aucun élément de preuve quant à la date exacte à laquelle il a emménagé à cette adresse. Dans son témoignage, il a déclaré avoir obtenu des permis d’occuper pour les trois habitations pour la simple raison qu’il s’agissait d’une exigence figurant dans le contrat d’achat et de vente.

[66] M. Wall n’a conservé aucun document permettant d’établir ses dépenses liées aux travaux de construction pour le bien situé au 4668, West 14th Avenue. Selon ses explications, il n’a conservé aucun reçu au motif qu’il ne s’agissait pas d’une entreprise et qu’il ne prévoyait pas demander des crédits de taxe sur les intrants. Il avait prévu habiter dans chacune des trois habitations et, par conséquent, il n’avait pas géré les travaux de construction correspondants de la même manière qu’il avait géré des aménagements immobiliers dans le cadre de l’entreprise Pocido. M. Wall a soutenu qu’au moins un des entrepreneurs n’avait pas documenté les transactions et que, de toute manière, il lui aurait été impossible de recueillir des éléments de preuve documentaires auprès de ces entrepreneurs. Les dépenses dont M. Wall a fait état pour le bien situé au 4668, West 14th Avenue étaient des factures de gaz de l’entreprise Terasen et un avis d’assurance de la société Wawanesa. Comme pour les autres habitations, il a estimé les coûts de construction à 250 dollars au pied carré.

[67] M. Wall avait personnalisé le bien situé au 4668, West 14th Avenue différemment de celui située au 4324, West 14th Avenue. Au lieu de construire une pièce pour le chat, il a déclaré avoir confié l’animal à ses parents. Autrement, le plan est identique à celui des autres habitations : la maison située au 4668, West 14th Avenue comprend trois étages, cinq chambres et un logement au sous-sol.

[68] M. Wall a vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue le 26 novembre 2010 pour 2 265 000 dollars. Il n’a pas déclaré la vente dans sa déclaration de revenu de 2010. Dans son témoignage, il a déclaré ne pas pouvoir se souvenir s’il avait informé ou non son comptable de la vente. Il a toutefois fait des déclarations vagues selon lesquelles il aurait gardé ce renseignement pour lui, au motif qu’il estimait qu’il était admissible à l’exemption pour résidence principale et qu’il n’était pas nécessaire d’en discuter avec son comptable [23] .

[69] M. Wall a fait état de plusieurs motifs pour la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue. Premièrement, il a déclaré que son père lui avait parlé de son intention de lui donner le bien situé au 2612, Patricia Crescent. Deuxièmement, son fils (Alexander Wall) n’avait plus besoin de sa présence après avoir terminé ses études secondaires. Troisièmement, M. Wall avait prétendument accumulé des dettes qu’il voulait rembourser.

[70] Concernant son premier motif de vendre le bien situé au 4668, West 14th Avenue, M. Wall a déclaré avoir voulu emménager à l’île Savary (au 2612, Patricia Crescent) pour [traduction] « adopter une mode de vie complètement différent ». Son père lui a donné le bien situé au 2612, Patricia Crescent pour un dollar au titre d’un transfert foncier exécuté le 28 mars 2011. M. Wall a déclaré avoir vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue en novembre 2010, en prévision de l’obtention de celui situé au 2612, Patricia Crescent. Il est curieux qu’il ait souhaité renoncer à sa maison en prévision d’un événement à venir, même si le transfert final du bien situé au 2612, Patricia Crescent était prévu entre parties apparentées. En outre, le père de M. Wall possédait le bien situé au 2612, Patricia Crescent en théorie seulement : M. Wall avait participé à chaque étape de l’achat et il aurait assumé l’intégralité de l’hypothèque et des autres paiements correspondants [24] .

[71] M. Wall a déclaré que son père (Henry Wall) et sa mère avaient résidé au 2612, Patricia Crescent avant de déménager pour habiter avec la sœur de M. Wall à Delta. M. Wall a déclaré à la Cour avoir emménagé au 2612, Patricia Crescent après la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue. Toutefois, dans une télécopie datée du 12 janvier 2010 qu’il a envoyée à l’Agence du revenu du Canada (Agence), il a déclaré ce qui suit concernant les soins apportés à ses parents en 2010 :

[traduction]

Je me déplaçais continuellement à Delta pour prendre soin de mes parents âgés. Au fil de l’année, il est devenu évident qu’ils auraient besoin d’un soignant à temps plein pour les aider au quotidien. J’ai décidé de vendre le bien [4668, West 14th Avenue] et d’emménager avec mes parents pour leur assurer cette aide. J’ai mis le bien en vente et je l’ai vendu le 29 novembre 2010 (et non en septembre, comme il est indiqué dans votre lettre), puis j’ai emménagé avec mes parents [25] .

[72] M. Wall n’a pas été en mesure d’expliquer pourquoi il avait déclaré à la Cour avoir emménagé à l’île Savary après avoir déclaré à l’Agence avoir emménagé à Delta.

[73] Le deuxième motif invoqué par M. Wall pour vendre le bien situé au 4668, West 14th Avenue était que son fils n’avait plus besoin de sa présence à proximité. Toutefois, dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir construit la maison au 4668, West 14th Avenue afin de fournir à Alexander une maison pendant ses études. Il semble étrange que M. Wall ait souhaité vendre le bien situé au 4668, West 14th Avenue avant que son fils eût terminé ses études secondaires. Selon les éléments de preuve présentés à ce sujet, l’ancienne épouse de M. Wall avait des problèmes de santé à l’époque. M. Wall a déclaré que son fils avait emménagé avec sa mère à la fin de ses études secondaires. Il est difficile de déterminer le lieu dans lequel le fils de M. Wall a résidé entre la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue et l’obtention de son diplôme. Ce raisonnement contredit les projets à long terme évoqués par M. Wall de résider au 4668, West 14th Avenue.

[74] Le troisième motif invoqué par M. Wall pour vendre le bien situé au 4668, West 14th Avenue concerne des dettes accumulées. Il n’a toutefois présenté aucun élément de preuve quant à ces dettes. Dans divers documents ayant précédé les présents appels, M. Wall a invoqué d’autres motifs de vente de ce bien, mais aucune dette. Par exemple, dans son avis d’appel à l’égard de la TPS, il n’a pas invoqué les dettes comme motif pour vendre le bien situé au 4668, West 14th Avenue. En outre, dans une lettre datée du 3 octobre 2012 adressée au vérificateur de l’Agence par les représentants de M. Wall, ce dernier a indiqué avoir vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue au motif que le bien situé au 2612, Patricia Crescent pouvait lui servir de résidence et qu’il n’avait plus besoin de prendre soin de son ancienne épouse et de son fils [26] .

3) Le revenu de M. Wall

[75] Je suis d’avis que M. Wall est un entrepreneur intelligent, qui connaît le fonctionnement de la fiscalité dans le secteur de l’immobilier. M. Wall s’est servi de son entreprise d’aménagement, Pocido, pour construire environ 20 maisons en rangée, une maison et un duplex. Vu ces activités d’aménagement, M. Wall a déclaré dans son témoignage savoir que les bénéfices découlant de transactions immobilières doivent être déclarés à titre de revenu au sens de la Loi. Il a également déclaré au cours de son témoignage savoir que l’entreprise Pocido était tenue de déclarer la TPS sur ses ventes et avoir rempli en bonne et due forme les déclarations de TPS de cette entreprise.

[76] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré ne pas pouvoir se souvenir des détails concernant ses ventes immobilières ou les commissions qu’il avait perçues. En particulier, il a déclaré ne pas pouvoir se souvenir des transactions immobilières ayant contribué à son revenu entre 2006 et 2010. Malgré des éléments de preuve documentaires contredisant ses affirmations, M. Wall a nié en particulier qu’une partie ou la totalité de son revenu, sous la forme de commissions, découlant de ventes immobilières au cours de cette période, provenait de biens en sa possession ou de transactions immobilières auxquelles avait pris part son père (Henry Wall) ou son [traduction] « amie », Mme Pillon [27] .

[77] M. Wall a déclaré à plusieurs reprises avoir exercé une activité d’agent immobilier seulement au cours de la période pertinente et n’avoir perçu aucun autre revenu. Il n’a toutefois pas été en mesure de citer une mise en vente qu’il aurait effectuée entre 2006 et la date de l’audience. Le seul élément de preuve selon lequel M. Wall aurait vendu des biens immobiliers consiste en des documents fournis par la société Park Georgia Realty (son employeur), dans lesquels il est fait mention de commissions pour des transactions qu’il a facilitées pour son compte, celui de son père ou celui de Mme Pillon. Par ailleurs, je relève qu’il n’a déclaré aucune dépense de publicité ou autre en lien avec son activité d’agent immobilier dans ses déclarations de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010.

[78] M. Wall a déclaré avoir mis ou essayé de mettre en location son appartement, situé au 2612, Patricia Crescent, ainsi que les logements au sous-sol des trois habitations, mais il n’a produit aucun élément de preuve et il n’a appelé personne à témoigner du revenu découlant de ces prétendues transactions. Je ne dispose par ailleurs d’aucun élément de preuve permettant de confirmer que M. Wall a tenu compte d’une mise en location de ces biens dans le calcul de son revenu.

[79] M. Wall a déclaré les revenus qui suivent au sens de la Loi entre 1987 et 2010 [28] :

Année

Revenus

1987

11 266 $

1988

27 552 $

1989

8 076 $

1990

21 879 $

1991

10 412 $

1992

107 678 $

1993

15 303 $

1994

600 $

1995

43 419 $

1996

50 887 $

1997

35 248 $

1998

23 000 $

1999

15 000 $

2000

7 000 $

2001

13 472 $

2002

29 000 $

2003

15 000 $

2004

15 806 $

2005

18 000 $

2006

26 036 $

2007

15 919 $

2008

15 547 $

2009

16 646 $

2010

15 684 $

 

[80] En 2005, M. Wall a déclaré un revenu d’entreprise brut et net de 18 000 dollars. Il ne se souvenait pas de l’origine de ce revenu. En 2005, il a recommandé l’agent immobilier M. Velve pour l’achat du bien situé au 4067, West 19th Avenue. M. Wall aurait renoncé à sa commission au motif que son père était l’acheteur.

[81] En 2006, M. Wall a déclaré un revenu d’entreprise brut de 29 621 dollars et un revenu d’entreprise net de 26 036 dollars. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré que l’intégralité de ce revenu découlait de transactions immobilières. Le 13 avril 2006, M. Velve a versé à M. Wall des commissions de 7 669,16 dollars pour la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue. Le 14 juin 2006, M. Velve a versé à M. Wall des commissions de 10 450 dollars pour la vente du bien situé au 4067, West 19th Avenue. Le 22 juin 2006, M. Velve a versé à M. Wall des commissions de 1,15 dollar pour l’achat du bien situé au 2612, Patricia Crescent. M. Wall a déclaré avoir renoncé à ces commissions (1,15 dollar) car l’acheteur de ce bien était son père. Le 17 juillet 2006, M. Velve a versé à M. Wall des commissions de 11 502,26 dollars pour la vente du bien situé au 4324, West 14th Avenue. Je relève que le montant total de ces commissions en 2006 s’élève à 29 621,42 dollars, ce qui correspond au revenu d’entreprise brut susmentionné pour 2006.

[82] Le 10 août 2006, M. Wall a vendu le lot vacant (situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island) pour 150 000 dollars. Il n’a pas déclaré cette vente dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu. Il a affirmé l’avoir oubliée au moment de remplir sa déclaration.

[83] M. Wall n’a pas déclaré la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu de 2006 au motif qu’il pensait être admissible à l’exemption pour résidence principale. Il a affirmé ne pas se souvenir s’il avait informé ou non son comptable de la vente de ce bien. Il se souvient toutefois bel et bien avoir demandé à son comptable, à l’Agence et à d’autres personnes des renseignements sur le fonctionnement de l’exemption pour résidence principale. Lors des interrogatoires préalables, M. Wall avait fait des déclarations contradictoires quant à la question de savoir s’il avait consulté ou non son comptable précisément au sujet de la vente des trois habitations. Au final, il a déclaré ne pas avoir informé du tout son comptable de la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue. M. Wall a toutefois affirmé avoir demandé à son comptable la durée pendant laquelle il devait résider dans son bien avant de pouvoir le vendre et réclamer l’exemption pour résidence principale. Son comptable lui aurait indiqué qu’il pouvait vendre le bien s’il avait une bonne raison de le faire.

[84] En 2007, M. Wall a déclaré un revenu d’entreprise brut de 19 173 dollars et un revenu d’entreprise net de 15 919 dollars. Le 2 janvier 2007, il a perçu un revenu de 15 082,20 dollars sous la forme d’une commission pour la vente du bien situé au 4684, West 9th Avenue (la maison de Mme Pillon). Il n’a produit aucun élément de preuve de ses sources de revenu en 2007.

[85] En 2008, M. Wall a déclaré un revenu d’entreprise brut de 18 000 dollars et un revenu d’entreprise net de 15 547 dollars. Dans son témoignage, il a déclaré n’avoir participé à aucune autre activité et que son revenu découlait de la vente de biens immobiliers pour des amis. Selon les éléments de preuve documentaires, M. Velve a versé à M. Wall des commissions de 13 730,81 dollars pour la vente du bien situé au 4324, West 14th Avenue. M. Wall n’a pu expliquer d’où provenait le reste de son revenu d’entreprise pour 2008.

[86] M. Wall n’a pas déclaré la vente du bien situé au 4324, West 14th Avenue dans sa déclaration de revenu de 2008 et, comme je l’ai expliqué précédemment, il ressort des éléments de preuve qu’il n’a pas confirmé auprès de son comptable s’il devait déclarer le produit de la vente dans son revenu.

[87] En 2009, M. Wall a déclaré un revenu d’entreprise brut de 18 375 dollars et un revenu d’entreprise net de 16 646 dollars. Il a acheté le bien situé au 4668, West 14th Avenue en 2009, mais il n’a pas été en mesure de confirmer s’il avait déclaré ou non dans sa déclaration de revenu de 2009 un revenu sous la forme d’une commission pour cette vente. Il n’a pas été en mesure de signaler une autre transaction qu’il aurait pu comptabiliser dans son revenu d’entreprise de 2009. Il n’a produit aucun élément de preuve quant à ses sources de revenu en 2009.

[88] En 2010, M. Wall a déclaré un revenu d’entreprise brut de 18 000 dollars et un revenu d’entreprise net de 15 684 dollars. Il a vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue en 2010 et il a déclaré que M. Velve devait lui avoir versé des commissions d’aiguillage pour cette vente. Toutefois, M. Wall ne pouvait se souvenir du montant des commissions d’aiguillage ou d’autres commissions ayant contribué à son revenu. Il n’a cité aucun témoin pour attester ses sources de revenu en 2010.

[89] M. Wall n’a pas déclaré la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu de 2010 et, comme je l’ai expliqué précédemment, il ressort des éléments de preuve qu’il n’a pas confirmé auprès de son comptable s’il devait déclarer le produit de la vente dans son revenu.

4) Les hypothèques de M. Wall

[90] Le revenu annuel moyen déclaré par M. Wall est compris entre 15 000 et 20 000 dollars. Malgré son revenu déclaré relativement faible, il a présenté des demandes d’hypothèque afin de financer ses projets d’aménagement immobilier, en indiquant qu’il exerçait une activité d’aménageur immobilier lui rapportant un revenu à six chiffres. Compte tenu du faible revenu déclaré par M. Wall et de l’importance de ses hypothèques, il est invraisemblable qu’il ait nourri une intention à long terme de conserver l’une des trois habitations. Ses paiements hypothécaires étaient supérieurs à son revenu annuel et il n’a pas été en mesure de démontrer de quelle façon il aurait pu assumer cette série d’emprunts sans vendre chacune des trois habitations avec bénéfice.

[91] Le 17 octobre 2003, M. Wall a déposé une demande de prêt hypothécaire afin de financer un projet d’aménagement immobilier [29] . Il ne pouvait se souvenir du projet d’aménagement que cette hypothèque lui avait permis de financer; il aurait pu s’agir, selon lui, du duplex que sa société Pocido avait construit à Kitsilano. Dans sa demande, il est indiqué qu’il tirait de son activité d’agent immobilier un revenu annuel de 40 000 dollars et que son revenu annuel en tant qu’aménageur immobilier s’élevait à 100 000 dollars.

[92] Le 30 septembre 2004, M. Wall a déposé une demande de prêt hypothécaire afin de financer l’aménagement du bien situé au 4007, West 21st Avenue [30] . Cette fois encore, il a indiqué qu’il tirait de son activité d’agent immobilier un revenu annuel de 40 000 dollars. Dans la demande, il est également indiqué que M. Wall tirait de son activité d’aménagement immobilier un revenu annuel de 100 000 dollars.

[93] M. Wall a obtenu un financement de 812 500 dollars pour l’aménagement du bien situé au 4007, West 21st Avenue. Il n’a présenté aucun document permettant d’établir à quel point cette hypothèque avait servi à financer l’aménagement en question. Il a déclaré s’être acquitté de la mise de fonds grâce à des revenus réalisés lors d’aménagements antérieurs ainsi qu’à des prêts que des amis et des membres de sa famille lui avaient accordés. Il n’a appelé aucun témoin et il n’a produit aucun document afin d’établir ces économies ou ces prêts.

[94] Pendant toute la durée de l’hypothèque visant le bien situé au 4007, West 21st Avenue, les paiements effectués par M. Wall n’ont couvert que les intérêts. Ces paiements d’intérêt ont varié de 1 500 dollars à 2 600 dollars environ, pour un total de 21 570,21 dollars en 2005. M. Wall a déclaré en 2005 un revenu de 18 000 dollars. En 2006, le montant total des paiements d’intérêt pour cette hypothèque s’est élevé à 10 183,26 dollars. Pendant cette même période, M. Wall a également cotisé à son régime enregistré d’épargne-retraite à hauteur de 13 000 dollars. Il a insisté sur le fait qu’il utilisait ses économies et des sommes d’argent provenant de l’hypothèque elle-même pour payer l’hypothèque. Il n’a produit aucun élément de preuve à l’appui de ces déclarations.

[95] Le 9 avril 2005, M. Wall a présenté une autre demande de prêt hypothécaire auprès de la banque HSBC [31] . Rien ne permet de déterminer quel projet d’aménagement se rattache cette hypothèque, mais la date est proche de celle de l’achat du bien situé au 4067, West 19th Avenue. Dans cette demande, il est indiqué que M. Wall tirait de son activité d’agent immobilier un revenu de 30 000 dollars, ainsi qu’un revenu de 200 000 dollars de son activité d’aménageur immobilier. Il y est également fait mention d’un aéronef d’une valeur estimée à 200 000 dollars. M. Wall a déclaré que la banque avait gonflé ce montant afin d’obtenir l’approbation de l’hypothèque. Cet aéronef figure également dans une demande de prêt hypothécaire datée du 28 mars 2007, pour une valeur de 130 000 dollars [32] . M. Wall a déclaré que cet aéronef était de la camelote qu’il avait mentionnée dans ses demandes de prêt afin d’embellir ses actifs. Il n’a déclaré aucune de ses prétendues dettes aux membres de sa famille ou à ses amis dans la section de la demande concernant son passif.

[96] En ce qui concerne les fonds dont M. Wall a bénéficié pour le bien situé au 4324, West 14th Avenue, il y a le document concernant le titre foncier daté du 13 juillet 2006, dans lequel il est indiqué que M. Wall avait une hypothèque de 1 125 000 dollars [33] . L’historique de remboursement du prêt par M. Wall permet de conclure qu’en date du 13 juillet 2006, il avait diminué l’hypothèque [34] de 578 500 dollars. En 2006, M. Wall a imputé des paiements au principal à hauteur de 1 787,83 dollars ainsi que des paiements d’intérêt à hauteur de 14 794,47 dollars pour cette hypothèque. Il a déclaré en 2006 un revenu de 26 036 dollars. En 2006, le coût total des paiements hypothécaires de M. Wall concernant les biens situés au 4007, West 21st Avenue et au 4324, West 14th Avenue est supérieur au revenu annuel déclaré. En 2007, M. Wall a imputé des paiements au principal à hauteur de 10 610,48 dollars ainsi que des paiements d’intérêt à hauteur de 32 019,52 dollars. Il a déclaré en 2007 un revenu de 15 919 dollars. Il n’a présenté aucun élément de preuve qui aurait permis d’établir comment il avait été en mesure de s’acquitter de la mise de fonds et des paiements hypothécaires. Il a déclaré avoir utilisé ses économies et des prêts que des amis et des membres de sa famille lui avaient accordés.

[97] Au début de l’été 2006, M. Wall a effectué des paiements mensuels de 821 dollars pour rembourser un prêt de 300 000 dollars qui lui avait permis de financer le bien situé au 2612, Patricia Crescent.

[98] La banque HSBC a produit au ministre un [traduction] « état financier personnel » de M. Wall daté du 28 mars 2007 [35] . Il y est fait mention d’un revenu annuel de 200 000 dollars pour M. Wall. Ce dernier a déclaré dans son témoignage ne pas avoir indiqué à la banque qu’il gagnait 200 000 dollars par an et que la banque savait qu’il ne gagnait pas une telle somme d’argent. Il a déclaré que la directrice de banque avait inscrit ce montant dans l’état financier au motif qu’elle savait qu’il conservait dans son compte bancaire de l’argent découlant de ses activités d’aménagement antérieures. M. Wall a déclaré que la directrice de banque embellissait toujours ses demandes d’hypothèque afin de garantir leur approbation. Il n’a cité aucun témoin à l’appui de sa déclaration.

[99] Lorsqu’il lui a été demandé s’il était important de dire la stricte vérité dans ses demandes d’hypothèque, M. Wall a déclaré :

[traduction]

« Cela n’a rien à voir avec le fait de dire la vérité. [La directrice de banque] tenait uniquement à ce que la banque obtienne assez de garanties pour le bien. Elle voulait simplement que le siège social valide le dossier au plus vite. Elle savait que j’avais un bon historique de remboursement et qu’elle n’avait jamais eu à s’inquiéter à mon sujet ou pour quoi que ce soit d’autre, alors elle m’a dit : “écoutez, mettez n’importe quoi là-dedans, tant que ça fait plaisir au siège social” et elle a rempli les cases vides. [36] »

[100] Dans son témoignage, il a clarifié ce point ainsi :

[traduction]

« D’accord. Votre question est très ambiguë. Dire la vérité. Ce n’est pas comme si je mentais à la banque. Je m’asseyais avec la directrice de banque et elle ajoutait littéralement... En gros, elle arrondissait tout pour satisfaire le siège social. Et ce n’est pas comme si j’avais dit, comme si je lui avais donné des renseignements trompeurs ou quelque chose du genre, parce que si j’avais menti à la banque sur des choses importantes à ses yeux, ils n’auraient jamais fait affaire avec moi… [37] »

[101] Le 24 mai 2007, la banque HSBC a approuvé une facilité de prêt de 1 230 000 dollars pour M. Wall en lien avec une garantie bancaire qu’il avait faite pour le compte d’un autre emprunteur [38] . Cette approbation date de l’époque à laquelle Mme Pillon a acheté le bien situé au 4684, West 9th Avenue. Dans ce document, il est indiqué que M. Wall était constructeur de résidences.

[102] La lettre se poursuit comme suit :

[traduction]

Historique de la relation

John Wall est un très bon client qui entretient des liens avec la banque HSBC depuis 1997. Nous lui fournissons des facilités importantes relativement à des travaux de construction et des hypothèques, afin de l’aider à financer des projets de construction, pour un maximum de deux habitations simultanées.

[...]

Résumé et recommandations

John Wall est constructeur de résidences présent dans le secteur de la construction individuelle depuis plus de 10 ans. À ce jour, nous lui avons accordé des facilités de crédit pour un total de 1,2 million de dollars canadiens, et notre relation est parfaitement satisfaisante et rentable compte tenu des frais que nous prélevons sur les emprunts consentis pour ses projets de construction individuelle. [39] [Non souligné dans l’original.]

[103] À mon avis, il est clair que la banque HSBC considère M. Wall comme un constructeur de résidences en activité et un client commercial important. Toutefois, M. Wall voudrait faire croire à notre Cour que la banque HSBC aurait embelli à maintes reprises ses documents de demande de financement de façon à ce qu’il puisse obtenir un financement. À cet égard, M. Wall affirme dans son témoignage avoir indiqué à la banque HSBC qu’il était constructeur de résidences dans le but d’obtenir l’approbation pour sa facilité de crédit du 24 mai 2007 [40] . J’ai tiré une conclusion défavorable de ce que M. Wall n’a cité aucun témoin de la banque HSBC pour corroborer son témoignage.

[104] Le 27 juillet 2009, M. Wall a déposé une demande de prêt hypothécaire afin de financer l’aménagement du bien situé au 4668, West 14th Avenue [41] . Dans sa demande, il est indiqué qu’il tirait un revenu annuel de 30 000 $ de ses activités d’agent immobilier et que son revenu annuel en tant que promoteur immobilier s’élevait à 100 000 $. Dans un titre de propriété daté du 14 août 2009, il est indiqué que M. Wall avait une hypothèque de 2 100 000 $ pour le bien situé au 4668, West 14th Avenue [42] . L’historique de remboursement du prêt par M. Wall permet de conclure qu’il a réduit l’hypothèque de 845 250 $ [43] . M. Wall a seulement fait des paiements d’intérêt pour cette hypothèque. Il a effectué quatre paiements d’intérêt en 2009, pour un total de 12 012,87 $. En 2010, ses paiements d’intérêt s’élevaient au total à 42 727,64 $. En 2009, il a déclaré un revenu de 16 646 $ et en 2010, un revenu de 15 684 $. Il n’a présenté aucun élément de preuve qui aurait permis d’établir comment il avait été en mesure de s’acquitter de la mise de fonds et des paiements hypothécaires. Il a déclaré avoir utilisé ses économies et des prêts que des amis et des membres de sa famille lui avaient accordés.

5) La relation entre M. Wall et Mme Wall

[105] La relation entre M. Wall et son ancienne épouse a eu des répercussions sur la manière dont il a interagi avec ses biens, par le passé comme au cours de la période pertinente. M. Wall a pris des mesures pour garantir qu’il n’aurait plus aucune obligation à l’égard de Mme Wall; cela dit, il a également soutenu avoir volontairement assumé des dépenses importantes pour le compte de cette dernière. Le témoignage de M. Wall concernant Mme Wall contredisait des réponses qu’il avait données au cours de l’interrogatoire préalable. De plus, M. Wall n’a produit aucun élément de preuve et n’a cité aucun témoin pour expliquer ces incohérences.

[106] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré que son épouse et lui s’étaient séparés aux alentours de 1996 et qu’ils avaient divorcé aux alentours de 2003. Mme Wall est décédée avant l’audition des présents appels.

[107] Le 19 juillet 2004, M. Wall a cédé à Mme Wall la moitié indivise de leur bien situé au 4434, West 8th Avenue à titre de pension alimentaire future. Le 9 août 2004, Mme Wall a conclu un contrat de prêt avec M. Wall afin de lui emprunter 300 000 $ sous la forme d’une [traduction] « hypothèque fictive » dans le cadre du transfert du bien situé au 4434, West 8th Avenue [44] . M. Wall a expliqué que, théoriquement, la somme mensuelle de 1 500 $ serait déduite de l’hypothèque. Il a déclaré avoir conclu cet accord dans le but de se protéger contre toute demande de pension alimentaire de la part de Mme Wall.

[108] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré qu’il avait contracté des créances importantes en lien avec son ancienne épouse, et c’était l’une des raisons qui l’avait incité à vendre les biens situés au 4007, West 21st Avenue et au 4324, West 14th Avenue. Une dépense en particulier concerne l’installation, au coût de 30 000 $, d’une plateforme élévatrice pour fauteuil roulant dans le bien situé au 4434, West 8th Avenue. Aucun élément de preuve documentaire ne permet de confirmer les dépenses que M. Wall a prétendument engagées pour le compte de Mme Wall.

[109] Au cours de l’interrogatoire préalable, M. Wall avait fait des déclarations contradictoires en affirmant s’être libéré de ses obligations envers Mme Wall en lui cédant la moitié indivise de leur habitation (située au 4434, West 8th Avenue). Il avait également déclaré que ses créances avait rien à voir avec Mme Wall et que d’autres dettes l’avaient contraint à vendre le bien situé au 4007, West 21st Avenue. M. Wall a cherché à expliquer cette incohérence en déclarant qu’il avait continué d’aider Mme Wall par choix personnel, et non par obligation juridique.

6) La relation entre M. Wall et Mme Pillon

[110] Les éléments de preuve ne permettent pas de définir clairement la relation entre M. Wall et Mme Pillon. Cette dernière est qualifiée parfois d’amie, parfois de compagne et parfois d’épouse de M. Wall. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir tenté d’avoir une relation romantique avec Mme Pillon, mais qu’ils avaient au final décidé de rester amis. Il a affirmé que les périodes romantiques de leur relation ont eu lieu au début des années 2000 et à la fin de l’année 2006 ou 2007.

[111] Au deuxième jour du procès, l’appelant a déclaré qu’il ne citerait pas Mme Pillon à témoigner [45] . Toutefois, le quatrième jour du procès, après un ajournement de six mois, l’appelant a amené Mme Pillon devant la Cour, sans notification préalable, et a déclaré qu’il souhaitait la citer à témoigner. L’intimée a sollicité un ajournement en vue de préparer son contre-interrogatoire de Mme Pillon. Cependant, M. Wall a décidé qu’il préférait continuer le procès et a donc retiré sa demande visant à citer Mme Pillon comme témoin. Il ressort des éléments de preuve que Mme Pillon connaissait les faits relatifs aux trois habitations en raison de sa relation avec M. Wall. J’ai tiré une conclusion défavorable du fait que M. Wall n’a pas cité Mme Pillon à témoigner.

[112] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir habité avec Mme Pillon dans le bien situé au 4324, West 14th Avenue pendant un mois en 2006 ou en 2007. Il a affirmé que les enfants de Mme Pillon avaient eux aussi résidé à cette adresse. Il a expliqué qu’à cette époque, Mme Pillon et lui avaient tenté d’entreprendre une relation amoureuse.

[113] M. Wall a été mentionné à titre de garant pour son [traduction] « épouse », Maria Pillon, dans son [traduction] « état financier personnel » du 28 mars 2007 fourni par la banque HSBC.

[114] Il a déclaré avoir habité avec Mme Pillon au 4684, West 9th Avenue pendant qu’il construisait la maison au 4668, West 14th Avenue. Cette cohabitation a probablement duré de cinq à six mois en 2009-2010.

7) Les adresses de M. Wall

[115] M. Wall a utilisé différentes adresses tout au long de la période pertinente visée par les présents appels. Dans son témoignage, il a déclaré avoir conservé le bail de son appartement situé au 2370, West 2nd Street jusqu’à un certain stade de l’aménagement du bien situé au 4668, West 14th Avenue. Il a déclaré avoir résidé avec Mme Pillon dans la demeure et dans l’appartement de cette dernière. Il a également déclaré avoir résidé dans les trois habitations pendant au moins un an chacune. Je suis d’avis que le témoignage de M. Wall concernant ses lieux de résidence et les périodes correspondantes contredit d’autres éléments de preuve.

[116] M. Wall a emménagé dans l’appartement situé au 2370, West 2nd Street, aux alentours de 1996, à la suite de sa séparation d’avec son ancienne épouse, Mme Wall. Il a présenté des demandes d’hypothèque dans lesquelles il a indiqué comme adresse celle de l’appartement [46] . Il a également utilisé l’adresse de l’appartement en tant qu’adresse postale lorsqu’il possédait les biens situés au 4007, West 21st Avenue et au 4324, West 14th Avenue. Il a prétendument emménagé de nouveau dans son appartement après la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue en 2006, puis il aurait continué d’y résider pendant la construction du bien situé au 4324, West 14th Avenue. Dans le document de déclaration et d’avis de divulgation du propriétaire-constructeur pour le bien situé au 4324, West 14th Avenue, M. Wall a indiqué pour adresse celle de l’appartement [47] . Dans ses déclarations de revenu de 2006 et de 2008, il a indiqué comme adresse postale celle de l’appartement [48] . M. Wall avait résidé de nouveau dans cet appartement pendant une courte période avant la construction de la maison située au 4668, West 14th Avenue. Il est difficile de déterminer le moment où M. Wall a résilié le bail de l’appartement.

[117] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir également résidé pendant un certain temps avec Mme Pillon dans les biens de cette dernière. Il a déclaré avoir habité avec Mme Pillon au 4684, West 9th Avenue pendant qu’il construisait la maison située au 4668, West 14th Avenue. Le 12 août 2010, il a signé une demande de renouvellement d’hypothèque pour le bien situé au 4668, West 14th Avenue en indiquant comme adresse postale l’appartement no 702 au 2233, Allison Road (à savoir l’adresse de Mme Pillon avant qu’elle emménage au 4684, West 9th Avenue) [49] . Toutefois, M. Wall a déclaré avoir résidé au 4668, West 14th Avenue avant d’emménager au 4684, West 9th Avenue. De plus, il n’a nullement mentionné l’appartement no 702 au 2233, Allison Road dans son témoignage. L’appartement no 702 au 2233, Allison Road figure aussi parmi les adresses de M. Wall en 2010 dans les rapports de sa banque sur son historique d’emprunt [50] .

[118] M. Wall a également utilisé comme adresse postale l’adresse du bureau de la société Park Georgia Realty situé au 5701, Granville Street, à Vancouver, et ce, de 2009 jusqu’en 2011. Vont dans ce sens les documents de l’Agence du revenu du Canada [51] et les documents concernant des titres fonciers [52] .

[119] M. Wall a utilisé l’adresse du bureau de la société Park Georgia Realty au 5701 Granville Street comme adresse postale dans sa déclaration de revenus de 2010. Tel qu’il a été susmentionné, dans ses déclarations de revenus de 2006 et de 2008, M. Wall a indiqué comme adresse postale celle de l’appartement. Aucun élément de preuve ne permet de conclure qu’il a utilisé l’adresse de l’une des trois habitations comme adresse postale dans l’une de ses déclarations de revenus entre 2005 et 2011.

[120] Il ressort toutefois de certains éléments de preuve que M. Wall a utilisé l’adresse des trois habitations comme adresse postale à des fins précises. Certaines des factures de gaz de la société Terasen ont été envoyées aux trois habitations [53] , et un document de renouvellement d’assurance a été adressé par la société Wawanesa au 4668, West 14th Avenue [54] . Lorsque M. Wall a vendu les trois habitations, il a inscrit l’adresse de ces biens en tant qu’adresse personnelle dans quelques documents de vente, notamment certains documents concernant des titres fonciers et l’historique des prêts [55] .

B. Bryan Velve

[121] L’appelant a cité Bryan Velve à témoigner. Au moment du procès, M. Velve était agent immobilier depuis plus de 29 ans et était, à titre d’agent immobilier, au service de la société RE/MAX. Dans son témoignage, M. Velve a déclaré connaître M. Wall depuis environ 15 à 20 ans, à titre de confrère agent immobilier et de client. M. Velve a été l’agent chargé de la mise en vente de chacune des trois habitations. À ce titre, il a déclaré dans son témoignage avoir été en droit de recevoir 53,5 % de la commission sur les ventes pour chacune des trois habitations, mais avoir versé en retour à M. Wall une commission d’aiguillage qui a été déduite de sa part.

[122] Dans son témoignage, M. Velve a déclaré ce qui suit concernant les motifs qui, selon lui, ont conduit M. Wall à faire appel à lui en tant qu’agent pour la mise en vente des trois habitations :

[traduction]

Eh bien, premièrement, dans le secteur de l’immobilier, si on vend son propre bien, on n’est pas couvert par l’assurance responsabilité professionnelle. C’est pourquoi on ne vend pas son propre bien. Deuxièmement, je pense qu’il jugeait qu’il n’était peut-être pas aussi actif que moi dans le secteur, et estimait probablement que je ferais un meilleur travail [56] .

[123] Dans son témoignage, M. Velve a déclaré que M. Wall avait acheté chacune des trois habitations, et démoli la maison existante sur chacun des biens pour ensuite en construire une nouvelle. Il a également confirmé que M. Wall avait géré la construction de chacune des trois habitations. M. Velve a par ailleurs témoigné que chacune d’elles comprenait trois étages et quatre à cinq chambres. En outre, il a déclaré qu’il avait déconseillé à M. Wall de construire une [traduction] « pièce pour le chat » au 4324, West 14th Avenue, comme ce n’était pas idéal sur le plan de la revente.

[124] M. Velve a soutenu se souvenir de chaque maison qu’il a vendue au cours de sa carrière d’agent immobilier. Toutefois, il ne pouvait se rappeler avoir vendu le bien de Henry Wall situé au 4067, West 19th Avenue, lequel avait été construit de la même façon et au même moment que la première des trois habitations. Ce point lui a été rappelé lors de son contre-interrogatoire, et c’est seulement à partir de ce moment qu’il a fait des observations sur sa participation à la vente de ce bien. M. Velve a également versé à M. Wall une commission, qui a été déduite de la part de la commission qui lui revenait pour la vente de ce bien.

[125] Dans son témoignage, M. Velve a déclaré que M. Wall et Alexander Wall avaient résidé dans chacune des trois habitations, mais il n’était pas certain de la date à laquelle ils avaient commencé à résider dans chacune d’entre elles et n’avait pas de détails précis concernant leur séjour dans ces maisons. Il a déclaré que M. Wall avait meublé chacune des trois habitations, mais seulement partiellement, et que les meubles de M. Wall n’étaient pas très beaux. À cet égard, M. Velve a indiqué dans son témoignage que les meubles étaient les mêmes dans chacune des trois habitations. Il se rappelait également avoir demandé à M. Wall de remplacer la table de la salle à manger, étant donné que des meubles un peu plus neufs auraient facilité la mise en valeur. Dans son témoignage, il a aussi déclaré qu’il avait surpris M. Wall à quelques reprises en train de dormir dans l’une des trois habitations, alors que ce dernier n’était pas censé s’y trouver en raison de visites prévues. M. Velve a en outre déclaré qu’il n’aurait jamais visité l’une des trois habitations si M. Wall ne l’avait pas embauché pour assurer la gestion de leur mise en vente.

[126] Le 13 janvier 2006, M. Velve a mis en vente le bien situé au 4007, West 21st Avenue à titre de maison occupée par son propriétaire et construite en 2006. Le 13 février 2006, il a remis ce bien en vente à titre de maison dont la construction remontait à un an, soit en 2005. Lorsqu’il lui a été demandé de préciser les raisons pour lesquelles le bien avait été remis en vente, M. Velve ne pouvait se souvenir si c’était parce que certains acheteurs avaient eu l’impression d’avoir été induits en erreur ou si c’était pour une autre raison. Il importe de relever que, lors des deux mises en vente, il a été indiqué que le bien était neuf et que la vente n’était pas assujettie à la TPS. M. Velve a déclaré avoir indiqué que le bien situé au 4007, West 21st Avenue était neuf dans le but d’attirer des acheteurs étrangers – même après avoir affirmé que M. Wall y résidait et même après avoir précisé que la TPS ne s’appliquait pas étant donné que la maison était occupée par son propriétaire. Je relève que ces deux affirmations sont contradictoires.

[127] M. Velve a bénéficié des activités d’aménagement immobilier de M. Wall. À cet égard, je relève qu’il a participé à des transactions immobilières concernant des biens appartenant à M. Wall, à Henry Wall et à Mme Pillon. Dans l’ensemble, j’estime que le témoignage de M. Velve est sélectif, vague et incomplet. Je note également qu’il a volontairement affirmé que les trois habitations étaient neuves, tout en indiquant par la même occasion que la vente n’était pas assujettie à la TPS au motif que les maisons étaient occupées par leur propriétaire. Je suis d’avis que M. Wall semblait prêt à affirmer n’importe quoi, du moment que cela convenait le mieux à ses affaires, et ce, quitte à faire des déclarations contradictoires dans une seule et même inscription au système de service interagences MLS. Je suis également d’avis que M. Velve avalisait cette façon de procéder. À ce titre, j’estime que le témoignage de M. Velve n’est pas fiable et je lui accorde donc peu de poids. Je suis également d’avis que le témoignage de M. Velve ne permet pas de confirmer que M. Wall avait normalement habité dans l’une des trois habitations.

C. Alexander Wall

[128] L’appelant a cité son fils, Alexander Wall, à témoigner. Alexander Wall est né en 1992 et il était adolescent au cours de la période visée par les présents appels. Il a obtenu son diplôme d’études secondaires au milieu de l’année 2011 et, au moment de l’audition des présents appels, il étudiait en affaires au collège. Il a nié que son père avait construit les trois habitations dans l’intention de les vendre dès qu’elles seraient terminées. Il a également nié que son père gagnait de l’argent grâce à l’aménagement de biens.

[129] Après la séparation de ses parents vers 1996, Alexander Wall a vécu à la fois avec sa mère (dans la maison de cette dernière située au 4434, West 8th Avenue) et avec son père. Il passait toutefois plus de temps avec son père en raison de la maladie de sa mère. Dans son témoignage, il a déclaré avoir résidé avec M. Wall dans l’appartement, qui ne comptait qu’une chambre, au début de la séparation de ses parents. Il avait ensuite habité avec son père dans plusieurs maisons. Il ne pouvait se souvenir de la date à laquelle il avait emménagé dans l’une des habitations ou déménagé de celles-ci, ni de l’adresse précise de l’une de ces habitations.

[130] Dans son témoignage, Alexander Wall a déclaré avoir habité avec sa mère au 4434, West 8th Avenue après la fin de ses études secondaires, n’ayant plus autant besoin du soutien de son père. Il a hérité de cette maison après le décès de Mme Wall en 2015. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré qu’Alexander Wall était allé habiter avec sa mère après la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue à la fin de l’année 2010, soit plusieurs mois avant qu’Alexander Wall ait terminé ses études secondaires. Le témoignage d’Alexander Wall ne permet pas de définir clairement son lieu de résidence au cours des derniers mois de ses études secondaires.

[131] Dans son témoignage, Alexander Wall a déclaré ne pas se souvenir de travaux réalisés dans les maisons dans lesquelles il a habité. Toutefois, son témoignage contredit les éléments de preuve documentaire, qui comprennent une liste de défauts relatifs aux travaux de construction dans les biens situés au 4007, West 21st Avenue et au 4668, West 14th Avenue. Par exemple, dans le contrat d’achat et de vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue, il est stipulé que le vendeur devait fournir et installer une porte de garage. Alexander Wall ne se souvenait pas s’il manquait ou non une porte de garage, bien qu’il ait déclaré dans son témoignage qu’il rangeait régulièrement sa bicyclette dans le garage. Dans l’annonce pour le bien situé au 4007, West 21st Avenue, il est également fait mention d’un budget pour les appareils électroménagers, mais Alexander Wall ne s’est souvenu d’aucun appareil électroménager manquant.

[132] Dans l’ensemble, le témoignage d’Alexander Wall est vague en ce qui concerne les maisons dans lesquelles il a résidé avec son père au cours de la période visée par les présents appels. Il ne se souvenait pas des adresses des maisons dans lesquelles il aurait habité étant enfant, ni la durée de résidence dans chacune d’entre elles. Son témoignage selon lequel aucun travail de construction n’était en cours pendant qu’il habitait dans les trois habitations contredit par ailleurs les éléments de preuve documentaire dans lesquels de sérieuses lacunes ont été relevées au moment de la conclusion de la vente de chacune des trois habitations. Je suis d’avis que le témoignage d’Alexander Wall ne permet pas de définir clairement s’il a résidé ou non dans l’une des trois habitations ou dans d’autres biens. Bien qu’il ressort de son témoignage qu’il a habité avec son père à certains moments au cours de la période pertinente, il ne permet pas de confirmer les lieux où ils ont tous deux résidé pendant la période visée par les présents appels. Cela n’est pas étonnant, compte tenu du jeune âge d’Alexander Wall aux dates pertinentes et des difficultés qu’il a sans doute éprouvées en raison de la séparation de ses parents et des problèmes de santé de sa mère. Par conséquent, j’accorde peu de poids au témoignage d’Alexander Wall.

D. Alfonso Daudet

[133] L’appelant a appelé Alfonso Daudet à témoigner. M. Daudet est le conseiller en placement qui a vendu à M. Wall des assurances et des placements avant et pendant la période pertinente visée par les présents appels. Dans son témoignage, il a déclaré avoir commencé à rencontrer M. Wall dans les biens de ce dernier à des fins professionnelles en 2005 et que leurs dernières transactions commerciales dataient de l’année 2010 environ. Il n’a pas rendu visite à M. Wall pour des motifs personnels. Dans son témoignage, M. Daudet a déclaré avoir rencontré M. Wall une fois dans chacune des trois habitations, mais il ne se souvenait pas des adresses. Il avait également rendu visite à M. Wall dans l’appartement de ce dernier, mais il ne se souvenait pas de la date. Chacune de ces visites avait duré entre 45 minutes et une heure environ. M. Daudet savait que M. Wall avait possédé trois habitations différentes entre 2006 et 2010, mais il ignorait si M. Wall avait construit ces habitations en qualité d’aménageur immobilier.

[134] Dans son témoignage, M. Daudet a déclaré qu’il ignorait si M. Wall avait résidé dans les biens, mais il a indiqué que cela semblait être le cas. Dans son témoignage, il a déclaré que M. Wall possédait des meubles, des vêtements et un chat. Il a affirmé que les meubles étaient les mêmes dans tous les biens et dans l’appartement. Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir vu Alexander Wall à l’un des biens. Lors de ces visites, M. Daudet demeurait dans le salon, de sorte qu’il n’a pas vu les autres pièces. Il n’a pu confirmer, lors de ces visites, si des travaux de construction avaient lieu dans les biens.

[135] M. Daudet a vendu à M. Wall une assurance invalidité et un compte en fiducie de 10 000 dollars pour Alexander Wall. M. Wall n’a fait aucun autre placement. Dans son témoignage, M. Daudet a déclaré qu’il avait l’obligation de rencontrer tous ses clients chaque année, et ce, quelle que soit la valeur de leurs placements. Il ne se souvenait de détails précis sur les produits qu’il avait vendus à M. Wall. Il a déclaré ne pas connaître la profession, le revenu et les finances de M. Wall. Il a expliqué qu’il vendait des produits pour le compte de sociétés qui se seraient chargées elles-mêmes de la collecte de renseignements sur M. Wall, afin de vérifier si ce dernier était admissible aux produits.

[136] Dans l’ensemble, je conclus que le témoignage de M. Daudet est vague et incomplet. Par conséquent, je lui accorde peu de poids. Je suis également d’avis que son témoignage est insuffisant pour en conclure que M. Wall a normalement habité, ou habité d’une autre façon, dans l’un des trois biens au cours de la période visée par les présents appels.

E. Les témoins de l’intimée

[137] L’intimée a appelé deux témoins, à savoir Danielle Thomson et John Virtusio. Je conclus que tous deux sont des témoins crédibles. L’intimée a également présenté des éléments de preuve documentaires à l’appui de sa position dans les présents appels. Voici un résumé du témoignage de chacun de ces deux témoins.

1) Danielle Thomson

[138] Mme Thomson est la vérificatrice de l’impôt sur le revenu à l’Agence qui a vérifié le dossier de M. Wall pour les années d’imposition en cause. Elle a établi que la vente des trois habitations était imputable au revenu de M. Wall. Son témoignage est clair, et les conclusions qu’elle a tirées sont étayées par les éléments de preuve qu’elle a fournis. Sa vérification a porté sur bon nombre des documents qui ont permis de clarifier les transactions immobilières de M. Wall.

[139] Dans son témoignage, Mme Thomson a déclaré que M. Wall avait envoyé au ministre un courrier dans lequel il expliquait les motifs de l’achat et de la vente des biens, sans toutefois produire des documents à l’appui de ses motifs. Mme Thomson avait demandé à M. Wall de produire des documents faisant état de ses dépenses relatives à l’achat, à la construction et à la vente des biens. Dans son témoignage, elle a déclaré que M. Wall avait produit quelques documents seulement, notamment des factures de gaz de la société Terasen, une facture d’assurance de la société Wawanesa couvrant 17 jours, ainsi qu’une demande d’autorisation de construire à titre de propriétaire auprès du HPO. Le ministre a estimé que les documents et les lettres que M. Wall avait produits étaient insuffisants pour en conclure que les habitations étaient imputables au capital de M. Wall.

[140] Mme Thomson a envoyé une demande de renseignements auprès de tiers, à savoir la société Park Georgia Realty et la banque HSBC. Les documents produits par la société Park Georgia Realty permettent de confirmer les commissions de courtage perçues par M. Wall au cours de la période pertinente. La banque HSBC a quant à elle produit des documents d’hypothèque, des états de compte en banque, des états du revenu et des relevés de la valeur nette du patrimoine concernant M. Wall. Mme Thomson a également consulté des documents concernant des titres fonciers et des permis divers émanant de la ville de Vancouver.

[141] Après examen de tous ces renseignements, Mme Thomson a établi une nouvelle cotisation pour M. Wall, afin de tenir compte du revenu découlant de la vente du lot vacant et des trois habitations dans son revenu pour les années d’imposition correspondantes. L’augmentation du revenu de M. Wall tient compte du prix de vente de chacun des quatre biens, après déduction du prix d’achat initial, de la valeur du projet et des dépenses admissibles. La valeur de chaque projet a été calculée à partir des valeurs de projet indiquées dans les permis de construire de la ville de Vancouver, sur la foi des renseignements produits par M. Wall [57] . Mme Thomson a rejeté l’estimation par M. Wall de la valeur des projets, à savoir 750 000 dollars par habitation, selon le coût de construction allégué de 250 dollars au pied carré. Les dépenses admissibles comprennent toutes les factures de gaz de la société Terasen et une part calculée au prorata de la facture d’assurance de la société Wawanesa.

[142] Plusieurs critères ont permis au ministre de déterminer si les trois habitations étaient imputables ou non au revenu de M. Wall, notamment ceux-ci :

  • a) Les états du compte de prêt hypothécaire de M. Wall permettent de conclure qu’il a effectué principalement des paiements d’intérêt qui étaient supérieurs à son revenu déclaré.

  • b) Malgré son activité d’agent immobilier, M. Wall a seulement perçu des commissions d’aiguillage, et ce, pour des transactions liées à ses biens ou à ceux possédés par Mme Pillon ou Henry Wall.

  • c) M. Wall s’est continuellement présenté à la banque comme constructeur de résidences générant un revenu à six chiffres.

  • d) M. Wall a possédé chacune des trois habitations pendant une période relativement courte;

  • e) La vérification n’a révélé aucun élément de preuve dont il ressort que M. Wall avait utilisé l’une des trois habitations à titre d’adresse postale [58] .

  • f) Certains éléments de preuve portent que M. Wall a utilisé l’adresse de son appartement (no 908 au 2370, West 2nd Avenue) et celle du bien situé au 4684, West 9th Avenue (l’habitation qu’il a achetée et attribuée à Mme Pillon) à titre d’adresses postales.

  • g) Les lacunes recensées dans certains des contrats d’achat et de vente permettent de conclure que ces biens étaient en cours de construction jusqu’à la date de leur vente.

[143] Dans son témoignage, Mme Thomson a déclaré que le ministre avait imposé des pénalités pour faute lourde, au motif que M. Wall était un agent immobilier expérimenté ayant construit et vendu trois biens sur une courte période, grâce à un financement qu’il n’aurait pu soutenir à long terme. Elle a également tenu compte du fait que M. Wall s’était présenté à la banque comme un aménageur immobilier. Enfin, les sommes d’argent réévaluées comptent pour 98 % du revenu imposable révisé de M. Wall.

2) John Virtusio

[144] M. Virtusio est le vérificateur de la TPS à l’Agence qui a vérifié le dossier de M. Wall pour les périodes de déclaration comprises entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2008. Il a déterminé les obligations relatives à la TPS de M. Wall pour l’achat et la vente du lot vacant, du bien situé au 4007, West 21st Avenue et du bien situé au 4324, West 14th Avenue. M. Virtusio a également rendu un témoignage limité sur ses connaissances de la vérification de la TPS menée par Gerald Ng pour les périodes de déclaration comprises entre le 14 août 2009 et le 31 décembre 2010, laquelle avait donné lieu à une nouvelle cotisation de TPS pour la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue. Les deux vérificateurs ont mené leurs vérifications de manière indépendante, ont utilisé des méthodes semblables et ont tiré des conclusions semblables. Je suis d’avis que M. Virtusio est un témoin crédible qui a tiré des conclusions raisonnables en se fondant sur les renseignements à sa disposition.

[145] M. Virtusio a conclu que M. Wall n’avait résidé ni au 4007, West 21st Avenue ni au 4324, West 14th Avenue. Dans son témoignage, il a déclaré que M. Wall semblait s’être engagé dans une série d’achats de biens, de démolitions de structures existantes, de constructions de nouvelles maisons et de reventes des biens dans les semaines suivant la fin des travaux de construction. M. Ng a tiré des conclusions semblables en ce qui concerne le bien situé au 4668, West 14th Avenue. Les deux vérificateurs ont établi les nouvelles cotisations sur la foi des permis délivrés par la ville de Vancouver, sur lesquels sont indiquées les dates de début et de fin des travaux de construction. Le 11 janvier 2012, M. Wall a fait parvenir au ministre une télécopie dans laquelle il expliquait sa position à l’égard des biens. Malgré des demandes de renseignements complémentaires, les deux vérificateurs n’ont reçu aucun document à l’appui des affirmations de M. Wall.

[146] Les deux vérificateurs de la TPS ont calculé les obligations de M. Wall relatives à la TPS en s’appuyant sur les produits de l’aliénation des quatre biens. Aucun vérificateur de la TPS n’a autorisé de crédit de taxe sur les intrants. Dans son témoignage, M. Virtusio a déclaré que M. Wall n’avait ni demandé un crédit de taxe sur les intrants ni produit l’un des documents nécessaires pour réclamer ce crédit. M. Virtusio a également déclaré que le ministre avait imposé de manière automatique des pénalités pour production tardive et pour omission de produire une déclaration, selon les dispositions pertinentes en vigueur.

IV. DROIT ET DISCUSSION

A. La vente des trois habitations par M. Wall est-elle imputable au revenu ou au capital au sens de la Loi?

[147] Comme je l’ai noté précédemment, la principale question en litige dans les présents appels consiste à déterminer si la vente des trois habitations par M. Wall est imputable au revenu (dans le cadre d’une entreprise d’aménagement) ou au capital.

[148] En résumé, M. Wall soutient avoir acheté et aménagé chacune des trois habitations dans l’intention d’y habiter à titre de résidence principale, ce qu’il prétend avoir fait, mais l’évolution de sa situation l’avait contraint à vendre chacune des trois habitations après y avoir résidé un certain temps. Par conséquent, il soutient que la vente de chacune des trois habitations est imputable au capital et qu’il est admissible à l’exemption pour résidence principale, de sorte que les gains importants découlant de la vente de chacune des trois habitations doivent être exonérés de l’impôt sur le revenu.

[149] À l’inverse, l’intimée soutient que [traduction] « [les] éléments de preuve permettent de confirmer sans équivoque que l’appelant a toujours eu l’intention d’acheter les biens, de démolir les maisons, d’en construire de nouvelles, puis de vendre les biens avec bénéfice. L’appelant a ensuite déclaré chacune de ces habitations à titre de résidence principale afin de tirer un avantage indu de l’exemption pour résidence principale et de ne payer aucune taxe ni aucun impôt. » [59]

[150] J’abonde dans le sens de l’intimée. Comme je le discute plus loin, je suis d’avis que la vente de chacune des trois habitations est imputable au revenu de M. Wall dans le cadre d’une entreprise d’aménagement que ce dernier a exploitée à titre de propriétaire unique au cours des années d’imposition visées par les présents appels.

[151] Aux termes des articles 3 et 9 de la Loi, l’appelant est tenu d’inclure dans son revenu au sens de la Loi toutes les sommes qui constituent son revenu dont la source se situe au Canada ou à l’étranger, y compris le revenu tiré d’une entreprise qu’il a exploitée au cours de l’année d’imposition correspondante. Aux termes du paragraphe 248(1) de la Loi, le mot « entreprise » est défini de manière large et regroupe « les professions, métiers, commerces, industries ou activités de quelque genre que ce soit et […] les projets comportant un risque ou les affaires de caractère commercial […] ».

[152] De manière générale, la personne entreprenant l’aménagement d’un bien immobilier résidentiel aux fins de vente en vue de réaliser un bénéfice est engagée dans une entreprise au sens de la Loi et qu’elle doit, par conséquent, inclure le revenu découlant de cette vente dans sa déclaration de revenus au sens de la Loi.

[153] Les critères permettant aux juges de vérifier si un gain est imputable au revenu ou au capital ont été définis par la jurisprudence, notamment Taylor c. Minister of National Revenue [60] , Racine c. Minister of National Revenue [61] , Happy Valley Farms Ltd. c. La Reine [62] , Sangha c. La Reine [63] et Les propriétés Belcourt inc. c. La Reine [64] .

[154] Le résumé de la loi qui figure dans la décision Happy Valley a été suivi dans les deux décisions Belcourt (au paragraphe 30) et Sangha (au paragraphe 18). Dans la décision Happy Valley, la Cour a fait les observations suivantes aux paragraphes 13 à 20, en résumant les critères utilisés pour déterminer si un gain est imputable au revenu ou au capital :

[traduction]

13 Depuis que l’impôt sur le revenu a été introduit au Canada, l’expression « un projet comportant un risque ou une affaire de caractère commercial » figurant dans la définition générale du terme « entreprise », dans le paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, a fait l’objet de nombreux arrêts. Selon la disposition législative en question, le terme « entreprise ou affaire » comprend une profession, un métier, un commerce, une manufacture ou une activité de quelque genre que ce soit et comprend « un projet comportant un risque ou une affaire de caractère commercial mais ne comprend pas une charge ni un emploi ». L’examen le plus complet de l’expression « projet comportant un risque de caractère commercial » se trouve dans l’arrêt M.N.R. v. Taylor, [1956] CTC 189; 56 D.T.C. 1125 (C. de l’Éch.), dans lequel la Cour a énoncé un certain nombre de critères devant s’appliquer afin de déterminer dans quels cas une opération, qui ne constitue pas en soi un commerce ou une entreprise, peut être considérée comme « un projet comportant un risque ou une affaire de caractère commercial ». La décision montre clairement que dans des cas de ce genre, il s’agit de savoir si le bien a ou non été acquis par le contribuable à titre d’investissement. Dans la négative, tout gain retiré par le contribuable par suite de la vente du bien est imposable à titre de revenu. Pour déterminer si un bien a été acquis à titre d’investissement, il faut tenir compte de tous les faits de l’affaire en cause, et notamment du comportement du contribuable, de la nature de la propriété en cause, de la probabilité qu’un revenu soit tiré du bien sans qu’il soit nécessaire de revendre celui-ci et de la ressemblance de l’opération en question avec une opération commerciale.

14 Plusieurs critères, dont un bon nombre sont semblables à ceux qui ont été énoncés par la Cour dans l’arrêt Taylor, ont été utilisés par les tribunaux afin de déterminer si un gain constitue un revenu ou s’il est imputable au capital. Mentionnons, entre autres choses, les critères suivants :

1. La nature du bien qui est vendu. Presque tous les biens, quels qu’ils soient, peuvent être acquis pour qu’on en fasse le commerce, mais certains genres de biens, comme les produits manufacturés, qui sont en général commercialisés seulement, font rarement l’objet d’un investissement. Il y a plus de chances pour qu’un bien qui ne rapporte à son propriétaire aucun revenu ou qui ne lui procure aucune satisfaction personnelle du simple fait qu’il lui appartient soit acquis afin d’être vendu que le bien qui rapporte pareille [sic] revenu ou procure pareille satisfaction.

2. La durée de la possession. En règle générale, les biens destinés à faire l’objet d’un commerce sont convertis en espèces peu de temps après avoir été acquis. Néanmoins, il existe de nombreuses exceptions à cette règle générale.

3. La fréquence ou le nombre d’opérations similaires effectuées par le contribuable. Si des biens d’une catégorie particulière ont été vendus à maintes reprises pendant un certain nombre d’années ou si plusieurs ventes ont eu lieu vers la même époque, on peut présumer qu’il s’agissait d’opérations commerciales.

4. Les travaux réalisés sur le bien ou en lien avec celui-ci. Si le contribuable s’efforce de mettre le bien dans un état qui lui permettre [sic] de le vendre plus facilement pendant qu’il en est propriétaire, ou s’il fait un effort particulier afin de trouver ou d’attirer des acheteurs (par exemple, en ouvrant un bureau ou en faisant de la publicité), la chose tend à prouver l’existence d’une opération commerciale.

5. Les circonstances qui ont entraîné la vente du bien. Il peut exister certaines explications, comme un cas urgent ou une occasion nécessitant de l’argent en espèces, qui feront qu’il sera impossible de conclure que le bien a initialement été acquis à des fins commerciales.

6. Le motif. Dans tous les cas de ce genre, le motif du contribuable est toujours pertinent. L’intention au moment de l’acquisition d’un bien, déduite à partir des circonstances et de la preuve directe, constitue l’un des éléments les plus importants pour déterminer si un gain est imputable au revenu ou au capital.

15 Tous les facteurs précités ont été examinés par les tribunaux, mais c’est le dernier facteur, soit le motif ou l’intention, qui a été le plus étudié. Ce facteur, en plus de l’examen du comportement du contribuable dans son ensemble lorsqu’il avait le bien en sa possession, constitue ce qui, en fin de compte, influe sur la conclusion de la Cour.

16 Ce critère a été précisé par les tribunaux canadiens et est devenu ce qui est généralement appelé le critère de l’« intention secondaire ». Cela a voulu dire, dans certains cas, que même s’il pouvait être établi que le contribuable avait principalement l’intention d’effectuer un investissement, un gain retiré par suite de la vente du bien serait jugé imposable à titre de revenu si la cour croyait qu’au moment de l’acquisition, le contribuable envisageait la possibilité de vendre le bien si pour quelque raison que ce soit, son projet d’investissement ne se matérialisait pas. Dans l’arrêt Racine, Demers and Nolin v. Minister of National Revenue, 65 DTC 5098 (C. de l’Éch.), le juge Noël a résumé comme suit le critère de l’intention secondaire, à la p. 5103 :

[traduction]

[…] le seul fait qu’une personne achetant un bien en vue de l’utiliser à titre de bien en immobilisations pourrait être portée à le revendre, si un prix suffisamment élevé lui était offert, ne suffit pas pour en faire un projet comportant un risque de caractère commercial. De fait, ce n’est pas là ce qu’il faut entendre par « intention secondaire », si je puis employer cette expression.

Pour qu’une transaction qui implique l’acquisition de capitaux soit en même temps une initiative de caractère commercial, l’acheteur doit avoir l’intention, lors de l’achat, de revendre et ce doit être le motif de l’achat; c’est-à-dire qu’il doit avoir l’intention de revendre le bien à profit au lieu de l’immobiliser dès que surviendront certaines circonstances. D’une façon générale, si l’on décide qu’un tel motif existe, l’on doit se fonder sur des présomptions découlant des circonstances qui entourent la transaction plutôt que sur la déposition de l’acheteur quant à son intention.

17 Dans la décision Armstrong v. The Queen, [1985] 2 CTC 179, 85 DTC 5396 (CF 1re inst.), j’ai eu l’occasion d’examiner le critère d’« intention secondaire » tel que celui-ci est défini par le juge Noël dans l’arrêt Racine. Comme je l’ai mentionné dans la décision Armstrong, la notion d’intention secondaire n’est consacrée nulle part dans la Loi de l’impôt sur le revenu. Dans la décision Hiwako Investments Limited c. La Reine, [1978] CTC 378, 78 DTC 6281 (CAF), le juge en chef de la Cour fédérale a énoncé au paragraphe 384 (DTC 6285) que le terme « intention secondaire » :

[traduction]

[…] ce terme se rapporte tout au plus à une méthode pratique pour résoudre certaines questions découlant des « affaires commerciales » mais il ne représente aucune catégorie juridique. Les trois principales, sinon les seules, sources de revenus sont les entreprises, les biens et les charges et emplois (article 3). Sauf de très rares exceptions, un bénéfice réalisé sur l’achat et la revente d’un bien doit avoir sa source dans une « entreprise » au sens de l’article 139 (soit le paragraphe 248(1) actuel).

18 Par conséquent, le but ultime d’appliquer aux faits de l’espèce les critères définis précédemment, y compris le critère d’intention, est de déterminer si l’achat et la vente ultérieure de la propriété Field Farm constituent une entreprise ou un projet de nature commerciale.

19 Lorsque la nature du bien en litige est telle que celui-ci ne peut générer de revenu, mais qu’il doit être vendu afin d’en tirer des bénéfices, on peut en conclure que la transaction est un projet de nature commerciale. L’arrêt Taylor (précité) porte sur l’une de ces affaires dans lesquelles l’objet de l’instance a été présenté. Dans deux causes au Royaume-Uni, la propriété visée par l’instance était du papier toilette dans le cas du jugement Rutledge v. CIR, 14 TC 490, et du whisky dans le cas du jugement CIR v. Fraser, 24 TC 598. Dans la décision David C. McDonald v. The Queen, [1974] CTC 836, 74 DTC 6644 (CAF), un terrain vacant a été jugé comme appartenant à cette catégorie.

20 Un autre critère élaboré dans les arrêts est la fréquence d’opérations similaires effectuées par le contribuable. Le profit tiré d’une opération isolée peut ou non être jugé imposable, mais un grand nombre d’opérations similaires mèneront généralement à la conclusion qu’un contribuable exploite une entreprise. De plus, l’espace de temps pendant lequel un bien est possédé est une indication, car il est présumé que plus le contribuable conserve le bien longtemps, plus il est probable qu’il s’agisse d’un investissement.

[Non souligné dans l’original.]

[155] Comme il a été relevé au paragraphe 15 de la décision Happy Valley, la jurisprudence enseigne que la question du motif ou de l’intention est un facteur important. Dans la décision Canada Safeway Limited c. Canada [65] , la Cour d’appel fédérale a observé quant à ce critère, au paragraphe 61 :

61 On peut dégager de ces décisions quelques principes qui peuvent, à mon avis, être résumés comme suit. Premièrement, il n’est pas facile de tracer une ligne de démarcation entre les revenus et les gains en capital et il est donc nécessaire, pour bien les distinguer, de tenir compte d’une foule de facteurs, et notamment de l’intention du contribuable au moment de l’acquisition du bien en litige. Deuxièmement, pour que l’opération soit considérée comme un projet comportant un risque de caractère commercial, il faut qu’au moment de l’acquisition, le contribuable ait eu à l’esprit la possibilité de revendre comme motif qui le poussait à faire cette acquisition. La conclusion qu’une telle motivation existe devrait être basée sur des inférences découlant des circonstances qui entourent la transaction. Autrement dit, c’est toute la conduite du contribuable qu’il faut apprécier. Troisièmement, en ce qui concerne l’« intention secondaire », celle-ci doit aussi avoir existé au moment de l’acquisition du bien et le contribuable doit avoir été motivé par l’intention secondaire de le revendre avec bénéfice au cas où une occasion intéressante se présenterait. Quatrièmement, le fait que le contribuable envisageait la possibilité de revendre son bien ne suffit pas, en soit, pour conclure à l’existence d’un projet comportant un risque de caractère commercial. Dans leur ouvrage Principles of Canadian Income Tax Law, précité, les éminents auteurs expriment l’avis, dans leur analyse du critère applicable en ce qui a trait à l’existence d’une « intention secondaire », que [traduction] « les critères de la doctrine de l’intention secondaire ne seront respectés que si la perspective de revente avec bénéfices a joué un rôle important dans la décision d’acquérir le bien » (à la page 337). Je souscris entièrement à cette proposition. Cinquièmement, le témoignage du contribuable au sujet de son intention n’est pas déterminant et doit être examiné à la lumière de l’ensemble des circonstances.

[156] En l’espèce, il n’y a nulle controverse entre les parties en ce qui concerne le droit. Toutefois, leurs positions diffèrent quant à l’application du droit aux faits. Je suis d’avis, cependant, que les éléments de preuve en l’espèce permettent de confirmer sans équivoque que M. Wall a exécuté l’aménagement des trois habitations dans le cadre d’une entreprise d’aménagement immobilier qu’il a exploitée à titre de propriétaire unique, et que les bénéfices tirés de cette entreprise sont, par conséquent, imputables au revenu. Comme je l’explique en détail plus loin, je suis d’avis que M. Wall était tenu d’inclure les bénéfices découlant de la vente des trois habitations dans sa déclaration de revenus pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010.

1) La nature des biens

[157] Même si une maison ne permet pas en soi de conclure qu’on était en présence d’une immobilisation ou d’un bien figurant à l’inventaire [66] , la nature spéculative du marché de l’habitation à Vancouver est importante pour déterminer si le gain est imputable au revenu ou au capital. M. Wall étant un entrepreneur intelligent et au fait de l’aménagement immobilier et de la vente de biens immobiliers dans la région de Vancouver, il devait savoir que les trois habitations pouvaient être acquises et aménagées à un prix inférieur à leur valeur de revente finale. Les éléments de preuve permettent de conclure que les trois habitations étaient en état de délabrement lorsque M. Wall les a achetées, et que leur valeur a fortement augmenté après leur aménagement. Étant donné tous les éléments de preuve, je suis d’avis que M. Wall a acheté les trois habitations dans l’intention de démolir les structures existantes et de construire de nouvelles habitations. J’estime que l’investissement de M. Wall dans ces biens était de nature spéculative et qu’il était conscient que le marché de l’habitation à Vancouver pouvait générer des rendements importants à cette époque. Ses compétences d’entrepreneur lui ont permis de tirer profit de la nature de ces biens. Selon la prépondérance des probabilités, je suis d’avis que ce critère permet de conclure que les gains de la vente de chacune des trois habitations sont imputables au revenu.

2) La durée de la possession

[158] Je suis d’avis que la courte période pendant laquelle l’appelant est demeuré le propriétaire des trois habitations permet de conclure que la vente de ces dernières est imputable au revenu. Comme je l’ai signalé précédemment, M. Wall a possédé le bien situé au 4007, West 21st Avenue pendant environ 16 mois, celui situé au 4324, West 14th Avenue pendant environ 21 mois, et celui situé au 4668, West 14th Avenue pendant environ 16 mois. Dans chaque cas, cette période comprenait le temps nécessaire pour démolir la maison existante, en construire une nouvelle et vendre le bien. Étant donné tous les éléments de preuve, y compris les imperfections précisées dans les divers documents de conclusion des ventes, je suis d’avis que les trois habitations étaient en cours de construction presque pendant toute la période où M. Wall en a été le propriétaire, et que chacune des trois habitations a été vendue aux environs de la date de fin des travaux de construction. Je relève par ailleurs qu’au cours de cette période, M. Wall a également participé à l’achat, au réaménagement et à la revente de biens pour le compte de Henry Wall (son père) et de Mme Pillon (son [traduction] « amie »).

[159] M. Wall a soutenu que, s’il avait voulu exercer une activité d’aménageur, il aurait pu construire les trois habitations plus rapidement et aménager plus de biens au cours de la même période. Dans son témoignage, il a également déclaré avoir réfléchi au fait de devoir résider pendant un certain temps dans les trois habitations avant de pouvoir réclamer l’exemption pour résidence principale. Étant donné tous les éléments de preuve, je suis d’avis que M. Wall avait planifié la durée d’aménagement de chacune des trois habitations en essayant de structurer chaque transaction de manière à pouvoir réclamer l’exemption pour résidence principale. Comme je l’ai signalé précédemment, je relève également qu’il a en réalité exécuté d’autres activités d’aménagement en cours de la même période, mais par l’intermédiaire de Henry Wall et de Mme Pillon.

[160] Selon la prépondérance des probabilités, je suis d’avis que ce critère permet de conclure que les gains de la vente de chacune des trois habitations sont imputables au revenu. À cet égard, j’estime que les éléments de preuve permettent de conclure que M. Wall a vendu des habitations au fur et à mesure qu’il les aménageait, tout en essayant de satisfaire aux exigences relatives à l’exemption pour résidence principale, afin d’éviter de payer des taxes et des impôts sur ses bénéfices.

3) La fréquence ou le nombre d’autres transactions semblables

[161] Les transactions semblables et fréquentes réalisées par M. Wall concernant des biens immobiliers résidentiels permettent de conclure que les bénéfices découlant de la vente des trois habitations sont imputables au revenu. Concernant les trois habitations, M. Wall a acheté des biens de plus en plus coûteux, a démoli la structure existante, a construit une nouvelle maison, puis a vendu le bien dès que les travaux de construction étaient terminés. Outre les trois habitations, on observe cette série d’actions dans les interactions de M. Wall avec les biens dont la transaction a été effectuée par Henry Wall et Mme Pillon. M. Wall avait procédé à des transactions semblables par le passé en qualité d’aménageur immobilier, par l’intermédiaire de sa société Pocido. Je suis d’avis que M. Wall est un aménageur de biens intelligent, qui possède les compétences nécessaires pour aménager et vendre rapidement des biens de façon à générer des bénéfices importants. J’estime que M. Wall a exploité une entreprise d’aménagement de biens et que l’aménagement des trois habitations s’inscrit dans les activités de cette entreprise.

4) Les travaux réalisés sur le bien ou en lien avec celui-ci.

[162] Il est manifeste que M. Wall a déployé des efforts considérables pour acheter, réaménager et vendre les trois habitations. Étant donné ses déclarations de revenus et le manque d’éléments de preuve portant qu’il a bénéficié d’un revenu sous la forme de commissions versées par des tiers non apparentés, il est manifeste que la majorité des efforts professionnels de M. Wall, déployés au cours de la période visée par les présents appels, comprend l’achat, le réaménagement et la vente de biens immobiliers, notamment les trois habitations et des biens qu’il a gérés au nom de son père (Henry Wall) et de son [traduction] « amie », Mme Pillon. À cet égard, je relève que, même si M. Wall a déclaré être agent immobilier, la totalité ou la presque totalité de son revenu perçu sous la forme de commissions au cours de la période visée par les présents appels découle de commissions d’aiguillage qui sont liées à ses biens et à ceux dont la transaction a été effectuée au nom de Henry Wall et de Mme Pillon [67] . Dans l’ensemble, il ressort des éléments de preuve que M. Wall a déployé des efforts importants pour rehausser la valeur des trois habitations et les vendre dès la fin des travaux d’aménagement afin de générer des bénéfices importants. M. Wall n’a présenté aucun élément de preuve quant à d’autres travaux qu’il aurait effectués au cours de la période pertinente et il n’a produit aucune autre explication crédible quant à son revenu.

5) Les circonstances à l’origine de la vente du bien

[163] Dans son témoignage, M. Wall a soutenu avoir acheté chacune des trois habitations dans l’intention d’y résider avec son fils, mais avoir été contraint de vendre chacune d’elles en raison de circonstances indépendantes de sa volonté ayant trait à des dépenses personnelles imprévues ou de ses dettes accumulées. Étant donné tous les éléments de preuve, je suis d’avis que le témoignage de M. Wall concernant sa situation financière tout comme les motifs pour lesquels il a vendu chacune des trois habitations ne sont pas crédibles. M. Wall n’a produit aucun élément de preuve, autre que son témoignage de vive voix, permettant de confirmer la réalité de ses dettes insurmontables. Par exemple, pour chacun des cas, je ne dispose d’aucun élément de preuve de demandes de remboursement ou de mesures de recouvrement prises par son institution financière ou encore d’une éventuelle restructuration financière qu’il aurait entreprise afin de gérer ses dettes accumulées. Par ailleurs, M. Wall n’a vendu aucun autre bien personnel, tel que son aéronef, pour rembourser ses dettes. Par exemple, au lieu d’utiliser le produit de la vente du lot vacant pour rembourser ses dettes, M. Wall a préféré l’utiliser à titre de mise de fonds pour le bien situé au 2612, Patricia Crescent. En outre, après avoir vendu chacune des trois habitations prétendument pour rembourser ses dettes, M. Wall a acheté par la suite une habitation encore plus coûteuse, en souscrivant une hypothèque encore plus importante, sans aucun changement vérifiable de sa situation financière. Par exemple, je relève que l’hypothèque pour le bien s’est élevée à 812 500 dollars, celle pour le second bien à 1 125 000 dollars, et celle pour le troisième bien à 2 100 000 dollars.

[164] Je relève également que M. Wall a cotisé à son régime enregistré d’épargne-retraite en 2006 à hauteur de 13 000 dollars, ce qui contredit son témoignage selon lequel il aurait vendu le bien situé au 4007, West 21st Avenue au début de l’année 2006 en raison de difficultés financières.

[165] M. Wall a soutenu avoir eu les moyens d’acheter les trois habitations, car il possédait des économies, et des membres de sa famille et des amis lui avaient fourni des fonds. Il a également soutenu avoir prévu de louer l’appartement au sous-sol que comprenait chacune des trois habitations, d’obtenir de Mme Pillon une aide pour payer l’hypothèque, d’obtenir un revenu plus important sous la forme de commissions, et d’entreprendre plus de projets d’aménagement immobilier. Toutefois, je ne dispose d’aucun élément de preuve crédible portant qu’il a déployé des efforts afin de mettre à exécution l’un des plans qui précèdent, et je suis d’avis qu’aucune de ces affirmations n’est crédible. J’estime par ailleurs qu’aucun élément de preuve ne porte que M. Wall avait les moyens de demeurer le propriétaire de l’une des trois habitations après son achat et son réaménagement, compte tenu des biens à sa disposition et de son revenu déclaré. Par exemple, le revenu annuel que M. Wall a déclaré aux fins de l’impôt sur le revenu pendant la majeure partie de sa carrière d’agent immobilier et d’aménageur immobilier est très faible. En effet, pour les années d’imposition 1998 à 2010, il a déclaré un revenu aux fins de l’impôt ne dépassant pas 29 000 dollars. Au contraire, comme je l’ai signalé précédemment, il a déclaré un revenu annuel total aux fins de l’impôt de 7 000 à 18 000 dollars pour dix de ces années d’imposition ainsi qu’un revenu annuel total aux fins de l’impôt de 23 000 dollars, 26 036 dollars et 29 000 dollars pour les trois années d’imposition restantes.

[166] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré avoir autorisé la banque à embellir ses demandes d’hypothèque, en indiquant des biens et un revenu annuel plus importants que la réalité, pour que ses demandes soient approuvées. Dans ces demandes d’hypothèque, il est également indiqué que M. Wall exerçait la profession d’aménageur immobilier. Il a déclaré avoir dû verser une mise de fonds importante (d’environ 35 %) pour obtenir les hypothèques pour chacune des trois habitations. Je relève toutefois qu’il n’a produit aucun élément de preuve quant à la provenance de ces fonds, outre les bénéfices découlant de l’aménagement de biens, dont les trois habitations. Je suis d’avis qu’il est peu probable que M. Wall ait pu économiser les sommes nécessaires, compte tenu du revenu imposable qu’il déclarait. Je relève également que M. Wall a effectué des paiements hypothécaires importants pour les trois habitations, par rapport à son revenu annuel déclaré, et que ces paiements hypothécaires ont pour la plupart couvert les intérêts seulement.

[167] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré qu’outre ses dettes, il avait vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue au motif que son fils ne voulait plus résider avec lui et que M. Wall voulait changer de mode de vie. Cependant, les éléments de preuve contredisent les motifs évoqués par M. Wall, en particulier ceux concernant le bien situé au 2612, Patricia Crescent – la maison dans laquelle M. Wall a emménagé après avoir vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue. Selon le témoignage de M. Wall, le bien situé au 2612, Patricia Crescent était la résidence de vacances de son père. Il en ressort d’autres éléments de preuve qu’il a vendu le lot vacant afin de pouvoir fournir la mise de fonds pour le bien situé au 2612, Patricia Crescent, qu’il a souscrit une hypothèque et effectué la majorité, sinon la totalité, des paiements pour ce bien, et que Henry Wall lui a transféré cette propriété pour un montant d’un dollar. S’il est possible que Henry Wall ait été le propriétaire légal du bien situé au 2612, Patricia Crescent, aucun élément de preuve ne permet de conclure qu’il a apporté la moindre contribution financière pour ce bien. Je relève également que M. Wall a conclu la vente du bien situé au 4668, West 14th Avenue en novembre 2010, alors que la dernière année scolaire de son fils avait commencé depuis peu, ce qui contredit son témoignage selon lequel il aurait acheté chacune des trois habitations pour permettre à son fils de résider à proximité de son école et de sa mère.

[168] Je relève par ailleurs que M. Wall a informé l’Agence, par lettre datée du 12 janvier 2012, qu’il avait vendu le bien situé au 4668, West 14th Avenue en vue d’emménager avec ses parents et de les aider, du fait que leur âge avancé exigeait une aide à temps plein [68] . Je constate que M. Wall n’a produit aucun élément de preuve à l’appui de cette affirmation et que celle-ci contredit le témoignage qu’il a rendu au procès, selon lequel il aurait vendu le bien en raison de prétendues difficultés financières.

[169] Je suis d’avis, étant donné tous les éléments de preuve, que les motifs évoqués par M. Wall devant la Cour pour la vente des trois habitations ne sont ni crédibles ni plausibles. En revanche, je suis d’avis que M. Wall a acheté les trois habitations dans l’intention de réaménager chacune d’elles et de les revendre avec bénéfice une fois les travaux de construction achevés, ce qu’il fait chaque fois.

6) Le motif

[170] Comme je l’ai signalé précédemment, M. Wall a soutenu dans son témoignage avoir acheté chacune des trois habitations dans l’intention d’y habiter à titre de résidence principale avec son fils, mais avoir été entravé par des circonstances imprévues qu’ils l’ont contraint à vendre chacune des trois habitations, l’une après l’autre. Comme il a été signalé au paragraphe 61 de l’arrêt Safeway, « le témoignage du contribuable au sujet de son intention n’est pas déterminant et doit être examiné à la lumière de l’ensemble des circonstances ».

[171] Comme je l’ai signalé précédemment, étant donné tous les éléments de preuve, je suis d’avis que le témoignage de M. Wall quant à ses intentions n’est ni crédible ni plausible. En revanche, j’estime que la conduite de M. Wall et les circonstances permettent de conclure qu’il a acquis chacune des trois habitations dans l’intention de les revendre avec bénéfice, ce qu’il a fait. À mon sens, il est impossible de tirer une autre conclusion plausible à la lumière de tous les éléments de preuve en l’espèce.

[172] Dans l’ensemble, étant donné tous les éléments de preuve en l’espèce, je relève que M. Wall est un entrepreneur intelligent et expérimenté en matière de vente et d’aménagement de biens immobiliers. Il savait comment exécuter et financer le réaménagement de biens sous-évalués au sein du marché de l’immobilier de Vancouver en plein essor. M. Wall a entrepris une série d’achats de maisons délabrées, de démolitions des structures existantes, de constructions de nouvelles maisons et de reventes des biens en tirant des bénéfices importants dès la fin des travaux de construction. Il est clair également que M. Wall n’était pas en mesure de payer les hypothèques de chacune des trois habitations à long terme, compte tenu de ses déclarations de revenus. Le revenu qu’il a déclaré était trop faible, et je ne dispose d’aucun élément de preuve tendant à établir l’existence d’économies ou d’autres fonds, de quelque nature que ce soit, que M. Wall aurait pu utiliser pour payer l’hypothèque de chacune des trois habitations à long terme. En revanche, je suis d’avis que M. Wall utilisait les fonds provenant des hypothèques pour financer son activité d’aménagement immobilier et qu’il remboursait ses dettes accumulées au moment de la vente du bien correspondant. M. Wall a également vendu chacune des trois habitations avec bénéfice, au lieu de vendre d’autres biens personnels pour rembourser ses dettes. Il a également conservé d’autres biens ou y a eu accès (par exemple, son appartement et la résidence de Mme Pillon), afin d’y résider au cours de la période visée par les présents appels, notamment après la revente de chacune des trois habitations.

[173] Étant donné tous les éléments de preuve en l’espèce, je relève que le témoignage de l’appelant est plutôt vague, notamment en ce qui concerne les nombreux faits importants et pertinents quant à ses appels. J’estime également que le témoignage de M. Wall est à la fois évasif et spécieux. Je relève par ailleurs qu’il était en possession de très peu de documents relatifs à l’achat, au réaménagement et à la vente des trois biens, et ce, en dépit de sa vaste expérience en affaires. En outre, il a omis de citer à témoigner Mme Pillon, les enfants de Mme Pillon et son comptable. J’ai tiré une conclusion défavorable du défaut de M. Wall d’appeler à témoigner des personnes pertinentes ou encore de conserver et de présenter des éléments de preuve documentaires importants concernant ses activités d’aménagement.

[174] Étant donné tout ce qui précède, je suis d’avis, selon la prépondérance des probabilités, que la vente des trois habitations par M. Wall est imputable au revenu et qu’elle découle d’une entreprise d’aménagement immobilier que M. Wall a exploitée à titre de propriétaire unique.

B. Si la vente des trois habitations par M. Wall est imputable au capital, l’appelant peut-il réclamer l’exemption pour résidence principale pour l’une des trois habitations, aux termes de l’alinéa 40(2)b) de la Loi?

[175] Étant donné ma conclusion selon laquelle la vente des trois habitations par M. Wall est imputable au revenu et qu’elle découle d’une entreprise d’aménagement immobilier, je suis d’avis que M. Wall ne peut réclamer l’exemption relative à la résidence principale aux termes de l’alinéa 40(2)b) de la Loi. À cet égard, il est clair que l’exemption pour résidence principale ne vaut que pour les contribuables dont la vente du bien est imputable au capital.

[176] Même si la vente des trois habitations possédées par M. Wall avait été imputable au capital, selon la prépondérance des probabilités, je suis d’avis que M. Wall n’aurait pas satisfait aux exigences prévues par la loi pour réclamer l’exemption relative à la résidence principale dans le cas de chacune des trois habitations. Plus précisément, j’estime, selon la prépondérance des probabilités, que je dispose d’éléments de preuve peu crédibles et insuffisants pour en conclure que M. Wall (ou son fils, un époux, un ex-époux, un conjoint de fait ou encore un ancien conjoint de fait) « a normalement habité » dans l’une des trois propriétés à quelque moment que ce soit.

[177] Selon l’alinéa 3b) de la Loi, le revenu du contribuable pour l’année d’imposition comprend ses gains en capital imposables supérieurs aux pertes en capital déductibles. Selon les alinéas 38a) et b) de la Loi, les mots « gain en capital imposable » et « perte en capital déductible » s’entendent, respectivement, de la moitié du gain en capital réalisé et de la moitié de la perte en capital subie par le contribuable. Les règles générales de calcul des gains et des pertes en capital sont quant à elles définies au paragraphe 40(1) de la Loi. Une exception aux règles générales définies au paragraphe 40(1) est consacrée par l’alinéa 40(2)b); on l’appelle communément l’exemption relative à la résidence principale. Selon cet alinéa 40(2)b), le gain en capital découlant de l’aliénation de la « résidence principale » du contribuable est en général exclu du calcul du revenu dans les circonstances prescrites.

[178] Selon la définition des mots « résidence principale » de l’article 54 de la Loi, la

« résidence principale d’un contribuable pour une année d’imposition [désigne le] bien – logement […] – dont le contribuable est propriétaire au cours de l’année […], à condition que : […] le logement soit normalement habité au cours de l’année par le contribuable, par son époux ou conjoint de fait ou ex-époux ou ancien conjoint de fait ou par un enfant du contribuable […] ». [Non souligné dans l’original.]

[179] Selon l’alinéa 40(2)b) et l’article 54 de la Loi, pour que puisse jouer l’exemption pour résidence principale, le contribuable doit avoir « normalement habité » dans la propriété pendant les périodes relativement auxquelles il a déclaré cette propriété à titre de résidence principale. Il n’existe aucune définition des mots « normalement habité » dans la Loi, mais dans la décision Flanagan c Minister of National Revenue [69] , aux paragraphes 27 à 29, la doctrine consacrée par la jurisprudence Thomson c Minister of National Revenue [70] concernant la qualité de [traduction] « résident habituel » a été citée pour établir la définition suivante des mots « normalement habité », comme suit :

[traduction]

27 La jurisprudence a discuté à plusieurs reprises la signification des mots « résident habituel » comme ils figuraient au paragraphe 139(4) de la Loi, dans sa version antérieure à celle de 1972. Dans la décision Thomson v. Minister of National Revenue, [1946] SCR 209, [1946] CTC 51, 2 DTC 812, la Cour suprême du Canada a conclu que la résidence du contribuable située au Nouveau-Brunswick n’était en rien occasionnelle ou non permanente, alors même que le contribuable y résidait, au moment des années visées par l’appel, de mai à octobre et moins de 183 jours par an. Le reste de l’année, ce contribuable résidait aux États-Unis. Rand J. a observé à la page 64 (DTC 815) :

[traduction]

Les mots « résident habituel » ont un sens restreint et, alors qu’à première vue elle suppose une prépondérance dans le temps, la jurisprudence relative à la loi anglaise a rejeté ce point de vue. La règle est qu’il s’agit de résidence selon le mode habituel de vie de l’intéressé, par opposition à une résidence spéciale, occasionnelle ou fortuite. Pour appliquer le critère de la résidence habituelle, il faut donc examiner le mode de vie général.

28 Voici ce que Kellock J. a observé aux pages 67 et 68 (DTC 819 et 820) :

[traduction]

Le mot « habituel » signifie « en conformité avec les règles ou les habitudes ou pratiques établies », « dans le contexte d’une pratique ou d’une répétition régulière », « selon le cours normal ou habituel des événements », « normalement », « couramment » ou encore « qui est normal ou habituel ». Le « séjour » évoqué à la disposition b) s’oppose à la « résidence » évoquée à la disposition a). Un simple séjour n’est pas assujetti à l’article en question, sauf si ce séjour se prolonge au-delà de la période énoncée. Je suis d’avis que l’appelant ne doit pas être qualifié de résident temporaire à l’égard des années en cause, mais comme une personne résidant au Canada au sens de la disposition a). Il n’existe pas la moindre différence d’utilisation par l’appelant entre sa maison au Canada et ses deux maisons aux États-Unis. Les trois installations sont pour l’essentiel de même nature et l’appelant les considère toutes comme des « maisons », selon la même signification. L’appelant réside dans chacune d’elles dans le cadre normal et habituel de sa vie et il occupe chacune d’elles à un même niveau, quoique à des moments de l’année différents.

29 Le mot « habituel », par conséquent, ne contraint pas une personne à résider dans un seul pays; une personne peut habiter normalement dans plus d’une unité d’habitation au cours de l’année, si cela correspond à son mode de vie habituel : il s’agit ici encore d’une question de fait. L’intimée convient qu’une résidence saisonnière peut constituer une résidence principale pour un contribuable. Voici le contenu du paragraphe 9 du bulletin d’interprétation IT-120R3 de l’intimée :

[traduction]

La question de savoir si la résidence a été « normalement habitée » au cours d’une année d’imposition par le contribuable ou par un époux, un ex-époux ou un enfant du contribuable doit être tranchée au regard des faits pour chaque affaire. Lorsqu’une résidence a été occupée par l’une de ces personnes pour une courte période seulement au cours de l’année d’imposition (par exemple, une résidence saisonnière occupée pendant les vacances du contribuable ou une maison qui a été vendue au début de l’année d’imposition ou achetée à la fin de l’année d’imposition), le Ministère est d’avis que le contribuable a « normalement habité » cette résidence au cours de l’année, sauf si le motif principal quant à la possession du bien est d’en tirer un gain ou un revenu. Lorsque le contribuable reçoit un revenu consécutif à la mise en location d’une résidence saisonnière, on considère que le bien n’est pas possédé aux fins d’en tirer un gain ou un revenu.

[180] Dans la décision Rebus c. La Reine [71] , la Cour a interprété les mots « normalement habité » au sens « normalement occupé en tant que “chez-soi” ». Dans la décision Sidhu c. La Reine, la règle concernant les mots « normalement habité » consacrée par la jurisprudence Flanagan a été interprétée comme suit :

[…] une résidence occasionnelle, c’est-à-dire une résidence occupée par une personne mais qui ne reflète pas le domicile habituel de cette personne, n’est pas une résidence dans laquelle ladite personne réside [traduction] « normalement » [72] .

[181] Comme je l’ai expliqué précédemment, la durée de la possession est l’un des facteurs permettant de déterminer si un bien est imputable au revenu ou au capital [73] . Une fois que l’on a imputé le bien au revenu ou au capital, il faut vérifier le respect de l’exigence d’avoir « normalement habité » avant que l’on puisse faire jouer l’exemption pour résidence principale. Dans la décision Sangha, la Cour a reconnu que la durée d’habitation normale de la propriété ne constitue pas un critère permettant de déterminer si le contribuable est admissible à l’exemption relative à la résidence principale [74] . Bien entendu, la durée d’habitation normale n’a aucune importance pour l’application de l’exemption pour résidence principale au sens de l’alinéa 40(2)b), dès qu’on estime que cette exemption s’applique autrement.

[182] En l’espèce, M. Wall a déclaré dans son témoignage avoir résidé dans chacune des trois habitations avec son fils, Alexander Wall, d’où son affirmation d’avoir normalement habité chacune des trois habitations. Dans son témoignage, Alexander Wall a quant à lui déclaré avoir résidé dans chacune des trois habitations. Toutefois, je conclus que leur témoignage est vague et peu crédible quant à la mesure dans laquelle chacun d’eux a éventuellement occupé les trois habitations. M. Velve et M. Daudet ont également témoigné au sujet de l’occupation des trois habitations par M. Wall. Comme je l’ai signalé précédemment, je conclus également que le témoignage de ces deux personnes est vague, de sorte que je leur ai accordé peu de poids quant à la prétendue occupation des trois habitations par M. Wall. Je relève par ailleurs que les seules factures de M. Wall à l’égard des trois habitations concernent des dépenses telles que le gaz et l’assurance, c’est-à-dire des dépenses concevables dans le cadre du réaménagement des trois habitations, sans que M. Wall y habite. Par conséquent, ces factures ne permettent pas de conclure que les trois habitations ont été normalement habitées. L’appelant n’a, par exemple, produit aucune facture de téléphone ou d’Internet, et je ne dispose d’aucun élément de preuve dont il ressort que l’appelant a utilisé à un quelconque moment l’adresse de l’une des trois habitations à titre d’adresse personnelle, que ce soit dans ses états de compte en banque, dans ses relevés de carte de crédit, dans son permis de conduire ou dans ses déclarations de revenu.

[183] Je relève également que les trois habitations ont été qualifiées de neuves à leur mise en vente et qu’il y avait des défauts importants à corriger avant d’en conclure la vente. Un budget était également prévu pour des appareils ménagers.

[184] Au cours de la période visée par les présents appels, M. Wall a eu accès à un certain nombre de résidences, notamment son appartement, les résidences et les biens possédés ou mis en location par Mme Pillon, les biens des parents de M. Wall et les trois habitations. Étant donné tous les éléments de preuve et selon la prépondérance des probabilités, il est difficile de déterminer les lieux de résidence de M. Wall à un tel ou tel moment. Si l’on interprète les éléments de preuve de manière généreuse, il serait possible de conclure que M. Wall a emménagé certains meubles dans chacune des trois habitations et qu’il y a séjourné ou résidé de manière occasionnelle afin de donner l’apparence d’y résider réellement, lui permettant ainsi de demander l’exemption pour résidence principale. Si l’on interprète les éléments de preuve de manière moins favorable, il serait possible de conclure que M. Wall n’a pas du tout résidé dans ces trois habitations. Je suis d’avis que M. Wall n’a pas normalement résidé dans les trois habitations, du fait qu’il a conservé son appartement, qu’il a utilisé l’adresse de l’appartement et celle d’autres biens à titre d’adresse postale, qu’il a vendu les trois habitations dès la fin des travaux de construction, et qu’il n’a pas été en mesure de produire un quelconque élément de preuve fiable de sa résidence dans les trois habitations dans le cadre normal de son mode de vie. Comme je l’ai signalé précédemment, j’estime que le témoignage de M. Wall n’est pas crédible. Selon la prépondérance des probabilités, je suis d’avis que M. Wall n’a pas normalement habité l’une des trois habitations à quelque période que ce soit. Par conséquent, j’estime qu’aucune des trois habitations n’a constitué une « résidence principale » pour M. Wall, puisqu’il n’en a normalement habité aucune. Ainsi, M. Wall n’est pas en droit de demander l’exemption pour résidence principale à l’égard de l’une des trois habitations.

C. Le ministre a-t-il imposé à juste titre des pénalités pour M. Wall aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010?

[185] En l’espèce, le ministre a établi des pénalités (souvent à titre de pénalités pour faute lourde) aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi, au motif que M. Wall a omis de déclarer les bénéfices découlant de la vente des trois habitations et du lot vacant au cours des années d’imposition 2006, 2008 et 2010. Comme je l’ai signalé précédemment, M. Wall a déclaré dans son témoignage avoir omis de déclarer ses gains découlant de la vente des trois habitations au motif qu’il avait construit et occupé chacune des trois habitations à titre de résidence principale. Malgré sa vaste expérience dans le monde des affaires et le secteur de l’immobilier, il a également déclaré lors de son témoignage avoir omis de déclarer les gains importants découlant de la vente du lot vacant.

[186] En l’espèce, l’intimée soutient que M. Wall a sciemment fait de fausses déclarations, et il y a eu des omissions dans ses déclarations de revenu de 2006, 2008 et 2010 en s’abstenant de déclarer ses bénéfices et ses gains découlant de l’aliénation des trois habitations et du lot vacant. À titre subsidiaire, l’intimée soutient que M. Wall a fait preuve d’un aveuglement volontaire ou d’une négligence excessive en omettant de déclarer ses bénéfices et ses gains découlant de l’aliénation des trois habitations et du lot vacant. À ce titre, l’intimée soutient qu’en l’espèce, le ministre a imposé à juste titre des pénalités aux termes du paragraphe 163(2). Je suis d’accord avec l’intimée pour les motifs qui suivent.

[187] Le paragraphe 163(2) de la Loi dispose :

« Faux énoncés ou omissions – (2) Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse (appelé « déclaration » au présent article) rempli, produit ou présenté, selon le cas, pour une année d’imposition pour l’application de la présente loi, ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d’une pénalité égale, sans être inférieure à 100 $, à 50 % du total des montants suivants […] »

[Non souligné dans l’original.]

[188] Dans la décision Gray c. La Reine, 2016 CCI 54, aux paragraphes 22 à 36 concernant l’application des pénalités prévues par le paragraphe 163(2), la Cour a conclu ce qui suit :

22 Il est évident que notre régime fiscal repose à la fois sur l’autocotisation et l’autodéclaration. Il est fondé sur l’honnêteté et l’intégrité du contribuable. Il s’appuie sur un « système de confiance ». Le contribuable a le devoir de déclarer la totalité de son revenu imposable de manière correcte et exacte, peu importe qui prépare sa déclaration de revenus. Par conséquent, le contribuable doit être vigilant et s’assurer que les renseignements fournis dans sa déclaration sont complets et exacts. Comme l’indique le juge Martineau au paragraphe 11 de la décision Northview Apartments Ltd. c. Canada (Procureur général), 2009 CF 74, « Le régime fiscal repose sur l’autocotisation et l’autodéclaration, dont sont responsables les contribuables envers l’ARC ».

[...]

24 Les pénalités prévues à l’article 163 de la Loi ont été établies pour assurer l’intégrité de notre régime d’autocotisation et d’autodéclaration et pour inciter le contribuable à faire preuve de minutie et d’exactitude dans la préparation de sa déclaration de revenus, peu importe qui la prépare. Dans la décision Sbrollini c. La Reine, 2015 CCI 178 (CCI [procédure informelle]), le juge Boyle de la Cour est d’avis que la disposition prévoyant une pénalité au paragraphe 163(2) de la Loi traduit ce qui suit :

15 [...] [L]’importance des exigences d’honnêteté et de fidélité requises dans la cadre du régime fiscal canadien d’autodéclaration des revenus [...].

16 De telles pénalités sont dûment payables par [le contribuable] s’il a délibérément, ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait de faux énoncés ou des omissions dans ses déclarations, ou y participe, y consent ou y acquiesce.

25 Par conséquent, je suis d’avis que la décision d’assujettir ou non un contribuable aux pénalités prévues au paragraphe 163(2) de la Loi doit être prise à la lumière des responsabilités et des devoirs imposés au contribuable par un régime d’autocotisation et d’autodéclaration, c’est-à-dire de déclarer des revenus complets et exacts.

26 Deux éléments doivent nécessairement être établis pour rendre un contribuable passible des pénalités prévues au paragraphe 163(2) :

a) un faux énoncé dans une déclaration;

b) le fait d’avoir, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait le faux énoncé ou d’y avoir participé, consenti ou acquiescé.

[...]

30 Il y a une différence entre la négligence ordinaire et la faute lourde. Plusieurs de mes collègues et moi avons à maintes occasions scruté le droit dans les récentes décisions prises dans ce domaine. La négligence est le défaut d’agir avec autant de soin que ne l’aurait fait une personne raisonnablement prudente et minutieuse dans des circonstances semblables. La faute lourde implique une négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi; voir la décision Venne, précitée. Dans la décision Venne, le juge Strayer de la Cour fédérale (Section de première instance) a indiqué que le paragraphe 163(2) constitue une disposition pénale à interpréter de façon stricte. Les pénalités prévues doivent être imposées uniquement dans des affaires où il existe un degré élevé de faute impliquant la connaissance ou la mauvaise conduite insouciante.

31 Toutefois, dans l’arrêt Guindon, précité, la Cour suprême du Canada considère que l’article 163.2 de la Loi, lequel prévoit l’imposition de pénalités pour faute lourde aux tiers qui préparent des déclarations de revenus, n’est pas une disposition pénale. Cet article prévoit une pénalité administrative qui vise principalement l’observation de règles ou la réglementation de la conduite dans une sphère d’activité limitée; son objectif est de promouvoir l’honnêteté des tiers et de les dissuader de commettre une faute lourde, des qualités essentielles du volet d’autodéclaration du régime de cotisation fiscale. Je suis d’avis que l’on peut dire la même chose des pénalités prévues au paragraphe 163(2) qui nous intéressent en l’espèce. Par conséquent, on ne doit pas chercher des éléments de preuve qui se rapprochent de la norme de la preuve hors de tout doute raisonnable avant de conclure que l’imposition des pénalités prévues au paragraphe 163(2) est justifiée. Néanmoins, les pénalités visent à sanctionner une conduite grave, et non la négligence ordinaire ou la simple erreur d’un contribuable.

32 Il est également bien établi que la faute lourde peut comprendre l’« ignorance volontaire » (aussi appelée « aveuglement volontaire »). Cette notion bien connue en droit criminel a été expliquée par le juge Cory de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Hinchey, précité. Selon la règle, si une partie qui a des soupçons omet délibérément de se renseigner davantage parce qu’elle désire demeurer dans l’ignorance, elle est réputée être au courant.

33 Il a été décidé que la notion d’ignorance volontaire est applicable aux affaires fiscales; voir les arrêts Villeneuve et Panini, précités. Dans l’arrêt Panini, le juge Nadon a clairement indiqué que la notion d’« aveuglement volontaire » est incluse dans la notion de la « faute lourde », puisque cette expression est utilisée au paragraphe 163(2) de la Loi. Il a déclaré ce qui suit :

43 [...] le droit imputera une connaissance au contribuable qui, dans des circonstances qui lui commanderaient ou lui imposeraient de s’enquérir de sa situation fiscale, refuse ou néglige de le faire sans raison valable.

34 Il a été jugé que, pour établir la distinction entre « négligence ordinaire » et « faute lourde », il faut tenir compte d’un certain nombre de facteurs, à savoir :

a) l’importance de l’omission relative au revenu déclaré;

b) la faculté du contribuable de découvrir l’erreur;

c) le niveau d’instruction du contribuable et son intelligence apparente,

d) l’effort réel de se conformer à la loi.

Évidemment, aucun facteur n’est prédominant. Il faut accorder à chacun des facteurs le poids qu’il convient dans le contexte de l’ensemble de la preuve (voir la décision DeCosta, précitée, au paragraphe 11; la décision Bhatti, précitée, au paragraphe 24; et la décision McLeod, précitée, au paragraphe 14).

35 Dans la décision Torres, précitée, le juge C. Miller de la Cour a mené un examen très approfondi de la jurisprudence touchant les pénalités pour faute lourde applicables en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi. Il résume au paragraphe 65 les principes directeurs à appliquer, à savoir :

a) La connaissance d’un faux énoncé peut être déduite d’un aveuglement volontaire.

b) La notion d’aveuglement volontaire peut être appliquée aux pénalités pour faute lourde prévues par le paragraphe 163(2) de la Loi […].

c) Pour savoir s’il y a eu ou non aveuglement volontaire, il faut tenir compte du niveau d’instruction et d’expérience du contribuable.

d) Pour conclure à un aveuglement volontaire, il doit y avoir eu nécessité de s’informer, ou soupçon d’une telle nécessité.

e) Les facteurs laissant supposer la nécessité de s’informer avant la production d’une déclaration […] comprennent ce qui suit :

i) l’importance de l’avantage ou de l’omission;

ii) le caractère flagrant du faux énoncé et la facilité avec laquelle il peut être décelé;

iii) l’absence, dans la déclaration elle-même, d’une attestation du spécialiste qui a établi la déclaration;

iv) les demandes inusitées du spécialiste;

v) le fait que le spécialiste était auparavant inconnu du contribuable;

vi) les explications inintelligibles du spécialiste;

vii) le point de savoir si d’autres personnes ont eu recours au spécialiste ou ont fait des mises en garde à l’encontre de ce dernier, ou le point de savoir si le contribuable lui-même hésite à s’en ouvrir à d’autres.

f) Le dernier critère de l’aveuglement volontaire est le fait que le contribuable ne s’enquiert pas auprès du spécialiste pour comprendre la déclaration de revenus ni ne s’enquiert aucunement auprès d’un tiers, ou auprès de l’ARC elle-même.

36 Cette liste n’est certainement pas exhaustive.

[189] Selon le paragraphe 163(3) de la Loi, le ministre a la charge d’établir les faits qui justifient l’imposition d’une pénalité aux termes du paragraphe 163(2). Comme il a été observé dans l’arrêt Lacroix c. Canada, 2008 CAF 241, au paragraphe 32 :

32 Qu’en est-il alors du fardeau du ministre? Comment s’en acquitte-t-il? Il se peut que dans certaines circonstances, le ministre soit en mesure de faire une preuve directe de l’état d’esprit du contribuable lorsque ce dernier a produit sa déclaration de revenu. Mais dans la grande majorité des cas, le ministre ne pourra que miner la crédibilité du contribuable, soit par des éléments de preuve qu’il apporte, soit en contre-interrogatoire du contribuable. Dans la mesure où la Cour canadienne de l’impôt est persuadée que le contribuable touche un revenu qu’il n’a pas déclaré et que l’explication offerte par le contribuable pour l’écart constaté entre son revenu déclaré et l’accroissement de son actif est non crédible, le ministre s’est acquitté du fardeau de preuve qui lui incombe aux termes du sous-alinéa 152(4)(a)(i) et du paragraphe 162(3).

[190] En l’espèce, pour les motifs énoncés précédemment, je suis d’avis que M. Wall était tenu d’inclure dans son revenu ses bénéfices et ses gains découlant de l’aliénation des trois habitations et du lot vacant pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010, respectivement. Par conséquent, j’estime que M. Wall a fait une fausse déclaration, ou qu’ il y a eu omission de sa part dans sa déclaration pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010, en omettant de déclarer ses bénéfices et ses gains découlant de l’aliénation des trois habitations et du lot vacant. À ce titre, il est nécessaire de déterminer s’il l’a fait sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde. Je suis d’avis, étant donné tous les éléments de preuve et selon la prépondérance des probabilités, que M. Wall a agi à la fois sciemment et dans des circonstances équivalant à faute lourde.

[191] M. Wall est entrepreneur, aménageur immobilier et agent immobilier informé qui compte de nombreuses années d’expérience. Il découle clairement de son témoignage et de ses expériences antérieures en matière d’aménagement de biens, notamment par l’intermédiaire de sa société Pocido, qu’il connaissait ses obligations en matière de déclarations de l’impôt sur le revenu liées à des activités d’aménagement immobilier. Il a également communiqué avec l’Agence et avec son comptable afin d’obtenir des renseignements sur la manière de demander l’exemption relative à la résidence principale en lien avec la vente des trois habitations. M. Wall a déclaré un revenu imposable de 26 036 dollars, de 15 547 dollars et de 15 684 dollars pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010. À cet égard, M. Wall a déclaré dans son témoignage avoir examiné ses déclarations de revenu avant que son comptable les remplisse et avoir su que les bénéfices découlant de la vente des trois habitations n’avaient pas été pris en compte dans ses déclarations fiscales. Dans son témoignage, il a déclaré avoir simplement oublié de déclarer ses gains découlant de la vente du lot vacant dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu de 2006.

[192] Comme je l’ai signalé précédemment, je suis d’avis que le témoignage de M. Wall n’est pas crédible à bien des égards. Étant donné tous les éléments de preuve, j’estime que M. Wall a sciemment choisi de ne pas déclarer son revenu découlant de la vente des trois habitations au motif qu’il voulait réclamer l’exemption relative à la résidence principale pour chacune d’elles. Par ailleurs, au vu des connaissances et de l’expertise reconnues de M. Wall, je ne crois pas son affirmation selon laquelle il aurait simplement oublié de déclarer ses gains découlant de la vente du lot vacant. Par conséquent, je suis d’avis que M. Wall a sciemment fait une fausse déclaration ou une omission dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010, notamment en omettant de déclarer ses bénéfices et ses gains découlant de l’aliénation des trois habitations et du lot vacant. À ce titre, j’estime que le ministre s’est acquitté en l’espèce de son fardeau en matière d’application de pénalités aux termes du paragraphe 163(2) pour chacune des années d’imposition visées par les présents appels.

[193] Je suis également d’avis que M. Wall a fait de fausses déclarations ou des omissions dans ses déclarations de l’impôt sur le revenu de 2006, 2008 et 2010, et ce, dans des circonstances à la fois d’ignorance volontaire et de faute lourde.

[194] Dans l’arrêt Wynter c. Canada, 2017 CAF 195, la Cour a conclu ce qui suit au paragraphe 20 :

« Un contribuable qui ferme les yeux sur la véracité et l’exactitude des renseignements fournis dans sa déclaration de revenus est volontairement ignorant et commet également une faute lourde. »

[195] Comme il a été observé dans la décision Venne c. La Reine, [1984] CTC 223; 84 DTC 6247, au paragraphe 37 :

« La “faute lourde” doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi. »

[196] En l’espèce, le comportement de M. Wall correspond à un aveuglement volontaire et à cette définition de la faute lourde. Il ressort des éléments de preuve que M. Wall a communiqué avec son comptable et avec l’Agence afin de se familiariser avec l’exemption relative à la résidence principale, mais qu’il a omis de rechercher des renseignements précis sur la possibilité d’invoquer cette exemption relativement à la vente des trois habitations. Il a également affirmé dans son témoignage avoir oublié de déclarer ses gains découlant de la vente du lot vacant, malgré sa vaste expérience et sa déclaration d’autres revenus très faibles.

[197] Dans son témoignage, M. Wall a déclaré ne pas se souvenir des paroles échangées avec son comptable, mais au cours de l’interrogatoire préalable, il avait déclaré avoir posé à son comptable des questions concernant la vente de ses biens :

[traduction]

Je lui ai demandé quelque chose comme : « Combien de temps dois-je résider dans une propriété si jamais je veux la vendre sans avoir à m’inquiéter de quoi que ce soit? ». Et il m’a répondu la même chose que quand j’ai téléphoné à l’ARC. On m’a affirmé que c’était une vraie zone grise. Il m’a dit : « Si vous avez une bonne raison de vendre, alors vendez, ne vous inquiétez pas pour ça. » [75]

[198] Au cours de l’interrogatoire préalable, M. Wall avait déclaré ne pas avoir informé son comptable de la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue. Dans son témoignage, il a également déclaré ne pas pouvoir se souvenir s’il avait ou non informé son comptable de la vente des deux autres maisons, mais qu’il ne pensait pas avoir à le faire, puisqu’il estimait que chacune des trois habitations était sa résidence principale.

[199] M. Wall a exploité son entreprise d’aménagement immobilier à titre de propriétaire unique pendant de nombreuses années. Il est un entrepreneur intelligent et expérimenté dans le secteur de l’immobilier résidentiel, et il connaît les moyens de tirer profit efficacement du marché de l’immobilier de Vancouver. Étant donné tous les éléments de preuve, y compris le témoignage de M. Wall, je suis d’avis que, vu son expérience et ses connaissances, il aurait dû conclure que les bénéfices et les gains découlant de la vente des quatre biens auraient dû être pris en compte dans son revenu pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010.

[200] Je suis également d’avis que l’ampleur des bénéfices non déclarés de M. Wall découlant de son activité d’aménagement, en comparaison de son revenu déclaré, fait pencher la balance en faveur de l’imposition de pénalités pour faute lourde. Par exemple, je relève que :

  • a) M. Wall a déclaré en 2006 un revenu de 26 036 dollars, tandis que les bénéfices non déclarés découlant de la vente du lot vacant et du bien situé au 4007, West 21st Avenue s’élèvent à 651 322,69 dollars, ce qui signifie que le revenu non déclaré de M. Wall en 2006 est supérieur à son revenu déclaré à hauteur de 2 502 %.

  • b) M. Wall a déclaré en 2008 un revenu de 15 547 dollars, tandis que les bénéfices non déclarés découlant de la vente du bien situé au 4324, West 14th Avenue s’élèvent à 772 402,66 dollars, ce qui signifie que le revenu non déclaré de M. Wall en 2008 est supérieur à son revenu déclaré à hauteur de 4 968 %.

  • c) M. Wall a déclaré en 2010 un revenu de 15 684 dollars, tandis que les bénéfices non déclarés découlant de la vente du lot vacant et du bien situé au 4668, West 14th Avenue s’élèvent à 810 693,31 dollars et, ce qui signifie que le revenu non déclaré de M. Wall en 2010 est supérieur à son revenu déclaré à hauteur de 5 169 %.

[201] Je suis d’avis que les fausses déclarations ou les omissions de M. Wall sont flagrantes et facilement détectables, ce qui fait pencher la balance en faveur de l’imposition de pénalités pour faute lourde. Même un examen très rapide des circonstances permet de conclure que les bénéfices découlant de la vente des quatre biens auraient dû être déclarés. M. Wall est un aménageur immobilier informé et expérimenté, qui se savait tenu de payer des impôts sur ses revenus d’entreprise découlant de l’aménagement de biens immobiliers. Je suis d’avis qu’il a acheté chacune des trois habitations dans l’intention de les revendre avec bénéfice. Toutefois, il a essayé de masquer son entreprise d’aménagement en donnant l’apparence qu’il habitait dans les biens, afin de lui permettre de demander l’exemption pour résidence principale. Je suis d’avis que les circonstances de l’acquisition, du réaménagement et de la vente de chacune des trois habitations permettent de conclure uniquement à une activité commerciale. Par ailleurs, l’excuse de M. Wall quant à son omission de déclarer les bénéfices découlant de la vente du lot vacant n’est tout simplement pas crédible. En sa qualité d’agent et d’aménageur immobilier, il aurait dû savoir que ses bénéfices découlant de la vente du lot vacant étaient imposables. Je suis d’avis qu’il a simplement choisi de ne pas les déclarer. L’omission de déclarer son revenu découlant de la vente de ce bien dans sa déclaration de l’impôt sur le revenu de 2006 constitue une fausse déclaration flagrante.

[202] Je suis également d’avis que M. Wall n’a pas fait de vrais efforts pour remplir ses obligations en vertu de la Loi. Par exemple, il a omis de conserver des registres et les documents relatifs à ses activités d’aménagement, il n’a communiqué à son comptable aucun des renseignements dont ce dernier avait besoin, et il n’a cherché à obtenir aucun conseil de la part de son comptable ou d’un fiscaliste bien informé au sujet de ses activités d’aménagement. J’estime que M. Wall a essayé indûment d’invoquer l’exemption pour résidence principale afin de soustraire ses bénéfices importants découlant de son entreprise d’aménagement immobilier à l’imposition aux termes de la Loi. Je relève par ailleurs certains éléments de preuve dont il ressort que M. Wall a également fait d’autres efforts pour soustraire ses bénéfices à une imposition, en exécutant certaines de ses activités d’aménagement immobilier au nom de son père, Henry Wall, ou de son [traduction] « amie », Mme Pillon.

[203] Dans l’ensemble, étant donné tous les éléments de preuve en l’espèce, je suis d’avis que M. Wall a sciemment fait de fausses déclarations ou des omissions dans ses déclarations de l’impôt sur le revenu de 2006, 2008 et 2010. J’estime également que M. Wall s’est rendu volontairement ignorant et a commis une faute lourde en faisant ces fausses déclarations ou omissions. Par conséquent, je suis d’avis que c’est à bon droit que le ministre a imposé à M. Wall les pénalités prévues par le paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d’imposition visées par les présents appels.

D. Le ministre était-il en droit d’établir une nouvelle cotisation pour M. Wall après la période normale de nouvelle cotisation pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010 aux termes du paragraphe 152(4) de la Loi?

[204] En l’espèce, les nouvelles cotisations de M. Wall pour les années d’imposition 2006 et 2008 ont été établies par le ministre après la période normale de nouvelle cotisation prévue par le sous-alinéa 152(4)a)(i) de la Loi. Si l’avis de nouvelle cotisation du ministre daté du 7 octobre 2013 et visant l’année d’imposition 2010 de M. Wall a été établi au cours de la période normale de nouvelle cotisation, le suivant, daté du 4 mai 2015 et visant l’année d’imposition 2010 de M. Wall, a été quant à lui établi après la période normale de nouvelle cotisation prévue par le sous-alinéa 152(4)a)(i) de la Loi. Étant donné tous les éléments de preuve en l’espèce et selon la prépondérance des probabilités, je suis d’avis que le ministre a dûment établi les nouvelles cotisations de M. Wall pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010 après la période normale de nouvelle cotisation prévue par le sous-alinéa 152(4)a)(i) de la Loi.

[205] Selon le sous-alinéa 152(4)a)(i) de la Loi, le ministre peut établir à tout moment une cotisation ou une nouvelle cotisation payable le contribuable pour une année d’imposition donnée, sous réserve que :

a) le contribuable ou la personne produisant la déclaration :

(i) soit a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi […]

[Non souligné dans l’original.]

[206] Pour les motifs exposés précédemment, je suis d’avis que M. Wall a fait de fausses déclarations dans ses déclarations de l’impôt sur le revenu de 2006, 2008 et 2010 en omettant de déclarer les bénéfices et les gains découlant de la vente des trois habitations et du lot vacant aux années d’imposition correspondantes.

[207] Pour les motifs fournis précédemment, je suis également d’avis que l’intimée a conclu, selon la prépondérance des probabilités, que ces fausses déclarations étaient imputables à la négligence, à l’inattention ou à une omission volontaire pour chacune de ces années d’imposition. Je suis d’avis que le témoignage de M. Wall n’est pas crédible. Il n’a présenté pour ainsi dire aucun registre ou reçu à l’appui de ses déclarations. À l’inverse, comme je l’ai signalé concernant les pénalités pour faute lourde, je dispose d’éléments de preuve substantiels me permettant de conclure que M. Wall a fait de fausses déclarations, que ce soit sciemment, par négligence ou par inattention, dans ses déclarations de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition visées par les présents appels.

E. La vente des trois habitations est-elle assujettie à la TPS?

[208] Selon l’article 165 de la Loi sur la taxe d’accise (LTA), la TPS vise toute « fourniture taxable effectuée au Canada ». Selon les définitions des mots « fourniture taxable », « fourniture » et « activité commerciale » figurant au paragraphe 123(1) de la LTA, la TPS vise la fourniture d’un bien immobilier situé au Canada, sauf s’il s’agit d’une fourniture exonérée aux termes de l’annexe V de la partie IX de la LTA.

[209] En l’espèce, l’appelant affirme ne pas avoir été un « constructeur » à l’égard de chacune des trois habitations, tel que ce mot est défini aux fins du calcul de la TPS par le paragraphe 123(1) de la LTA, et que, par conséquent, la vente de chacune des trois habitations est exonérée de TPS aux termes de l’article 2 de l’annexe V de la partie IX de la LTA. À l’inverse, l’intimée soutient que l’appelant est un « constructeur » à l’égard de chacune des trois habitations, tel que ce mot est défini aux fins du calcul de la TPS par le paragraphe 123(1) de la LTA, et que, par conséquent, la vente de chacune des trois habitations n’est pas exonérée de TPS aux termes de l’article 2 de l’annexe V de la partie IX de la LTA. L’intimée soutient également qu’une aucune des trois habitations n’a été utilisée « principalement à titre résidentiel par [l’appelant], son ex-époux ou ancien conjoint de fait ou un particulier lié [à l’appelant] » [76] une fois que les travaux de construction de chacune des trois habitations étaient en grande partie achevés, de sorte que la vente de chacune d’elles n’est pas non plus exonérée de la TPS aux termes de l’article 3 de l’annexe V de la partie IX de la LTA. Si l’appelant n’a ni plaidé ni soutenu que l’article 3 de l’annexe V de la partie IX de la LTA joue afin d’exonérer la vente de chacune des trois habitations par l’appelant, ce dernier a toutefois affirmé dans son avis d’appel pour chacun des dossiers 2013-3996(GST)G et 2013-3997(GST)G avoir occupé chacune des trois habitations à titre de [traduction] « résidence principale ou primaire ».

[210] Aux dates pertinentes, la définition du terme « constructeur » figurant au paragraphe 123(1) de la LTA était la suivante :

« Est constructeur d’un immeuble d’habitation ou d’une adjonction à un immeuble d’habitation à logements multiples la personne qui, selon le cas :

a) réalise, elle-même ou par un intermédiaire, à un moment où elle a un droit sur l’immeuble sur lequel l’immeuble d’habitation est situé :

(i) dans le cas d’une adjonction à un immeuble d’habitation à logements multiples, la construction de l’adjonction,

(ii) dans le cas d’un logement en copropriété, la construction de l’immeuble d’habitation en copropriété dans lequel ce logement est situé [77] ,

(iii) dans les autres cas, la construction ou des rénovations majeures de l’immeuble d’habitation;

b) acquiert un droit sur l’immeuble à un moment où :

(i) dans le cas d’une adjonction à un immeuble d’habitation à logements multiples, cette adjonction est en construction,

(ii) dans les autres cas, l’immeuble d’habitation est en construction ou fait l’objet de rénovations majeures;

c) dans le cas d’une maison mobile ou d’une maison flottante, fournit la maison avant qu’elle soit utilisée ou occupée à titre résidentiel;

d) acquiert un droit sur l’immeuble d’habitation au moment suivant, en vue principalement soit d’effectuer par vente des fournitures de tout ou partie de l’immeuble, ou de droits sur celui-ci, soit d’effectuer des fournitures de tout ou partie de l’immeuble par bail, licence ou accord semblable au profit de personnes autres que des particuliers qui acquièrent l’immeuble ou la partie d’immeuble en dehors du cadre d’une entreprise, d’un projet à risques ou d’une affaire de caractère commercial :

(i) dans le cas d’un immeuble d’habitation en copropriété ou d’un logement en copropriété, soit à un moment où l’immeuble n’est pas enregistré à titre d’immeuble d’habitation en copropriété, soit avant qu’il soit occupé à titre résidentiel ou d’hébergement,

(ii) dans les autres cas, avant qu’il soit occupé à titre résidentiel ou d’hébergement;

e) dans tous les cas, est réputée par le paragraphe 190(1) être le constructeur de l’immeuble.

N’est pas un constructeur :

f) le particulier visé aux alinéas a), b) ou d) qui, en dehors du cadre d’une entreprise, d’un projet à risques ou d’une affaire de caractère commercial :

(i) soit construit ou fait construire l’immeuble d’habitation ou l’adjonction, ou y fait ou y fait faire des rénovations majeures,

(ii) soit acquiert l’immeuble ou un droit afférent;

g) le particulier visé à l’alinéa c) qui fournit la maison mobile ou la maison flottante en dehors du cadre d’une entreprise, d’un projet à risques ou d’une affaire de caractère commercial;

h) la personne visée aux alinéas a) à c) dont le seul droit sur l’immeuble est celui d’acheter du constructeur l’immeuble ou un droit afférent.

[Non souligné dans l’original.]

[211] En l’espèce, étant donné tous les éléments de preuve, il est clair que M. Wall avait un intérêt sur le bien immobilier où était située chacune des trois habitations lorsqu’il a réalisé, lui-même ou par un intermédiaire, des travaux de construction sur les habitations. En l’espèce, M. Wall a également admis avoir géré la construction de chacune des trois habitations. Par conséquent, il est clair que M. Wall satisfait aux critères qui figurent à l’alinéa a) de la définition du mot « constructeur » à l’égard de chacune des trois habitations.

[212] Comme je l’ai signalé précédemment, je suis également d’avis que M. Wall a exécuté la construction de chacune des trois habitations dans le cadre d’une entreprise d’aménagement qu’il a exploitée à titre de propriétaire unique. À ce titre, je suis d’avis que l’alinéa f) de la définition du mot « constructeur » ne vise pas M. Wall à l’égard de la construction de chacune des trois habitations. Étant donné qu’il est clair que les alinéas g) et h) de la définition du mot « constructeur » ne visent pas non plus M. Wall à l’égard de la construction de chacune des trois habitations, je suis d’avis que M. Wall est un « constructeur » à l’égard de la construction de chacune des trois habitations. À ce titre, j’estime que l’article 2 de l’annexe V de la partie IX de la LTA ne permet pas l’exonération de TPS de la vente de chacune des trois habitations par l’appelant.

[213] Même si ce point en particulier n’a été ni plaidé ni soutenu par l’appelant, je suis également d’avis que l’article 3 de l’annexe V de la partie IX de la LTA ne permet pas l’exonération de TPS de la vente de chacune des trois habitations par M. Wall. À cet égard, selon la prépondérance des probabilités et étant donné tous les éléments de preuve présentés en l’espèce (comme je l’ai mentionné précédemment), je suis d’avis qu’aucune des trois habitations n’a été utilisée « principalement à titre résidentiel par [l’appelant], son ex-époux ou ancien conjoint de fait ou un particulier lié [à l’appelant] » [78] une fois que les travaux de construction de chacune des trois habitations étaient en grande partie achevés, de sorte que la vente de chacune des trois habitations n’est pas non plus exonérée de la TPS aux termes de l’article 3 de l’annexe V de la partie IX de la LTA.

[214] Étant donné qu’aucune disposition en matière d’exonération ne vise la vente de chacune des trois habitations, je suis d’avis que ces ventes sont assujetties à la TPS applicable.

F. Les pénalités pour omission de produire une déclaration de la TPS – article 280.1

[215] Le ministre a imposé des pénalités en application de l’article 280.1 de la LTA à l’égard de la vente du lot vacant et des trois habitations par M. Wall. L’intimée ayant concédé que la TPS ne visait pas la vente du lot vacant, la pénalité correspondante n’est plus applicable à l’égard de la vente de ce bien.

[216] L’article 280.1 a été ajouté à la LTA par la loi L.C. 2006, ch. 4, paragraphe 147(1), et s’applique relativement

a) à toute déclaration à produire en vertu de la partie IX de la même loi le 1er avril 2007 ou par la suite;

b) à toute déclaration à produire en vertu de la partie IX de la même loi avant cette date, mais qui n’est pas produite au plus tard le 31 mars 2007; dans ce cas, la date limite de production de la déclaration est réputée être le 31 mars 2007 pour ce qui est du calcul de la pénalité prévue à cet article [79] .

[217] L’article 280.1 de la LTA impose une pénalité lorsqu’une personne « omet de produire une déclaration pour une période de déclaration selon les modalités et dans le délai prévus par » la partie IX de la LTA. En l’espèce, comme je l’ai signalé précédemment, je suis d’avis que M. Wall était tenu de percevoir et de verser la TPS sur la vente des trois habitations, ce qu’il a omis de faire. L’intimée soutient que M. Wall n’a pas fait preuve de diligence raisonnable en ce qui concerne le respect des obligations qui lui incombaient aux termes de la LTA et que, par conséquent, il ne peut utilement invoquer le moyen de défense tiré de la diligence raisonnable à l’égard de ces pénalités. À cet égard, je relève que M. Wall n’a pas soulevé le moyen de défense tiré de la diligence raisonnable dans les présents appels. Quoi qu’il en soit, étant donné tous les éléments de preuve, je suis d’avis que M. Wall n’a pas fait preuve de diligence raisonnable en ce qui concerne le respect de ses obligations de percevoir, de verser et de déclarer la TPS sur la vente des trois habitations.

[218] Par ailleurs, M. Wall n’a soulevé aucune question concernant le calcul des pénalités imposées par le ministre en application de l’article 280.1 de la LTA, y compris à l’égard des dates de prise d’effet. Par conséquent, je n’ai pas examiné cette question plus en détail.

G. Les pénalités pour déclaration tardive de la TPS – ancien alinéa 280(1)a)

[219] Le paragraphe 280(1) de la LTA a été modifié par la loi L.C. 2006, ch. 4, paragraphe 146(1). Ces modifications sont entrées en vigueur le 1er avril 2007 [80] . Voici le texte de l’ancienne version du paragraphe 280(1) de la LTA :

Pénalité et intérêts – (1) Sous réserve du présent article et de l’article 281, la personne qui ne verse pas ou ne paie pas un montant au receveur général dans le délai prévu par la présente partie est tenue de payer la pénalité et les intérêts suivants, calculés sur ce montant pour la période commençant le lendemain de l’expiration du délai et se terminant le jour du versement ou du paiement :

a) une pénalité de 6 % par année;

b) des intérêts au taux réglementaire.

[220] En l’espèce, le ministre a également imposé des pénalités aux termes de l’ancien alinéa 280(1)a) de la LTA à l’égard de la vente du lot vacant et du bien situé au 4007, West 21st Avenue par M. Wall. L’intimée ayant concédé que la TPS ne visait pas la vente du lot vacant, la pénalité correspondante n’est plus applicable à l’égard de la vente de ce bien.

[221] Comme je l’ai signalé précédemment, l’ancien alinéa 280(1)a) de la LTA imposait une pénalité lorsque « la personne [...] ne verse pas ou ne paie pas un montant au receveur général dans le délai prévu par » la partie IX de la LTA. En l’espèce, comme je l’ai signalé précédemment, je suis d’avis que M. Wall était tenu de percevoir et de verser la TPS sur la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue, ce qu’il a omis de faire. L’intimée soutient que M. Wall n’a pas fait preuve de diligence raisonnable en ce qui concerne le respect des obligations qui lui incombaient aux termes de la LTA et que, par conséquent, il ne peut utilement invoquer le moyen de défense tiré de la diligence raisonnable à l’égard de ces pénalités. À cet égard, je relève que M. Wall n’a pas soulevé le moyen de défense tiré de la diligence raisonnable dans les présents appels. Quoi qu’il en soit, étant donné tous les éléments de preuve, je suis d’avis que M. Wall n’a pas fait preuve de diligence raisonnable en ce qui concerne le respect de ses obligations de percevoir, de verser et de déclarer la TPS sur la vente du bien situé au 4007, West 21st Avenue.

[222] Par ailleurs, M. Wall n’a soulevé aucune question concernant le calcul des pénalités imposées par le ministre aux termes de l’alinéa 280(1)a) de la LTA, y compris à l’égard des dates de prise d’effet. Par conséquent, je n’ai pas examiné cette question plus en détail.

V. CONCLUSION

[223] Dans l’ensemble, je suis d’avis que M. Wall a vendu les trois habitations dans le cadre d’une entreprise d’aménagement qu’il a exploitée à titre de propriétaire unique pendant les années d’imposition visées par les présents appels. À ce titre, j’estime que les bénéfices de M. Wall découlant de la vente de chacune des trois habitations sont imputables au revenu et qu’ils auraient dû être déclarés pour les années d’imposition 2006, 2008 et 2010. Puisque la vente de chacune des trois habitations est imputable au revenu, je suis également d’avis que M. Wall ne peut utilement invoquer l’exemption relative à la résidence principale prévue par l’alinéa 40(2)b) de la Loi à l’égard des bénéfices découlant de la vente de chacune des trois habitations. Étant donné tous les éléments de preuve, j’estime par ailleurs que le ministre a établi à juste titre les cotisations pour M. Wall après la période normale de nouvelle cotisation aux termes du paragraphe 152(4) de la Loi et qu’il a imposé à juste titre des pénalités aux termes du paragraphe 163(2) de la Loi. Je suis d’avis que M. Wall est également constructeur des trois habitations aux fins de la LTA et qu’il n’a utilisé aucune des trois habitations principalement à titre résidentiel. À ce titre, j’estime que la vente de chacune des trois habitations est assujettie au taux de TPS applicable. Étant donné que M. Wall a omis de percevoir, de verser et de déclarer la TPS sur la vente des trois habitations, je suis également d’avis que les pénalités en application de l’article 280.1 et de l’alinéa 280(1)a) de la LTA lui ont été imposées à juste titre.

[224] Étant donné tout ce qui précède, les appels interjetés par M. Wall sont accueillis à seule fin de donner effet aux concessions de l’intimée. Les cotisations et les nouvelles cotisations en litige sont par conséquent renvoyées au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation, au motif que :

  • a) le revenu d’entreprise net de M. Wall pour l’année d’imposition 2006 doit être réduit de 126 000 dollars relativement à sa vente du lot vacant situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island;

  • b) le revenu de M. Wall pour l’année d’imposition 2006 doit être majoré de 63 000 dollars relativement au gain en capital imposable découlant de sa vente du lot vacant situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island;

  • c) M. Wall n’était pas tenu de percevoir ou de verser la TPS sur sa vente en 2006 du lot vacant situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island, et, par conséquent, le montant net de la TPS qu’il aurait dû verser à l’égard de la période de déclaration comprise entre le 1er juillet 2006 et le 30 septembre 2006 doit être réduit de 9 000 dollars;

  • d) le revenu d’entreprise net de M. Wall pour l’année d’imposition 2006 doit être réduit de 159 370 dollars (à savoir la différence entre 810 693 dollars et 651 323 dollars), afin qu’il soit tenu compte d’une erreur qui a été reconnue par l’intimée et décrite aux paragraphes 14 et 23 de la réponse de l’intimée dans le dossier 2014-4354(IT)G;

  • e) le montant de l’intérêt et des pénalités applicables qui ont été imposées doit être réduit en conséquence des paragraphes a) à d) qui précèdent;

  • f) les appels interjetés par M. Wall sont rejetés à tous les autres égards.

VI. DÉPENS

[225] Les dépens sont accordés à l’intimée. Les parties disposent d’un délai de 30 jours suivant la date du présent jugement pour parvenir à un accord sur les dépens, faute de quoi l’intimée disposera alors d’un délai de 30 jours pour présenter ses observations écrites sur les dépens, après quoi l’appelant disposera d’un délai supplémentaire de 30 jours pour déposer sa réponse par écrit. Ces observations ne devront pas dépasser dix pages. Si les parties n’informent pas la Cour qu’elles sont parvenues à un accord, et en l’absence de dépôt d’observations, les dépens seront accordés à l’intimée selon ce que prévoit le tarif.

Signé à Halifax (Nouvelle-Écosse), ce 14e jour d’août 2019.

« Henry A. Visser »

Le juge Visser

Traduction certifiée conforme

ce 14e jour de juin 2021.

François Brunet, réviseur


RÉFÉRENCE :

2019 CCI 168

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2013-3996(GST)G; 2013-3997(GST)G; 2014-4354(IT)G

INTITULÉ :

JOHN WALL c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

Les 24, 25 et 26 octobre 2016
Les 26 et 27 avril 2017

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Henry A. Visser

DATE DU JUGEMENT :

Le 14 août 2019

COMPARUTIONS :

Avocat de l’appelant :

Me George Douvelos

Avocats de l’intimée :

Me Selena Sit

Me Johanna Russell

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

[en blanc]

 

Cabinet :

[en blanc]

 

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1] L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), telle que modifiée. Sauf indication contraire, tous les renvois à des dispositions légales dans les présentes concernent la Loi.

[2] Voir les paragraphes 14, 16, 19 et 23 de la réponse de l’intimée dans le dossier 2014-4354(IT)G.

[3] Ce qui correspond à la différence entre les montants d’argent inversés, à savoir 810 693 dollars et 651 323 dollars

[4] Précité, note 2.

[5] L.R.C. (1985), ch. E-15, telle que modifiée. Les références à la TPS dans les présentes englobent toute TVH admissible en application de la LTA.

[6] Voir les actes de procédure figurant au dossier 2013-3996(GST)G.

[7] Voir les actes de procédure figurant au dossier 2013-3997(GST)G.

[8] Voir le rapport de vérification et les documents de transfert des titres fonciers qui figurent à la pièce R-1, onglets 2, 20, 35, 41, 45, 47, 53, 60 et 65. Les dates d’achat et de vente s’appuient sur les dates qui sont définies dans les documents de transfert du titre foncier correspondant.

[9] Le nombre total de mois en qualité de propriétaire s’appuie sur les renseignements figurant dans les documents de transfert du titre foncier correspondant et il est arrondi au nombre de mois entier le plus proche; dans le cas des trois habitations, ce nombre prend en compte le temps nécessaire pour démolir la maison existante et pour en construire une nouvelle, ainsi que la durée de mise en vente du bien.

[10] Le bien situé au 2761, Patricia Crescent, Savary Island, est appelé dans les présentes « le lot vacant ». Il a également été appelé [traduction] « le lot Courtenay ».

[11] Les biens situés au 4007, West 21st Avenue, au 4324, West 14th Avenue et au 4668, West 14th Avenue sont collectivement appelés « les trois habitations » dans les présentes.

[12] Précité, note 8. Voir également en particulier le rapport de vérification qui figurant dans la pièce R-1, onglet 2.

[13] Pièce R-1, volume 1, onglet 24, page 17.

[14] Voir la pièce A-1, onglets 24 et 25, et la pièce R-1, volume 2, onglets 33, 38, 50, 51 et 55.

[15] Transcription, volume 2, page 250, lignes 20 à 25.

[16] Pièce R-1, volume 2, onglet 38.

[17] Pièce R-1, volume 1, onglet 13.

[18] Pièce R-1, volume 1, onglet 15.

[19] Pièce R-1, volume 1, onglet 16, page 4.

[20] Pièce R-1, volume 1, onglet 24, page 9.

[21] Transcription, volume 3, pages 505 à 511.

[22] Pièce R-1, volume 2, onglet 51.

[23] Transcription, volume 3, pages 505 à 511.

[24] Transcription, volume 2, pages 319 à 320, 427 et 430 à 435; volume 3, pages 560, 611 et 622 à 627.

[25] Transcription, volume 3, page 629, lignes 10 à 20.

[26] Pièce R-1, volume 2, onglet 86.

[27] Transcription, volume 2, page 272.

[28] Revenus de M. Wall entre 1987 et 2011, tels qu’ils sont indiqués à la pièce R-3, onglet 23.

[29] Pièce R-1, volume 2, onglet 30.

[30] Pièce R-1, volume 2, onglet 33.

[31] Pièce R-1, volume 2, onglet 38.

[32] Pièce R-1, volume 2, onglet 51.

[33] Pièce R-1, volume 2, onglet 46.

[34] Pièce R-1, volume 2, onglet 55.

[35] Pièce R-1, volume 2, onglet 51.

[36] Transcription, volume 2, page 410.

[37] Transcription, volume 2, page 411.

[38] Pièce R-1, volume 1, onglet 5.

[39] Pièce R-1, volume 1, onglet 5, page 4.

[40] Transcription, volume 2, page 400.

[41] Pièce R-1, volume 2, onglet 58.

[42] Pièce R-1, volume 2, onglet 59.

[43] Pièce R-1, volume 2, onglet 69.

[44] Pièce R-1, onglet 24, pages 5 à 7.

[45] Transcription, volume 2, page 347.

[46] Pièce R-1, volume 2, onglets 33, 38, 50, 51 et 55.

[47] Pièce A-1, onglet 11.

[48] Pièce R-1, volume 1, onglets 21 et 22.

[49] Pièce R-1, volume 2, onglet 63.

[50] Pièce R-1, volume 2, onglets 67 et 69.

[51] Pièce R-1, volume 1, onglet 11; pièce R-2, onglet 3; pièce R-3, onglet 2. Je relève toutefois que seule l’adresse de service, et non l’adresse postale, figure dans la plupart des factures de gaz de la société Terasen qui ont été présentées à titre d’éléments de preuve. Par conséquent, seules quelques factures de gaz de la société Terasen indiquaient l’une des trois habitations en tant qu’adresse postale.

[52] Pièce R-1, vol. 1, onglet 24.

[53] Pièce R-1, volume 2, onglets 42, 54 et 66.

[54] Pièce R-1, volume 2, onglet 64.

[55] Pièce R-1, volume 1, onglet 24; volume 2, onglets 45, 46, 55, 59, 60 et 68.

[56] Transcription, volume 1, de la ligne 25 de la page 30 à la ligne 2 de la page 31.

[57] Pièce R-1, volume 2, onglet 36, 48 et 61.

[58] Transcription, volume 4, pages 797 à 800.

[59] Observations écrites de l’intimée, au paragraphe 2.

[60] [1956] CTC 189, 56 DTC 1125 (Ex Ct).

[61] [1965] CTC 150, 65 DTC 5098 (Ex Ct).

[62] [1986] 2 CTC 259, 86 DTC 6421 (CF 1re inst.) [décision Happy Valley].

[63] 2013 CCI 69.

[64] 2014 CCI 208.

[65] 2008 CAF 24.

[66] Voir la décision Sangha, 2013 CCI 69, au paragraphe 19.

[67] Voir la pièce R-1, onglet 70, et le témoignage de l’appelant, 25 octobre 2016. Entre le 1er janvier 2005 et le 31 décembre 2010, il semble que l’appelant a perçu un revenu sous la forme de commissions pour sept transactions seulement, lesquelles sont toutes liées à des biens dont son père, Mme Pillon ou lui était propriétaire.

[68] Pièce R-3, onglet 6, page 2.

[69] [1989] 2 CTC 2395, 89 DTC 615 [décision Flanagan].

[70] [1946] SCR 209, [1946] CTC 51.

[71] [2002] 3 CTC 2328, au paragraphe 23.

[72] 2004 CCI 174, au paragraphe 21.

[73] Voir Happy Valley, au paragraphe 14.

[74] Sangha, 2013 CCI 69, au paragraphe 20, citant Palardy c. La Reine, 2011 CCI 108.

[75] Transcription, volume 3, page 508.

[76] Voir l’article 3 de l’annexe V de la partie IX de la LTA.

[77] Le sous-alinéa a)(ii) de la définition du mot « constructeur » a été abrogé par la Loi L.C. 2014, ch. 39, paragraphe 92(3), qui vise de façon générale toute vente d’un immeuble d’habitation après le 8 avril 2014 (sous réserve d’exemptions précises). Cette modification n’est pas pertinente aux fins des présents appels.

[78] Voir l’article 3 de l’annexe V de la partie IX de la LTA.

[79] L.C. 2006, ch. 4, paragraphe 147(2).

[80] L.C. 2006, ch. 4, paragraphe 146(11).

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