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Dossier: 2016-4459(IT)G

ENTRE :

MICHEL HAMEL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

Appel entendu le 28 janvier 2020, à Montréal (Québec)

Devant : L’honorable juge Johanne D’Auray


Comparutions :

Avocat de l’appelant :

Me Stéphane Harvey

Avocate de l’intimée :

Me Sara Jahanbakhsh

 

JUGEMENT

  L’appel des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 est rejeté avec frais sur la base que :

-  la ministre a correctement établi des nouvelles cotisations après le délai normal de cotisation selon le sous-alinéa 152(4)(a)(i) de la Loi.

-   la ministre a correctement inclus dans les revenus de M. Hamel les montants de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement.

-   la ministre a correctement imposé des pénalités à M. Hamel selon le paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009.

Signé à Ottawa, Canada, ce 9e jour de juillet 2020.

« Johanne D’Auray »

Juge D’Auray


Référence : 2020 CCI 48

Date : 20200709

Dossier : 2016-4459(IT)G

ENTRE :

MICHEL HAMEL,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


MOTIFS DU JUGEMENT

La juge D’Auray

I. Questions en litige

[1]  Les questions à déterminer dans l’appel en l’espèce sont :

  • a) Est-ce que l’intimée a établi que M. Hamel a fait une présentation erronée des faits par négligence, inattention ou omission volontaire ou a commis quelque fraude en produisant ses déclarations de revenus ou en fournissant quelque renseignement sous le régime la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), permettant à la ministre du Revenu national (la « ministre ») d’établir une cotisation à l’égard de l’appelant, M. Hamel, après les délais requis par la Loi, en ce qui a trait aux années d’imposition 2007, 2008 et 2009?

  • b) Est-ce que la ministre a correctement ajouté dans le calcul du revenu de M. Hamel, les montants de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement, selon le paragraphe 5(1) de la Loi (revenu tiré d’une charge) ou alternativement selon l’alinéa 6(1)(a) de la Loi (avantage reçu dans le cadre d’une charge) ou encore selon le paragraphe 9(1) de la Loi, à titre d’un revenu tiré d’une entreprise?

  • c) Est-ce que la ministre a correctement imposé des pénalités à M. Hamel selon le paragraphe 163(2) de la Loi à l’égard de revenus non déclarés par M. Hamel de l’ordre de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement?

II. Les faits

[2]  M. Hamel est un homme d’affaires. Il débute l’exploitation d’une société d’investigation en 1990, soit le Centre d’investigation West Island inc. (le « CIWI »). Par la suite, M. Hamel fonde la société Montréal Experts en sinistre. La preuve n’a pas établi clairement à quel moment ces sociétés ont cessé leurs opérations. M. Hamel témoigne que les sociétés ont cessé leurs opérations en 2002. Cependant, le Registre des entreprises du Québec indique que les sociétés ont cessé d’opérer en 2010. Il ressort de la preuve présentée lors de l’audience que le CIWI opérait en 2007 et que son courrier était acheminé au 105, rue St-Paul à Montréal.

[3]  M. Hamel fait connaissance de M. Gélinas en 2000 et ils collaborent depuis cette date. Les sociétés de M. Gélinas sont des clientes du CIWI et de Montréal Experts en sinistre. Ces dernières font des enquêtes pour les sociétés de M. Gélinas.

[4]  En 2006, M. Hamel collabore avec M. Gélinas dans la Fondation Fer de Lance (la « FFDL »). Selon la convention de la FFDL, soit la convention de mise à disposition de capital monétaire (la « convention »), la FFDL se définit « comme étant un organisme privé à but non lucratif, ayant pour mission de dédier tous les efforts nécessaires et d’utiliser tous les moyens disponibles pour améliorer la qualité de vie du genre humain sur la terre » [1] .

[5]  Toujours selon la convention, la FFDL accomplit sa mission et réalise ses objectifs par le truchement d’ingénierie financière particulière, utilisant la technique de la mise à disposition de capital monétaire de tiers afin de permettre la réalisation de telles ingénieries.

[6]  Ainsi, tel que décrit dans la convention, un Sponsor/Donneur d’Ordres (« sponsor ») accepte de mettre à la disposition de la fondation une portion de son capital monétaire afin d’habiliter la FFDL à réaliser une ingénierie financière distincte et d’atteindre ses objectifs.

[7]  À la signature de la convention, le sponsor remet une traite bancaire à Me Jean-Pierre Desmarais, avocat chez Marchand, Melançon, Forget (« MMF »). La traite bancaire est émise et libellée à l’étude de droit MMF, en fidéicommis.

[8]  Selon cette convention, le sponsor reste propriétaire du montant d’argent remis à la FFDL, cette dernière s’engage à remettre cette somme lorsque l’ingénierie financière sera complétée. La FFDL s’engage aussi à remettre une compensation monétaire importante au sponsor pour avoir mis à la disposition de la FFDL des montants d’argent. Ces compensations font partie intégrante de la convention.

[9]  Dans la brochure intitulée « La fondation ou penser un futur meilleur » qui a été déposée en preuve, M. Hamel est décrit comme un des fondateurs de la FFDL.

[10]  La brochure fait également un survol de ses fondateurs. On y décrit le rôle de M. Hamel dans la FFDL de la manière suivante :

Michel Hamel est le secrétaire-trésorier et le directeur général de la Fondation. Il est aussi le président de CIWI, une entreprise dans le domaine de la sécurité et prévention des en affaires depuis plusieurs années. Tant dans le secteur privé que public, CIWI opère sous licence émise par le Gouvernement du Québec, Ministère de la Sécurité Publique. Michel Hamel jouit de 35 ans de métier dans de telles activités et ce, tant dans la moyenne que la grande entreprise, incluant des institutions bancaires et d’assurances.

[11]  M. Hamel admet qu’il est un membre fondateur et directeur général de la FFDL. Cependant, il témoigne qu’il n’a pas joué un rôle important au sein la FFDL et qu’il n’a pas dédié beaucoup de temps aux activités de la FFDL.

[12]  Quant à M. Paul Gélinas, la brochure de la FFDL le décrit comme le « Trustee Executor » de la fondation. Lors de son témoignage, M. Hamel indique que M. Gélinas était le maître d’œuvre de la FFDL.

[13]  Selon M. Hamel, la FFDL a recueilli plus de onze millions de dollars des sponsors. M. Hamel indique aussi que la FFDL n’a jamais distribué des fonds pour des fins humanitaires, car l’ingénierie financière n’a jamais été complétée. De plus, les sponsors n’ont jamais reçu une compensation pour avoir mis des fonds à la disposition de la FFDL.

[14]  Au cours des années en litige, M. Gélinas transfère d’importantes sommes d’argent provenant des comptes bancaires de la FFDL à ses comptes bancaires personnels.

[15]  De ses comptes bancaires personnels, M. Gélinas transfère à M. Hamel des montants de 21 705 $ en 2007, de 74 000 $ en 2008 et de 33 000 $ en 2009. La ministre ajoute ces montants dans le calcul du revenu de M. Hamel en vertu du paragraphe (5)(1) de la Loi, à titre de revenu tiré d’une charge et alternativement, selon l’alinéa 6(1)(a) de la Loi, à titre d’avantage ou encore à titre de revenu d’entreprise selon le paragraphe 9(1) de la Loi.

[16]  Selon M. Hamel, lors de sa rencontre avec M. Gélinas en 2000, ce dernier lui indique qu’il ne peut pas obtenir de cartes de crédit en raison de sa faillite personnelle. M. Hamel considère qu’il est important que M. Gélinas ait accès à des cartes de crédit.

[17]  M. Hamel autorise M. Gélinas à utiliser certaines de ses cartes de crédit. À cet effet, il autorise les institutions financières à émettre des cartes de crédit supplémentaires au nom de M. Gélinas. Trois cartes de crédit supplémentaires ont été émises au nom de M. Gélinas, avec un numéro de carte de crédit différent de celles de M. Hamel, soit :

  • - Visa Or, Banque de Nouvelle-Écosse (« Visa Or ») ayant une limite monétaire maximale de 3 000 $;

  • - American Express, Tiger Woods, (« Amex Express ») ayant une limite monétaire maximale de 15 000 $;

  • - American Express Or (« Amex Or »), sans aucune limite monétaire.

[18]  M. Hamel témoigne qu’en vertu d’une entente commerciale entre lui et M. Gélinas, ce dernier s’est engagé à lui transférer de l’argent pour l’utilisation des cartes de crédit. M. Hamel explique qu’il devait se protéger, car c’est lui qui effectue les paiements relatifs aux cartes de crédit utilisées par M. Gélinas. Par conséquent, les montants transférés par M. Gélinas ne constituent pas une source de revenu imposable.

[19]  M. Hamel explique que l’arrangement commercial qu’il a conclu avec M. Gélinas quant aux transferts d’argent visant le paiement des cartes de crédit est en branle depuis l’année 2000, bien avant la constitution de la FFDL. Cet arrangement n’a donc aucun lien avec les activités de la FFDL.

[20]  Cependant, aucun relevé de cartes de crédit pour les années 2000 à 2006 n’est déposé en preuve par M. Hamel à l’appui de son témoignage. Seuls les relevés de carte de crédit relatifs aux années en litige 2007, 2008 et 2009 sont déposés en preuve par l’intimée, soit les relevés pour les cartes de crédit Visa Or et Amex Or.

[21]  M. Hamel témoigne que selon l’arrangement commercial entre lui et M. Gélinas, ce dernier s’engage à lui verser sur une base annuelle trois fois le montant de la limite disponible sur la carte de crédit.

[22]  M. Hamel explique, à titre d’exemple, pour la Visa Or ayant une limite de 3 000 $, M. Gélinas devait lui donner un montant annuel de 9 000 $ afin de couvrir les dépenses de M. Gélinas sur cette carte. Selon M. Hamel, cette façon de faire lui permettait de payer les cartes de crédit relatives aux dépenses de M. Gélinas.

[23]  M. Hamel témoigne que préalablement aux années en litige, il a annulé la carte de crédit supplémentaire Amex Express au nom de M. Gélinas, car ce dernier n’avait pas respecté leur arrangement commercial relatif aux paiements périodiques. Ainsi, pendant les années en litige, M. Gélinas n’était détenteur supplémentaire que de la Visa Or et de l’Amex Or.

[24]  M. Hamel indique qu’il a dû payer un solde de 65 000 $ [2] en ce qui a trait à la carte de crédit Amex Or de M. Gélinas. M. Hamel aurait payé ce solde en 2012 pour couvrir les dépenses effectuées par M. Gélinas et non payées par ce dernier.

[25]  Lors de l’audience, M. Hamel dépose en preuve un billet promissoire [3] daté du 30 novembre 2012, pour un montant 65 000 $. Selon M. Hamel, ce billet est signé par M. Gélinas en sa faveur en reconnaissance de dettes. Selon M. Hamel, si les sommes versées constituaient du revenu pour les services qu’il a rendus à la FFDL, la reconnaissance de dettes n’aurait pas été nécessaire.

[26]  M. Hamel fait valoir que les montants transférés par M. Gélinas sont pour l’utilisation de ses cartes de crédit en vertu de leur arrangement commercial. M. Hamel fait valoir que ces montants n’ont aucun lien avec la FFDL. Par conséquent, ces montants ne doivent pas être inclus dans ses revenus durant les années en litige à titre de source de revenu pour les services rendus à la FFDL.

[27]  M. Hamel fait également valoir que si effectivement les montants avaient été payés pour la charge qu’il occupait au sein de la FFDL, ces montants auraient été payés par la FFDL et non pas du compte personnel de M. Gélinas. Il fait valoir qu’il n’y a aucune preuve que ces montants payés par M. Gélinas de son compte personnel provenaient de la FFDL. De plus, il ressort de la preuve que M. Hamel a aussi transféré à M. Gélinas des sommes de 25 795 $ en 2007 et de 2 000 $ en 2009. Selon M. Hamel, il s’agit d’un système d’avances réciproques entre lui et M. Gélinas. Cependant, M. Hamel n’a pas expliqué pourquoi il a transféré ces deux montants à M. Gélinas.

[28]  De plus, M. Hamel fait valoir que la FFDL ne lui aurait pas versé de tels montants, eu égard au rôle qu’il jouait dans la FFDL. Son rôle s’étant limité à apposer sa signature sur quelques documents de la FFDL.

[29]  L’intimée, pour sa part, fait valoir que la version de M. Hamel ne tient pas la route et que je dois ignorer le témoignage de M. Hamel. Elle fait valoir que M. Hamel n’est pas un témoin crédible.

[30]  L’intimée fait valoir que la preuve démontre que M. Hamel jouait un rôle important dans la FFDL. Les montants transférés du compte personnel de M. Gélinas à M. Hamel ne sont pas en guise de paiements pour l’utilisation des cartes de crédit de M. Hamel, car les faits révélés par la preuve documentaire ne sont pas conformes au témoignage de M. Hamel.

III. Analyse

[31]  Afin de répondre aux questions en litige, je vais en premier lieu procéder à l’analyse des faits.

[32]  Plusieurs documents déposés en preuve par l’intimée font état du rôle de M. Hamel dans la FFDL.

[33]  Selon ces documents, il est clairement établi que M. Hamel est non seulement un membre fondateur de la FFDL, mais il agit aussi à titre de secrétaire‑trésorier et de directeur général de la FFDL.

[34]  De plus, on retrouve la signature de M. Hamel à titre de secrétaire-trésorier sur la correspondance et les documents de la FFDL. À titre d’exemple, M. Hamel appose sa signature sur la Convention de Mise à Disposition de Capital Monétaire dans laquelle un sponsor, M. Auger, met à disposition des fonds au bénéfice de la FFDL. La signature de M. Hamel se retrouve également sur un document joint à la mise de fonds de M. Auger intitulé « Instructions irrévocables inconditionnelles et permanentes #FFDL-SA/0308/ « III&PO » confidentielles sponsor/donneur d’ordres ». À cet effet, au dernier paragraphe de ce document, il y est indiqué « M. Michel Hamel, lequel intervient aux fins des présentes afin de confirmer sa pleine acceptation d’agir conformément aux dites instructions telles que ici (sic) et ci-avant rédigées. ». M. Hamel ne se souvient pas de sa rencontre avec M. Auger. Cela étant dit, M. Hamel admet que la signature sur ces documents est la sienne.

[35]  La signature de M. Hamel se retrouve aussi sur le certificat honorifique que la FFDL remet à un sponsor pour avoir mis des fonds à sa disposition.

[36]  Qui plus est, M. Hamel a signé une lettre bilatérale d’engagement formel en 2007, dans laquelle il s’engage à constituer une filiale de la FFDL aux Îles Turquoises et d’agir à titre de prête-nom et gérer tel que son mandat l’exige la fondation :

Lettre Bilatérale d’engagement formel

# MH/FFDLTC/0207

Je, soussigné, Michel Hamel (MH), passeport #: […], un des Membres Fondateurs et Secrétaire/Trésorier du Conseil d’administration de Fondation Fer de Lance (FFDL), une corporation canadienne sans but lucratif, ai accepté le mandat du Conseil d’administration et des Membres Fondateurs de ladite Fondation en vertu d’une résolution du 29 janvier 2007, de constituer une Fondation sous forme de corporation aux Îles Turquoises dans the B.W.L., afin de permettre l’accomplissement de la mission et l’atteinte des buts de FFDL. Ladite nouvelle corporation devant s’appeler Fondation Fer De lance Turks and Caicos (FFDLT&C), devant être détenu pour et nom de FFDL par MH et devant agir à titre de filiale détenue à 100% par FFDL.

Ledit mandat m’autorise à détenir telle nouvelle fondation aux Îles Turquoises, seul, en tant que « Beneficial Owner », Président du Conseil et Secrétaire Trésorier, aux fins de simplifier sa constitution face aux exigences des Îles Turquoises en la matière, le tout toujours basé entièrement sur le fait que j’agis en tant que prête-nom pour et au nom de FFDL et qu’en fait FFDLT&C est une filiale détenue à 100% par FFDL.

Considérant que mon acceptation de tel mandat est basée sur le fait de mon engagement personnel et formel d’administrer et de gérer telle Fondation en conformité des By Laws et des décisions des Membres Fondateurs et/ou du Conseil d’administration de la Fondation canadienne, selon que le cas l’exige, je confirme par la présente LETTRE D’ENGAGEMENT FORMEL # MH/FFDLTC/0207 que je m’engage à respecter telle gestion et telle administration de ladite Fondation qui officiellement aux yeux des autorités des Îles Turquoises ne sera détenue que par moi mais sera traiter ici comme une filiale détenue à 100% par FFDL en autre au bilan consolidé de FFDL.

De plus, en considération et en vertu de mon engagement ci-avant stipulé et ce, tant et aussi longtemps que je m’y conformerai ou jusqu’à décision nouvelle devant modifier la détention comme « Beneficial Owner » de la Fondation aux Îles Turquoises FGFDLT&C, FFDL dont je fais aussi partie, sera responsable à tous points de vue, de toute décision, modification, changement et/ou autre élément reliés à son administration et à sa gestion, sous mon règne de « Beneficial Owner » aux Îles Turquoises.

[Je souligne.]

[37]  La preuve a aussi établi que la FFDL a payé des dépenses engagées par M. Hamel. Ce dernier a admis avoir voyagé internationalement, à plus d’une fois, pour les affaires relatives à la FFDL.

[38]  Je suis d’avis qu’en vertu de la preuve, M. Hamel a joué un rôle important dans la FFDL.

[39]  Lors de son témoignage, M. Hamel indique qu’il payait les cartes de crédit Visa Or et Amex Or, à l’égard de ses propres dépenses ainsi qu’à l’égard des dépenses engagées par M. Gélinas. M. Hamel témoigne que c’est d’ailleurs pour cette raison que M. Gélinas lui transférait périodiquement de l’argent afin de garantir le paiement des cartes de crédit. Cependant, il ressort de la preuve qu’aucune des dépenses engagées par M. Gélinas avec les cartes de crédit supplémentaires n’ont pas été payées par M. Hamel durant les années en litige [4] .

[40]  À cet effet, l’intimée dépose en preuve tous les relevés de cartes de crédit de M. Hamel pour les années en litige. L’intimée établit que c’est M. Gélinas qui a effectué la majorité des paiements relativement aux cartes de crédit que M. Hamel lui avait fournies. Certains paiements ont cependant été effectués par la FFDL.

[41]  À cet égard, l’intimée dépose en preuve les chèques tirés par M. Gélinas à l’ordre d’Amex Or et Visa Or, établissant les paiements effectués par ce dernier à l’égard des cartes de crédits supplémentaires fournies par M. Hamel. L’intimée dépose également en preuve les relevés du compte bancaire de M. Gélinas établissant les paiements par le retrait équivalent au montant des chèques.

[42]  Par conséquent, eu égard à la preuve documentaire déposée par l’intimée, la version de M. Hamel à l’effet qu’il aurait reçu de l’argent de M. Gélinas durant les années en litige afin de payer et de garantir les dépenses engagées par M. Gélinas avec les cartes de crédit supplémentaires ne tient tout simplement pas.

[43]  Tout au long de l’audience, M. Hamel tente de minimiser son rôle dans la FDDL. Selon M. Hamel, le maître d’œuvre de la FFDL est M. Gélinas. M. Hamel témoigne qu’il n’a pas été en mesure de faire comparaître M. Gélinas comme témoin, car ce dernier était en Angleterre lors de l’audience et que sa santé ne lui permettait pas de témoigner.

[44]  La preuve démontre que suite à un jugement de la Cour du Québec [5] , M. Gélinas a été condamné à un emprisonnement de cinq ans pour avoir enfreint la Loi sur les valeurs mobilières du Québec relativement aux activités de la FFDL. M. Gélinas fait l’objet d’un mandat d’arrestation.

Est-ce que la ministre pouvait établir des nouvelles cotisations après le délai prescrit pour établir une nouvelle cotisation selon le sous-alinéa 152(4)(a)(i) de la Loi?

[45]  La première question est de déterminer si la ministre pouvait établir une nouvelle cotisation après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation.

[46]  Selon le sous-alinéa 152(4)(a)(i) de la Loi, la ministre peut établir une nouvelle cotisation après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation, si elle établit que le contribuable a fait une présentation erronée des faits par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant sa déclaration de revenu. Ce sous-alinéa énonce ce qui suit :

Cotisation et nouvelle cotisation

(4) Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire concernant l’impôt pour une année d’imposition, ainsi que les intérêts ou les pénalités, qui sont payables par un contribuable en vertu de la présente partie ou donner avis par écrit qu’aucun impôt n’est payable pour l’année à toute personne qui a produit une déclaration de revenu pour une année d’imposition. Pareille cotisation ne peut être établie après l’expiration de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l’année que dans les cas suivants :

a) le contribuable ou la personne produisant la déclaration :

(i) soit a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi,

[47]  Je suis d’avis que les faits suivants justifient l’établissement des nouvelles cotisations par la ministre à l’égard de M. Hamel après la période normale de cotisation relativement aux années d’imposition 2007, 2008 et 2009 :  

-  Les montants déclarés par M. Hamel pour les années en litige sont faibles. M. Hamel déclare des revenus de 14 328 $, de 13 120 $, et de 11 392 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement. Les revenus non déclarés, soit les montants transférés par M. Gélinas à M. Hamel, sont de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $. L’écart entre les revenus déclarés et les revenus non déclarés est important.

-  M. Hamel joue un rôle important dans la FFDL. Les documents déposés en preuve le confirment. Il va de soi qu’il est compensé pour la charge et le rôle qu’il occupe et les engagements qu’il a pris à l’égard de la FFDL.

-   Les montants versés à M. Hamel sont remis périodiquement, ce qui laisse entendre qu’il reçoit une rémunération pour la charge qu’il occupe au sein de la FFDL.

-  De plus, la version de M. Hamel en ce qui a trait aux montants reçus périodiquement de M. Gélinas n’est pas crédible. Qui plus est, la version de M. Hamel a été contredite par la preuve déposée par l’intimée.

[48]  Dans la décision de la Cour d’appel fédérale Lacroix c Canada [6] , le juge Pelletier, dans un jugement unanime, écrit que la ministre s’acquitte de son fardeau si la Cour est persuadée que le contribuable touche un revenu qu’il n’a pas déclaré et que l’explication offerte par le contribuable pour l’écart constaté entre son revenu déclaré et l’accroissement de son actif est non crédible. C’est la situation en l’espèce.

[49]  Je suis donc d’avis que la ministre a prouvé qu’elle était justifiée établir des nouvelles cotisations à l’égard de M. Hamel après l’expiration de la période normale de cotisation.

Est-ce que les montants de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement ont correctement été inclus dans les revenus de M. Hamel à titre de revenu tiré d’une charge ou un avantage tiré d’une charge ou un revenu tiré d’une entreprise?

[50]  La deuxième question à déterminer est de savoir si la ministre a correctement ajouté les montants de 21 705 $, 74 000 $ et de 33 000 $ dans le calcul des revenus de M. Hamel durant les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement.

[51]  Les dispositions de la Loi qui sont pertinentes en l’espèce sont les suivantes :

5 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, le revenu d’un contribuable, pour une année d’imposition, tiré d’une charge ou d’un emploi est le traitement, le salaire et toute autre rémunération, y compris les gratifications, que le contribuable a reçus au cours de l’année.

6(1)(a) la valeur de la pension, du logement et de tout autre avantage que reçoit ou dont jouit le contribuable, ou une personne avec laquelle il a un lien de dépendance, au cours de l’année au titre, dans le cadre ou en raison de la charge ou de l’emploi du contribuable

9 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, le revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise ou d’un bien pour une année d’imposition est le bénéfice qu’il en tire pour cette année.

[52]  Une fois que la ministre a établi qu’un contribuable a fait une présentation erronée des faits par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant ses déclarations de revenu, c’est au contribuable d’établir que la ministre n’a pas correctement inclus lesdits montants dans le calcul du revenu du contribuable.

[53]  En l’espèce, M. Hamel admet qu’il a reçu de l’argent de M. Gélinas de manière périodique durant les années d’imposition 2007, 2008 et 2009. Il admet aussi qu’il occupait le poste de secrétaire-trésorier et directeur général de la FFDL. M. Hamel ne conteste pas qu’il était membre du conseil d’administration de la FFDL. Il n’est donc pas contesté qu’il occupait une charge telle que définie au paragraphe 248(1) de la Loi.

[54]  Le témoignage de M. Hamel à l’effet qu’il payait les cartes de crédit de M. Gélinas est contredit par la preuve déposée par l’intimée. De plus, M. Hamel indique qu’il exigeait que M. Gélinas lui transfère annuellement trois fois le montant de la limite disponible. La carte de crédit Visa Or dispose d’une limite de crédit de 3 000 $. Ainsi, les montants transférés devraient totaliser 9 000 $ à un moment donné, ce qui n’est pas le cas, selon la preuve documentaire déposée par l’intimée. Qui plus est, M. Hamel ne dépose aucun document corroborant son témoignage à cet effet.

[55]  Lors de l’argumentation, M. Hamel fait valoir qu’il y avait eu plusieurs transferts monétaires entre lui et M. Gélinas et que ces montants ne constituaient pas un revenu. La difficulté avec cet argument est que M. Hamel n’explique pas en quoi consistent ces transferts d’argent qu’il a reçus de M. Gélinas. Ce n’est certainement pas pour que M. Hamel effectue les paiements relativement aux cartes de crédit de M. Gélinas, car la preuve démontre que M. Hamel n’a jamais payé les cartes de crédit de M. Gélinas. M. Hamel n’explique pas non plus pourquoi il a transféré à M. Gélinas des sommes de 25 795 $ en 2007 et de 2 000 $ en 2008.

[56]  M. Stéphane Beauregard, CPA à l’Agence du revenu du Canada, est l’officier responsable de la vérification des dossiers de la FFDL, dont celui de M. Gélinas et de certains des membres fondateurs de la FFDL. Il a obtenu des documents de l’Autorité des marchés financiers (« AMF ») qui enquêtait sur les agissements de la FFDL, de M. Gélinas, de M. Hamel, de M. Duguay et de M.  Nadeau. M. Beauregard a aussi fait des demandes péremptoires auprès d’institutions financières afin d’avoir accès aux relevés des comptes bancaires et aux relevés des cartes de crédit pertinents en l’espèce.

[57]  M. Beauregard explique que M. Gélinas avait une grande latitude envers l’argent des sponsors déposé en fidéicommis sous la responsabilité de Me Desmarais.

[58]  M. Beauregard témoigne qu’en vérifiant les dossiers de la FFDL et de M. Gélinas, il s’est rendu compte que des montants au compte en fidéicommis de la FFDL étaient transférés dans le compte personnel de M. Gélinas.

[59]  M. Beauregard s’aperçoit qu’à partir de son compte bancaire personnel, M. Gélinas payait M. Réjean Duguay et M. Denis Nadeau en guise des services qu’ils avaient rendus à la FFDL, ces derniers étaient impliqués dans le recrutement des sponsors. Il constate que de l’argent est aussi transféré à M. Hamel de façon périodique. C’est alors qu’il débute la vérification de M. Hamel. Selon les documents obtenus de l’AMF, M. Beauregard constate que M. Hamel jouait un rôle important et occupait une charge dans la FFDL.

[60]  Selon M. Beauregard, les argents transférés à M. Hamel par M. Gélinas constituaient une rémunération pour les services qu’il avait rendus à titre de secrétaire–trésorier et de directeur général ou à titre d’avantage reçu lié à la charge de secrétaire-trésorier de la FFDL. En soi, selon M. Beauregard, le modus operandi de M. Gélinas était de payer à même son compte personnel les personnes qui rendaient des services à la FFDL. D’ailleurs le jugement de la Cour du Québec dans l’affaire AMF c FFDL, Réjean Duguay, Paul Gélinas, Michel Hamel et Denis Nadeau [7] confirme que M. Hamel a reçu un total de 151 900 $ des comptes personnels de M. Gélinas. À cet effet, le juge Délisle écrit ce qui suit:

[87] La preuve présentée démontre que Michel Hamel, en sa qualité d’administrateur de FFDL, connaissait les activités de placement de la société et qu’il a autorisé ou permis la réalisation de ces activités.

[88] À titre de secrétaire-trésorier et directeur général de FFDL, Michel Hamel procède, en décembre 2006, à l’ouverture de quatre comptes de FFDL à la Banque Scotia située à Hawksbury, ville de sa résidence. Il se désigne comme l’un des signataires autorisés de ces comptes.

[89] En janvier 2007, il ouvre trois autres comptes de FFDL à la même banque. Il se désigne comme l’un des signataires autorisés pour donner des instructions, des confirmations et des approbations pourvu qu’elles soient effectuées au moyen d’une attestation signée à la fois par lui-même et l’autre signataire. Deux de ces comptes ont été utilisés pour recevoir les placements des sponsors provenant du compte en fidéicommis de MMF.

[90] À la fin de décembre 2007, Michel Hamel est signataire, avec Paul Gélinas, d’une entente de prêt de 420 000 $ entre FFDL et FFDL Turk & Caicos. En 2009, il demande à Charles Leclair, de la Banque Scotia, de transmettre au comptable Richard Dalcourt, vérificateur externe de FFDL, une copie de deux ordres de transfert à l’étranger totalisant la somme de 1,38 million de dollars.

[91] En mars 2008, il est signataire, à titre de représentant de FFDL, d’une Convention entre FFDL et Sylvain Auger dans laquelle ce dernier s’engage à investir 50 000 $.

[92] De plus, trois lettres provenant soit de Paul Gélinas ou de Jean-Pierre Desmarais et adressées à l’un d’eux ou aux investisseurs, discutent d’une mise à disposition effectuée, de l’ingénierie financière ou de son évolution. Le nom de Michel Hamel apparaît sur les lettres comme destinataire en copie conforme.

[93] Aussi, cinq sponsors ont reçu un certificat honorifique de FFDL signé par Michel Hamel. Ce certificat « certifie que son détenteur fait partie d’un groupe sélect de sponsors honoraires privés choisis par FFDL, lesquels, par leur mise à disposition, contribuent de façon simplement remarquable à l’accomplissement de la mission et à la réalisation des objectifs à caractère humanitaire de la Fondation ».

[94] Finalement, entre février 2007 et juin 2010, Michel Hamel a reçu un total de 151 900 $ des comptes personnels de Paul Gélinas.

[95] Par la position qu’il occupe dans FFDL et par les gestes qu’il a posés, Michel Hamel ne pouvait ignorer que FFDL procédait au placement de contrats d’investissement sans avoir obtenu un prospectus visé.

[. . .]

[61]  M. Hamel fait valoir que le vérificateur, M. Beauregard, s’est appuyé uniquement sur le jugement du juge Délisle de la Cour du Québec pour établir les nouvelles cotisations à son égard. Cette prétention est fausse. Lors de l’établissement de la cotisation à l’égard de M. Hamel le 27 octobre 2014, le juge Délisle n’avait pas rendu son jugement, ce dernier a été rendu le 15 mars 2016.

[62]  Deux versions s’imposent. La version de M. Hamel est que des montants sont transférés par M. Gélinas dans son compte bancaire pour lui permettre de payer les dépenses effectuées par M. Gélinas relativement aux cartes de crédit supplémentaires. La version de l’intimée est que les montants transférés par M. Gélinas ne peuvent être que de la rémunération ou un avantage reçu par M. Hamel pour les services qu’il a rendus à la FFDL à titre d’administrateur.

[63]  À la lumière de la preuve, la version de M. Hamel, soit que les montants auraient été transférés par M. Gélinas pour le paiement de ses cartes de crédit ne tient pas. De plus, M. Hamel n’est pas un témoin crédible. En contre‑interrogatoire, il ne souvient pas avoir vu les documents tout en reconnaissant qu’il avait signé lesdits documents. Tout au long de son témoignage, il tente de minimiser le rôle qu’il a joué dans la FFDL. M. Hamel n’a déposé que trois documents lors de l’audience, ces trois documents n’ont aucune force probante.

[64]  M. Hamel est un homme d’affaires d’expérience. Il n’aurait pas accepté les fonctions de secrétaire-trésorier, directeur général et prête-nom pour la filiale de la FFDL aux Îles Turquoises sans aucune rémunération. À titre d’administrateur de la FFDL, il occupait une charge au sens de l’article 248(1) de la Loi. La ministre a donc correctement inclus en vertu du paragraphe 5(1) de la Loi, les montants de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement. Je n’ai donc pas à examiner si l’alinéa 6(1)(a) et le paragraphe 9(1) de la Loi s’appliquent.

Est-ce que la ministre a correctement imposé des pénalités selon le paragraphe 163(2) de la Loi?

[65]  Le paragraphe 163(2) de la Loi stipule ce qui suit :

(2) Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse (appelé « déclaration » au présent article) rempli, produit ou présenté, selon le cas, pour une année d’imposition pour l’application de la présente loi, ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d’une pénalité égale, sans être inférieure à 100 $, à 50 % du total des montants suivants :

[. . .]

[66]  Le paragraphe 163(3) de la Loi stipule que c’est la ministre qui a la charge d’établir que les faits justifient l’imposition de la pénalité.

[67]  Par conséquent, l’intimée doit établir que :

-  M. Hamel a fait de fausses déclarations dans ses déclarations de revenus;

-  M. Hamel a sciemment fait ces fausses déclarations dans des circonstances équivalant à une faute lourde.

[68]  Dans la décision Wynter c Canada [8] , le juge Rennie explique que l’on considère qu’un contribuable a agi « sciemment », non seulement lorsqu’il a réellement l’intention de faire un faux énoncé, mais également lorsqu’il prend conscience de la nécessité de se renseigner, mais refuse de le faire parce qu’il ne veut pas connaître la vérité ou qu’il évite soigneusement de la connaître. Dans ces circonstances, le principe de l’ignorance volontaire impute une connaissance au contribuable : 

[13] Un contribuable fait preuve d’ignorance volontaire lorsqu’il prend conscience de la nécessité de se renseigner, mais refuse de le faire parce qu’il ne veut pas connaître la vérité ou qu’il évite soigneusement de la connaître. Il s’agit de la notion de l’ignorance délibérée : R. c. Briscoe, 2010 CSC 13 (CanLII), aux paragraphes 23 et 24, [2010] 1 R.C.S. 411 (Briscoe); Sansregret, au paragraphe 24. Dans ces circonstances, la doctrine de l’ignorance volontaire impute une connaissance au contribuable : Briscoe, au paragraphe 21. L’ignorance volontaire est la doctrine ou le mécanisme par lequel l’élément de connaissance requis aux termes du paragraphe 163(2) est établi.

[69]  Dans l’analyse du premier critère, soit la personne qui fait sciemment un faux énoncé, le test est subjectif. La Cour doit analyser les circonstances propres au contribuable.

[70]  L’intimée fait valoir que durant les années en litige, M. Hamel jouait un rôle important au sein de la FFDL, sa signature est apposée sur les documents de la FFDL. De plus, les montants versés par M. Gélinas à M. Hamel sont versés périodiquement; ce qui s’apparente à des revenus pour services rendus. M. Hamel a déclaré des revenus de 14 328 $ en 2007, de 13 120 $ en 2008 et de 11 392 $ en 2009. Ces revenus sont très faibles. De plus, les écarts sont importants; les revenus non déclarés sont plus élevés que les revenus déclarés. M. Hamel est un homme d’affaires, il a plus de 35 ans d’expérience dans le domaine des enquêtes. Il savait ou aurait dû savoir que les montants qu’il recevait pour la charge qu’il occupait dans la FFDL devaient être inclus dans son revenu.

[71]  Je suis d’avis que l’intimée a établi que M. Hamel avait la connaissance ou aurait dû savoir qu’il devait déclarer les montants reçus par l’entremise de M. Gélinas pour les services qu’il a rendus à la FFDL et que ces montants constituaient une rémunération. Il a donc sciemment omis d’inclure dans ses revenus les montants de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement, sachant que les montants transférés par M. Gélinas n’avaient pas pour but le paiement des cartes de crédit de M. Gélinas.

[72]  De plus, je suis aussi d’avis que M. Hamel a aussi fait des fausses déclarations dans des circonstances équivalant à une faute lourde. Tel qu’énoncé par le juge Rennie de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Wynter, le critère de la « faute lourde » se distingue de celui de « l’ignorance volontaire ». La faute lourde se manifeste lorsque la conduite d’un contribuable se situe considérablement en deçà de la conduite à laquelle on est en droit de s’attendre d’un contribuable raisonnable. Ainsi, les faits doivent être analysés de manière objective sans égard aux caractéristiques personnelles du contribuable.

[73]  La décision de principe sur ce qu’est la faute lourde au sens du paragraphe 163(2) de la Loi est la décision de la Cour d’appel fédérale Venne c. La Reine [9] . Le juge Strayer décrit la faute lourde dans les termes suivants :

La « faute lourde » doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré d’important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la Loi.

[74]  Je suis d’avis que M. Hamel a fait de faux énoncés dans ses déclarations de revenus équivalant à une faute lourde. La preuve démontre que la conduite de M. Hamel se situe considérablement en deçà de la conduite à laquelle on est en droit de s’attendre d’un contribuable raisonnable. M. Hamel a démontré une indifférence au respect de la Loi. Le témoignage de M. Hamel ne vise qu’à diminuer le rôle qu’il a joué auprès de la FFDL. De plus, son témoignage est contredit par la preuve documentaire déposée par l’intimée quant aux montants transférés par M. Gélinas dans son compte bancaire.

[75]  L’appel de M. Hamel relativement aux années d’imposition 2007, 2008 et 2009 est rejeté.

[76]  À la lumière des faits, la ministre a correctement établi des nouvelles cotisations après le délai normal de cotisation selon le sous-alinéa 152(4)(a)(i) de la Loi.

[77]  La ministre a correctement inclus dans les revenus de M. Hamel les montants de 21 705 $, de 74 000 $ et de 33 000 $ pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009 respectivement.

[78]  La ministre a correctement imposé des pénalités à M. Hamel selon le paragraphe 163(2) de la Loi pour les années d’imposition 2007, 2008 et 2009.  

[79]  L’appel et rejeté avec frais en faveur de l’intimée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 9e jour de juillet 2020.

« Johanne D’Auray »

  Juge D’Auray

 


RÉFÉRENCE :

2020 CCI 48

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2016-4459(IT)G

INTITULÉ DE LA CAUSE :

MICHEL HAMEL c SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 28 janvier 2020

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

L’honorable juge Johanne D’Auray

DATE DU JUGEMENT :

Le 9 juillet 2020

COMPARUTIONS :

Avocat de l’appelant :

Me Stéphane Harvey

Avocate de l’intimée :

Me Sara Jahanbakhsh

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

Pour l’appelant:

Nom :

Me Stéphane Harvey

Cabinet :

Harvey, Jean Avocats

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1]   Voir la pièce I-2.

[2]   Voir les pièces A-3 et A-4.

[3]   Voir la pièce A-1.

[4]   Il y a cependant un montant de 70,000 $ pour lequel le vérificateur ne pouvait établir qui avait fait le paiement.

[5]   Autorité des marchés financiers c Fondation Fer de Lance, 2016 QCCQ 1693.

[6]   Lacroix c Canada, 2008 CAF 241.

[7]   AMF c FFDL, supra, note 5.

[8]   Wynter c Canada, 2017 CAF 195.

[9]   Venne c La Reine, 2017 CAF 195.

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