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Dossier : 2018-3112(IT)I

ENTRE :

ALEXANDER MARINO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 19 février 2020, à Vancouver (Colombie-Britannique)

Devant : L’honorable juge K.A. Siobhan Monaghan


Comparutions :

Avocat de l’appelant :

Me Drew Gilmour

Me Darryl Way

Avocat de l’intimée :

Me Kieran Meehan

 

JUGEMENT

Conformément aux motifs du jugement ci-joints :

L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2012 de l’appelant est rejeté sans frais.

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juillet 2020.

« K.A. Siobhan Monaghan »

Juge Monaghan


Référence : 2020 CCI 50

Date : 20200710

Dossier : 2018-3112(IT)I

ENTRE :

ALEXANDER MARINO,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Juge Monaghan

I. EXPOSÉ DES FAITS

[1]  M. Marino vit à Calgary. Il a immigré au Canada depuis les États-Unis le 2 juillet 2012. M. Marino ne résidait pas au Canada pendant la période allant de 2002 jusqu’à son immigration au Canada en 2012. De 2002 à 2011, il a plutôt fréquenté l’université à temps plein aux États-Unis, en commençant par l’Université de Pittsburgh, puis l’Université Duquesne et enfin l’Université de Floride. M. Marino a payé les frais de scolarité de ces universités, soit un total d’un peu plus de 159 000 $ US sur la période de 2002 à 2011. Les parties conviennent que cela représente environ 179 000 $ [1] .

[2]  Les trois universités américaines ont fourni à M. Marino des copies signées des formulaires prescrits par la Loi de l’impôt sur le revenu [2] (la « Loi ») aux fins des crédits d’impôt pour frais de scolarité et d’études prévus aux articles 118.5 et 118.6 de la Loi. Les trois universités sont énumérées à l’annexe VIII du Règlement de l’impôt sur le revenu [3] , telle que cette annexe se lisait en 2012 [4] .

[3]  Après avoir immigré au Canada, M. Marino a produit des déclarations de revenus canadiennes pour les années 2002 à 2011 aux termes de la partie I de la Loi. M. Marino a produit les déclarations de 2009 à 2011 en 2013 et les déclarations de 2002 à 2008 au début de 2016. En d’autres termes, toutes les déclarations ont été produites après que M. Marino est devenu résident du Canada, mais en tenant compte du fait qu’il n’était ni résident du Canada ni résident réputé du Canada (soit une déclaration de revenus à titre de non-résident aux termes de l’article 115) au cours de ces années. Les déclarations de 2002 à 2011 ont fait l’objet de cotisations et de nouvelles cotisations pour le motif que M. Marino n’avait aucun impôt à payer aux termes de la Loi.

[4]  Quant à la déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2012, pour le calcul de ses crédits d’impôt non remboursables, M. Marino a demandé le report des crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés en tenant compte des frais de scolarité payés aux universités américaines de 2002 à 2011 alors qu’il n’était pas résident canadien et n’avait aucune source de revenus au Canada. Le ministre a établi une nouvelle cotisation à l’égard de M. Marino pour son année d’imposition 2012 afin de refuser les crédits d’impôt pour frais de scolarité demandés et de réduire à zéro le montant reporté [5] de ses crédits d’impôt pour frais de scolarité et pour études. Le 6 octobre 2016, le ministre a établi une nouvelle cotisation pour l’année d’imposition 2012 de M. Marino afin de réduire à zéro tout montant de frais de scolarité et d’éducation reporté précédemment [6] . M. Marino s’est opposé à cette nouvelle cotisation, mais celle-ci a été confirmée en 2018, puis il a déposé le présent appel.

[5]  Les parties conviennent que M. Marino n’était pas tenu de produire une déclaration d’impôt sur le revenu au Canada pour les années 2002 à 2011. Ils conviennent également qu’il n’avait aucun revenu imposable gagné au Canada et aucun impôt à payer aux termes de la Loi au cours de ces années.

II. SURVOL DES RÈGLES RELATIVES AU CRÉDIT D’IMPÔT POUR FRAIS DE SCOLARITÉ

[6]  Avant d’aborder la question au cœur du présent appel, il est peut-être utile de résumer les dispositions pertinentes. Sous réserve de certaines conditions, l’article 118.5 permet à un particulier de réduire son impôt à payer aux termes de la partie I de la Loi pour une année d’imposition donnée en déduisant une partie des frais de scolarité payés à un établissement postsecondaire pour l’année d’imposition en question. (Par souci de simplicité, je vais désigner cette déduction dans le calcul de l’impôt à payer comme le crédit d’impôt pour frais de scolarité.)

[7]  Lorsque le particulier n’est pas en mesure d’utiliser le crédit au cours de l’année d’imposition donnée, il peut, là encore sous réserve de certaines conditions, transférer le crédit à un conjoint de fait ou à un époux [7] ou à un parent ou grand-parent [8] (chacun étant une « personne désignée ») ou il peut reporter [9] les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés [10] qu’il utilisera au cours d’une année d’imposition ultérieure.

[8]  M. Marino s’appuie sur ces dispositions. Pour simplifier sa position, M. Marino a payé des frais de scolarité à des universités aux États-Unis pour les années 2002 à 2011, ces frais de scolarité lui ont donné droit à un crédit d’impôt pour frais de scolarité pour chacune des années 2002 à 2011, il n’a pas pu utiliser ce crédit dans le calcul de son impôt à payer aux termes de la partie I de la Loi pour ces années, il n’a pas transféré les crédits à une personne désignée au cours de ces années et, par conséquent, il dispose de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés en 2012.

III. QUESTIONS EN LITIGE

[9]  Les parties ont soumis un exposé conjoint des faits [11] . Aucun autre élément de preuve n’a été présenté en appel. Le présent appel porte uniquement sur une question de droit : M. Marino avait-il droit à un crédit d’impôt pour frais de scolarité pour chacune des années 2002 à 2011 en raison des frais de scolarité payés à des universités aux États-Unis au cours de ces années, de sorte qu’il a un solde de crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé à la fin de 2011 qu’il peut déduire dans le calcul de son impôt payable en 2012 une fois qu’il est devenu résident du Canada?

[10]  À l’audience, une deuxième question que l’on pourrait qualifier de procédurale a été soulevée. L’avocat de l’appelant a cherché à limiter les arguments que l’intimée pouvait avancer pour appuyer la nouvelle cotisation en raison de la manière dont la réponse a été rédigée. Les motifs de mon désaccord avec l’avocat de l’appelant sur cette deuxième question suivent mon analyse de la principale question en litige dans le cadre du présent appel : M. Marino a-t-il droit à un crédit d’impôt pour frais de scolarité pour chacune des années 2002 à 2011?

IV. QUESTIONS NON CONTESTÉES

[11]  En plus des faits convenus par les parties, les parties s’entendent sur plusieurs autres points pertinents pour le présent appel.

[12]  Les parties acceptent que l’année d’imposition 2012, soit l’année d’imposition au cours de laquelle M. Marino a cherché à appliquer les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés, est celle qui est pertinente aux fins du présent appel. En d’autres termes, bien que le ministre ait établi des cotisations et de nouvelles cotisations à l’égard des déclarations de revenus de M. Marino pour les années 2002 à 2011, et que ces cotisations et nouvelles cotisations aient porté sur des crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés, l’année au cours de laquelle les crédits ont été demandés pour réduire l’impôt à payer est la seule année qui fasse l’objet d’un appel en bonne et due forme [12] .

[13]  Les parties conviennent également que l’alinéa 118.5(1)b) est la seule partie de l’article 118.5 qui s’appliquerait à M. Marino [13] . Cette disposition prévoit que lorsqu’un particulier était un étudiant fréquentant à plein temps une université à l’étranger dans un programme menant à un diplôme à un moment quelconque au cours d’une année d’imposition, il peut déduire, dans le calcul de son impôt à payer pour cette année d’imposition, une partie des frais de scolarité payés à l’université au cours de l’année en question [14] . Les parties conviennent que M. Marino était un étudiant à plein temps dans une université à l’étranger, suivant un programme menant à un diplôme dans chacune des années 2002 à 2011.

[14]  Enfin, les parties conviennent que le paragraphe 118.5(1), qui traite des crédits d’impôt pour frais de scolarité pour une année d’imposition donnée, et l’article 118.61, qui décrit le calcul et l’utilisation des crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés, peuvent s’appliquer aux non-résidents.

V. THÈSES DES PARTIES

[15]  Le désaccord en l’espèce porte sur la question de savoir si le paragraphe 118.5(1) et l’article 118.61 s’appliquent à tous les non-résidents (position de l’appelant) ou seulement aux non-résidents qui sont des contribuables au cours des années d’imposition au titre desquelles des frais de scolarité sont payés – en d’autres termes, les non-résidents qui sont assujettis à la partie I de la Loi au cours de l’année pour laquelle les frais de scolarité sont payés (position de l’intimée).

[16]  L’intimée soutient que lorsqu’un particulier non résident n’est pas tenu de produire une déclaration d’impôt sur le revenu aux termes de la partie I de la Loi pour une année donnée, parce qu’il n’était pas employé au Canada, n’y exerçait pas d’activité et n’a pas disposé de biens canadiens imposables, ce particulier n’est pas un contribuable aux fins de la Loi, et l’année en question n’est pas une année d’imposition pour ce même particulier. De plus, une telle personne n’est ni tenue ni en mesure de calculer l’impôt à payer aux termes de la partie I. Par conséquent, l’intimée soutient que, même si la personne paie des frais de scolarité à un établissement d’enseignement admissible pour cette année, elle n’a aucun crédit d’impôt pour frais de scolarité pour cette année aux termes de l’article 118.5 et aucun crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé à reporter à la fin de cette année aux termes de l’article 118.61.

[17]  En d’autres termes, si l’on replace cela dans le contexte de M. Marino, étant donné que M. Marino n’a pas gagné de revenus au Canada au cours des années 2002 à 2011 [15] , aucune des années 2002 à 2011 n’est une année d’imposition pour M. Marino et le fait de produire une déclaration pour ces années ne suffit pas à faire de lui un contribuable. Par conséquent, M. Marino ne peut pas calculer l’impôt à payer en application de la partie I de la Loi pour aucune de ces années, et ne dispose d’aucune somme aux termes l’article 118.5 pour ces années. S’il n’a aucune somme aux termes de l’article 118.5 pour ces années, il n’a aucune somme à ajouter à son crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé pour ces années et n’a aucun solde de crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé à la fin de 2011. Pour étayer cette position, l’intimée s’appuie fortement sur la décision Oceanspan Carriers Limited v. Canada [16] .

[18]  M. Marino soutient que chacune des années 2002 à 2011 est une année d’imposition, que les dispositions relatives au crédit d’impôt pour frais de scolarité n’exigent pas qu’il soit un contribuable et que le texte, le contexte et l’objectif de la législation soutiennent sa position selon laquelle il disposait d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé pour chacune des années 2002 à 2011, et d’un solde de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de 2011. Il peut ainsi déduire ce solde du calcul de son impôt à payer en 2012 (et des années d’imposition futures) aux termes de l’article 118.61 de la Loi. Rien dans la Loi ne l’empêche d’accumuler des crédits et de les déduire en 2012.

[19]  M. Marino prétend qu’il n’avait pas besoin d’être un contribuable en 2002 à 2011 parce que l’article 118.5 fait référence à un particulier, et non à un contribuable. En outre, il fait valoir que, nonobstant la décision Oceanspan, les années 2002 à 2011 sont toutes des années d’imposition aux termes de l’article 250.1. L’avocat de M. Marino suggère que l’article 250.1 prévoit l’existence d’une année d’imposition pour les personnes non résidentes et donc, selon lui, chacune des années 2002 à 2011 est des années d’imposition pour M. Marino même s’il n’était pas alors un contribuable. Par conséquent, M. Marino satisfait aux exigences de l’article 118.5 pour chacune des années 2002 à 2011. M. Marino dispose de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de chacune des années 2002 à 2011, et ces crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés sont ajoutés dans le calcul de ses crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de chacune de ces années de sorte qu’il dispose de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de 2011. M. Marino peut utiliser une partie de ses crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés pour réduire son impôt à payer en 2012, lorsqu’il sera assujetti à l’impôt sur le revenu canadien.

[20]  M. Marino affirme qu’aucune disposition de la Loi ne l’empêche d’accumuler des crédits d’impôt pour frais de scolarité lorsqu’il est non-résident ou de déduire les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés en 2012. Il affirme que les articles 118.5 et 118.61, interprétés de manière textuelle, contextuelle et téléologique, soutiennent sa position.

VI. LES PRINCIPES D’INTERPRÉTATION LÉGISLATIVE

[21]  Les faits ne sont pas contestés en l’espèce. Le présent appel plutôt sur l’interprétation des dispositions législatives pertinentes, à savoir les paragraphes 118.5(1) et 118.61(1). Comme indiqué, les parties ne sont pas d’accord sur le sens à donner à ces dispositions.

[22]  Il ne fait aucun doute que les dispositions de la Loi doivent être interprétées selon le principe textuel, contextuel et téléologique décrit par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Hypothèques Trustco Canada c. Canada [17] comme suit :

Il est depuis longtemps établi en matière d’interprétation des lois qu’« il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur » : voir 65302 British Columbia Ltd. c. Canada, [1999] 3 R.C.S. 804, au paragraphe 50. L’interprétation d’une disposition législative doit être fondée sur une analyse textuelle, contextuelle et téléologique destinée à dégager un sens qui s’harmonise avec la Loi dans son ensemble. Lorsque le libellé d’une disposition est précis et non équivoque, le sens ordinaire des mots joue un rôle primordial dans le processus d’interprétation. Par contre, lorsque les mots utilisés peuvent avoir plus d’un sens raisonnable, leur sens ordinaire joue un rôle moins important. L’incidence relative du sens ordinaire, du contexte et de l’objet sur le processus d’interprétation peut varier, mais les tribunaux doivent, dans tous les cas, chercher à interpréter les dispositions d’une loi comme formant un tout harmonieux [18] .

[Non souligné dans l’original.]

[23]  Ainsi, le libellé d’une disposition législative doit être interprété en fonction de son contexte et de son objet législatif [19] . Lorsque les mots utilisés peuvent avoir plus d’une signification, le sens ordinaire des mots, bien que pertinent, jouera un rôle moindre dans le processus d’interprétation que le contexte et l’objet des dispositions législatives. Le contexte comprend non seulement du vocabulaire environnant (c.-à-d. le libellé de la disposition précise), mais aussi le contexte plus large des dispositions connexes et de la Loi dans son ensemble.

VII. LIBELLÉ DE LA DISPOSITION À INTERPRÉTER

[24]  Le paragraphe 118.5(1) est rédigé en partie ainsi :

Sous réserve du paragraphe (1.2), les montants suivants sont déductibles dans le calcul de l’impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie pour une année d’imposition :

Le paragraphe 118.61(1) est rédigé en partie ainsi :

Pour l’application du présent article, la partie inutilisée des crédits d’impôt pour études, pour frais de scolarité et pour manuels d’un particulier à la fin d’une année d’imposition correspond à la somme obtenue par la formule suivante :

A + (B - C) - (D + E)

A  représente la somme déterminée selon le présent paragraphe relativement au particulier à la fin de l’année d’imposition précédente;

B.  le total des sommes dont chacune est déductible en application des articles 118.5 ou 118.6 dans le calcul de l’impôt à payer par le particulier en vertu de la présente partie pour l’année; [...]

[25]  Les deux termes utilisés dans ces dispositions sur lesquels les parties se sont concentrées étaient « année d’imposition » et « particulier ».

(a) Année d’imposition : M. Marino peut-il avoir une année d’imposition dans une période où il est un non-résident qui n’est pas soumis à la partie I?

[26]  Le paragraphe 118.5(1) vise le particulier qui est inscrit dans un établissement d’enseignement au cours d’une année d’imposition et qui a payé des frais de scolarité pour cette année d’imposition [20] . Comme l’« année d’imposition » est définie dans la Loi [21] , il faut utiliser le sens législatif. De 2002 à 2012, la définition était rédigée comme suit en ce qui a trait à un particulier :

Dans la présente loi, sauf disposition contraire expresse, l’année d’imposition correspond :

[...] b) dans le cas d’un particulier, à l’exception d’une fiducie testamentaire, à l’année civile;

[27]  Le contribuable est défini comme étant toute personne, qu’elle soit ou non assujettie à l’impôt [22] .

[28]  Si l’on fait une lecture littérale de cette disposition, on pourrait donc dire que M. Marino est un contribuable et que chacune des années 2002 à 2011 est une année civile et donc une année d’imposition pour lui.

[29]  Cependant, dans la décision Oceanspan, la Cour a conclu qu’un non-résident n’ayant aucune source de revenus au Canada n’était pas un « contribuable » et n’avait donc pas d’année d’imposition. L’intimée s’appuie sur la décision Oceanspan lorsqu’elle affirme que M. Marino n’a pas d’année d’imposition, et n’est donc pas visé par le paragraphe 118.5(1).

[30]  La décision Oceanspan présente une certaine similitude avec le présent appel. La société appelante avait cherché à déduire des pertes autres qu’en capital subies avant qu’elle ne devienne résidente du Canada et pendant une période où elle n’exerçait aucune activité au Canada. La société appelante avait fait valoir que les pertes autres qu’en capital subies avant qu’elle devienne résidente au Canada étaient déductibles du revenu qu’elle a gagné après qu’elle est devenue résidente, car bien que non imposable au Canada avant qu’elle ne devienne résidente, elle était néanmoins, au cours de ces années, une contribuable au sens de la Loi et avait une année d’imposition. Le contribuable était alors défini dans la Loi, comme il l’est aujourd’hui, comme toute personne assujettie ou non à l’impôt [23] . Dans le cas d’une société, l’année d’imposition était alors définie dans la Loi, comme elle l’est aujourd’hui : une année d’imposition dans le cas d’une société est un exercice fiscal. La société appelante avait fait valoir qu’elle avait une année d’imposition, car elle avait eu un exercice fiscal, et qu’elle était un contribuable bien qu’elle ne soit pas tenue de payer l’impôt au Canada.

[31]  La Cour fédérale (section d’appel) n’était pas d’accord, et a conclu que la société appelante n’était pas une contribuable et ne pouvait donc pas avoir d’année d’imposition. Comme elle n’avait aucun revenu de source canadienne au cours de ces années, elle n’était pas tenue de calculer son revenu imposable et n’était pas « assujettie à l’impôt au Canada » [24] . Le juge Urie a ajouté ceci :

[TRADUCTION]

[...] La définition du « contribuable », correctement comprise dans son contexte dans l’ensemble du régime de la Loi, montre, à mon avis, de manière incontestable, qu’elle fasse référence aux personnes physiques ou morales résidentes qui peuvent être tenues de payer l’impôt à un moment donné, qu’elles y soient assujetties ou non à un moment donné.  Un non-résident sans revenu de source canadienne ne peut jamais être assujetti à l’impôt aux termes de la Loi sur ses revenus étrangers.  Il ne s’agit donc pas d’une société visée par la définition de « contribuable » dans la Loi. De même, en tant que société non résidente, les pertes qu’elle a pu subir du fait de ses activités commerciales à l’étranger ne sont pas pertinentes au regard de la Loi. [...] Je conclus de plus ce qui suit d’autres éléments qui viennent étayer ce point de vue.

 Jusqu’à ce qu’elle devienne un « contribuable », une société non résidente n’a pas « [p]our l’application de la présente Loi », une « année d’imposition » au sens de l’alinéa 249(1)a) de la Loi, précitée. La Loi s’applique à elle lorsqu’elle devient résidente, car elle devient assujettie à l’impôt. C’est alors qu’elle devient un « contribuable » par définition. Avant cela, ce terme ne s’appliquait pas. Par conséquent, jusqu’alors, la définition de l’« année d’imposition » ne lui était pas applicable.

[...] un non-résident n’exerçant pas d’activité au Canada ne peut pas avoir d’année d’imposition aux fins de l’impôt canadien. Je ne comprends pas comment on pourrait en donner une rétroactivement. La thèse de l’appelante ne peut donc pas résister à l’analyse [25] .

[Non souligné dans l’original.]

[32]  En termes simples, l’avocat de l’intimée fait valoir qu’aucune des années 2002 à 2011, les seules années dans lesquelles M. Marino a payé des frais de scolarité, n’était une année d’imposition pour M. Marino. Comme un particulier peut seulement avoir droit à une somme décrite à l’alinéa 118.5(1)b) s’il a payé des frais de scolarité pour une année d’imposition, M. Marino n’a aucun crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé à reporter de 2002 à 2011.

[33]  En revanche, l’avocat de M. Marino soutient que l’article 250.1 a élargi la définition de l’année d’imposition et qu’un non-résident est réputé avoir une année d’imposition. Ainsi, il soutient que l’article 250.1 l’emporte sur la décision Oceanspan dans la mesure cette affaire correspond à la proposition voulant qu’une année au cours de laquelle un non-résident n’est ni assujetti ni potentiellement assujetti à l’impôt au Canada n’est pas une année d’imposition. Par conséquent, chacune des années 2002 à 2011 est une année d’imposition pour M. Marino, même s’il n’était pas résident du Canada et n’avait aucun revenu gagné ou imposable au Canada au cours de ces années.

[34]  L’article 250.1, ajouté à la Loi et entré en vigueur le 17 décembre 1999, prévoit ce qui suit :

Il est entendu, sauf indication contraire du contexte :

  • a) que l’année d’imposition d’une personne non résidente est déterminée, sauf permission contraire du ministre, de la même manière que l’année d’imposition d’une personne résidant au Canada;

  • b) que les personnes non résidentes comptent parmi les personnes dont le revenu pour une année d’imposition est déterminé conformément à la présente loi.

[Non souligné dans l’original.]

[35]  Je ne suis pas d’accord que l’article 250.1 fait en sorte que chaque personne non résidente est réputée avoir une année d’imposition. Premièrement, la disposition ne crée pas une présomption d’existence d’une année d’imposition. Lorsque le Parlement souhaite créer une présomption dans la Loi, il utilise un libellé en conséquence [26] , y compris dans le contexte de la signification d’une « année d’imposition ». Par exemple, la Loi créé une présomption selon laquelle l’année d’imposition d’une société se termine lorsqu’elle devient ou cesse d’être une société privée sous contrôle canadien [27] , ou lorsqu’elle devient ou cesse d’être résidente au Canada [28] . L’année d’imposition d’une société est réputée se termine le dernier jour d’une année civile aux termes de la Loi si la société n’aurait pas autrement une année d’imposition dans une année civile parce que son exercice fiscal comprend plus de 365 jours [29] . Une personne physique est réputée avoir une année d’imposition qui se termine immédiatement avant le jour où elle a fait faillite [30] .

[36]  Deuxièmement, l’article 250.1 ne dit pas ce que M. Marino suggère qu’il signifie, c’est-à-dire qu’il ne dit pas que [traduction] « toute personne non résidente a une année d’imposition qui doit être déterminée », soit une formulation qui pourrait suggérer une application universelle aux non-résidents. Il y est dit que « l’année d’imposition d’une personne non résidente est déterminée ».

[37]  Quel est donc le sens et la raison d’être de ce libellé? À mon avis, le libellé utilisé traduit les limites de l’application de la disposition. Lorsqu’une année d’imposition d’un non-résident doit être déterminée pour une raison quelconque prévue par la Loi, mais que ce non-résident n’aurait pas d’année d’imposition aux termes du principe établi dans la décision Oceanspan, l’alinéa 250.1a) nous indique comment déterminer l’année d’imposition à cette fin.

[38]  Si le non-résident est assujetti à l’impôt canadien au cours de l’année, les règles de la Loi traitant des années d’imposition s’appliquent et l’article 250.1 n’a aucune fonction. En d’autres termes, l’alinéa 250.1a) ne s’applique qu’aux non-résidents pour lesquels une année d’imposition doit être déterminée à une fin prescrite par la Loi (y compris à la fin indiquée à l’alinéa 250.1b)), mais qui ne sont pas des contribuables et n’auraient donc pas d’année d’imposition aux termes de la Loi. Elle s’applique lorsqu’un non-résident doit avoir une année d’imposition pour qu’une disposition de la Loi fonctionne comme prévu, y compris à l’égard d’un autre contribuable. Elle ne vise pas à donner à chaque non-résident un exercice fiscal, permettant ainsi à chaque non-résident de se placer dans le champ d’application de la Loi.

[39]  Le paragraphe 104(13) est un bon exemple de l’application de l’article 250.1 [31] . Il prévoit que le calcul du revenu d’une année d’imposition d’un bénéficiaire d’une fiducie doit comprendre la partie du revenu de la fiducie pour l’année d’imposition de celle-ci qui se termine au cours de l’année d’imposition du bénéficiaire. Cette disposition peut s’appliquer au bénéficiaire résident d’une fiducie non résidente. En application de la Loi, le revenu est calculé pour une année d’imposition. Toutefois, n’eut été l’article 250.1, l’année d’imposition d’une fiducie non résidente qui n’est pas un contribuable (parce qu’elle n’exerce pas d’activité au Canada et ne dispose pas de biens canadiens imposables) ne serait pas claire. Or, la détermination d’une année d’imposition pour la fiducie non résidente est nécessaire pour calculer ses revenus, une étape obligatoire dans la détermination de la somme à ajouter au revenu du bénéficiaire résident.

[40]  Toutefois, je ne suis pas d’accord que l’article 250.1 donne à chaque non-résident une année d’imposition simplement pour que n’importe quelle disposition de la Loi puisse s’appliquer à celui-ci. Ainsi, alors qu’un non-résident doit avoir une année d’imposition pour être assujetti à l’article 118.5, rien dans l’article 118.5 n’exige qu’il s’applique à un non-résident qui n’a pas d’autre année d’imposition. L’article 250.1 ne comble pas, à mon avis, cette lacune de sorte à faire entrer chaque non-résident dans le champ d’application de l’article 118.5.

[41]  En conclusion, étant donné que l’article 118.5 exige qu’une personne soit un étudiant au cours d’une année d’imposition et que les frais de scolarité aient été payés pour cette année d’imposition, un étudiant n’a pas droit à un crédit d’impôt pour frais de scolarité pour toute année qui n’est pas une année d’imposition. Je suis d’accord avec l’avocat de l’intimée que puisque M. Marino n’était pas un contribuable selon l’interprétation de la décision Oceanspan de ce terme pour aucune des années 2002 à 2011, aucune de ces années n’était une année d’imposition pour lui. Par conséquent, l’article 118.5 ne s’applique pas à lui pendant les années 2002 à 2011. Étant donné que M. Marino n’a bénéficié d’aucun crédit d’impôt pour frais de scolarité entre 2002 et 2011, il n’avait aucun crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé à la fin de 2011 pouvant être déduit dans le calcul de son impôt à payer en 2012. Il s’agit d’une conclusion suffisante pour régler le présent appel.

(b) Particulier : M. Marino est-il un particulier au sens du paragraphe 118.5(1)?

[42]  Toutefois, même si ma conclusion concernant la portée et l’effet de l’article 250.1 est incorrecte, et que chacune des années 2002 à 2011 est une année d’imposition de M. Marino, je rejetterais néanmoins l’appel. Selon l’application des principes d’interprétation des lois, l’article 118.5 ne s’applique pas aux particuliers non résidents, mais se limite aux particuliers (résidents ou) non résidents qui sont potentiellement assujettis à l’impôt canadien au cours de l’année d’imposition (c.-à-d. qui sont des contribuables au sens de la définition établie dans la décision Oceanspan cours de l’année en question). Permettez-moi d’expliquer les motifs de cette conclusion.

[43]  Supposons, aux fins de cette analyse, qu’aux termes de l’article 250.1, chacune des années 2002 à 2011 est une année d’imposition de M. Marino. M. Marino fait ensuite valoir que, puisque le préambule du paragraphe 118.5(1) utilise le terme « particulier » plutôt que « contribuable », cette disposition s’applique à lui pour chacune des années 2002 à 2011, de sorte qu’il bénéficie d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité pour chacune des années 2002 à 2011. De plus, M. Marino soutient que l’article 118.61 fait référence aux crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’un particulier, de sorte que M. Marino, en tant que particulier, dispose de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de 2011, soit le total des crédits accumulés de 2002 à 2011.

[44]  À mon avis, la référence à un « particulier » plutôt qu’à un « contribuable » dans les articles 118.5 et 118.61 ne signifie pas que le crédit d’impôt pour frais de scolarité est disponible pour tout particulier qui satisfait par ailleurs aux conditions requises (p. ex., type d’établissement d’enseignement supérieur et nature du programme).

[45]  Lorsque l’application d’une disposition est limitée à un type donné de contribuable qui est facilement identifié par un autre terme (particulier, fiducie ou société), le choix d’utiliser cet autre terme peut ne représenter rien de plus que ce que l’on pourrait appeler une rédaction raisonnée; l’application limitée de la disposition ressort clairement de l’utilisation d’un terme plus précis. La Loi est remplie de dispositions qui n’utilisent pas le terme de contribuable, mais qui s’appliquent clairement et uniquement aux contribuables. Cela est dû en partie à la structure ou à l’architecture de la Loi.

[46]  Dans le cas de l’article 118.5, il se trouve dans la subdivision a de la section E de la partie I. Le titre de la section E est « Calcul de l’impôt » et le titre de la sous-section A est « Règles applicables aux particuliers [32]  ». Il n’est pas surprenant que les dispositions de cette sous-section utilisent le terme « particulier » plutôt que « contribuable ». De même, les dispositions de la sous-section B, intitulée « Règles applicables aux sociétés », utilisent le terme « société » plutôt que « contribuable ». En revanche, dans la sous-section C, intitulée « Règles applicables à tous les contribuables », le terme « contribuable » tend à être utilisé. Le contexte dans lequel le mot est utilisé est important.

[47]  En outre, le sens à donner au mot « particulier » tel qu’il est utilisé au paragraphe 118.5(1) doit être déterminé en tenant compte de l’objectif pour lequel il est utilisé et du libellé qui l’entoure. La première question à se poser est de savoir si le mot « particulier » dans ces dispositions est ambigu. Doit-il s’agir de n’importe quel particulier ou seulement d’un sous-ensemble de particuliers? En examinant cette question, ma première observation est que le terme « particulier » n’est pas utilisé comme objet de l’article 118.5. Le paragraphe 118.5(1) ne prévoit pas, par exemple, [traduction] « un particulier bénéficie d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité » ou même [traduction] « le crédit d’impôt pour frais de scolarité d’un particulier à la fin d’une année d’imposition est » [33] . Le terme « particulier » est plutôt utilisé pour modifier la raison d’être d’application du paragraphe 118.5(1).

[48]  Le paragraphe 118.5(1) s’applique qu’à une seule fin : le calcul des « montants [...] déductibles [...] de l’impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie pour une année d’imposition ». Cette expression de l’objectif est essentielle; à mon avis, elle éclaire le sens à donner au terme « particulier » dans le paragraphe 118.5(1). Quels sont les particuliers visés le paragraphe 118.5(1)? Il ne s’agit pas de tous les particuliers, mais seulement de ceux qui sont assujettis à la partie I de la Loi au cours de l’année d’imposition et qui sont donc en mesure de calculer l’impôt à payer aux termes de la partie I pour l’année d’imposition [34] .

[49]  La section A de la partie I de la Loi établit les particuliers sont tenus de calculer leur impôt à payer; elle décrit toute la gamme des personnes qui sont potentiellement assujetties à l’impôt aux termes de la partie I.

[50]  Le paragraphe 2(1) prévoit que l’impôt sur le revenu doit être versé sur le revenu imposable pour chaque année d’imposition de toute personne résidant au Canada à un moment quelconque de l’année. Ainsi, tout particulier résidant au Canada à un moment quelconque de l’année est potentiellement assujetti à l’impôt sur le revenu et doit donc calculer son impôt à payer aux termes de la partie I. [35] Il s’agit d’un particulier auquel la Loi s’applique chaque année.

[51]  Le paragraphe 2(3) prévoit que lorsqu’une personne non imposable aux termes du paragraphe 2(1) pour une année d’imposition, a été employée au Canada, a exploité une entreprise au Canada ou a disposé de biens canadiens imposables à un moment quelconque de l’année ou au cours d’une année antérieure, un impôt sur le revenu doit être versé sur le revenu imposable de la personne gagné au Canada pour l’année, déterminé conformément à la section D. Bien que le paragraphe 2(3) ne précise pas expressément qu’il s’applique aux non-résidents, il est clair qu’il ne s’applique uniquement aux non-résidents, car le paragraphe 2(1) s’applique à toute personne résidant au Canada. Toutefois, contrairement au paragraphe 2(1), qui s’applique à tout résident, le paragraphe 2(3) ne s’applique qu’à un sous-ensemble de non-résidents : ceux qui ont été employés au Canada, qui ont exploité une entreprise au Canada ou qui ont disposé de biens canadiens imposables au cours de l’année ou d’une année antérieure. Seuls ces non-résidents sont potentiellement assujettis à l’impôt aux termes de la partie I et seuls ces non-résidents peuvent calculer leur impôt à payer aux termes de la partie I [36] . Seuls ces non-résidents sont des personnes auxquelles la partie I de la Loi s’applique au cours de l’année visée.

[52]  Cette analyse a été appliquée dans la décision Oceanspan :

[traduction]

[...] il est nécessaire de revenir aux principes de base tels qu’ils sont révélés par le régime des sections A à D inclus de la Loi, dont le plus fondamental est que tant les résidents que les non-résidents sont tenus de payer l’impôt sur les revenus gagnés à partir d’une source située au Canada. Un non-résident qui n’a aucun revenu de quelque source que ce soit au Canada n’est pas tenu de payer l’impôt au Canada. Tant les résidents que les non-résidents qui tirent des revenus de source canadienne sont inclus, par définition, dans le terme « contribuable », qu’ils soient ou non assujettis à l’impôt. Leurs revenus sont calculés conformément à la section B. Pour déterminer leur « revenu imposable » aux termes du paragraphe 2(2), ils ont droit aux déductions et aux exemptions visées à la section C. Ce n’est qu’à l’issue de cet exercice qu’il est déterminé s’ils sont ou non « assujettis à l’impôt ». Il s’ensuit qu’une société non résidente qui n’a pas de revenu provenant de sources canadiennes n’est pas tenue de calculer son revenu imposable. [...] et n’a donc pas besoin d’utiliser les déductions autorisées par la division C. [...] Une telle société n’est pas « assujettie à l’impôt » [37] .

[53]  En d’autres termes, une personne ne sera pas un particulier aux fins de l’article 118.5 au cours d’une année donnée, à moins que ce particulier soit un contribuable au cours de cette année aux termes du paragraphe 2(1) ou 2(3) et qu’il est potentiellement assujetti à l’impôt au Canada aux termes de la partie I. En termes simples, le terme « particulier » dans l’article 118.5 signifie un particulier qui est un contribuable parce que seul un contribuable calcule l’impôt payable aux termes de la partie I.

[54]  Ce point de vue est renforcé par le paragraphe 117(2), qui se trouve également dans la sous-section A de la section E. Il est rédigé comme suit :

L’impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie sur, selon le cas, son revenu imposable ou son revenu imposable gagné au Canada (appelé « montant imposable » à la présente sous-section) pour une année d’imposition correspond à ce qui suit : [...]

[55]  Ce libellé identifie les personnes qui peuvent avoir un « impôt payable [...] en vertu de la [partie I] ». Il s’agit des mêmes particuliers identifiés aux paragraphes 2(1) et 2(3) : tout particulier résidant au Canada au cours d’une année d’imposition calcule l’impôt à payer sur son revenu imposable pour l’année en question, mais seuls les particuliers non résidents qui étaient employés au Canada, ont exercé une activité commerciale au Canada ou ont cédé des biens canadiens imposables au cours d’une année calculent l’impôt à payer sur leur revenu imposable gagné au Canada pour l’année. En d’autres termes, à moins qu’un particulier non résident soit décrit au paragraphe 2(3), aucune des dispositions de la partie I ne s’applique à lui. Cette personne n’a rien à calculer en application du paragraphe 117(2).

[56]  Pour les motifs susmentionnés, les seuls particuliers qui peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité au cours d’une année donnée sont ceux qui sont assujettis à la partie I au cours de l’année – c’est-à-dire les particuliers qui résident au Canada ou qui sont obligés de déterminer leur revenu imposable gagné au Canada aux termes de la section D parce que le paragraphe 2(3) les y oblige. Seuls ces particuliers calculent leur impôt à payer en application de la partie I aux termes du paragraphe 117(2), et donc seules ces personnes peuvent avoir le droit de déduire une somme aux termes du paragraphe 118.5(1) [38] .

[57]  Ainsi, indépendamment du fait que l’article 250.1 ait pour effet de traiter les années 2002 à 2011 comme des années d’imposition pour M. Marino, à mon avis, le paragraphe 118.5(1) ne lui est néanmoins pas applicable pour aucune de ces années. Un particulier non résident est un particulier auquel le paragraphe 118.5(1) peut s’appliquer au cours d’une année d’imposition uniquement si ce particulier est celui qui est décrit au paragraphe 2(3) (c.-à-d., est un contribuable) au cours de cette année. M. Marino n’a pas été un tel particulier pendant les années 2002 à 2011.

(c) « Année d’imposition » et « particulier » dans le contexte du paragraphe 118.61(1)

[58]  Lorsqu’un crédit d’impôt pour frais de scolarité n’est pas déductible dans l’année où il est accordé, il peut être reporté et déduit dans une année d’imposition ultérieure. Le paragraphe 118.61(1) décrit les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’un particulier à la fin d’une année d’imposition. M. Marino affirme que cette disposition lui accorde des crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de 2011 qu’il peut reporter et déduire dans le calcul de son impôt à verser pour l’année d’imposition 2012 lorsqu’il était résident du Canada.

[59]  Dans le préambule du paragraphe 118.61(1), le mot « particulier » modifie l’expression « la partie inutilisée des crédits d’impôt pour études, pour frais de scolarité et pour manuels [...] à la fin d’une année d’imposition ». À première vue, cela peut laisser penser que toute personne ayant une année d’imposition peut avoir un solde de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de cette année. Mais, si on tient compte du contexte, il est évident que ce n’est pas le cas.

[60]  Les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’un particulier sont uniquement calculés à la fin d’une année d’imposition et selon la formule : A + (B-C) - (D + E). En termes simples, les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’un particulier à la fin d’une année d’imposition donnée sont les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à la fin de l’année d’imposition précédente, augmentés du crédit d’impôt pour frais de scolarité du particulier pour l’année d’imposition donnée et diminués du total des crédits d’impôt pour frais de scolarité déduits par le particulier au cours de l’année d’imposition donnée ou transférés au cours de cette année par le particulier à une personne désignée.

[61]  La formule de calcul des crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’un particulier prévoit que la somme maximale qui peut être ajoutée pour augmenter les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’un particulier à la fin d’une année d’imposition donnée est de :

B  le total des sommes dont chacune est déductible en application des articles 118.5 ou 118.6 dans le calcul de l’impôt à payer par le particulier en application de la présente partie [partie I] pour l’année.

[62]  L’année mentionnée au point B est l’année d’imposition en question. M. Marino soutient qu’il peut ajouter une somme conformément à l’élément B pour chacune des années 2002 à 2011 parce qu’il s’agit d’années d’imposition et que l’article 118.5 s’est appliqué à lui pour chacune de ces années.

[63]  J’ai déjà conclu qu’aucune des années 2002 à 2011 n’était une année d’imposition pour M. Marino. Cependant, même si c’était le cas, pour les motifs susmentionnés, l’article 118.5 ne s’appliquait pas à M. Marino pendant les années 2002 à 2011. La somme ajoutée au crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé d’un particulier au cours d’une année d’imposition donnée dépend entièrement d’une somme calculée aux termes de l’article 118.5 pour l’année du particulier. Or, M. Marino n’avait pas ces sommes pour ces années et donc aucune somme représentant l’élément B dans la formule pour ces années.

VIII. CONTEXTE : AUTRES DISPOSITIONS CONNEXES DE LA LOI

[64]  J’ai également examiné les dispositions connexes pour déterminer l’interprétation correcte à donner aux articles 118.5 et 118.61 quant à leur application à M. Marino, et pour déterminer si mon interprétation est conforme aux principes de l’interprétation législative. Plusieurs de ces dispositions ne s’appliquent pas à M. Marino, elles sont toutefois pertinentes pour l’analyse textuelle, contextuelle et téléologique des dispositions relatives au crédit d’impôt pour frais de scolarité que M. Marino cherche à invoquer. Pour les motifs suivants, je suis d’avis que ces dispositions soutiennent ma conclusion.

(a) Article 118.94

[65]  L’article 118.94 interdit aux particuliers non résidents de demander certains crédits d’impôt prévus par la Loi, sauf si la totalité ou la quasi-totalité de leur revenu pour l’année est incluse dans le calcul de leur revenu imposable gagné au Canada. L’avocat de M. Marino fait remarquer que l’article 118.94 ne fait pas référence aux articles 118.5 ou 118.61 et ne limite donc pas la capacité de M. Marino à réclamer les crédits.

[66]  Plus précisément, il soutient que les limitations du crédit pour les frais de scolarité payés à des institutions étrangères ainsi que l’exclusion de l’article 118.5 de l’article 118.94 indiquent que le Parlement a choisi de permettre aux non-résidents, dans la situation de M. Marino, d’accumuler des crédits et de les reporter jusqu’à ce qu’ils aient des revenus de source canadienne. Si j’ai bien compris cet argument, ni l’alinéa 118.5(1)a) ni l’alinéa 118.5(1)c) ne pourraient s’appliquer à un non-résident [39] , de sorte que l’élargissement de la disposition la plus restrictive en matière de crédit d’impôt pour frais de scolarité (c.-à-d. l’alinéa 118.5(1)b)) aux non-résidents est conforme à ce que l’avocat décrit comme étant le choix du Parlement de permettre aux non-résidents qui n’ont aucun lien avec le Canada au cours de l’année de scolarité de gagner et de reporter les crédits d’impôt pour frais de scolarité jusqu’à ce qu’ils deviennent résidents du Canada et qu’ils aient des revenus gagnés au Canada.

[67]  Je reconnais que l’alinéa 118.5(1)b) est la plus restrictive des dispositions relatives au crédit d’impôt pour frais de scolarité : elle est uniquement applicable lorsque l’établissement étranger est une université; lorsque le cours mène à un diplôme; lorsque la fréquentation est à temps plein et, dans les années pertinentes au présent appel, lorsque le cours a duré au moins 13 semaines consécutives. Toutefois, en toute déférence, je ne vois rien dans le libellé qui soutienne la position de l’appelant. L’alinéa 118.5(1)b) s’applique aux résidents, les restrictions ne sont donc pas limitées aux non-résidents. Deuxièmement, l’alinéa 118(1)a) n’est pas réservé aux seuls résidents du Canada. En d’autres termes, rien n’empêche un particulier non résident qui fréquente un établissement d’enseignement au Canada au cours de cette année de demander le crédit d’impôt pour frais de scolarité prévu à l’alinéa 118.5(1)a) s’il remplit les conditions requises pour ce crédit et s’il est un particulier visé au paragraphe 2(3) au cours de l’année en question [40] .

[68]  Il convient de souligner que lorsque l’article 118.94 a été promulgué, il s’appliquait au crédit d’impôt pour frais de scolarité, mais cela a changé à partir de la date d’entrée en vigueur de l’article 118.94. Il s’agit d’un élément d’histoire qui mérite d’être revu.

[69]  Avant la réforme fiscale intervenue en 1987-1988, les frais de scolarité payés à un établissement d’enseignement supérieur étaient déductibles dans le calcul du revenu. Les dispositions pertinentes se trouvaient à l’article 60 de la Loi, dans la sous-section E de la section B de la partie I. L’alinéa 60(1)e) de la Loi antérieure à 1988 concernait les frais de scolarité payés aux universités situées à l’étranger, ce qui correspond à l’alinéa 118.5(1)b). L’alinéa 60(1)f) de la Loi antérieure à 1988 concernait les frais de scolarité payés aux établissements d’enseignement postsecondaire canadiens, ce qui correspond à l’alinéa 118.5(1)a). L’alinéa 60(1)g) concernait les personnes réputées résider au Canada, correspondant ainsi à l’alinéa 118.5(1)c).

[70]  Les non-résidents qui sont (potentiellement sinon véritablement) assujettis à l’impôt aux termes de la partie I de la Loi doivent calculer leur revenu imposable gagné au Canada. Le paragraphe 115(1) explique comment un non-résident effectue ce calcul. En termes simplifiés, l’alinéa 115(1)a) prévoit qu’un particulier non résident calcule ses revenus au titre de l’article 3 – et donc de la même façon qu’un résident – mais comme si le particulier non résident n’avait pas d’autres revenus que ceux provenant d’un emploi au Canada, d’une entreprise qu’il exploite au Canada et des gains en capital imposables provenant de la disposition de biens canadiens imposables. Par conséquent, tant que les frais de scolarité constituaient une déduction dans le calcul du revenu, un particulier non résident qui était tenu de calculer son revenu imposable gagné au Canada avait le droit de déduire les frais de scolarité dans le calcul de son revenu imposable gagné au Canada, de la même manière qu’un particulier résident était autorisé à déduire les frais de scolarité dans le calcul de son revenu, pour autant que les conditions pertinentes relatives à cette déduction soient satisfaites (p. ex., nature de l’établissement et programme d’études).

[71]  En outre, en application des alinéas 115(1)d), e) et f) tels qu’ils existaient avant la réforme fiscale de 1987-88, un non-résident ayant un revenu imposable gagné au Canada avait droit à certaines déductions dans le calcul de son revenu imposable [41] . Certaines de ces déductions étaient seulement possibles lorsque la totalité ou la quasi-totalité du revenu du non-résident pour l’année était incluse dans son revenu imposable gagné au Canada [42] . Toutefois, cette limitation s’appliquait uniquement à certaines déductions dans le calcul du revenu imposable, et non aux déductions, y compris la déduction pour frais de scolarité, qui sont pertinentes pour le calcul du revenu.

[72]  Dans le cadre de la réforme fiscale de 1987-1988, la déduction pour frais de scolarité et plusieurs autres déductions ont été converties en crédits d’impôt non remboursables. Par conséquent, les déductions ont été déplacées de la section B de la partie I, qui traite du calcul du revenu, à la section E de la partie I, qui traite du calcul de l’impôt. La conversion des déductions en crédits non remboursables avait pour but de faire en sorte que la réduction de l’impôt à payer soit la même pour tous les contribuables, quels que soient leurs revenus. Au même moment, la Loi a été modifiée pour permettre à un étudiant qui ne peut pas utiliser le crédit pour frais de scolarité de le transférer à son conjoint, son conjoint de fait, un parent ou un grand-parent.

[73]  L’article 118.94 a été ajouté à la Loi dans le cadre de la réforme fiscale de 1987-1988. L’expression « la totalité, ou presque, du revenu » a été reprise à l’alinéa 115(1)f) après la réforme pour les crédits d’impôt qui s’applique aux déductions dans le calcul du revenu imposable, puis le crédit d’impôt pour frais de scolarité a été inclus dans la liste des dispositions soumises à cette limitation, bien qu’il s’agissait d’une déduction dans le calcul du revenu (et non du revenu imposable). En 1990, l’article 118.94 a été modifié pour supprimer la référence à l’article 118.5, à compter de la date de son entrée en vigueur. La note explicative accompagnant cette modification précise ce qui suit :

[traduction]

Cette modification garantit que la règle des 90 % ne s’appliquera pas aux frais de scolarité et aux crédits d’impôt pour les cotisations au RPC et à l’AE. La suppression de cette limitation à l’égard de ces crédits est conforme au traitement des frais de scolarité et des cotisations au RPC et à l’AE avant la réforme fiscale, où ces sommes étaient autorisées comme déductions dans le calcul du revenu net et n’étaient pas soumis à la règle des 90 % qui s’appliquait à certaines déductions autorisées dans le calcul du revenu imposable.

[74]  Ainsi, la raison pour laquelle l’article 118.94 ne s’applique pas au crédit d’impôt pour frais de scolarité est que les non-résidents se trouvent dans la même position après la conversion de la déduction pour frais de scolarité en crédit d’impôt pour frais de scolarité que lorsqu’il s’agissait d’une déduction dans le calcul du revenu.

[75]  Cet historique confirme également mon interprétation de l’article 118.5. Lorsque les frais de scolarité étaient une déduction dans le calcul du revenu, un particulier non résident qui était employé au Canada, exerçait une activité commerciale au Canada ou disposait de biens canadiens imposables était tenu de calculer son revenu imposable gagné au Canada de la manière prévue au paragraphe 115(1). Comme il a été mentionné précédemment, le particulier non résident qui satisfaisait aux conditions pour la déduction des frais de scolarité y avait droit. Toutefois, si le particulier non résident ne correspondait pas à la définition du paragraphe 2(3), il n’avait aucun revenu imposable gagné au Canada et aucune déduction pour frais de scolarité n’aurait été accordée.

[76]  L’objectif déclaré de la conversion des déductions était l’équité fiscale : [traduction] « les crédits d’impôt personnels offrent la même réduction d’impôt à tous les contribuables, quel que soit leur niveau de revenu » [43] . Rien ne laisse supposer une intention d’étendre les crédits aux personnes qui n’auraient pas eu droit à une déduction pour frais de scolarité parce qu’elles n’entraient pas dans le champ d’application de la Loi.

[77]  L’avocat de M. Marino a fait remarquer que la limitation de l’article 118.94 s’applique à un transfert du crédit d’impôt pour frais de scolarité à une personne désignée non résidente, mais pas au crédit pour frais de scolarité lui-même ni à la disposition relative aux crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés. Il affirme que cela témoigne d’une décision politique visant à permettre aux personnes qui ne résident pas au Canada ou qui ne sont pas assujetties à la partie I au cours d’une année de cumuler et de reporter les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés de cette année.

[78]  Je suis d’accord qu’un particulier qui ne réside pas au Canada à un moment quelconque de l’année peut bénéficier d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité reporté sur les années suivantes, quelle que soit la part de son revenu total qui est de source canadienne. Cependant, tous les particuliers non résidents ne peuvent pas le faire – seuls les particuliers non résidents décrits au paragraphe 2(3) au cours de l’année concernée (c.-à-d., ceux qui ont une source canadienne de revenus de la partie I).

[79]  Je conviens également que lorsqu’un étudiant non résident a un revenu imposable gagné au Canada [44] , mais ne peut pas utiliser le crédit d’impôt pour frais de scolarité dans le calcul de l’impôt à payer sur ce revenu imposable, le Canada, par l’intermédiaire de l’article 118.94, interdit le transfert du crédit à une personne désignée non résidente qui se trouve à avoir un certain revenu imposable au Canada au cours de cette année, sauf si ce revenu représente la totalité ou la quasi-totalité des revenus de la personne désignée. Toutefois, à mon avis, aucune de ces conclusions ne va à l’encontre de mon interprétation des dispositions.

[80]  L’avocat de M. Marino fait également remarquer que l’article 118.94 s’applique aux crédits pour études et manuels scolaires, de sorte que le Parlement s’est penché sur la question de savoir quand un non-résident doit avoir un revenu de source canadienne pour avoir droit à un crédit. En excluant l’article 118.5 de l’article 118.94, affirme-t-il, le Parlement a démontré une intention de permettre à des non-résidents comme M. Marino d’accumuler des crédits, sans égard au revenu, pouvant être utilisés dans les années ultérieures lorsque le non-résident a des revenus imposables au Canada.

[81]  L’article 118.94 est une reconnaissance que les non-résidents peuvent avoir droit à divers crédits, y compris les crédits d’impôt pour frais de scolarité, prévus dans la section E de la partie I. Je suis donc d’accord que l’article 118.94 ne fait pas obstacle à la demande de M. Marino [45] . Cependant, dire que l’article 118.94 n’interdit pas à M. Marino de réclamer le crédit n’équivaut pas à dire qu’il y a donc droit.

[82]  L’article 118.94 n’est pas nécessaire si la condition qu’il impose est que le non-résident ait un revenu imposable gagné au Canada dans l’année. D’après ma lecture, cette condition est directement contenue dans les articles 118.5, 118.61 et les autres dispositions prévoyant des crédits dans la section E, sous-section A. L’article 118.94 a une raison d’être différente. Cette disposition impose une condition supplémentaire, non applicable aux particuliers résidents, à un non-résident qui a un revenu imposable aux termes de la partie I pour l’année d’imposition et qui cherche à demander certains crédits dans le calcul de cet impôt (y compris le crédit pour études et manuels scolaires pour les années visées et les crédits d’impôt pour frais de scolarité transférés) [46] . Cette condition ne s’applique pas à tous les crédits (p. ex., elle ne s’applique pas au crédit d’impôt pour frais de scolarité ni au crédit pour don de charité). Toutefois, l’article 118.94 impose une condition supplémentaire pour certains crédits.

[83]  En d’autres termes, même si un non-résident satisfait aux conditions de l’article 118.94, cela ne l’aide pas s’il ne satisfait pas aux conditions du crédit concerné. Un particulier non résident devrait seulement se préoccuper de l’article 118.94 après avoir déterminé que les conditions du crédit précis qu’il cherche à demander sont satisfaites.

(b) Article 118.91

[84]  L’article 118.91 traite de la disponibilité des crédits d’impôt pour les particuliers qui résident au Canada pendant une partie de l’année d’imposition, mais qui sont des non-résidents pendant l’autre partie de l’année. Pour calculer l’impôt dû par un tel particulier pour l’année au titre de la partie I, les deux périodes sont traitées séparément; comme si chaque période était sa propre année d’imposition. L’article 118.91 précise ensuite comment les différents crédits doivent être traités dans chacune de ces deux périodes.

[85]  L’article 118.91 aborde expressément la disponibilité dans les deux périodes des différents crédits, et s’applique au crédit d’impôt pour frais de scolarité de l’article 118.5. L’alinéa 118.91a) s’applique à la partie de l’année où le particulier est non-résident (la « période de non-résidence ») et prévoit que les crédits correspondants sont calculés comme si la période de non-résidence correspondait à l’année d’imposition entière [47] . L’alinéa 118.91b) s’applique aux périodes de l’année tout au long desquelles le particulier est résident du Canada (la « période de résidence »), là encore, calculées comme si la période de résidence était l’année d’imposition entière, mais en y ajoutant des conditions supplémentaires [48] .

[86]  D’une certaine façon, l’article 118.91 est plus facile à comprendre en appliquant l’alinéa b) avant l’alinéa a). L’alinéa b) s’applique à la période ou aux périodes tout au long de l’année où le particulier réside au Canada. Elle précise que le crédit d’impôt pour frais de scolarité peut seulement être déduit pour la période de résidence lorsqu’il peut raisonnablement être considéré comme entièrement applicable à la période de résidence, et doit être calculé comme si cette période était l’année d’imposition entière.

[87]  L’alinéa a) s’applique à la période non visée à l’alinéa b). La seule condition qu’elle impose est que la période de non-résidence doive être considérée comme une année d’imposition distincte.

[88]  Alors, qu’est-ce que cela signifie? Le crédit d’impôt pour frais de scolarité dont bénéficie un particulier au cours d’une année d’imposition dépend de sa qualité d’étudiant au cours de cette année d’imposition [49] et du paiement des frais de scolarité pour cette année d’imposition [50] . L’article 118.91 exige que la période de non-résidence et la période de résidence soient traitées comme des années d’imposition entières distinctes aux fins de la détermination du droit aux différents crédits, y compris le crédit d’impôt pour frais de scolarité. Un particulier qui était étudiant à temps plein et qui payait des frais de scolarité uniquement pour la période de non-résidence, mais qui n’était pas une personne visée au paragraphe 2(3) au cours de cette période, n’aurait pas droit à une déduction aux termes de l’article 118.5 dans le calcul de l’impôt à verser pour l’année.

[89]  Toutefois, l’article 118.91 n’empêcherait pas un non-résident décrit au paragraphe 2(3) au cours de la période de non-résidence (et donc capable de calculer le revenu imposable gagné au Canada pour la période de non-résidence) de déduire un crédit d’impôt pour frais de scolarité dans l’année si celui-ci satisfaisait par ailleurs aux conditions pour le crédit au cours de cette période de non-résidence.

[90]  Les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés des années précédentes ne sont pas limités par l’article 118.91. Plus précisément, l’article 118.91 n’est pas mentionné dans l’alinéa 118.91b) traitant de la période de résidence, ce qui signifie que si un particulier dispose de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés, les règles « normales » applicables à leur déduction s’appliquent. Ainsi, si le particulier disposait de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’années antérieures, rien ne l’empêcherait de déduire ces crédits dans le calcul de l’impôt à verser pour l’année où il est résident pendant une partie de l’année et non-résident pendant une autre partie de l’année.

[91]  Qu’est-ce que cela nous apprend sur le cas de M. Marino? M. Marino est devenu résident du Canada au milieu de l’année 2012. Ainsi, en 2012, il a eu une période de non-résidence (du 1er janvier au 1er juillet) et une période de résidence (du 2 juillet au 31 décembre). Si M. Marino avait été étudiant à temps plein dans l’une des universités américaines au cours de sa période de non-résidence [51] et avait payé des frais de scolarité pour cette période, l’article 118.91 l’empêcherait de déduire un crédit d’impôt pour frais de scolarité lors du calcul de son impôt à payer pour 2012, parce qu’il n’était pas étudiant à temps plein au cours de la période de résidence, qu’il n’a pas payé de frais de scolarité pour sa période de résidence et qu’on ne peut pas dire que les frais de scolarité étaient « entièrement applicables » à sa période de résidence. Cela serait vrai même s’il peut avoir un impôt canadien important à payer relativement à la période de résidence. Or, s’il avait été un non-résident décrit au paragraphe 2(3) au cours de sa période de non-résidence, il aurait eu le droit de déduire tout crédit pour frais de scolarité lié à la période de non-résidence dans le calcul de son impôt à payer pour 2012.

[92]  Dans ce contexte, l’objectif de l’article 118.91, dans la mesure où il s’applique au crédit d’impôt pour frais de scolarité, ne peut être que d’empêcher qu’un crédit soit gagné au cours d’une période de non-résidence, sauf si la personne est un particulier assujetti à la Loi au cours de cette période (c.-à-d., était une personne décrite au paragraphe 2(3) au cours de cette période).

[93]  Cette règle ne peut pas servir uniquement à reporter la déduction d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité lié à la période de non-résidence à une année d’imposition ultérieure au cours de laquelle la personne physique est résidente tout au long de l’année. Premièrement, il n’y aurait aucune raison apparente de le faire. En outre, une telle interprétation serait contraire à un autre principe inscrit dans les règles relatives au crédit d’impôt pour frais de scolarité : un particulier n’est pas autorisé à reporter les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’une année d’imposition donnée lorsque l’étudiant a un impôt à payer cette année-là (c.-à-d. qu’il a des revenus lors de l’année en question). Si l’étudiant choisit de ne pas demander le crédit d’impôt pour frais de scolarité relativement à l’année d’imposition en question pour réduire l’impôt qu’il devrait autrement payer cette année-là (peut-être parce qu’il a d’autres crédits qui compensent entièrement l’impôt à payer), il peut perdre ce crédit [52] . En d’autres termes, les étudiants sont obligés d’utiliser les crédits d’impôt pour frais de scolarité dès qu’ils sont en mesure de le faire.

[94]  De plus, si la position de M. Marino est correcte, pourquoi la déduction du crédit d’impôt pour frais de scolarité serait-elle restreinte aux termes de l’article 118.91, mais pas les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés? Cela n’a de sens que si l’objectif de la disposition est d’empêcher un non-résident qui n’est pas par ailleurs assujetti à la partie I de la Loi au cours d’une période où il n’est pas résident d’utiliser les frais de scolarité payés relativement à cette période comme un crédit d’impôt sur le revenu canadien découlant de la période de résidence.

[95]  Là encore, l’objet législatif est évident : un non-résident n’est pas autorisé à bénéficier d’un crédit d’impôt pour les frais de scolarité engagés pour une période antérieure à celle où il devient résident, sauf s’il est visé par le paragraphe 2(3) au cours de cette période et qu’il peut donc calculer son revenu imposable gagné au Canada au cours de cette période.

(c) Articles 118.8 à 118.9

[96]  La réforme fiscale de 1987-1988 a également entraîné l’ajout de dispositions permettant à un particulier de transférer le crédit à son époux, à son conjoint de fait, à un parent ou à un grand-parent parce que [traduction] « souvent, un étudiant est incapable d’utiliser pleinement le crédit pour frais de scolarité. En le rendant transférable, cela signifie que tout crédit non utilisé réduira les impôts du parent, du grand-parent ou du conjoint qui subvient aux besoins de l’étudiant » [53] .

[97]  Lorsqu’un particulier ne peut pas utiliser (ou utiliser entièrement) le crédit d’impôt pour frais de scolarité dans l’année de naissance du crédit, il a le choix : soit transférer le crédit d’impôt pour frais de scolarité qu’il ne peut pas utiliser dans cette année-là à une personne désignée ou le reporter pour l’utiliser dans une année ultérieure. Comme la somme qui peut être transférée à une personne désignée est limitée, le particulier peut choisir de transférer une partie du crédit à une personne désignée et de reporter le solde. Toutefois, un crédit ne peut être transféré à une personne désignée que dans l’année où il est né; les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés (c.-à-d. les soldes reportés) ne peuvent pas être transférés à une personne désignée.

[98]  Bien que le montant du crédit d’impôt pour frais de scolarité disponible qu’une personne (l’étudiant) peut transférer à une personne désignée soit limité par l’article 118.81, le point de départ du calcul du montant transférable est « le total des montants déductibles en application de l’article 118.5 dans le calcul de l’impôt payable par [l’étudiant] en vertu de la présente partie pour l’année ». [54] En d’autres termes, le point de départ du calcul du crédit d’impôt pour frais de scolarité qui peut être transféré à une personne désignée au cours d’une année est identique à la somme qui serait ajoutée à la partie inutilisée du crédit d’impôt pour frais de scolarité de l’étudiant pour cette année selon l’élément B de la formule de l’article 118.61. En outre, la somme qui peut être transférée à une personne désignée est réduite de l’impôt à payer par l’étudiant, calculé sans tenir compte de certains autres crédits d’impôt [55] . En d’autres termes, l’étudiant doit d’abord utiliser le crédit.

[99]  En quoi cela est-il donc pertinent pour l’analyse en l’espèce? Si l’on admet la position de M. Marino, tout étudiant non résident qui fréquente une université étrangère dans le cadre d’un programme qui satisfait aux conditions de l’alinéa 118.5(1)b) aurait le droit de transférer les crédits d’impôt pour frais de scolarité à un grand-parent résident canadien chaque année où l’étudiant a suivi le programme. Selon cette interprétation, cela serait vrai, que l’élève ou ses parents aient eu de revenus provenant d’une source au Canada, ou non, ou à l’étranger par ailleurs. Imaginez maintenant que ce grand-parent résident canadien ait plusieurs petits-enfants non résidents qui fréquentent des universités à l’étranger, chacun d’eux pouvant transférer le crédit au grand-parent résident canadien.

[100]  Je n’ai aucun doute que ce n’était pas l’intention du Parlement lorsqu’il a ajouté les dispositions relatives aux transferts. Pourtant, si j’acceptais la lecture que fait M. Marino du paragraphe 118.5(1), le résultat serait le suivant : M. Marino aurait un crédit d’impôt pour frais de scolarité en 2002; parce qu’il ne pourrait pas l’utiliser cette année-là, il pourrait en transférer une partie à un parent ou à un grand-parent résidant au Canada. (La limitation prévue à l’article 118.94 ne s’applique pas si le parent ou le grand-parent réside au Canada.)

[101]  Or, conformément à mon interprétation de l’article 118.5, un particulier (étudiant) qui n’est pas potentiellement assujetti à l’impôt au Canada au cours d’une année, parce qu’il n’est ni résident du Canada ni un non-résident visé au paragraphe 2(3) de la Loi, n’a aucune somme calculée aux termes de l’article 118.5, et donc aucune somme qui peut être déduite aux termes de cette disposition. Par conséquent, cette personne n’a aucune somme à ajouter à son crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé aux termes de l’article 118.61 et aucune somme qui peut être transférée à une personne désignée aux termes de l’article 118.81. Selon cette interprétation, les particuliers non résidents autres que ceux décrits au paragraphe 2(3) ne bénéficieraient d’aucun avantage par rapport aux particuliers résidents ou aux particuliers non résidents décrits au paragraphe 2(3).

[102]  Pour en arriver à cette conclusion sur la portée des dispositions relatives au transfert, j’ai tenu compte de la décision Cristofaro c. Agence du revenu du Québec [56] , qui portait sur une question similaire relativement à la Loi sur les impôts du Québec [57] . Pour simplifier les faits dans cette affaire, M. Cristofaro et sa fille étaient tous deux résidents de l’Ontario aux fins de l’impôt. Toutefois, M. Cristofaro, en tant qu’associé d’un cabinet professionnel national, a gagné des revenus d’entreprise au Québec et a donc produit une déclaration d’impôt du Québec pour ces revenus, comme il était tenu de le faire. Dans le calcul de son impôt à payer, M. Cristofaro a réclamé une somme pour les frais de scolarité que sa fille a payés à une université en Écosse. La déduction a d’abord été refusée pour le motif que sa fille n’avait pas produit de déclaration de revenus au Québec, condition préalable au transfert du crédit prévu à l’article 776.41.21 de la Loi sur les impôts (Québec). Elle a donc rempli une déclaration d’impôt au Québec, bien qu’elle n’y soit pas obligée, car elle n’était pas résidente du Québec et ne tirait aucun revenu du Québec. Revenu Québec a néanmoins rejeté la demande de M. Cristofaro concernant le transfert du crédit pour frais de scolarité pour le motif que sa fille n’était pas assujettie à l’impôt du Québec. La Cour a rejeté cet argument pour le motif qu’il suffisait que le parent soit assujetti à l’impôt québécois et que la fille puisse, à un moment donné, être assujettie à l’impôt québécois. La Cour a reconnu que rien n’empêchait la fille de produire une déclaration québécoise et a conclu que le résultat était conforme au texte et à la politique de la disposition de la Loi sur les impôts (Québec) [58] .

[103]  L’affaire Cristofaro portait sur des faits différents et une législation différente : les deux personnes étaient résidentes du Canada [59] ; le crédit pour frais de scolarité a été transféré, et non reporté; et le libellé de la législation québécoise, bien que similaire, n’est pas le même que celui de la Loi. Toutefois, je suis d’avis que cette affaire est différente de l’espèce. Quoi qu’il en soit, cette décision n’est pas contraignante et ne change pas mon point de vue sur la bonne application des articles 118.5 et 118.61 de la Loi à M. Marino.

(d) Paragraphe 128(2)

[104]  Le sous-alinéa 128(2)g)(iii) prévoit l’annulation de tous les crédits d’impôt pour frais de scolarité à la fin de l’année d’imposition précédant immédiatement la libération inconditionnelle de la faillite du particulier. L’avocat de M. Marino a suggéré que lorsque le Parlement avait l’intention d’arrêter un crédit, il ajoutait une règle pour le faire. Il a avancé que le fait qu’il n’existe pas de règle pour réduire les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à zéro au moment de devenir résident soutient la position de M. Marino.

[105]  Je suis d’accord qu’aucune règle ne réduit les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés d’un particulier à zéro lorsque celui-ci devient résident. Toutefois, je ne pense pas que cela soutienne la position de M. Marino. Au contraire, conformément à mon interprétation des dispositions, une règle qui réduit à zéro les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés au moment de devenir résident (i) n’est pas nécessaire pour un particulier non résident qui, comme M. Marino, n’était pas une personne décrite dans le paragraphe 2(3) avant de devenir résident, parce que cette personne n’a pas de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés à réduire, et (ii) n’a probablement pas été jugée appropriée pour les non-résidents qui, avant de devenir résident, ont accumulé des crédits dans les années où ils étaient résidents au Canada ou les années où ils étaient non-résidents aux termes du paragraphe 2(3).

IX. AUTRES OBSERVATIONS POLITIQUES RELATIVES AUX DISPOSITIONS DE REPORT

[106]  Comme l’a fait remarquer l’avocat de M. Marino, la période de report du crédit d’impôt pour frais de scolarité n’est pas limitée. Il a suggéré que ce facteur, associé à la raison d’être du report, appuie la position de M. Marino : soit que la politique du crédit d’impôt pour frais de scolarité est de permettre à toutes les personnes assujetties à l’impôt canadien de réduire cet impôt par les frais de scolarité payés lorsque l’enseignement postsecondaire est utilisé pour gagner un revenu au Canada. En d’autres termes, fait-il valoir, le Canada a décidé d’accorder un allégement fiscal pour une partie des frais engagés par M. Marino afin de lui permettre de contribuer à l’économie canadienne et de gagner au Canada un revenu assujetti à l’impôt canadien, que M. Marino soit ou non une personne visée à l’article 2 de la Loi au cours de l’année où ces frais sont engagés. Toutefois, outre le fait de rappeler les termes de la législation et certaines déclarations faites lors de l’ajout des dispositions relatives au report, il n’a fourni aucune preuve à l’appui de cette politique.

[107]  Rien dans le texte des règles relatives au crédit d’impôt pour frais de scolarité n’oblige le contribuable à rattacher les études, dont le coût donne droit au crédit, à une source particulière de revenu imposable. Le crédit est disponible pour les résidents canadiens et les non-résidents décrits au paragraphe 2(3), quelle que soit la source du revenu donnant lieu à l’imposition aux termes de la partie I.

[108]  En supposant que les conditions d’obtention d’un crédit soient remplies, un étudiant résident canadien qui n’est pas employé et ne gagne pas de revenu au Canada peut tout de même (i) avoir droit à un crédit d’impôt pour frais de scolarité au cours des années où il est résident, (ii) transférer tout ou partie de ce crédit à une personne désignée au cours de cette année, ou (iii) reporter tout crédit inutilisé aux termes de l’article 118.61 pour l’appliquer à l’impôt prévu par la partie I sur le revenu de toute source canadienne au cours des années d’imposition futures. Cela comprend un étudiant qui émigre du Canada immédiatement après avoir terminé ses études postsecondaires pour occuper un emploi ou exercer d’autres activités rémunératrices entièrement à l’extérieur du Canada, de sorte que l’éducation subventionnée par le Canada contribue à l’économie d’une autre compétence.

[109]  Un tribunal doit toujours soupeser le poids à accorder aux déclarations faites à la Chambre des communes et aux notes explicatives. Ces déclarations peuvent donner un aperçu de l’intention du Parlement, elles sont néanmoins rarement déterminantes.

[110]  Le report des crédits d’impôt pour frais de scolarité a été instauré dans le budget fédéral de 1997. Dans son discours du budget du 18 février 1997, Paul Martin, alors ministre des Finances, a tenu les propos suivants :

Les Canadiennes et Canadiens savent qu’une meilleure instruction est synonyme de meilleurs emplois. Cela vaut pour les jeunes qui sont actuellement aux études. Cela vaut également pour ceux et celles qui se trouvent déjà sur le marché du travail et qui, pour garder leur emploi, doivent désormais parfaire leur formation durant toute leur vie active.

[...]

En outre, d’après les règles actuelles, certains étudiants ou leurs parents ne peuvent profiter de ces crédits pour frais de scolarité et pour études parce qu’ils n’ont pas, au cours d’une année, un revenu suffisant pour utiliser ces crédits. C’est particulièrement le cas des personnes dont les parents ne peuvent assumer leurs frais d’entretien, ou les personnes qui s’inscrivent sur le tard à un programme d’études, pour réorienter leur carrière ou se recycler. Nous modifions donc les règles pour que les étudiants qui ne peuvent utiliser ces crédits au cours de l’année de leurs études puissent désormais le faire en reportant les crédits au titre de revenus futurs. [60]

[111]  Toutefois, il est essentiel de replacer ces déclarations dans le contexte dans lequel elles ont été faites. Le texte est ancré dans le contexte des Canadiens et des jeunes canadiens. Le crédit est une déduction dans le calcul de l’impôt à payer; en d’autres termes, c’est dans ce contexte qu’on utilise l’expression [traduction] « parce qu’ils n’ont pas de revenus suffisants dans une année donnée ». Nulle part il n’est fait référence aux non-résidents.

[112]  Avant l’ajout du report, un crédit d’impôt pour frais de scolarité inutilisé par le particulier au cours de l’année et non transféré à une personne désignée au cours de l’année était perdu. Par conséquent, avant l’ajout d’un système de report, les règles ne permettaient pas aux non-résidents sans revenus au Canada de bénéficier d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité (parce que le crédit devait être utilisé dans l’année). L’ajout du report n’avait pas pour but de changer, et ne changeait pas, qui avait droit à un crédit; il visait seulement à modifier l’utilisation qui pouvait être faite de ces crédits.

[113]  À mon avis, les déclarations du gouvernement ne suggèrent rien de plus qu’une intention de permettre aux personnes qui avaient droit au crédit dans l’année, mais qui n’ont pas pu y avoir recours dans l’année en raison de revenus insuffisants, de les reporter. Rien ne suggère une intention ou un objectif de permettre aux personnes qui n’ont pas de crédit en raison de l’absence de lien avec le Canada de pouvoir ensuite accumuler un crédit et le reporter jusqu’à ce que ces personnes puissent être potentiellement assujetties à l’impôt au Canada.

[114]  En clair, selon l’interprétation de M. Marino, une personne non résidente qui immigre au Canada à la retraite, des décennies après avoir fréquenté l’université dans une compétence étrangère [61] , et ayant gagné des centaines de milliers de dollars de revenus dans la compétence étrangère, aurait droit au crédit simplement parce qu’elle a immigré au Canada. Je ne vois aucun élément de preuve voulant que la politique de report s’étende aussi loin.

X. QUESTION SECONDAIRE : OPPOSITION DE L’APPELANT À LA POSITION DE L’INTIMÉE

[115]  La réponse à l’avis d’appel indique que l’intimée se fonde sur les articles 118.5, 118.6, 118.61, 118.94 et les paragraphes 118.6(1), 118.6(2), 248(1) et 250(1) de la Loi. Toutefois, sous la rubrique [traduction] « Motifs invoqués et redressement demandé », l’intimée suggère que c’est l’article 118.94 qui empêche les non-résidents de demander les crédits d’impôt pour frais de scolarité et les crédits d’impôt pour études prévus aux articles 118.5 et 118.6, respectivement. Cela n’est manifestement pas correct, car l’article 118.94 ne fait pas référence à l’article 118.5.

[116]  L’avocat de l’intimée ne le conteste pas. Son argument en appel était plutôt fondé sur les articles 118.5 et 118.61 et sur la décision Oceanspan. Il a fait valoir qu’étant donné que M. Marino était un non-résident qui n’avait aucun revenu de source canadienne en 2002-2011, ces années n’étaient pas des années d’imposition pour M. Marino de sorte que, en immigrant au Canada, il n’avait pas de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés.

[117]  L’avocat de M. Marino s’est opposé à cet argument et aux motifs d’appel, car il n’a pas été soulevé dans la réponse, que l’appel a été entendu fondé sur un exposé conjoint des faits et que s’il avait su qu’un tel argument aurait été soulevé, il aurait pu apporter des éléments de preuve supplémentaires. Je n’ai pas admis cette observation et j’ai permis à l’intimée de poursuivre son argumentation.

[118]  Tout d’abord, le présent appel a été instruit et entendu dans le cadre de la procédure informelle de cette notre Cour pour les appels en matière fiscale. Le paragraphe 18.15(3) de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt prévoit qu’un appel instruit sous le régime de la procédure informelle doit être entendu « d’une manière informelle et le plus rapidement possible, dans la mesure où les circonstances et l’équité le permettent ».

[119]  Ensuite, l’intimée nomme les articles 118.5 et 118.61 dans sa réponse parmi les dispositions légales invoquées [62] . La réponse fait également référence au paragraphe 248(1), qui contient la définition de « contribuable », sans lien avec l’article 118.94. Si l’intimée se fondait uniquement sur l’argument selon lequel l’article 118.94 empêchait le crédit, il ne serait pas nécessaire de faire référence à d’autres dispositions.

[120]  La partie de la réponse qui traite des motifs invoqués comprend l’énoncé [traduction] « L’appelant n’ayant pas le droit de déduire les frais de scolarité et d’étude aux termes des articles 118.5, 118.6 et 118.94 de la Loi, il n’a pas droit au report des frais de scolarité disponible pour les années d’imposition 2012 aux termes de l’article 118.61 de la Loi » [63] .

[121]  Je partage l’avis de l’avocat de M. Marino selon lequel la rédaction de la réponse laisse beaucoup à désirer [64] ; toutefois, je ne suis pas convaincu que l’intimée avance un argument subsidiaire ou nouveau, ou qu’elle avance des arguments que M. Marino ne pouvait pas prévoir vu la réponse et l’exposé conjoint des faits. En outre, l’avocat de M. Marino a passé beaucoup de temps à expliquer pourquoi son client avait droit à ce crédit. Ces explications allaient bien au-delà de l’affirmation selon laquelle l’article 118.94 ne s’appliquait pas en vue d’empêcher le crédit.

[122]  Par conséquent, d’un point de vue, l’intimée pourrait sembler n’avoir avancé aucun nouvel argument, mais répondre à l’argument de M. Marino selon lequel il relève du champ d’application des articles 118.5 et 118.61, en indiquant pourquoi, selon l’intimée, il n’en relève pas. Je préfère ce point de vue.

[123]  Or, même si l’intimée peut sembler chercher à avancer un argument supplémentaire pour étayer la nouvelle cotisation, le paragraphe 152(9) de la Loi lui permet expressément de le faire à tout moment ultérieurement à la période normale de nouvelle cotisation, sauf s’il existe des éléments de preuve que le contribuable n’est plus en mesure de fournir sans l’autorisation de la Cour et qu’il n’est pas approprié que la Cour ordonne que ces éléments de preuve soient produits.

[124]  Dans la décision Walsh c. Canada [65] , la Cour d’appel fédérale a défini un critère en trois parties qui doit être satisfait avant que l’intimée puisse invoquer le paragraphe 152(9) pour modifier ses actes de procédure et ajouter des arguments supplémentaires, comme suit :

  • a) le ministre ne peut pas inclure de transactions non comptées dans la nouvelle cotisation du contribuable;

  • b) le droit du ministre de proposer un autre argument à l’appui d’une cotisation est assujetti aux alinéas 152(9)a) et b), qui ont trait au préjudice causé au contribuable;

  • c) le ministre ne peut pas invoquer le paragraphe 152(9) pour établir une nouvelle cotisation au-delà du délai prévu au paragraphe 152(4) ou pour percevoir un impôt dépassant le montant de la cotisation contestée [66] .

[125]  Dans le cas de M. Marino, ni a) ni c) ne posent problème. L’intimée ne cherche pas à ajouter de nouvelles transactions et ne cherche pas à obtenir une somme d’impôt supplémentaire au-delà de celle qui fait l’objet de l’appel. Ainsi, en supposant que l’intimée présente un argument nouveau ou subsidiaire, le seul critère que nous devons examiner est de savoir si M. Marino est lésé par l’argument subsidiaire. Pour trancher cette question, le paragraphe 152(9) me demande de déterminer s’il existe des éléments de preuve pertinente que M. Marino n’est plus en mesure de présenter sans l’autorisation de la Cour et qu’il ne serait pas approprié dans les circonstances que la Cour ordonne que les éléments de preuve soient présentés.

[126]  L’avocat de M. Marino a laissé entendre que s’il avait su que l’intimée s’appuierait sur la décision Oceanspan et sur des dispositions autres que l’article 118.94, il aurait peut-être produit des éléments de preuve supplémentaires pour démontrer que M. Marino avait des liens avec le Canada en 2002 à 2011, plutôt que de procéder uniquement au moyen d’un exposé conjoint des faits. Par exemple, il a suggéré qu’il pourrait apporter la preuve que M. Marino a été embauché par le cabinet d’avocats canadien où il travaille actuellement avant d’immigrer au Canada et qu’il a effectué un certain travail pour ce cabinet, bien qu’à distance des États-Unis. En d’autres termes, il n’était pas employé au Canada, bien qu’il ait été employé par une entreprise canadienne. Considérant les motifs qui m’ont mené à conclure que M. Marino n’a pas de crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés, une preuve de cette nature n’est pas pertinente.

[127]  L’exposé conjoint des faits indique clairement que M. Marino n’était ni résident du Canada ni réputé l’être de 2002 à 2011, qu’il n’avait aucun revenu imposable gagné au Canada au cours de ces années et qu’il n’avait aucun impôt à payer au Canada au cours de ces années. À mon avis, ce sont les seuls faits pertinents pour répondre à la question dont je suis saisie. Une fois ces faits convenus, il n’y a rien d’autre à prendre en considération. En d’autres termes, à mon avis, le seul lien pertinent avec le Canada est le fait d’appartenir au champ d’application du paragraphe 2(3) au cours de l’année concernée. Ainsi, même si M. Marino avait présenté des éléments de preuve établissant d’autres liens, ma décision aurait été la même [67] .

[128]  Par conséquent, même si l’on devrait conclure que l’intimée a avancé un motif subsidiaire pour étayer les nouvelles cotisations, M. Marino n’a pas établi qu’il existe d’autres éléments de preuve pertinents ou qu’il a subi un préjudice quelconque. Par conséquent, l’intimée n’est pas restreinte à la seule invocation de l’article 118.94 pour appuyer la nouvelle cotisation [68] .

XI. CONCLUSION

[129]  À mon avis, l’interprétation que j’ai donnée aux articles 118.5 et 118.61 est conforme au texte, au contexte et à l’objet de ces dispositions. Par conséquent, pour les motifs susmentionnés, l’appel de M. Marino de la nouvelle cotisation de son année d’imposition 2012 est rejeté. Chaque partie prendra en charge ses propres dépens.

  Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juillet 2020.

« K.A. Siobhan Monaghan »

Juge Monaghan


RÉFÉRENCE :

2020 CCI 50

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2018-3112(IT)I

INTITULÉ :

ALEXANDER MARINO c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L’AUDIENCE :

19 février 2020

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge K.A. Siobhan Monaghan

DATE DU JUGEMENT :

10 juillet 2020

COMPARUTIONS :

Avocat de l’appelant :

Me Drew Gilmour

Me Darryl Way

Avocat de l’intimée :

Me Kieran Meehan

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelant :

Nom :

Me Drew Gilmour

Cabinet :

Schmidt & Gilmour Tax Law LLP

Vancouver (Colombie-Britannique)

Pour l’intimée :

Nathalie G. Drouin

Sous-procureure générale du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] La somme réclamée par M. Marino dans sa déclaration d’impôts était apparemment légèrement supérieure à la somme que son avocat a établie comme celle qui aurait dû être déclarée selon les taux de change moyens de la Banque du Canada, mais la différence est inférieure à 30 $, ce qui n’est aucunement déterminant. Aux fins du dossier, M. Marino était prêt à accepter la somme inférieure.

[2] Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.). Sauf indication contraire, toutes les références aux dispositions législatives sont des références aux dispositions de la Loi.

[3] Règlement de l’impôt sur le revenu, CRC, ch. 945.

[4] L’annexe VIII a été abrogée en 2018. L’annexe VIII et l’article 3503 (également abrogé en 2018) du Règlement de l’impôt sur le revenu prescrivent les universités situées à l’étranger qui sont des donataires reconnus aux fins du paragraphe 149.1(1).

[5] L’exposé conjoint des faits comporte seulement une référence au montant du crédit d’impôt pour frais de scolarité reporté, pour les années concernées; toutefois, l’expression pertinente est « crédits d’impôt pour frais de scolarité et études inutilisés ».

[6] La réponse indique que (i) le ministre a initialement établi les cotisations pour les déclarations de 2002 à 2011 telles que produites, tandis que la déclaration de 2012 a fait l’objet d’une première cotisation le 24 mai 2013; (ii) le ministre a établi une nouvelle cotisation le 15 juillet 2013 à l’égard l’année d’imposition 2012 de l’appelant pour refuser les crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés demandés; (iii) le 6 octobre 2016, le ministre a établi de nouvelles cotisations à l’égard des déclarations de l’appelant pour 2005, 2006, 2007, 2008 et 2011 afin de refuser les sommes pour frais de scolarité et études des années précédentes; et (iv) le 6 octobre 2016, le ministre a établi une nouvelle cotisation à l’égard de l’année d’imposition 2012 de l’appelant afin de réduire à zéro le montant du report de crédits d’impôt pour frais de scolarité et études inutilisés.

 

[7] Articles 118.8 et 118.81.

[8] Articles 118.9 et 118.81.

[9] Article 118.61.

[10] Avant 2017, lorsque les crédits pour études et manuels ont été supprimés, l’article 118.61 prévoyait le calcul des « crédits d’impôt inutilisés pour études, frais de scolarité et manuels » d’un particulier. Bien que ce soit le terme qui s’appliquait en 2012, et qu’il continue d’être utilisé dans l’article 118.61, seuls les crédits d’impôt pour frais de scolarité sont pertinents dans le présent appel; ainsi, pour des raisons de simplicité dans les présents motifs, j’utiliserai souvent l’expression « crédits d’impôt pour frais de scolarité inutilisés ».

[11] Certains points de l’exposé conjoint des faits pourraient être décrits de manière plus appropriée comme des questions mixtes de fait et de droit, ou des conclusions de droit, y compris, par exemple, la question de savoir si M. Marino était résident au Canada de 2002 à 2011. Toutefois, j’ai accepté l’exposé conjoint des faits et rien ne laisse entendre que les conclusions qui ne sont pas purement factuelles soient inappropriées selon les faits.

[12] Les cotisations pour les années antérieures à 2012 étaient des cotisations nulles (c.-à-d. des cotisations aux termes desquelles aucun impôt n’était payable), M. Marino étant un non-résident sans revenu imposable gagné au Canada. Les cotisations nulles ne peuvent faire l’objet d’un appel : Canada c. Interior savings credit union, 2007 CAF 151 [Interior Savings]. Par conséquent, comme les parties en ont convenu, l’année appropriée pour interjeter appel est celle où les crédits sont appliqués et, s’ils sont disponibles, influenceront l’impôt à payer : Aallcann Wood Suppliers Inc. v. R, 94 DTC 1475 (TCC) et Interior Savings.

[13] L’alinéa 118.5(1)a) est limité aux étudiants inscrits dans des établissements d’enseignement postsecondaire au Canada et, aux termes du paragraphe 118.5(2), aux étudiants qui sont réputés être des résidents du Canada en application de l’article 250 et qui fréquentent des établissements d’enseignement postsecondaire à l’étranger. L’alinéa 118.5(1)c) est limité aux personnes qui résident au Canada près de la frontière entre le Canada et les États-Unis et qui font la navette vers les États-Unis pour fréquenter un établissement d’enseignement postsecondaire. L’alinéa b) modifié est entré en vigueur à la fin de 2011, mais il n’a pas d’influence sur M. Marino. Avant la modification, les frais de scolarité devaient être liés à un cours d’au moins 13 semaines consécutives, mais ce délai a ensuite été réduit à 3 semaines.

[14] Sous réserve de certaines exceptions non pertinentes dans le présent appel.

[15] Il n’était pas employé au Canada, n’y exerçait pas d’activités commerciales et ne disposait pas de biens canadiens imposables.

[16] Oceanspan Carriers Ltd v. Canada, [1987] 2 FC 171 (section d’appel) [Oceanspan].

[17] Hypothèques Trustco Canada c. Canada, 2005 CSC 54.

[18] Ibid., au paragraphe 10.

[19] Lawyers’ Professional Indemnity Company v. The Queen, 2020 FCA 90, au paragraphe 31.

[20] Le préambule du paragraphe 118.5(1) prévoit « dans le calcul de l’impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie pour une année d’imposition ». Chacun des alinéas 118.5(1)a), b), et c) indique que le particulier est un étudiant « au cours de l’année » ou et que des frais de scolarité ont été payés l’université « pour l’année ». Ces références à « l’année » visent clairement l’année d’imposition indiquée dans le préambule.

[21] Paragraphe 249(1).

[22] Paragraphe 248(1).

[23] Paragraphe 248(1).

[24] Précitée, note 16 au paragraphe 13.

[25] Ibid., aux paragraphes 13-15.

[26] Il y a plus de 4 000 références dans la Loi au verbe « réputer ».

[27] Paragraphe 249(3.1).

[28] Alinéas 128.1(1)a) et 128.1(4)a).

[29] Paragraphe 249(3).

[30] Alinéa 128(2)d). Les paragraphes 249(4) et (4.1) et les alinéas 128(1)d), 128(2)d), 128.1(1)a) et 128.1(4)a) figurent parmi les autres règles fixant le moment où une année d’imposition est réputée commencer ou se terminer.

[31] Elle fonctionne également lorsque le revenu du non-résident doit être déterminé, par exemple comme prévu dans diverses dispositions de la partie XIII de la Loi.

[32] La décision Kaiser v. Minister of National Revenue, 91 DTC 1057, s’appuie sur la citation suivante tirée du livre « Interprétation des lois » de Pierre A. Côté concernant la valeur potentielle des titres :

[traduction]

[…] les titres font partie des textes juridiques et sont de ce fait pertinents dans leur interprétation. Les titres peuvent aider à situer une disposition dans la structure générale du texte législatif, sur lequel ils apportent un éclairage sur leur cadre et leur organisation. Les titres peuvent aussi être considérés comme des préambules aux dispositions qu’ils présentent.

[33] En revanche, cette approche subsidiaire est adoptée au paragraphe 118.61(1), mais comme nous le verrons plus loin, à moins que l’article 118.5 ne s’applique, l’article 118.61 n’est pas pertinent.

[34] Certaines dispositions relatives au crédit utilisent l’expression « an individual’s tax payable under this Part for a taxation year » (l’impôt à payer par un particulier au titre de la présente partie pour une année d’imposition) dans la version anglaise plutôt que « tax payable by an individual for a taxation year » (l’impôt à payer par un particulier pour une année d’imposition), mais, à mon avis, les deux expressions ont la même signification. Ce qui est cohérent (et important), c’est que le mot « particulier » vient modifier l’expression « calcul de l’impôt payable [...] en vertu de la présente partie pour une année d’imposition ».

[35] Cela ne signifie pas que toute personne résidant au Canada doit produire une déclaration ou que toute personne résidant au Canada aura un montant d’impôt à payer aux termes de la partie I. La question de savoir si une déclaration est requise est déterminée par la section I de la partie I. La question de savoir si l’impôt sur le revenu est en fait payable est déterminée en fonction de la détermination du revenu imposable de cette personne : voir les paragraphes 2(1) et (2) et 117(2).

[36] Là encore, il s’agit d’un exercice distinct de la détermination du montant de l’impôt à payer aux termes de la partie I. Cela dépend de la question de savoir si le non-résident a un montant positif de revenu imposable gagné au Canada au cours de l’année d’imposition.

[37] Précitée, note 16 au paragraphe 12. Voir également l’arrêt Lea-Don Canada Limited c. Ministre du Revenu national, [1971] R.C.S. 95 à la page 99.

[38] Ibid.

[39] Autres que les résidents réputés visés par l’article 250 dans le cas de l’alinéa 118.5(1)a).

[40] Par exemple, le particulier non résident peut avoir un revenu d’emploi provenant d’un emploi à temps partiel dans l’établissement d’enseignement canadien tout en étant étudiant, le rendant ainsi assujetti à la partie I.

[41] Les alinéas 115(1)d), e) et f) tels qu’ils existent dans la loi actuelle étendent également certaines déductions dans le calcul du revenu imposable dont bénéficient les résidents aux non-résidents tenus de calculer leur revenu imposable gagné au Canada.

[42] Voir l’alinéa 115(1)f). L’alinéa 115(1)f) est demeuré pratiquement inchangé depuis la réforme fiscale, mais s’applique aux déductions et non aux crédits.

[43] Ministère des Finances, Renseignements supplémentaires concernant les mesures de réforme fiscale, (Ottawa : 16 décembre 1987), p. 5-8.

[44] Peut-être parce que l’étudiant a été employé au Canada la même année qu’il a fréquenté l’université.

[45] L’avocat de l’intimée est d’accord avec cette observation, bien que la réponse indique que l’article 118.94 s’applique pour refuser à M. Marino les crédits d’impôt pour frais de scolarité. Plus loin dans les présents motifs, j’analyserai l’objection de l’appelant aux arguments de l’intimée à l’appui de la cotisation autre que ceux fondés sur l’article 118.94.

[46] En 2012, l’article 118.6 prévoyait une déduction similaire dans le calcul de l’impôt lié aux manuels scolaires et à la fréquentation d’un établissement d’enseignement supérieur, mais ces crédits n’ont pas été demandés par M. Marino et ces dispositions ont depuis été abrogées.

[47] Alinéa 118.91a).

[48] Alinéa 118.91b).

[49] L’alinéa 118.5(1)b) s’applique lorsque le particulier était un étudiant « au cours de l’année ». « L’année » en question dans cet alinéa est l’« année d’imposition » pour laquelle l’impôt à payer est calculé, comme le décrit le préambule du paragraphe 118.5(1). Ainsi, aux fins de l’article 118.91, lors du calcul du revenu pour la période de résidence, un résident d’une partie de l’année doit traiter cette période comme l’ensemble de l’année d’imposition, et peut seulement demander le crédit d’impôt pour les frais de scolarité payés pour cette période de résidence s’il est inscrit dans un établissement d’enseignement au cours de cette période.

[50] Ibid. (« [...] le total des frais de scolarité payés à l’université pour l’année [...] ».

[51] Il n’y a aucune indication qu’il ait été étudiant à un moment quelconque en 2012. Cette analyse est simplement illustrative.

[52] Voir l’élément C au paragraphe 118.61(1). De même, le solde inutilisé des crédits d’impôt pour frais de scolarité d’un particulier est réduit chaque année d’imposition par la somme de l’impôt à payer par le particulier aux termes de la partie I pour l’année en question, calculée avant que certains autres crédits disponibles ne soient utilisés (c.-à-d., lorsque le particulier a des revenus), que le particulier choisisse de déduire ou non le crédit inutilisé. Voir l’élément D au paragraphe 118.61(1), l’alinéa 118.61(2)b), l’article 118.92 et Zhang c. La Reine, 2017 CCI 258 (IP).

[53] Ministère des Finances, Notes techniques – Article 118 (1988).

[54] De 2002 à 2009, la disposition faisait référence aux sommes déductibles aux termes des articles 118.5 et 118.6. Cette dernière disposition concernait les crédits d’impôt pour les études, désormais abrogés. Par souci de simplicité, je n’ai pas fait référence à cette disposition ici.

[55] Voir l’élément B de la formule à l’alinéa 118.81a).

[56] Cristofaro c. Agence du revenu du Québec, 2020 QCCQ 1461 [Cristofaro].

[57] Loi sur les impôts, CQLR ch. l-3 [Loi sur les impôts (Québec)].

[58] Le juge a déclaré (au paragraphe 57) : [traduction] « La Cour arrive à la même conclusion à la lecture du texte à la lumière de son objet, qui représente l’objectif politique en jeu, soit celui d’encourager les personnes qui paient des impôts au Québec à soutenir leurs enfants dans leurs études, sous réserve de certaines conditions. Dans cette optique, une interprétation généreuse devrait être donnée, pour autant que les mots le permettent, et la Cour ne devrait pas lire dans les restrictions que l’on ne trouve pas dans le choix du législateur des mots utilisés et de ceux qui ne le sont pas ». En revanche, la Loi (fédérale) représente une politique différente dans le contexte du transfert d’un crédit à une personne désignée non-résidente, en refusant expressément le crédit à moins que la personne désignée ne tire la totalité ou la quasi-totalité de ses revenus de sources situées au Canada.

  [59] La Loi sur les impôts (Québec) prévoit des règles de calcul du revenu différentes pour les personnes qui ne résident pas au Canada et pour les personnes qui ne résident pas au Québec, mais qui résident au Canada.

[60] Débats de la Chambre des communes, 35e législature, 2e session, vol. 134, n° 132 (18 février 1997) à 8293 (ministre des Finances : Paul Martin). Voir également le Plan budgétaire de 1997 aux pages 94 et 180. Le Plan budgétaire du 18 février 1997 contient des déclarations allant dans le même sens (à la page 194) :

Même si les crédits pour études et pour frais de scolarité ne peuvent être demandés que durant l’année d’imposition visée, la plupart des étudiants peuvent les utiliser pleinement ou les transférer à une personne qui subvient à leurs besoins. Cependant, certains étudiants ne sont pas en mesure d’utiliser pleinement ces crédits, soit parce qu’ils touchent un faible revenu, soit qu’ils aient des frais de scolarité relativement élevés, soit que personne ne subvienne à leurs besoins, soit encore que la personne qui subvient à leurs besoins ait touché un revenu peu élevé pendant l’année. Dans le cas des travailleurs qui suivent des cours de perfectionnement ou qui retournent aux études après avoir fait partie de la population active, il se peut que la personne subvenant à leurs besoins n’ait touché un revenu imposable suffisant dans l’année pour se prévaloir du transfert. Afin que tous les étudiants puissent bénéficier pleinement des crédits pour études et frais de scolarité, le budget prévoit de permettre aux étudiants de reporter ces crédits indéfiniment jusqu’à ce qu’ils aient un revenu imposable suffisant qui leur permette d’en bénéficier.

Le report prospectif s’appliquera aux montants pour études et frais de scolarité accumulés en 1997 et au cours des années d’imposition ultérieures. Tout montant inutilisé par l’étudiant, qui n’a pas été transféré à une personne subvenant à ses besoins, fera automatiquement l’objet d’un report en vue d’une utilisation future par l’étudiant. La fraction inutilisée des montants que l’étudiant transfère à une personne subvenant à ses besoins ne peut dépasser la somme des montants pour études et pour frais de scolarité engagés dans l’année; elle continuera d’être assujettie à un plafond annuel de 5 000 dollars. Cependant, l’étudiant pourra, dans toute année ultérieure, appliquer à ses propres fins les montants reportés.  Il devra fournir les renseignements nécessaires qui établissent son droit au report. Revenu Canada tiendra compte des montants inutilisés des étudiants et indiquera ces montants sur les avis de cotisation des étudiants.

Une fois de plus, ce libellé doit être lu dans le contexte des dispositions telles qu’elles existaient alors. À l’époque, les règles ne permettaient pas aux non-résidents sans revenus au Canada de bénéficier d’un crédit d’impôt pour frais de scolarité (parce que le crédit devait être utilisé dans l’année).

[61] En supposant que l’université a été fréquentée dans la période suivant 1997, année où le report est devenu disponible.

[62] Elle fait également référence à l’article 118.6 et au paragraphe 250(1).

[63] Réponse, au paragraphe 25.

[64] Le paragraphe 23 de la réponse indique que l’appelant n’a pas été considéré comme un résident réputé ou de fait du Canada. Le paragraphe 24 indique ensuite que : [traduction] « en tant que tel, l’article 118.94 de la Loi empêche les non-résidents de déduire des déductions telles que les frais de scolarité et les sommes relatives aux études aux termes des articles 118.5 et 118.6 de la Loi ». L’avocat de M. Marino a souligné l’expression [traduction] « en tant que tel » en indiquant que l’article 118.94 était le seul motif invoqué. L’utilisation de l’expression [traduction] « en tant que tel » me semble étrange compte tenu du contenu du paragraphe 23 et je reconnais que la réponse n’est pas bien rédigée; toutefois, je n’accepte pas l’avis de l’avocat de l’appelant selon lequel cela signifie que l’article 118.94 est le seul motif avancé.

[65] Walsh c. Canada, 2007 CAF 222.

[66] Ibid., au paragraphe 18.

[67] Les arguments de l’intimée sont des arguments juridiques fondés sur les éléments de preuve existants. Voir Canada c. Global Equity Fund Ltd., 2012 CAF 272, autorisation d’interjeter appel à la CSC refusée le 11 avril 2013, 2013 CanLII 18834 (CSC).

[68] Je remarque également que le présent appel est régi par les règles de la procédure informelle. Bien que ces règles imposent un délai pour le dépôt d’une réponse, la seule conséquence du défaut de respecter ce délai est que les allégations de fait contenues dans l’avis d’appel sont présumées vraies. Ainsi, l’intimée aurait pu déposer la réponse la veille de l’appel avec cette conséquence. Toutefois, même si les faits allégués dans l’avis d’appel, dont beaucoup figurent dans l’exposé conjoint des faits, étaient tous vrais, cela ne changerait pas ma décision.

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