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Dossier : 2017-2825(GST)G

ENTRE :

MEDICLEAN INCORPORATED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 8 novembre 2021, à Toronto (Ontario)

Devant : L’honorable juge John R. Owen


Comparutions :

Avocates de l’appelante :

Me Louise R. Summerville

Me Monica Carinci

Avocate de l’intimée :

Me Andrée-Anne Lavoie

 

JUGEMENT

Après avoir entendu la preuve et les observations des avocates de l’appelante et de l’intimée;

Selon les motifs ci-joints du jugement, l’appel interjeté à l’encontre des nouvelles cotisations établies sous le régime de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi sur la TPS ») pour chacune des périodes de déclaration trimestrielles de l’appelante se terminant entre le 1er janvier 2009 et le 30 juin 2015 (« périodes de déclaration ») est accueilli et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation au motif que :

  1. les pénalités imposées en application de l’article 285 de la Loi sur la TPS sont annulées;

  2. la somme de 76 291,61 $ est accordée à titre de crédits de taxe sur les intrants en tenant compte du fait que le total des sommes indiquées pour une année dans l’annexe H de l’exposé conjoint des faits partiel est un crédit de taxe sur les intrants pour chacune des quatre périodes de déclaration trimestrielles de l’appelante se terminant cette année;

  3. les paiements en cause (définis au paragraphe 87 des motifs du jugement) sont appliqués en vue de réduire la taxe nette de l’appelante pour les périodes de déclaration durant lesquelles les paiements en cause ont été versés.

L’appelante dispose d’un délai de 30 jours suivant la date du jugement pour soumettre ses observations écrites sur les dépens. L’intimée dispose d’un délai de 30 jours pour fournir des observations écrites, en réponse aux observations de l’appelante. Les observations écrites de chaque partie ne doivent pas dépasser dix pages.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de mars 2022.

« J.R. Owen »

Le juge Owen

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de juin 2022.

François Brunet, réviseur


Référence : 2022 CCI 37

Date : 20220317

Dossier : 2017-2825(GST)G

ENTRE :

MEDICLEAN INCORPORATED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Owen

I. Introduction

[1] Mediclean Incorporated (l’« appelante ») interjette appel de la nouvelle cotisation établie sous le régime de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi sur la TPS ») [1] dans un avis daté du 5 mai 2016 (collectivement, les « nouvelles cotisations ») pour chacune de ses périodes de déclaration trimestrielles se terminant entre le 1er janvier 2009 et le 30 juin 2015 (collectivement, les « périodes de déclaration » et, individuellement, une « période de déclaration »).

[2] Pour chacune des périodes de déclaration, dans les nouvelles cotisations, des crédits de taxe sur les intrants (les « CTI ») que l’appelante a réclamés pour les paiements faits à des entrepreneurs indépendants qui assuraient des services de nettoyage à l’appelante pendant la période de déclaration (désignés collectivement les « sous-traitants » et individuellement un « sous-traitant ») ont été refusés et des pénalités ont été imposées en application de l’article 285 de la Loi.

[3] Les CTI refusés dans les nouvelles cotisations pour les périodes de déclaration se terminant en 2009 (les « périodes de déclaration de 2009 ») totalisaient 94 034,76 $ et les CTI refusés dans les nouvelles cotisations pour les périodes de déclaration se terminant entre le 1er janvier 2010 et le 30 juin 2015 (les « périodes de déclaration de 2010 à 2015 ») totalisaient 747 655,15 $. Je désignerai ainsi les nouvelles cotisations pour les périodes de déclaration de 2009 : les « nouvelles cotisations de 2009 » et ainsi les nouvelles cotisations pour les périodes de déclaration de 2010 à 2015 : les « nouvelles cotisations de 2010 à 2015 ».

[4] Les nouvelles cotisations pour les périodes de déclaration se terminant entre le 1er janvier 2010 et le 31 mars 2012 (les « périodes de déclaration de 2010 à 2012 ») ont été établies après l’expiration du délai de quatre ans énoncé à l’alinéa 298(1)a) de la Loi. J’appellerai ces nouvelles cotisations les « nouvelles cotisations de 2010 à 2012 ».

[5] L’appelante a auparavant admis que les nouvelles cotisations de 2009 ont été établies dans le délai imparti de quatre ans, car l’appelante a produit le 20 janvier 2016 les déclarations pour les périodes de déclaration de 2009 [2] .

[6] L’intimée a auparavant admis que l’appelante avait droit à des CTI totalisant 76 291,61 $ pour les paiements faits aux sous-traitants inscrits en vertu de la Loi sur la TPS, au cours des périodes de déclaration de 2010 à 2015 [3] .

[7] Au début des débats, l’avocate de l’intimée a admis que les pénalités imposées en application de l’article 285 de la Loi ne jouaient qu’en ce qui concerne les périodes de déclaration de 2010 à 2015.

[8] Par conséquent, les questions en litige sont les suivantes :

  1. L’appelante a-t-elle droit à des CTI ou à un remboursement qui a été déduit dans le calcul de la taxe nette de 94 034,76 $ pour les périodes de déclaration de 2009?

  2. L’appelante a-t-elle droit à des CTI ou à un remboursement qui a été déduit dans le calcul de la taxe nette de 671 363,54 $ [4] pour les périodes de déclaration de 2010 à 2015?

  3. Les nouvelles cotisations de 2010 à 2012 sont-elles prescrites et donc nulles?

  4. L’appelante est-elle passible de pénalités au titre de l’article 285 de la Loi pour les périodes de déclaration de 2009?

II. Les faits

[9] Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits partiel (l’« ECFP »). L’ECFP expose ce qui suit :

[traduction]

1. L’appelante est une société constituée aux termes des lois ontariennes et dont le siège social se trouve à Thornhill (Ontario).

2. L’appelante exerce des activités de prestation de services de nettoyage professionnels à des entreprises, notamment des hôtels, des cabinets médicaux et des immeubles commerciaux.

3. Afin d’offrir des services à ses clients, l’appelante embauche des travailleurs qui fournissent des services de nettoyage.

4. Lors d’un appel précédent devant la Cour canadienne de l’impôt (2008 [sic] CCI 340 [5] ), la Cour a conclu que les travailleurs embauchés par l’appelante étaient des sous-traitants. La décision est jointe à l’annexe A du présent jugement.

5. En 2009, après la décision rendue par la Cour canadienne de l’impôt dans l’appel dont elle avait été saisie, l’appelante a préparé et conclu une convention de sous-traitance avec chaque sous-traitant qu’elle avait embauché. Des exemples de ces conventions sont joints à l’annexe B des présents motifs du jugement.

6. L’appelante a reçu les licences commerciales de certains des sous-traitants. Des exemples de ces licences sont joints à l’annexe C des présents motifs du jugement.

7. De plus, en 2009, l’appelante a créé, par l’intermédiaire de son tiers fournisseur Desjardins, un système de paiement afin de procéder au paiement de tous les sous-traitants. Les documents de paie pour les périodes de déclaration comprises entre le 1er janvier 2010 et le 30 juin 2015 sont joints à l’annexe D des présents motifs du jugement. Les documents de paie sont représentatifs des paiements effectués aux sous-traitants au cours des périodes mentionnées.

8. Les sous-traitants n’ont pas facturé leurs services à l’appelante.

9. Chaque sous-traitant a reçu un talon de paie. Un exemple de talon de paie est joint à l’annexe E des présents motifs du jugement. Il est représentatif des talons de paie qui ont été remis à tous les sous-traitants en cause dans le présent appel.

10. L’appelante a produit ses déclarations de TPS/TVH pour les périodes de déclaration comprises entre le 1er janvier 2009 et le 30 juin 2015 (les « périodes pertinentes ») aux dates indiquées à l’annexe « A » de la réponse de l’intimée. Dans ces déclarations, l’appelante a demandé des crédits de taxe sur les intrants (« CTI ») à l’égard des sous-traitants énumérés dans les documents de paie à l’annexe D et qui figurent dans la liste regroupée à l’annexe F.

11. Le 5 mai 2016, le ministre a établi un avis de nouvelle cotisation (la « nouvelle cotisation ») pour les périodes pertinentes. La nouvelle cotisation est jointe à l’annexe G du présent jugement.

12. L’appelante a demandé des CTI de 94 034,76 $ pour l’année 2009.

13. Le montant total des CTI refusés se rapportant aux dépenses de sous-traitance de l’appelante [sic] pour les périodes de déclaration comprises entre le 1er janvier 2010 et le 30 juin 2015 s’élève à 747 655,15 $ [6] .

14. L’intimée a reconnu avoir accordé les CTI de 76 291,61 $ qui ont été demandés à l’égard des paiements effectués aux sous-traitants qui étaient inscrits au moment du paiement. Les numéros d’inscription de ces sous-traitants et la répartition des sommes concédées par sous-traitant sont joints à l’annexe H des présents motifs du jugement.

15. L’appelante a reconnu que les périodes de déclaration comprises entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2009 ne sont pas prescrites, étant donné que les déclarations relatives à ces périodes ont été déposées tardivement, le 20 janvier 2016.

[10] Deux témoins ont déposé pour le compte de l’appelante : John Procopoudis, le président de l’appelante, et David Burkes, le comptable professionnel agréé de longue date de l’appelante. Je conclus que ces deux témoins étaient crédibles. L’intimée n’a cité aucune personne à témoigner.

[11] Le 17 juillet 2009, la Cour canadienne de l’impôt a rendu son jugement à l’occasion de l’affaire Mediclean Incorporated c. M.R.N., 2009 CCI 340. La Cour a conclu que les travailleurs de l’appelante qui, selon ce qu’a établi le ministre du Revenu national (le « ministre »), exerçaient un emploi assurable et ouvrant droit à pension, au sens de la Loi sur l’assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada, étaient des entrepreneurs indépendants.

[12] Après cette décision, l’appelante a pris des mesures en 2009 pour officialiser sa relation avec ses entrepreneurs indépendants en préparant et en concluant une convention écrite avec chaque entrepreneur indépendant [7] . Des exemples des conventions écrites signées en 2012, 2013, 2014 et 2015 sont joints à l’annexe B de l’ECFP (pièce A-3).

[13] L’appelante a conclu la même convention écrite avec des employés qui ont choisi de devenir des entrepreneurs indépendants et avec tous les futurs entrepreneurs indépendants.

[14] Il est stipulé ce qui suit au paragraphe 4 de la convention écrite :

[traduction] La Société vous versera toutes les deux semaines une rémunération horaire de [8] $* plus la TVH, le cas échéant, pendant la durée de la présente convention (la « rémunération du sous-traitant ») pour les services exécutés aux termes de la présente convention. La rémunération du sous-traitant [sic] sera versée dans les 15 jours suivant la présentation de votre facture ou la consignation sur les lieux de ces services.

[15] De plus, en 2009, l’appelante a créé, par l’intermédiaire d’une entreprise d’administration de la paie appelée Desjardins, un système de paiement afin de procéder au paiement de chaque sous-traitant [9] . Un imprimé de 250 pages sur lequel figure le nom Desjardins dans la partie inférieure gauche de chaque page est joint à l’annexe D de l’ECFP (pièce A-1). La pièce A-1 présente les paiements versés aux entrepreneurs indépendants de l’appelante par Desjardins pendant les périodes de déclaration de 2010 à 2015 [10] .

[16] La pièce A-1 présente les paiements versés aux entrepreneurs indépendants ainsi qu’aux employés de l’appelante [11] pour les périodes de paie se terminant le 15 décembre des années 2010, 2011, 2012, 2013, 2014 et 2015 [12] . M. Procopoudis a témoigné que les registres de 2009 n’étaient pas disponibles, car Desjardins les avait supprimés en raison du temps écoulé.

[17] La pièce A-1 montre pour chaque paiement fait à un sous-traitant le nom, l’adresse, le taux horaire, les heures travaillées de ce sous-traitant, ainsi que la rémunération et la TPS/TVH qui lui ont été payées.

[18] Chaque sous-traitant a reçu un talon de paie [13] . Un exemple de talon de paie sur lequel figure le nom Desjardins dans la partie inférieure droite est joint à l’annexe E de l’ECFP (pièce A-2). L’exemple de talon de paie comprend le nom de l’appelante, le nom et l’adresse du bénéficiaire ainsi que sa fonction [14] , les heures travaillées, le taux horaire, le paiement total pour les services fournis pendant la période visée par le talon de paie, le montant de TPS payé, la période à laquelle le paiement se rapporte et la date à laquelle la somme indiquée sur le talon de paie est devenue payable.

[19] En août ou septembre 2009, M. Procopoudis a consulté le site Web de l’Agence du revenu du Canada (« ARC ») afin de recueillir de l’information sur les renseignements nécessaires pour demander un CTI pour la TPS/TVH payée aux termes d’une entente contractuelle.

[20] En mai 2015, l’ARC a amorcé une vérification de l’appelante en application de la Loi sur la TPS (la « vérification de l’ARC »). M. Procopoudis a témoigné qu’il avait son propre avis, mais que le vérificateur de l’ARC avait ses propres procédures et qu’après que ce dernier eut présenté la position de l’ARC au début de la vérification, M. Procopoudis s’est rendu sur le site Web de l’ARC afin d’imprimer les directives de l’ARC pour ses dossiers [15] .

[21] Deux pages de renseignements ont été déposées au dossier en tant que pièce A-4. La première page porte sur les ententes contractuelles et la deuxième page sur les petits fournisseurs.

[22] M. Procopoudis a témoigné que les renseignements à la première page de la pièce A-4 qui portait sur les demandes de renseignements relatives aux ententes contractuelles étaient identiques à ceux qu’il avait recueillis en 2009.

[23] Après avoir consulté le site Web de l’ARC en août ou en septembre 2009, M. Procopoudis a compris que pour que l’appelante demande des CTI pour les paiements de la TPS/TVH aux termes de l’entente contractuelle, les livres et registres ainsi que les documents connexes devaient contenir les renseignements suivants :

  • a) Le nom ou la dénomination commerciale et l’adresse du fournisseur.

  • b) Le numéro d’entreprise du fournisseur.

  • c) La période de déclaration durant laquelle la TVH a été payée ou est devenue payable et la portion de la TVH payée ou payable.

  • d) Le type de fourniture.

  • e) Le nom ou la dénomination commerciale et l’adresse de l’acquéreur de la fourniture.

[24] Lors de son contre-interrogatoire, M. Procopoudis a déclaré qu’au moment de l’élaboration du contrat avec les sous-traitants, en 2009, il n’a pas sollicité d’avis professionnels concernant le droit à des CTI de l’appelante, car il pensait que le point de vue de l’ARC concernant les ententes contractuelles était clair.

[25] On a interrogé M. Procopoudis au sujet des renseignements concernant les petits fournisseurs qui figurent à la page 2 de la pièce A-4 et il a répondu qu’il n’a pas consulté ces renseignements en 2009 et qu’il n’a pris connaissance de la question sur les petits fournisseurs qu’en 2015, lorsque le vérificateur de l’ARC l’a soulevée. Je déduis de cette réponse que M. Procopoudis a imprimé le document en réponse aux commentaires du vérificateur de l’ARC.

[26] M. Procopoudis a réitéré qu’il pensait que la règle concernant les petits fournisseurs n’était pas pertinente, étant donné que les contrats conclus entre l’appelante et les sous-traitants prévoyaient le paiement de la TPS/TVH sur les fournitures taxables et que les services fournis par les sous-traitants étaient des fournitures taxables [16] .

[27] Lorsqu’il a été interrogé au sujet de l’expression « le cas échéant » au paragraphe 4 des exemples de contrats, M. Procopoudis a déclaré qu’il pensait que cette expression essayait de régler la question de savoir si les services fournis par les sous-traitants étaient des fournitures taxables.

[28] Lors d’une réunion visant à examiner les états financiers de 2014 de l’appelante, au cours de la première semaine de mai 2015, M. Burkes a informé M. Procopoudis que l’ARC se penchait sur les entrepreneurs non inscrits qui percevaient la TPS/TVH. M. Burkes a proposé que l’appelante demande les numéros d’inscription au registre de la TVH avant de payer aux sous-traitants la TVH. En juin 2015, le vérificateur de l’ARC a informé M. Procopoudis que l’ARC était d’avis que l’appelante devrait obtenir un numéro d’inscription à la TVH avant de payer la TVH.

[29] Le 1er juillet 2015, l’appelante a envoyé à tous les sous-traitants une lettre indiquant que ceux-ci devaient être inscrits en vertu de la Loi sur la TPS d’ici au 30 juillet 2015 afin de continuer à recevoir la TPS. Un spécimen de lettre a été déposé en preuve; il s’agit de la pièce A‑6. Par ailleurs, l’appelante a modifié son contrat avec les sous-traitants.

[30] En octobre ou novembre 2015, le vérificateur de l’ARC a informé M. Procopoudis que l’appelante n’avait pas déposé les déclarations de TPS pour les périodes de déclaration de 2009 [17] . M. Procopoudis a enquêté sur les déclarations manquantes et il a découvert qu’elles se trouvaient avec les états financiers de 2009 de l’appelante. Il a signé et déposé les déclarations qu’il a accompagnées de 4 000 $ supplémentaires destinés à payer les pénalités et les intérêts [18] . M. Procopoudis n’a pas consulté M. Burkes avant de déposer ces déclarations.

[31] M. Procopoudis a témoigné que les déclarations de TPS/TVH de l’appelante pour les périodes de déclaration ont été préparées par M. Burkes en se fondant sur les renseignements fournis par l’appelante. M. Burkes a témoigné qu’avant le début de la vérification effectuée par l’ARC en mai 2015, on ne lui a pas demandé de donner son avis concernant le droit de l’appelante à des CTI. Lors de la préparation des déclarations de TPS/TVH de l’appelante pour les périodes de déclaration, il a cru que la TPS/TVH devait être versée à tous les sous-traitants et en mai 2015, au moment de se préparer en vue de la vérification, il a découvert que certains des sous-traitants n’auraient pas dû recevoir la TPS/TVH, car ils étaient des petits fournisseurs non inscrits.

III. Les thèses des parties

A. L’appelante

[32] L’appelante prétend qu’elle a droit à des CTI pour toute la TPS/TVH payée aux sous-traitants au cours des périodes de déclaration. En outre, même si l’appelante n’a pas droit à ces CTI, le ministre doit, pour chacune des périodes de déclaration, appliquer le montant de TPS/TVH que l’appelante a payé aux sous-traitants par erreur pendant les périodes de déclaration afin de réduire la taxe nette que l’appelante doit payer pour la période de déclaration.

[33] À l’appui de cette thèse, l’appelante cite les paragraphes 261(1) et 296(2.1) de la Loi et la décision Société en commandite Sigma-Lamaque c. La Reine, 2010 CCI 415, par. 26 et 28 ainsi que l’arrêt United Parcel Service du Canada Ltée c. Canada, 2009 CSC 20, [2009] 1 RCS 657 (« UPS »), par. 23, 29 et 30.

[34] En ce qui concerne chacune des nouvelles cotisations de 2010 à 2012, l’appelante fait valoir que le ministre a la charge de prouver les faits qui établissent que l’appelante a fait une présentation erronée en demandant des CTI dans sa déclaration de TPS/TVH pour la période de déclaration à laquelle la cotisation s’applique et que cette présentation erronée a été faite par négligence, inattention ou omission volontaire de la part de l’appelante.

[35] L’appelante soutient que même si la norme de conduite attendue de la part du contribuable qui produit sa déclaration est celle d’une personne prudente et avisée, cette norme n’est pas celle de la perfection. Si l’appelante, après examen réfléchi et attentif de la situation, a évalué celle-ci et produit une déclaration selon la méthode qu’en bonne foi elle croit appropriée, il n’y a pas fausse déclaration. L’appelante cite les décisions La Reine c. Regina Shoppers Mall Limited, 91 DTC 5101, p. 5105 et Salloum c. La Reine, 2014 CCI 366 (procédure informelle) confirmée par 2016 CAF 85 qui renvoie à son tour à l’arrêt Canada c. Johnson, 2012 CAF 253, par. 55.

[36] En ce qui concerne l’imposition des pénalités pour les périodes de déclaration de 2009, l’appelante soutient que le ministre a le fardeau de prouver les faits qui étayent l’imposition d’une pénalité au titre de l’article 285 de la Loi. L’appelante soutient que le ministre n’a présenté aucun élément de preuve qui établirait que l’appelante a, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé dans ses déclarations déposées pour les périodes de déclaration de 2009. L’appelante soutient que demander le remboursement de taxes payées en trop ne constitue pas une faute lourde.

B. L’intimée

[37] L’intimée fait valoir que l’appelante n’a pas droit à des CTI pour les sommes qu’elle a versées aux petits fournisseurs non inscrits, car contrairement à ce qui est indiqué à l’alinéa 169(4)a), l’appelante a omis d’obtenir suffisamment d’éléments de preuve pour permettre d’établir le montant des CTI, notamment les renseignements exigés par le Règlement sur les renseignements nécessaires à une demande de crédit de taxe sur les intrants (TPS/TVH) (le « Règlement sur les renseignements »).

[38] Plus précisément, l’intimée fait valoir que l’appelante n’a pas obtenu de numéro d’inscription au registre de la TPS/TVH de la part des sous-traitants, contrairement aux alinéas 3b) et 3c) du Règlement sur les renseignements. À l’appui de sa thèse selon laquelle un numéro d’inscription est exigé pour que l’appelante demande des CTI, l’intimée cite la décision Systematix Technology Consultants Inc. c. La Reine, 2006 CCI 277 (procédure informelle) (« Systematix ») confirmée par l’arrêt 2007 CAF 226 et la décision SNF L.P. c. La Reine, par. 79, 2016 CCI 12 (« SNF »).

[39] En outre, pour les périodes de déclaration de 2009, l’intimée soutient que l’appelante a demandé des CTI pour ces périodes après l’expiration du délai prévu par le paragraphe 225(4) de la Loi et, par conséquent, elle n’a pas droit à ces CTI.

[40] L’intimée soutient que l’appelante n’a pas droit à un remboursement de taxe payée par erreur au titre de l’article 261 et du paragraphe 292(2.1) de la Loi.

[41] L’intimée cite le paragraphe 20 de la décision Systematix à l’appui de sa thèse selon laquelle la Loi sur la TPS est d’interprétation stricte et ne peut pas être sollicitée de manière à l’appliquer à la TPS/TVH payée en toute bonne foi, même si certains peuvent y voir une iniquité. L’intimée cite le paragraphe 28 de la décision Systematix à l’appui de sa thèse selon laquelle l’appelante n’a pas prouvé que la TPS/TVH a été payée par erreur, car il n’y a aucune preuve permettant de conclure que les sous-traitants étaient des petits fournisseurs.

[42] Subsidiairement, l’intimée cite le paragraphe 84 de la décision SNF à l’appui de sa thèse selon laquelle l’appelante a versé aux sous-traitants des sommes d’argent par erreur du fait de sa propre négligence ou de son inattention et cette erreur ne lui donne pas droit à un remboursement. Étant donné que même si l’appelante demandait un remboursement à temps, elle n’y avait pas droit, le paragraphe 292(2.1) de la Loi ne s’applique pas.

[43] L’intimée cite les paragraphes 33 à 36 de la décision Reluxicorp Inc. c. La Reine, 2011 CCI 336, à l’appui de sa thèse selon laquelle les nouvelles cotisations de 2010 à 2012 sont valables, car l’appelante a, dans ses déclarations pour les périodes de déclaration de 2010 à 2012, fait une présentation erronée par négligence, inattention ou omission volontaire.

[44] L’appelante ne s’est pas conformée aux demandes de renseignements prévues par l’article 169 de la Loi et, par conséquent, elle a fait une présentation erronée lorsqu’elle a demandé d’avoir droit à des CTI. L’appelante n’a obtenu aucun avis professionnel concernant les documents nécessaires pour demander des CTI ou au sujet de son obligation de payer aux sous-traitants la TPS/TVH. L’appelante n’a pas non plus procédé à une analyse réfléchie, prudente et délibérée pour savoir si elle devait payer aux sous-traitants la TPS/TVH. Par conséquent, l’appelante a fait une présentation erronée des faits par négligence ou inattention.

[45] L’intimée fait valoir que l’appelante est passible de la pénalité imposée aux termes du paragraphe 285 de la Loi pour les périodes de déclarations de 2009, car l’appelante a produit les déclarations de TPS/TVH pour ces périodes et demandé des CTI pour les paiements aux sous-traitants de la TPS/TVH, malgré les questions soulevées par la vérification effectuée par l’ARC. Par conséquent, l’appelante n’a fait preuve ni d’ignorance volontaire à l’égard de la question concernant l’application de la TPS/TVH aux paiements faits aux sous-traitants non inscrits, ni de faute lourde en omettant d’examiner correctement cette question.

IV. Dispositions législatives

[46] Les dispositions législatives pertinentes en l’espèce sont mentionnées dans les renvois de la section intitulée Discussion des présents motifs et, s’il y a lieu, elles sont reproduites dans cette section.

V. Discussion

[47] J’examinerai d’abord la demande par l’appelante de CTI et sa demande subsidiaire de l’application d’un « montant de remboursement déductible » [19] afin de réduire la taxe nette due par l’appelante pour les périodes de déclaration. Les autres thèses de l’appelante nécessitent de comprendre le régime qui s’applique dans la Loi sur la TPS. Son concept est simple, mais son application est complexe.

A. Résumé des dispositions pertinentes en matière de taxe, de CTI et de remboursement

[48] Plutôt que d’examiner isolément quelques dispositions législatives diverses, je résumerai d’abord la longue liste de dispositions qui régissent l’imposition d’une taxe et l’admissibilité à des CTI et des remboursements dans les circonstances de l’espèce. Le présent résumé donne le contexte législatif complet pour les questions soulevées dans le présent appel.

[49] La Loi sur la TPS impose une taxe en vertu de quatre sections : II, III, IV et IV.1. Le présent appel ne concerne que la taxe imposée en vertu de la section II.

[50] L’acquéreur d’une fourniture taxable effectuée au Canada est tenu de payer à Sa Majesté du chef du Canada une taxe calculée sur la valeur de la contrepartie de la fourniture [20] . En règle générale [21] , la taxe est payable par l’acquéreur de la fourniture taxable au premier en date du jour où la contrepartie de la fourniture taxable est payée et du jour où cette contrepartie échoit.

[51] L’imposition d’une taxe en vertu des paragraphes 165(1) et (2) de la Loi est « sous réserve des autres dispositions de la présente partie ». Étant donné que « [l]es autres dispositions de la présente partie » désignent l’intégralité de la Loi sur la TPS, chaque exception ou restriction ailleurs dans la Loi sur la TPS doit être prise en compte en établissant le paiement par une personne de la taxe imposée par ces paragraphes.

[52] Le mot « fourniture » signifie « la livraison de biens ou prestation de services, notamment par vente, transfert, troc, échange, louage, licence, donation ou aliénation » [22] .

[53] Les définitions du « bien » et du « service » sont à leur tour très larges [23] . Cependant, la définition du mot « service » exclut « [t]out ce qui n’est ni un bien, ni de l’argent, ni fourni à un employeur par une personne qui est un salarié de l’employeur, ou a accepté de l’être, relativement à sa charge ou à son emploi » [24] . Par conséquent, une fourniture comprend les services fournis à un client par un entrepreneur indépendant, mais pas les services fournis par un employé à son employeur.

[54] Une « fourniture taxable » est une fourniture effectuée dans le cadre d’une « activité commerciale » [25] .

[55] Une « activité commerciale » exercée par une personne constitue l’exploitation d’une entreprise, un projet à risque ou une affaire de caractère commercial (une « ACC ») et la réalisation d’une fourniture de la personne [26] . Sont compris parmi les « entreprises » les commerces, les industries, les professions et toutes affaires quelconques avec ou sans but lucratif [27] .

[56] La définition de l’« activité commerciale » exclut une entreprise ou ACC qui comporte la réalisation par la personne de fournitures exonérées, une fourniture exonérée d’un bien immeuble par la personne et, dans le cas d’un particulier, d’une fiducie personnelle ou d’une société de personnes, une entreprise ou ACC exploitée ou dans laquelle des activités sont menées, sans attente raisonnable de profit.

[57] Lorsque la fourniture taxable est effectuée dans une province non participante, la taxe est appelée taxe sur les produits et services (TPS) [28] . Lorsque la fourniture taxable est effectuée dans une province participante comme l’Ontario, la taxe est appelée taxe de vente harmonisée (TVH) [29] . Le taux de la taxe est de 5 % plus un pourcentage provincial réglementaire si la fourniture est effectuée dans une province participante [30] . En ce qui concerne les fournitures taxables effectuées en Ontario avant le 1er juillet 2010, le taux de taxe (TPS) est de 5 % et en ce qui concerne les fournitures taxables effectuées en Ontario après le 30 juin 2010, le taux de taxe (TVH) est de 13 % [31] .

[58] Le ministre peut établir toute taxe payable par une personne en application de la section II (ainsi que des sections IV ou IV.1) [32] . Cependant, si la taxe est payée à la personne effectuant la fourniture par l’acquéreur de cette fourniture taxable, la taxe n’est plus payable par l’acquéreur de la fourniture, à condition que l’opération soit effectuée pour un objet véritable [33] .

[59] Sous réserve de trois exceptions [34] , si une personne effectue une fourniture taxable et que la contrepartie de cette fourniture échoit alors que cette personne est un petit fournisseur non inscrit, la contrepartie n’est pas incluse dans le calcul de la taxe payable relativement à la fourniture [35] . Par conséquent, il n’y a pas de taxe payable sur une fourniture taxable effectuée par un petit fournisseur qui n’est pas un inscrit.

[60] Une personne est un petit fournisseur pendant tout un trimestre civil si la contrepartie totale des fournitures taxables effectuées par cette personne, qui est arrivée à échéance au cours des quatre trimestres civils précédents, n’excède pas 30 000 $. Une personne cesse d’être un petit fournisseur dès que la contrepartie totale dépasse la limite de 30 000 $.

[61] Une personne est un « inscrit » si elle est inscrite ou elle doit être inscrite, aux termes de la sous-section D de la section V de la Loi sur la TPS [36] . Sous réserve de trois exceptions, chaque personne qui effectue une fourniture taxable au Canada, dans le cadre d’une activité commerciale qu’elle y exerce, est tenue d’être inscrite [37] .

[62] L’une des trois exceptions concerne un petit fournisseur qui n’exploite pas une entreprise de taxis [38] . Malgré cette exception, un petit fournisseur qui exerce une activité commerciale au Canada peut s’inscrire de manière à avoir droit à des CTI pour la taxe payée [39] . Si un petit fournisseur est inscrit, la taxe est payable sur toute fourniture taxable effectuée par ce petit fournisseur.

[63] Une fourniture incluse à l’annexe VI de la Loi sur la TPS est une « fourniture détaxée ». Une fourniture taxable qui est détaxée est soumise à une taxe, mais le taux de la taxe est nul [40] . Les produits d’épicerie sont un exemple courant de fourniture détaxée.

[64] Une fourniture incluse à l’annexe V de la LTA est une « fourniture exonérée ». Une fourniture exonérée n’est pas soumise à une taxe en application de la Loi sur la TPS [41] .

[65] L’acquéreur d’une fourniture détaxée peut avoir droit à des CTI relativement à cette fourniture, par exemple, s’il y a une taxe sur les frais de livraison de la fourniture détaxée [42] . L’acquéreur d’une fourniture exonérée n’a pas droit à des CTI relativement à la fourniture [43] .

[66] Une personne qui effectue une fourniture taxable doit percevoir la taxe qui est payable par l’acquéreur relativement à la fourniture [44] . Cette règle générale ne s’applique pas à une fourniture taxable par un petit fournisseur qui n’est pas un inscrit, car la contrepartie de cette fourniture n’est pas incluse dans le calcul de la taxe payable sur la fourniture et, par conséquent, la taxe payable est nulle [45] . Cette règle générale s’applique à une fourniture taxable par un petit fournisseur si ce dernier est un inscrit ou si l’une des exceptions aux alinéas 166a), b) ou c) s’applique à la fourniture.

[67] L’inscrit doit présenter une déclaration pour chacune de ses périodes de déclaration [46] .

[68] La période de déclaration d’un inscrit peut être un exercice, un trimestre d’exercice ou un mois d’exercice de l’inscrit, en fonction du montant déterminant de l’inscrit [47] .

[69] Des règles spéciales jouent lorsqu’une personne devient un inscrit ou cesse de l’être [48] , lorsqu’une personne devient un failli ou cesse de l’être [49] ou lorsqu’un séquestre agit à ce titre pour une personne ou cesse d’agir à ce titre pour la personne [50] .

[70] Si la période de déclaration de l’inscrit est un exercice, l’inscrit doit alors produire sa déclaration trois mois après la fin de la période de déclaration [51] . Cependant, lorsque l’inscrit est un particulier dont l’exercice est l’année civile, la date d’échéance est le 15 juin s’il s’agit de la date d’échéance de production applicable au particulier aux termes de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR ») [52] .

[71] Si la période de déclaration de l’inscrit n’est pas un exercice, l’inscrit doit alors produire sa déclaration un mois après la fin de la période de déclaration [53] .

[72] La personne qui est un non-inscrit doit présenter une déclaration correspondant à une période de déclaration pour laquelle la personne doit verser une taxe nette. La date d’échéance de production de la déclaration est un mois après la fin de la période de déclaration [54] . La période de déclaration d’un non-inscrit correspond au mois civil [55] .

[73] La personne tenue de produire une déclaration en application de la section II doit y calculer sa taxe nette pour la période de déclaration qui y est visée [56] .

[74] La personne est tenue de verser au ministre sa taxe nette pour une période de déclaration au plus tard le jour où la déclaration visant la période est à produire [57] . Cependant, si la déclaration d’un particulier doit être produite le 15 juin, en application du sous-alinéa 238(1)a)(ii), comme cela est exposé plus haut, la date d’échéance du versement est le 30 avril [58] .

[75] Sous réserve des règles de la sous-section B, la taxe nette d’une personne correspond à la somme des montants percevables ou perçus au cours de la période de déclaration, au titre de la taxe prévue à la section II, plus tous les autres montants à ajouter aux termes de la Loi sur la TPS pour la période de déclaration, moins la somme des CTI pour la période de déclaration ou une période de déclaration antérieure que la personne a demandés dans une déclaration produite en application de la section II pour la période de déclaration et l’ensemble des montants qui peuvent être déduits de la taxe nette en application de la Loi sur la TPS pour la période de déclaration [59] .

[76] Si une personne acquiert ou importe un bien ou un service pour une période de déclaration au cours de laquelle elle est un inscrit et que la taxe devient payable par la personne ou qu’est payée par elle sans qu’elle soit devenue payable, le résultat déterminé au moyen d’un calcul correspond à un CTI de la personne [60] . Si l’acquisition ou l’importation d’un bien ou d’un service n’est pas uniquement aux fins de consommation, d’utilisation ou de fourniture, dans le cadre des activités commerciales, l’élément B de la formule limite le CTI à un pourcentage de la taxe payable qui représente la mesure dans laquelle le bien ou le service a été acquis ou importé à cette fin.

[77] Un inscrit peut déduire des CTI en calculant la taxe nette uniquement s’il a obtenu des renseignements suffisants pour établir le montant du crédit de taxe sur les intrants, y compris les renseignements exigés par le Règlement sur les renseignements [61] . Le ministre a le pouvoir discrétionnaire de lever cette exigence [62] .

[78] Un inscrit qui n’est pas une personne déterminée doit demander un CTI au plus tard le jour où la déclaration est à produire pour sa dernière période de déclaration se terminant dans les quatre ans suivant la fin de la période de déclaration au cours de laquelle le CTI est survenu [63] .

[79] Une personne ne peut pas déduire, en calculant la taxe nette, une somme incluse ou demandée à titre de CTI ou de déduction pour une période de déclaration antérieure. Néanmoins, si la personne n’a pas eu le droit de demander la somme en calculant sa taxe nette pour la période de déclaration antérieure uniquement parce qu’elle n’a pas satisfait aux exigences en matière de renseignements prévues par le paragraphe 169(4) avant de produire la déclaration visant cette période de déclaration antérieure, cette interdiction générale ne joue pas [64] .

[80] En outre, si des conditions précises sont remplies lors de l’établissement d’une cotisation concernant la taxe nette pour une période de déclaration donnée, le ministre doit autoriser certains CTI, même si le délai de quatre ans prévu pour demander des CTI a expiré [65] . Les conditions sont les suivantes :

  1. La somme aurait été accordée à titre de CTI si celui-ci avait été demandé dans une déclaration produite en temps utile pour la période de déclaration donnée et si les exigences en matière de renseignements prévues par le paragraphe 169(4) de la Loi avaient été satisfaites.

  2. Le CTI n’a pas été demandé dans une déclaration produite avant l’envoi de l’avis de cotisation pour la période de déclaration donnée à la personne demandant le CTI ou s’il l’a été, le ministre l’a refusé.

  3. Le CTI serait accordé pour une période de déclaration de la personne s’il était demandé dans une déclaration produite le jour où l’avis de cotisation pour la période de déclaration donnée est envoyé en supposant que le délai de quatre ans est ignoré.

[81] Sous réserve de deux restrictions, une personne qui a, par erreur ou autrement, payé une somme au titre de la taxe, de la taxe nette, des pénalités, des intérêts ou d’une autre obligation aux termes de la Loi sur la TPS, alors qu’elle n’avait pas à la payer ou à la verser, a droit au remboursement de la somme ainsi payée [66] .

[82] Selon la première restriction, un remboursement n’est pas accordé dans l’un des trois cas suivants :

  1. La somme a été prise en compte à titre de taxe ou de taxe nette pour la période de déclaration d’une personne et le ministre a établi une cotisation à l’égard de la personne pour cette période selon l’article 296 de la Loi [67] .

  2. La somme payée était une taxe, une taxe nette, une pénalité, des intérêts ou une autre somme visée par une cotisation établie selon l’article 296 de la Loi [68] .

  3. Un remboursement de la somme est accordé en application des paragraphes 215.1(1) ou (2) ou 216(6) de la Loi ou un remboursement de la somme est accordé en application des articles 69, 73, 74 ou 76 de la Loi sur les douanes par l’effet des paragraphes 215.1(3) ou 216(7) de la Loi [69] .

[83] Selon la deuxième restriction, un remboursement est accordé uniquement si la personne en a fait la demande dans les deux ans suivant le paiement ou le versement de la somme [70] .

[84] Malgré cette deuxième restriction, le ministre est tenu, lors de l’établissement d’une cotisation concernant la taxe nette d’une personne pour une période de déclaration, de déduire le remboursement si le ministre conclut qu’une somme (le « montant de remboursement déductible ») aurait été payable à la personne à titre de remboursement si :

  1. le remboursement avait fait l’objet d’une demande présentée au plus tard le jour où la déclaration pour la période devait être produite et si la personne avait payé ou versé cette somme;

  2. le montant de remboursement déductible n’a pas fait l’objet d’une demande produite par la personne avant le jour où l’avis de cotisation lui est envoyé;

  3. le montant de remboursement déductible serait payable à la personne s’il faisait l’objet d’une demande produite le jour où l’avis de cotisation lui est envoyé, ou serait refusé s’il faisait l’objet d’une telle demande du seul fait que le délai dans lequel il peut être demandé a expiré avant ce jour [71] .

B. Analyse de la demande de CTI ou d’un remboursement présentée par l’appelante

[85] L’avocate de l’appelante fait valoir que soit l’appelante a droit à des CTI en vertu du paragraphe 169(1) de la Loi pour les sommes versées aux sous-traitants au titre de la taxe prévue à la section II de la Loi sur la TPS, soit l’appelante a droit au emboursement prévu par le paragraphe 261(1) de la Loi relativement à la taxe payée par erreur ou elle a le droit de demander ce remboursement afin de réduire sa taxe nette en application du paragraphe 296(2.1) de la Loi.

[86] L’intimée a accordé la demande par l’appelante de CTI à l’égard de la taxe payée (les [traduction] « paiements autorisés ») aux sous-traitants qui étaient des inscrits au moment du paiement (les [traduction] « sous-traitants inscrits »). Les paiements autorisés sont énumérés pour chaque année dans l’onglet H de l’ECFP et totalisent 76 291,61 $. L’avocate de l’intimée a informé la Cour que les CTI autorisés pour chacune des périodes de déclaration trimestrielles se terminant une année précisée dans le présent résumé correspondraient à un trimestre de la somme annuelle indiquée pour cette année [72] .

[87] L’intimée n’accorde pas la demande par l’appelante de CTI totalisant 765 398,30 $ et désignés par l’appelante comme la taxe payée (les [traduction] « paiements en cause ») aux sous-traitants qui étaient des non-inscrits au moment du paiement (les [traduction] « sous-traitants non inscrits »).

[88] Pour refuser les paiements en cause, l’intimée a allégué que l’appelante ne satisfaisait pas aux exigences en matière de renseignements imposées par le paragraphe 169(4) de la Loi, plus précisément, celle de l’obtention d’un numéro d’inscription auprès de chaque sous-traitant à qui une taxe était payée. En outre, l’intimée soutient que les demandes par l’appelante de CTI à l’égard des périodes de déclaration de 2009 ont été présentées après l’expiration du délai de quatre ans prévu par le paragraphe 225(4) de la Loi.

[89] D’après la pièce A-1, des sommes d’argent ont été versées périodiquement aux sous-traitants et chacun de ces versements était excédentaire de 30 $. Il est indiqué dans l’ECFP que la pièce A-1 présente les paiements effectués par l’appelante aux sous-traitants au cours des périodes de déclaration de 2010 à 2015. Rien ne permet de penser que l’ampleur de chaque paiement était différente de celle correspondant aux périodes de déclaration de 2009.

[90] En pareilles circonstances, aux fins de l’alinéa 169(4)a) de la Loi, les renseignements suivants sont prévus par le sous-alinéa 3b)(i) du Règlement sur les renseignements :

3. Les renseignements visés à l’alinéa 169(4)a) de la Loi, sont les suivants :

[. . .]

b) lorsque le montant total payé ou payable, selon la pièce justificative, à l’égard d’une ou de plusieurs fournitures est de 30 $ ou plus et de moins de 150 $,

(i) le nom ou le nom commercial du fournisseur ou de l’intermédiaire, et le numéro d’inscription attribué, conformément à l’article 241 de la Loi, au fournisseur ou à l’intermédiaire, selon le cas, [. . .]

[Non souligné dans l’original.]

[91] Si un paiement excède 150 $, l’alinéa 3c) du Règlement sur les renseignements impose des exigences en plus de celles prévues à l’alinéa 3b).

[92] M. Procopoudis s’est fié aux renseignements figurant sur le site Web de l’ARC qui portent sur les ententes contractuelles afin de déterminer les renseignements obtenus par l’appelante auprès des sous-traitants. Ces renseignements ne mentionnent aucunement la nécessité d’obtenir un numéro d’inscription auprès d’un bénéficiaire. En revanche, ces renseignements font référence à un numéro d’entreprise que l’appelante obtenait lorsqu’il en existait un.

[93] Pour gérer les paiements effectués à ses sous-traitants et employés, l’appelante a fait appel à Desjardins et celui-ci a, pour chaque paiement fait à un sous-traitant, consigné le nom, l’adresse, le taux horaire, les heures de travail effectuées par le sous-traitant, ainsi que la rémunération et la TPS/TVH payées à ce dernier. Les renseignements fournis à l’appelante par Desjardins pour chaque paiement effectué aux sous-traitants suffisent largement pour étayer le montant des CTI demandés par l’appelante [73] .

[94] Cependant, le paragraphe 169(4) de la Loi et le Règlement sur les renseignements exigent, dans le cas de fournitures taxables dont la valeur est supérieure à 30 $, qu’un inscrit obtienne le numéro d’inscription du bénéficiaire afin d’avoir droit à un CTI pour la taxe payée à ce bénéficiaire. Comme l’a observé la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Systematix technology consultants inc. c. Canada [74] :

Nous sommes d’avis que la Loi exige que les personnes ayant versé des sommes au titre de la TPS à des fournisseurs veillent à fournir des numéros d’inscription des fournisseurs valides lorsqu’elles demandent un crédit de taxe sur les intrants [75] .

[95] L’appelante n’a pas obtenu les renseignements exigés et, par conséquent, elle n’a pas droit aux CTI relativement aux paiements en cause. Vu cette conclusion, il n’est plus nécessaire d’examiner l’autre thèse de l’intimée concernant les CTI pour les périodes de déclaration de 2009.

[96] Selon la re thèse subsidiaire de l’appelante, elle a droit au remboursement prévu par le paragraphe 261(1) de la Loi, de la taxe payée par erreur ou à l’application de ce remboursement en réduction de sa taxe nette aux termes du paragraphe 296(2.1) de la Loi.

[97] Le paragraphe 261(1) de la Loi dispose :

261

(1) Dans le cas où une personne paie un montant au titre de la taxe, de la taxe nette, des pénalités, des intérêts ou d’une autre obligation selon la présente partie alors qu’elle n’avait pas à le payer ou à le verser, ou paie un tel montant qui est pris en compte à ce titre, le ministre lui rembourse le montant, indépendamment du fait qu’il ait été payé par erreur ou autrement.

[98] Avant d’examiner le paragraphe 261(1) de la Loi, il importe de rechercher pourquoi la Loi sur la TPS permet à une personne de demander le remboursement de sommes payées par erreur à un petit fournisseur qui n’est pas un inscrit.

[99] Une personne qui est un non-inscrit, mais qui reçoit une somme d’argent au cours d’un mois civil au titre de la taxe prévue par la Loi sur la TPS, est tenue de produire une déclaration en application de la Loi sur la TPS dans le mois suivant la fin de ce mois civil, de déclarer cette somme d’argent comme taxe nette dans la déclaration et de la verser au ministre dans le même délai [76] . En outre, le ministre a le droit d’établir une cotisation concernant la taxe nette de la personne, que cette dernière ait produit ou non une déclaration [77] .

[100] En bref, les dispositions applicables visent à veiller à ce que le ministre puisse percevoir les sommes payées par erreur aux personnes qui sont des non-inscrits, p. ex. les sous-traitants non inscrits.

[101] Pour revenir au paragraphe 261(1) de la Loi, le juge Rothstein, dans l’arrêt unanime de la Cour suprême du Canada, UPS, a reproduit le paragraphe 261(1) de la Loi et observé :

Sous réserve des par. (2) et (3), le par. 261(1) semble à première vue appuyer l’allégation de UPS selon laquelle elle avait droit au remboursement du montant de TPS payé en trop. UPS a payé, à l’égard de marchandises importées, un montant au titre de la TPS qu’elle n’avait pas à payer ou à verser puisqu’il s’agissait d’un paiement en trop. Ce paiement en trop résultait d’erreurs commises par UPS et ses clients. Dans de telles circonstances, le par. 261(1) prévoit que le ministre doit rembourser le montant du paiement en trop [78] .

[102] À l’occasion de l’affaire UPS, le ministre a soutenu que, vu que United Parcel Service était intervenue à titre de mandataire, elle n’était pas la personne qui a payé la somme d’argent au titre de la taxe prévue par la Loi sur la TPS. Le juge Rothstein a rejeté cet argument en observant que la responsabilité elle-même n’était pas pertinente, car « il n’existe aucune obligation de payer une taxe qui a été acquittée par erreur » [79] . Le juge Rothstein poursuit ainsi :

Le législateur ne peut avoir eu l’intention d’empêcher des personnes qui n’étaient pas tenues de payer certaines sommes au titre de la TPS mais l’ont fait par erreur d’obtenir le remboursement des sommes en question [80] .

[. . .]

Le paragraphe 261(1) est libellé en termes généraux. Il ne contient aucune restriction semblable à celle alléguée par le ministre. Le contexte du par. 261(1) n’étaye nullement une telle restriction, et le ministre n’a invoqué aucune autre disposition de la Loi sur la taxe d’accise ou de la Loi sur les douanes, L.R.C. 1985, ch. 1 (2e suppl.), l’appui d’une telle restriction. Il ne serait pas conforme au sens ordinaire et grammatical du texte de la disposition d’interpréter le par. 261(1) d’une façon qui empêcherait des personnes ayant par erreur payé la TPS ou versé des sommes en trop à cet égard de se faire rembourser par le ministre [81] .

[103] L’intimée soutient que rien n’indique que les sous-traitants non inscrits étaient des petits fournisseurs et, par conséquent, que les paiements en cause ont été versés par erreur.

[104] Subsidiairement, l’intimée soutient que si les paiements en cause ont été versés par erreur, cette erreur a résulté de l’inattention et de la négligence de l’appelante et, pour cette raison, l’appelante n’a pas droit au remboursement prévu par le paragraphe 261(1) de la Loi. L’intimée cite le paragraphe 84 de la décision SNF où le juge de la Cour canadienne de l’impôt observe :

L’argument subsidiaire de l’appelante [sic] avancé au cours de l’audience, selon lequel elle a droit à un remboursement parce qu’elle a payé la TPS par erreur, à M. Dubé Vanier et à Mme Bergeron, doit être rejeté. Tout montant payé à M. Dubé Vanier à compter du 17 septembre 2010 n’a pas été payé à titre de TPS étant donné que ce dernier n’était plus autorisé à percevoir la TPS. Il avait cessé d’être mandataire de la Couronne. Les montants payés à Mme Bergeron ont été payés par erreur, mais l’erreur était due à la négligence de SNF ellemême. Je ne peux pas considérer que l’article 261 de la LTA envisage un remboursement pour une erreur attribuable à l’inattention ou à la négligence de son auteur. Le droit à un remboursement dans l’une ou l’autre situation ouvrirait une boîte de Pandore, donnant lieu à des demandes douteuses on non fondées, demandes dont le législateur n’a jamais entendu parler, et encore moins envisagées.

[105] Enfin, l’intimée cite la jurisprudence Systematix de la Cour canadienne de l’impôt à l’appui de la thèse selon laquelle le paragraphe 296(2.1) de la Loi ne vise pas la somme versée à un fournisseur qui est un non-inscrit. J’étudierai la jurisprudence Systematix lors de mon examen ci-dessous du paragraphe 296(2.1) de la Loi.

[106] En ce qui concerne l’argument de l’intimée selon lequel rien n’indique que les sous-traitants non inscrits étaient des petits fournisseurs, l’intimée déclare ce qui suit dans la réponse modifiée au paragraphe 8h), à titre d’hypothèse de fait formulée par le ministre :

[traduction]
h) l’appelante savait ou aurait dû savoir que la plupart des sous-traitants étaient des petits fournisseurs et qu’ils n’étaient pas tenus d’être inscrits;

[107] Cette hypothèse de fait contient deux exposés des faits. Le premier exposé porte sur ce que savait l’appelante au sujet du statut des sous-traitants. M. Procopoudis a témoigné que jusqu’au milieu de 2015, il ignorait l’existence de l’exception concernant les petits fournisseurs dans la Loi sur la TPS. J’en déduis donc qu’il ne s’est pas penché sur le statut de petits fournisseurs des sous-traitants.

[108] Le deuxième exposé porte sur le statut de petits fournisseurs de la plupart des sous-traitants qui n’étaient pas tenus d’être inscrits. L’appelante n’a pas mis en doute ou contesté cet exposé des faits.

[109] Notre Cour doit tenir pour avérée une hypothèse de fait énoncée dans la réponse modifiée, sauf si elle est [traduction] « mise en doute par l’appelante » [82] . L’intimée n’est pas tenue de présenter des éléments de preuve pour étayer une hypothèse de fait, bien qu’elle puisse choisir de le faire.

[110] L’appelante peut choisir de contester l’hypothèse de fait du ministre, mais elle peut aussi choisir de tenir certains de ces faits pour avérés. Il serait manifestement injuste à l’égard de l’appelante de lui reprocher de ne pas avoir produit d’éléments de preuve établissant ce fait, sans l’informer que l’hypothèse de fait au paragraphe 8h) de la réponse modifiée a été retirée [83] .

[111] En outre, la concession de l’intimée à l’égard des CTI relativement aux paiements autorisés est conforme à la conclusion selon laquelle les sous-traitants non inscrits sont des petits fournisseurs.

[112] Plus précisément, l’intimée a accordé la demande de CTI faite par l’appelante relativement aux paiements autorisés, mais pas relativement aux paiements en cause. Étant donné qu’il ressort des preuves que l’appelante n’a pas obtenu de numéro d’inscription auprès des sous-traitants, j’en déduis que le ministre a exercé le pouvoir que lui confère le paragraphe 169(5) de la Loi pour lever les exigences en matière de renseignements imposées par le paragraphe 169(4) de la Loi et par le Règlement sur les renseignements en ce qui concerne les paiements autorisés.

[113] Un « inscrit » est notamment une personne qui est tenue d’être inscrite aux termes de la sous-section D de la section V de la Loi sur la TPS [84] . Sous réserve de trois exceptions, chaque personne qui effectue une fourniture taxable au Canada, dans le cadre d’une activité commerciale qu’elle y exerce, est tenue d’être inscrite [85] .

[114] Un petit fournisseur qui n’exploite pas une entreprise de taxis n’est pas tenu d’être inscrit [86] , mais il peut choisir de l’être s’il exerce une activité commerciale au Canada [87] .

[115] La concession de l’intimée signifie clairement que les sous-traitants non inscrits étaient des petits fournisseurs qui ont choisi de ne pas s’inscrire aux termes de la Loi sur la TPS. Si ces sous-traitants n’étaient pas des petits fournisseurs, ils seraient des inscrits, étant donné qu’ils ont effectué des fournitures dans le cadre d’une activité commerciale qu’ils exercent au Canada. Si tel était le cas, il n’y aurait pas de principe cohérent selon lequel le ministre pourrait opérer une distinction entre les sous-traitants non inscrits et les sous-traitants inscrits dans l’application du paragraphe 169(5) de la Loi.

[116] En conclusion, je rejette le premier argument de l’intimée au motif qu’il y a une hypothèse de fait selon laquelle la plupart des sous-traitants sont des petits fournisseurs qui ne sont pas inscrits aux termes de la Loi sur la TPS. Je déduis également de la concession du ministre concernant les CTI que les sous-traitants non inscrits sont des petits fournisseurs qui ne sont pas des inscrits.

[117] Pour ce qui est du paragraphe 84 de la décision SNF invoqué par l’intimée à l’appui de la thèse selon laquelle le paragraphe 261(1) de la Loi ne vise pas l’erreur qui découle de la négligence ou de l’inattention de l’appelante, il ressort de la formulation de l’argument faite par le juge de la Cour canadienne de l’impôt et du fait que seul un paragraphe de la décision SNF est consacré au paragraphe 261(1) de la Loi que le juge n’a pas bénéficié d’argumentaires poussés sur ce point. Il est particulièrement révélateur que la décision SNF ne comporte aucune mention de la jurisprudence UPS de la Cour suprême du Canada.

[118] Le paragraphe 261(1) de la Loi s’applique à « un cas où une personne paie un montant au titre de la taxe, de la taxe nette, des pénalités, des intérêts ou d’une autre obligation » en application de la Loi sur la TPS « alors qu’elle n’avait pas à le payer ou à le verser [...] indépendamment du fait qu’il ait été payé par erreur ou autrement ».

[119] Comme l’a fait observer le juge Rothstein dans l’arrêt UPS, le paragraphe 261(1) de la Loi est libellé libellée en termes généraux . Il vise un large éventail de sommes qu’une personne a versées « indépendamment du fait qu’[elles] ai[en]t été payé[es] par erreur ou autrement ».

[120] Bien qu’il soit loisible au juge d’interpréter une disposition libellée en termes généraux afin de mettre en application une exception ou restriction tacite qui est implicite dans le texte législatif, il ne saurait le modifier afin d’en dégager une restriction qui ne découle pas implicitement du texte.

[121] Une restriction ne peut découler implicitement du texte que s’il ressort de son libellé, du contexte ou de son objet que le législateur avait à l’esprit cette restriction, sinon, la Cour usurpe de façon inadmissible le rôle du législateur. Bien que l’existence d’une intention du législateur ne soit pas toujours évidente [88] , à mon avis, rien dans le texte, le contexte ou l’objet de l’article 261 de la Loi n’indique que le législateur avait à l’esprit les restrictions énoncées au paragraphe 84 de la décision SNF.

[122] Comme en ce qui concerne la restriction que soutenait le ministre à l’occasion de ldans l’arrêt UPS, on ne peut dégager du texte du paragraphe 261(1) de la Loi la restriction soutenue par l’intimée; une telle inférence serait contraire au sens ordinaire et grammatical de ce texte.

[123] Pour retenir l’argument de l’intimée, il faudrait lire le passage « indépendamment du fait qu’il ait été payé par erreur ou autrement » ainsi : « indépendamment du fait que la somme ait été versée par erreur (sauf une erreur découlant de la [négligence] ou de l’[inattention] de la personne) ou autrement ». Ce sens diffère complètement de celui exprimé par le texte lui-même.

[124] Les paragraphes 261(2) à (3) de la Loi limitent explicitement les circonstances dans lesquelles une personne peut obtenir un remboursement prévu par le paragraphe 261(1) de la Loi. Ces paragraphes sont muets quant à la raison de l’erreur. Le législateur aurait pu ajouter une exception portant sur l’erreur, mais il ne l’a pas fait. L’intimée n’a relevé aucune autre disposition dans la Loi sur la TPS qui va dans le sens de la conclusion selon laquelle le législateur avait à l’esprit une restriction en fonction de la raison de l’erreur commise par l’appelante.

[125] Les notes techniques qui accompagnaient l’introduction de l’article 261 de la Loi ainsi qu’une modification mineure apportée à l’article en 2018 indiquent respectivement ce qui suit :

En application de cet article, quand une personne paie ou verse un montant au titre de la taxe, de la taxe nette, des pénalités ou des intérêts et que l’on constate par la suite qu’elle n’avait pas à le faire, elle peut en demander le remboursement dans les quatre ans suivant le jour du paiement ou versement du montant. Mais quand le montant a été inclus dans une cotisation en application de l’article 296 ou qu’il se rapporte à une détermination de valeur aux termes de la Loi sur les douanes, la personne doit suivre les procédures applicables de cotisation et d’appel pour le recouvrer. À noter qu’il n’est pas permis de présenter plus d’une demande par mois en vertu de cet article.

Et

L’article 261 de la Loi prévoit que lorsqu’une personne paie ou verse un montant au titre de taxe, de la taxe nette, des pénalités ou des intérêts et que l’on constate par la suite qu’elle n’avait pas à le faire, elle peut en demander le remboursement si les conditions applicables sont remplies.

[126] Conformément à ces notes techniques ainsi qu’au texte et au contexte de la disposition, l’objet de l’article 261 de la Loi est de prévoir un remboursement pour les personnes qui ont payé une somme au titre de la taxe si les conditions à l’article 261 de la Loi sont remplies. La somme versée par erreur ou autrement fait partie des conditions applicables. La raison de l’erreur n’est simplement pas prise en considération dans l’application de l’article.

[127] Conformément au régime de la Loi sur la TPS qui s’applique au bénéficiaire de ce paiement, il n’est aucunement fait mention des motifs de l’erreur à l’article 261 de la Loi. Selon ce régime, toute somme perçue « au titre de la taxe prévue à la section II » est considérée comme la taxe nette du bénéficiaire et le ministre est autorisé à établir une cotisation concernant cette taxe nette et à la percevoir [89] . Il convient de souligner que le ministre peut établir une cotisation à l’égard de la taxe nette et la percevoir, quelle que soit la raison pour laquelle la somme a été perçue par le bénéficiaire.

[128] Pour les motifs qui précèdent, selon ma lecture du paragraphe 261(1) de la Loi, je ne saurais restreindre sa portée en fonction de la négligence ou de l’inattention alléguée de l’appelante.

[129] Aux termes du paragraphe 261(3) de la Loi, le versement d’un remboursement prévu par le paragraphe 261(1) de la Loi est refusé si la demande de remboursement n’a pas été présentée dans les deux ans suivant le paiement ou le versement de la somme. L’appelante n’a pas demandé le remboursement des paiements en cause prévu par le paragraphe 261(1) et le délai de deux ans concernant tous les paiements en cause est échu depuis longtemps.

[130] Cependant, le paragraphe 296(2.1) de la Loi exige que le ministre établisse une cotisation à l’égard d’une personne afin de déduire un remboursement prévu par le paragraphe 261(1) de la Loi dans le calcul de la taxe nette de cette personne si des conditions précises sont remplies. Dans l’arrêt UPS, le juge Rothstein a ainsi résumé le paragraphe 296(2.1) de la Loi :

Par ailleurs, le par. 296(2.1) prévoit que si le ministre constate, lors de l’établissement d’une cotisation, qu’un remboursement aurait été payable s’il avait fait l’objet d’une demande, qu’il n’a pas fait l’objet d’une telle demande et que le délai pour réclamer un remboursement est expiré, il doit, sauf demande contraire de la personne concernée, appliquer le montant du remboursement en réduction de la taxe nette de cette personne.

[131] Après avoir cité ce paragraphe, le juge Rothstein a observé :

Selon mon interprétation du par. 296(2.1), même si aucune demande de remboursement n’a été produite avant l’expiration du délai applicable, si le ministre constate qu’un remboursement aurait dû être accordé s’il avait été réclamé, il doit, lors de l’établissement de la nouvelle cotisation, appliquer le montant du remboursement en réduction de la taxe nette due par le contribuable. Le paragraphe fait référence à un « montant de remboursement déductible ». Ce terme doit s’entendre d’un montant de remboursement qui aurait été accordé si la procédure applicable avait été suivie. Autrement dit, le non-respect de cette procédure n’est pas fatal pour la demande de remboursement.

[132] L’intimée soutient que le paragraphe 296(2.1) de la Loi ne joue pas, car l’appelante n’aurait pas eu droit au remboursement prévu par le paragraphe 261(1), même si elle en avait fait la demande en temps utile.

[133] L’intimée cite une observation isolée du juge de la Cour canadienne de l’impôt dans la décision Systematix selon laquelle « [. . .] l’argument de l’avocat selon lequel la TPS payée à un fournisseur non inscrit devrait être remboursée au titre de montant payé par erreur est non fondé » va dans le sens de la thèse selon laquelle le remboursement ne s’applique pas aux paiements en cause [90] .

[134] Dans la décision Systematix, le juge de la Cour canadienne de l’impôt examine un cas où la règle sur la perception au paragraphe 221(1) de la Loi s’appliquait au bénéficiaire d’un paiement, même si celui-ci était un non-inscrit [91] . Le juge de la Cour canadienne de l’impôt reproduit les dispositions portant sur le prélèvement et la perception [92] , puis conclut que « les dispositions portant sur le prélèvement et la perception n’ont rien à voir avec le statut d’inscrit du fournisseur ».

[135] Dans la décision Systematix, le juge de la Cour canadienne de l’impôt dit expressément que rien n’indique dans cette affaire que les personnes qui effectuent des fournitures taxables étaient des petits fournisseurs. Par conséquent, le juge de la Cour canadienne de l’impôt n’a pas examiné un cas où la taxe n’était pas payable ou percevable parce que le bénéficiaire était un petit fournisseur qui n’était pas un inscrit. La Cour d’appel fédérale a confirmé la conclusion tirée par le juge de la Cour canadienne de l’impôt selon laquelle le contribuable n’avait pas droit à des CTI, mais elle n’a pas examiné la question du remboursement prévu par le paragraphe 261(1) ou 296(2.1) de la Loi.

[136] En dehors des thèses que j’ai déjà discutées, il n’est pas, par ailleurs, controversé par l’intimée que les conditions d’application des paragraphes 261(1) et 296(2.1) aux périodes de déclaration avaient été remplies par l’appelante et qu’il n’y a aucun élément de preuve en sens contraire. Par conséquent, je conclus que l’appelante a le droit de demander au ministre de déduire les paiements en cause dans le calcul de la taxe nette de l’appelante pour les périodes déclarées.

C. Les nouvelles cotisations de 2010 à 2012 sont-elles prescrites?

[137] Ma conclusion concernant l’application des paragraphes 261(1) et 296(2.1) aux périodes de déclaration rend théorique la question de savoir si les nouvelles cotisations de 2010 à 2012 sont prescrites. Néanmoins, je discuterai cette question afin d’être exhaustif.

[138] L’appelante a demandé des CTI pour les périodes de déclaration de 2010 à 2012 en se fondant sur ce qu’avait cru comprendre M. Procopoudis, à savoir que l’appelante avait le droit de recouvrer la « taxe » payée aux sous-traitants selon les modalités des contrats conclus avec ces sous-traitants. M. Procopoudis a cru que la taxe était payable en raison du paragraphe 4 des contrats.

[139] Lors de son contre-interrogatoire, M. Procopoudis a donné une interprétation parfaitement raisonnable de l’expression [traduction] « le cas échéant » au paragraphe 4 des contrats qui concorde avec la distinction opérée par la Loi sur la TPS entre les fournitures taxables qui sont soumises à une taxe et les fournitures exonérées qui ne le sont pas.

[140] M. Procopoudis a aussi admis qu’il n’a pas interrogé ses conseillers professionnels au sujet du droit de l’appelante à des CTI pour la taxe payée aux sous-traitants et prévue par les contrats.

[141] M. Procopoudis a toutefois cherché à obtenir des renseignements concernant le droit de l’appelante à des CTI et il s’est fié à l’information qu’il a recueillie en consultant le site Web de l’ARC concernant la taxe payée aux termes d’ententes contractuelles. M. Procopoudis a dit que l’information figurant sur la première page de la pièce A-4 était identique à celle tirée du site Web de l’ARC en 2009. De façon tout à fait raisonnable, M. Procopoudis a qualifié la position de l’ARC de très claire.

[142] L’information recueillie par M. Procopoudis à partir du site Web de l’ARC en 2009 est intitulée « Exceptions des exigences de facturation » et il est indiqué ce qui suit : [traduction] « les inscrits sont tenus de conserver les documents requis afin d’étayer leur demande de CTI et de remboursements. Les exigences en matière de documents ont dans certaines circonstances été réduites » et [traduction] « [e]n ce qui concerne les ententes contractuelles, l’accord contractuel, les livres et registres ainsi que les documents connexes doivent mettre en évidence » des renseignements précis. Il n’est pas fait mention du numéro d’inscription d’un bénéficiaire dans les renseignements précis.

[143] L’appelante a fait appel à une entreprise d’administration de la paie qui a recueilli et énuméré les renseignements provenant de l’ARC qui traitent des ententes contractuelles. Malheureusement pour l’appelante, l’exigence technique aux alinéas 3b) et 3c) du Règlement sur les renseignements pour obtenir un numéro d’inscription auprès du bénéficiaire n’a pas été satisfaite.

[144] La question est de savoir si, dans les circonstances, l’appelante a, dans ses déclarations pour les périodes de déclaration de 2010 à 2012, fait une présentation erronée qui est imputable à la négligence, à l’inattention ou à une omission volontaire.

[145] La norme pour conclure à une présentation erronée n’est pas élevée. Même si une croyance honnête et raisonnable peut ne pas constituer une présentation erronée, la jurisprudence enseigne que, en général, toute déclaration erronée dans une déclaration est une présentation erronée. Dans l’arrêt Nesbitt c. Canada [93] , la Cour d’appel fédérale a observé au paragraphe 8 :

Des faits ont été présentés erronément s’il se trouve un élément inexact dans la déclaration, du moins un élément qui est important pour les fins de la déclaration ainsi que de toute nouvelle cotisation ultérieure. Cela demeure une présentation erronée de fait même si le ministre pourrait relever ou relève effectivement l’erreur dans la déclaration en procédant à une analyse attentive des documents justificatifs.

[146] Dans la décision Venne c. Canada [94] , la Cour a conclu que la négligence était semblable à une faute lourde et que l’inattention et l’omission volontaire étaient des normes plus élevées. La Cour affirme ce qui suit au paragraphe 16 : [traduction]

[. . .] une négligence est établie s’il est démontré que le contribuable n’a pas fait preuve de diligence raisonnable.

[147] Dans l’arrêt Regina Shoppers Mall Ltd. v. M.N.R. [95] , la Cour d’appel fédérale a observé que la norme de diligence imposée par le terme [traduction] « négligence », lorsque la loi n’est pas claire ou que la caractérisation des faits est incertaine, est celle d’une personne prudente et avisée [96] .

[148] L’intimée fait valoir que l’appelante a fait preuve d’inattention ou de négligence, car elle n’a pas sollicité d’avis professionnels concernant les documents exigés pour demander des CTI ou son obligation de payer la TPS/TVH aux sous-traitants.

[149] Cependant, l’appelante a bel et bien fait appel à des avocats pour l’examen des contrats conclus avec les sous-traitants, à un comptable pour la préparation de ses déclarations trimestrielles en application de la Loi sur la TPS et à une entreprise d’administration de la paie pour la gestion des paiements faits aux sous-traitants.

[150] On pourrait raisonnablement s’attendre à ce qu’en présence d’une question évidente concernant l’obligation de l’appelante de payer la taxe aux sous-traitants ou relativement à ses droits à des CTI découlant de ces paiements, l’une ou plusieurs de ces personnes évoquent cette question avec l’appelante au moment de la conception et de la mise en œuvre des ententes.

[151] L’intimée affirme en outre que l’appelante n’a pas non plus procédé à une analyse réfléchie, prudente et délibérée pour savoir si elle devait payer aux sous-traitants la TPS/TVH.

[152] Le paiement de la taxe aux sous-traitants est prévu par les contrats conclus avec les sous-traitants. Ces contrats ont été examinés par les avocats de l’appelante en 2009.

[153] M. Procopoudis s’est raisonnablement concentré sur la question de savoir si l’appelante avait droit à des CTI pour la taxe payée prévue par les contrats et il a recueilli l’information à partir du site Web de l’ARC qui semblait à première vue porter directement sur cette question. Une formalité dans le Règlement sur les renseignements qui ne correspondait pas à l’information sur les ententes contractuelles que M. Procopoudis a recueillie à partir du site Web de l’ARC lui a fait commettre une erreur au sujet de la demande de CTI présentée par l’appelante.

[154] M. Procopoudis a fait des efforts sincères pour déterminer le droit de l’appelante aux CTI demandés dans sa déclaration pour les périodes de déclaration de 2010 à 2012. En se fiant à l’information qu’il a recueillie à partir du site Web de l’ARC, M. Procopoudis a commis une erreur compréhensible et de bonne foi.

[155] La norme imposée par l’alinéa 298(4)a) n’est pas celle de la perfection. Dans les circonstances, l’erreur commise par M. Procopoudis concernant le droit de l’appelante à des CTI ne saurait être imputable à ’inattention, la négligence ou à une omission volontaire de sa part.

[156] Par conséquent, si je fais erreur quant à ma conclusion concernant l’application des paragraphes 261(1) et 296(2.1) de la Loi aux périodes de déclaration de 2010 à 2012, je conclus que les nouvelles cotisations de 2010 à 2012 sont prescrites et qu’elles sont donc nulles.

D. L’imposition de pénalités en vertu de l’article 285 de la Loi

[157] Voici la partie introductive de l’article 285 de la Loi :

Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, une demande, un formulaire, un certificat, un état, une facture ou une réponse – appelés « déclaration » au présent article – établi pour une période de déclaration ou une opération, ou y participe, y consent ou y acquiesce, est passible d’une pénalité de 250 $ ou, s’il est plus élevé, d’un montant égal à 25 % de la somme des montants suivants : [. . .]

[158] Les dispositions liminaires indiquent deux conditions qui doivent être remplies si l’imposition par le ministre d’une pénalité en vertu de l’article 285 de la Loi doit être maintenue.

[159] Premièrement, l’appelant doit avoir fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, une demande, un formulaire, un certificat, un état, une facture ou une réponse, désignés collectivement comme une « déclaration » ou y a participé, consenti ou acquiescé.

[160] Les mots « faux énoncé » et « omission » ne permettent pas de définir l’élément moral requis pour l’imposition de la pénalité, qui est plutôt défini dans la deuxième exigence. Par conséquent, aux fins de l’application de l’article 285 de la Loi, un « faux énoncé » est un énoncé dans une déclaration qui n’est pas vrai et une « omission » est quelque chose qui est exclu d’une déclaration.

[161] Deuxièmement, le faux énoncé ou l’omission doivent avoir été faits par l’appelante sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, ou l’appelante doit avoir participé, consenti ou acquiescé à ce faux énoncé ou à cette omission sciemment ou dans des circonstances équivalant à une faute lourde.

[162] Étant donné que l’appelante est une société, les normes de l’article 285 s’appliquent au particulier qui donne effet aux actions de l’appelante, en l’espèce M. Procopoudis.

[163] Dans l’arrêt Wynter c. Canada, [97] la Cour d’appel fédérale a fait les observations suivantes concernant les deux normes au paragraphe 163(2) de la LIR dont le libellé est essentiellement le même que celui de l’article 285 de la Loi :

[11] Lorsque le législateur utilise d’autres termes, il est présumé avoir eu l’intention de prêter des sens différents à ces termes. En d’autres mots, le législateur ne se répète pas : voir Ruth Sullivan, Statutory Interpretation, 3e éd. (Toronto : Irwin Law Inc., 2016), à la page 43. L’article 163 permet l’imposition de pénalités dans les cas où le contribuable a connaissance des faits ou dans des circonstances équivalant à faute lourde. L’article n’est pas conjonctif, et ces deux termes sont présumés avoir un sens et une teneur différents.

[12] La distinction entre la faute lourde – établie par une appréciation objective du comportement du contribuable – et l’ignorance volontaire (également appelée « aveuglement volontaire ») – établie par renvoi à l’état d’esprit subjectif du contribuable – ne date pas d’hier. Il est vrai qu’il s’agit parfois d’une distinction ténue qui n’est pas toujours clairement établie. Néanmoins, le législateur est présumé avoir été au courant de cette distinction.

[164] Dans la décision Peck c. La Reine [98] , j’ai reproduit ces deux paragraphes tirés de l’arrêt Wynter, puis j’ai ainsi décrit les deux normes :

[43] Comme l’indique l’arrêt Wynter, le mot « sciemment » exige de la Cour qu’elle détermine si l’appelant avait une connaissance subjective qu’il faisait un faux énoncé dans sa déclaration de revenu ou dans sa demande au moment où il a signé ces documents. Il incombe à l’intimée de présenter des éléments de preuve établissant, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant savait qu’il faisait un faux énoncé lorsqu’il a signé la déclaration de revenu et la demande.

[44] Comme l’indique également l’arrêt Wynter, la connaissance subjective de l’appelant peut être prouvée au moyen d’éléments de preuve établissant, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant a fait preuve d’ignorance volontaire quant à la véracité des énoncés contenus dans la déclaration de revenu et la demande. Il s’agit là d’une précision utile sur le fait que l’ignorance volontaire permet d’imputer une connaissance subjective à l’appelant et que l’ignorance volontaire et la faute lourde sont des concepts juridiques différents.

[45] Pour établir l’ignorance volontaire, la preuve doit démontrer, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant savait subjectivement que les faux énoncés contenus dans la déclaration de revenu et la demande étaient probablement faux, mais qu’il a délibérément choisi de ne pas se renseigner davantage parce qu’il savait subjectivement ou soupçonnait fortement que s’il se renseignait, il saurait que les énoncés étaient effectivement faux (voir les arrêts Sansregret c. La Reine, [1985] 1 R.C.S. 570, à la page 584, R. c. Jorgensen, [1995] 4 R.C.S. 55, aux paragraphes 102 et 103, et Briscoe c. La Reine, 2010 CSC 13, [2010] 1 R.C.S. 411, aux paragraphes 21 à 23). Le critère de l’ignorance volontaire est résumé comme suit dans l’arrêt Wynter :

[13] Un contribuable fait preuve d’ignorance volontaire lorsqu’il prend conscience de la nécessité de se renseigner, mais refuse de le faire parce qu’il ne veut pas connaître la vérité ou qu’il évite soigneusement de la connaître. Il s’agit de la notion de l’ignorance délibérée : R. c. Briscoe, 2010 CSC 13, aux paragraphes 23 et 24, [2010] 1 R.C.S. 411 (Briscoe); Sansregret, au paragraphe 24. Dans ces circonstances, la doctrine de l’ignorance volontaire impute une connaissance au contribuable : Briscoe, au paragraphe 21. [. . .]

[46] La connaissance subjective qui est requise pour justifier une conclusion de connaissance réelle ou d’ignorance volontaire renvoie à la connaissance réelle ou subjective de la personne qui commet l’acte prohibé et non à la connaissance objective ou présumée de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances (voir, de façon générale, les arrêts Shand v. The Queen, 2011 ONCA 5, au paragraphe 188, et Roks v. The Queen, 2011 ONCA 526, au paragraphe 132).

[47] La connaissance subjective réelle et l’ignorance volontaire peuvent être établies par une preuve directe ou circonstancielle ou par une combinaison des deux. Pour déterminer s’il y a connaissance subjective réelle ou ignorance volontaire, il faut tenir compte de toutes les circonstances.

[48] La nature subjective de la norme de l’ignorance volontaire, par opposition à la nature objective de la norme de la faute lourde, signifie que la conduite qui justifie une conclusion d’ignorance volontaire peut étayer une conclusion de faute lourde, mais que l’inverse n’est pas nécessairement vrai. Par exemple, le fait que, dans les mêmes circonstances, la personne raisonnable se serait renseignée davantage ne permet pas de conclure à l’ignorance volontaire, mais peut justifier une conclusion de faute lourde. Dans l’arrêt Briscoe, la Cour suprême du Canada explique cette distinction comme suit :

[24] Le professeur Don Stuart fait utilement remarquer que l’expression [traduction] « ignorance délibérée » semble plus descriptive que l’expression « [ignorance] volontaire », étant donné qu’elle suggère l’idée d’[traduction] « un processus réel de suppression des soupçons ». Considéré, comme il se doit, dans cette optique, [traduction] « le concept d’ignorance volontaire a une portée restreinte et ne s’écarte pas de l’analyse subjective du fonctionnement de l’esprit de l’accusé » (Canadian Criminal Law : A Treatise (5e éd. 2007), p. 241). Si le défaut de se renseigner peut être une preuve d’insouciance ou de négligence criminelle, par exemple lorsque le défaut de se renseigner constitue un écart marqué par rapport à la conduite d’une personne raisonnable, l’ignorance volontaire n’est pas un simple défaut de se renseigner, mais, pour reprendre les termes du professeur Stuart, une « ignorance délibérée ».

[49] La nature subjective de la norme de l’ignorance volontaire signifie également que les qualités personnelles de la personne peuvent être prises en compte pour déterminer si elle a fait preuve d’ignorance volontaire.

[50] En revanche, la nature objective de la norme de la faute lourde signifie que les qualités personnelles ne sont pas pertinentes à moins que la personne établisse qu’elle est incapable d’apprécier le risque qu’elle n’a pas réussi à éviter (voir l’arrêt R. c. Beatty, 2008 CSC 5, [2008] 1 R.C.S. 49, au paragraphe 40). Dans l’arrêt R. c. Roy, 2012 CSC 26, [2012] 2 R.C.S. 60, au paragraphe 38, la Cour suprême qualifie cette norme de critère objectif modifié :

[. . .] L’application de ce critère objectif modifié signifie que, bien que la personne raisonnable soit placée dans la situation de l’accusé, la preuve des qualités personnelles de l’accusé (telles que son âge, son expérience et son niveau d’instruction) n’est pas pertinente, sauf si elles visent son incapacité d’apprécier ou d’éviter le risque [ . . .]

[51] Bien qu’il soit question dans l’arrêt Roy de la norme de la négligence pénale, je ne vois aucune raison d’aborder la norme de la « faute lourde » établie au paragraphe l’article 163(2) de façon différente, puisqu’il faut, dans l’application de toute norme de négligence, déterminer si la conduite en question s’écarte de la norme objective de la personne raisonnable. L’arrêt Roy ne fait que souligner que la norme objective pertinente est celle de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances que la personne dont la conduite est en cause.

[52] Le risque que l’appelant doit pouvoir apprécier – afin de pouvoir conclure à une faute lourde – est le risque de ne pas satisfaire à l’obligation qu’impose le système canadien d’autocotisation à tous les contribuables, soit celle de préparer leur déclaration de revenu avec honnêteté et intégrité, bref le risque de ne pas satisfaire à l’obligation de ne pas commettre d’acte prohibé. Dans l’arrêt R. c. Jarvis, [2002] 3 R.C. S. 757, la Cour suprême du Canada a déclaré, au paragraphe 49 :

Toute personne résidant au Canada au cours d’une année d’imposition donnée est tenue de payer un impôt sur son revenu imposable, calculé selon les règles prescrites par la Loi [ . . .] Le processus de perception des impôts repose principalement sur l’autocotisation et l’autodéclaration : tous les contribuables sont tenus d’estimer le montant de leur impôt annuel payable [. . .] et d’en informer l’ADRC dans la déclaration de revenu qu’ils sont tenus de produire [ . . .]

[Voir également : (Canada) Revenu national c. Thompson, 2016 CSC 21, au paragraphe 31, [2016] 1 RCS 381]

[54] Par conséquent, en l’absence de preuve établissant que l’appelant ne pouvait comprendre l’obligation imposée par le régime fiscal canadien d’autocotisation de ne pas commettre d’acte prohibé, les mots « dans des circonstances équivalant à faute lourde » nous imposent de déterminer si la conduite de l’appelant représentait un écart marqué et important par rapport à la conduite attendue de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances que celles de l’appelant. Pour conclure à la faute lourde, il faut que la conduite de l’appelant démontre un degré élevé de négligence (Venne c. La Reine, (C.F. 1re inst.) [1984] A.C.F. no 314, 84 DTC 6247).

[54] Plus important encore, la norme objective qui s’applique à la conduite de l’appelant ne varie pas selon les qualités personnelles ou la connaissance réelle de celuici. Dans tous les cas, la norme qui s’applique est celle de la conduite attendue de la personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances que l’appelant. La question qui se pose est la suivante : dans quelle mesure, le cas échéant, la conduite de l’appelant s’écarte-t-elle de la norme objective?

[55] On trouve un résumé utile, quoique bref, de l’écart qui est requis, par rapport à la norme de la personne raisonnable, pour conclure à la faute lourde dans le récent arrêt Guindon c. Canada, 2015 CSC 41, [2015] 3 R.C.S. 3, où, au paragraphe 60, la Cour suprême du Canada, dans son analyse de la norme de la faute lourde décrite dans la décision Venne, reprend la déclaration suivante faite par la Cour canadienne de l’impôt au paragraphe 23 de la décision Sidhu c. La Reine, 2004 CCI 174 :

Le fardeau de la preuve ne consiste pas à prouver au-delà du doute raisonnable l’intention coupable de se soustraire au paiement de l’impôt, mais à prouver selon la prépondérance des probabilités une telle indifférence à l’égard de la diligence appropriée et raisonnable dans le contexte d’un système d’autocotisation qui contredit et insulte le sens commun.

[165] À mon avis, ces observations valent également pour l’article 285 de la Loi.

[166] L’intimée soutient que, parce que l’appelante a produit des déclarations pour les périodes de déclaration de 2009 en demandant des CTI après que l’ARC eut soulevé une question concernant les CTI lors d’une vérification de l’appelante, cette dernière a, sciemment ou dans des circonstances équivalant une faute lourde, fait un faux énoncé dans ses déclarations de 2009.

[167] La majorité de la Cour suprême du Canada a reconnu dans l’arrêt Guindon c. Canada [99] que les dispositions relatives aux sanctions dans la LIR, qui sont très semblables à celles de l’article 285, visent les cas où un contribuable fait fi de la loi ou manifeste une telle indifférence à l’égard de la diligence appropriée et raisonnable dans le contexte d’un système d’autocotisation qui contredit et défie le simple bon sens [100] .

[168] L’appelante a versé à ses sous-traitants des sommes au titre de la taxe sur les fournitures taxables fournies par ces sous-traitants au cours des périodes de déclaration de 2009. M. Procopoudis a présenté les déclarations de 2009 de manière à ce que l’appelante puisse recouvrer les sommes ainsi versées sous la forme de CTI pour les périodes de déclaration de 2009.

[169] Il ne fait aucun doute que l’appelante a versé aux sous-traitants une somme censée être la TPS et chaque versement a été pleinement documenté [101] . L’appelante n’a pas droit aux CTI demandés, car elle n’a pas obtenu les numéros d’inscription des sous-traitants exigés au paragraphe 169(4) de la Loi et par le Règlement sur les renseignements.

[170] M. Procopoudis pensait que les numéros d’inscription n’étaient pas requis, car l’appelante avait conclu avec les sous-traitants des contrats qui exigeaient le paiement de la TPS et l’information qu’il a recueillie à partir du site Web de l’ARC sur les ententes contractuelles ne mentionnait pas les numéros d’inscription, mais uniquement les numéros d’entreprise que l’appelante a obtenus lorsqu’ils existaient. M. Procopoudis a fait appel à Desjardins pour veiller à ce que tous les paiements soient versés aux sous-traitants et à ce qu’ils soient consignés.

[171] Même si la compréhension de M. Procopoudis quant à la raison pour laquelle l’appelante devait recevoir des CTI pour la taxe payée aux sous-traitants était erronée, il n’avait pas tort concernant l’économie générale de la Loi sur la TPS qui appelle clairement la conclusion portant que l’appelante ne devait pas débourser les sommes versées au titre de la taxe aux petits fournisseurs qui sont des non-inscrits.

[172] Plus précisément, comme la discussion ci-dessus le révèle, les paragraphes 261(1) et 296(2.1) de la Loi prévoient deux mécanismes par lesquels une somme versée au titre de la taxe peut être recouvrée : soit par le remboursement de cette somme, soit par l’application du montant du remboursement en réduction de la taxe nette.

[173] Dans les déclarations de 2009, M. Procopoudis a commis une erreur non pas parce que l’appelante n’avait pas le droit de recouvrer les paiements en cause faits en 2009 ou de les porter à son crédit, mais parce qu’il s’est fié au mauvais mécanisme dans la Loi sur la TPS.

[174] M. Procopoudis a reconnu qu’il a été avisé de la question concernant le numéro d’inscription soulevée par le vérificateur de l’ARC et par M. Burkes et il ressort des éléments de preuve qu’il a immédiatement pris des mesures pour veiller à ce que l’appelante obtienne auprès des sous-traitants les numéros d’inscription à l’avenir. Je déduis des mesures prises par M. Procopoudis et de la formulation faite par M. Burkes en mai 2015 de la question en litige que M. Procopoudis comprenait que la question portait sur le fait que l’appelante ne devait pas payer la taxe aux sous-traitants non inscrits, et non sur le fait que l’appelante n’avait pas droit à des CTI.

[175] M. Procopoudis a témoigné qu’il pensait que le vérificateur de l’ARC se trompait et que la position de l’ARC à l’égard des ententes contractuelles s’appliquait à l’appelante. Dans les déclarations de 2009, M. Procopoudis a cru, en toute bonne foi, mais de façon erronée, que l’appelante avait respecté la loi concernant son admissibilité à des CTI et il a avisé le vérificateur de l’ARC du fait qu’il avait produit les déclarations de 2009 en se fondant sur cette croyance. La conduite de M. Procopoudis est bien loin de la conduite intentionnelle ou de l’indifférence visée par l’article 285 de la Loi.

[176] Cependant, je discuterai les deux normes consacrées par l’article 285 de la Loi afin d’être exhaustif.

[177] Rien n’indique que M. Procopoudis a sciemment fait un faux énoncé dans les déclarations de 2009. M. Procopoudis croyait honnêtement que l’appelante avait droit aux CTI demandés dans les déclarations de 2009.

[178] Rien n’indique non plus que M. Procopoudis a fait preuve d’ignorance volontaire à l’égard du droit aux CTI de l’appelante. D’après les preuves, M. Procopoudis connaissait la position du vérificateur de l’ARC, mais il pensait que le vérificateur se trompait en raison de l’information sur les ententes contractuelles. En 2015, M. Procopoudis a recueilli des renseignements à la fois sur les ententes contractuelles et sur les petits fournisseurs, mais il pensait que dans les circonstances de l’appelante, l’information sur les ententes contractuelles jouait. Rien n’indique que M. Procopoudis a fait preuve d’ignorance volontaire [102] .

[179] Rien n’indique non plus que M. Procopoudis a commis une faute lourde en produisant les déclarations de 2009.

[180] M. Procopoudis aurait pu demander au vérificateur de l’ARC d’appliquer le paragraphe 296(2.1) de la Loi lors de l’établissement d’une cotisation pour toutes les périodes de déclaration, mais il ne l’a pas fait. L’erreur commise par M. Procopoudis, en se prévalant du mauvais recours concernant l’appelante dans les déclarations de 2009, ne constitue guère un écart marqué et important par rapport à la conduite d’une personne raisonnable dans les mêmes circonstances.

[181] M. Procopoudis a commis une erreur de droit ou une erreur de fait et de droit. Sa croyance selon laquelle l’appelante devrait avoir droit au recouvrement de la taxe payée aux sous-traitants n’était pas déraisonnable, étant donné que l’appelante a payé la « taxe » conformément aux contrats conclus avec les sous-traitants et compte tenu de l’économie générale de la Loi sur la TPS.

[182] L’intimée affirme que le défaut de M. Procopoudis d’obtenir des avis professionnels avant de produire les déclarations de 2009 étaye une conclusion de faute lourde. J’admets qu’il aurait peut-être été prudent que M. Procopoudis demande à M. Burkes de lui communiquer son plan d’action proposé. Je n’admets pas que le défaut de M. Procopoudis d’agir de la sorte constitue une faute lourde.

[183] La situation de l’appelante n’avait rien d’inhabituel ou d’extraordinaire : l’appelante était un inscrit qui versait à ses sous-traitants des sommes au titre de la taxe prévue dans les modalités de contrats écrits et qui tentait de recouvrer ces sommes sous la forme de CTI. Dans les mêmes circonstances que celles de M. Procopoudis, une personne raisonnable aurait bien pu avoir conclu que la situation de l’appelante était parfaitement claire, que la thèse du vérificateur de l’ARC était erronée et que des avis professionnels n’étaient pas nécessaires.

[184] Même si une personne raisonnable aurait pu avoir adopté un plan d’action différent de celui de M. Procopoudis, je conclus que l’écart entre sa conduite et celle d’une personne raisonnable dans les mêmes circonstances n’est pas celui prévu par l’article 285 de la Loi.

[185] Pour les motifs qui précèdent, l’appelante n’est pas responsable de la pénalité prévue à l’article 285 de la Loi et imposée par les nouvelles cotisations de 2009.

VI. Conclusion

[186] Pour les motifs qui précèdent, l’appel concernant les nouvelles cotisations est accueilli avec dépens en faveur de l’appelante et les nouvelles cotisations sont renvoyées au ministre pour nouvel examen et établissement d’une nouvelle cotisation au motif que :

  1. les pénalités prévues à l’article 285 de la Loi sont annulées;

  2. la somme de 76 291,61 $ est accordée à titre de crédits de taxe sur les intrants en tenant compte du fait que le total des sommes indiquées pour une année dans l’annexe H de l’ECFP est un crédit de taxe sur les intrants pour chacune des quatre périodes de déclaration trimestrielles de l’appelante se terminant cette année;

  3. les paiements en cause sont appliqués en vue de réduire la taxe nette de l’appelante pour les périodes de déclaration durant lesquelles les paiements en cause ont été versés.

[187] L’appelante a 30 jours à compter de la date du jugement pour présenter des observations écrites sur les dépens déposées dans l’appel et ne devant pas dépasser 10 pages. L’intimée dispose d’un délai de 30 jours pour fournir des observations écrites, en réponse aux observations de l’appelante.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de mars 2022.

« J.R. Owen »

Le juge Owen

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de juin 2022.

François Brunet, réviseur


RÉFÉRENCE :

2022 CCI 37

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2017-2825(GST)G

INTITULÉ :

MEDICLEAN INCORPORATED c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 8 novembre 2021

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge John R. Owen

DATE DU JUGEMENT :

Le 17 mars 2022

COMPARUTIONS :

Avocates de l’appelante :

Me Louise R. Summerville

Me Monica Carinci

Avocate de l’intimée :

Me Andrée-Anne Lavoie

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

Me Louise R. Summerville

Me Monica Carinci

 

Cabinet :

Aird & Berlis LLP

Toronto (Ontario)

Pour l’intimée :

François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1] Sauf indication contraire, tous les renvois à des dispositions légales renvoient à la Loi sur la taxe d’accise.

[2] Voir l’exposé conjoint des faits partiel reproduit au paragraphe 9.

[3] Ibid.

[4] Il s’agit de 747 655,15 $ moins les 76 291,61 $ de CTI admis par l’intimée.

[5] La référence exacte est 2009 CCI 340.

[6] Dans la réponse du ministre, au paragraphe 5, il est indiqué qu’au total, 747 655 $ de CTI ont été refusés pour les périodes de déclaration. Je suppose que l’ECFP fournit les chiffres exacts de 94 034,76 $ pour les périodes de déclaration de 2009 et de 747 655,15 $ pour les périodes de déclaration de 2010 à 2015.

[7] Paragraphes 4 et 5 de l’ECFP.

[8] J’ai omis de mentionner la somme en dollars, car elle n’est pas pertinente.

[9] Paragraphe 7 de l’ECFP.

[10] Paragraphe 7 de l’ECFP.

[11] La pièce A-1 désigne les employés de l’appelante comme « nettoyeurs » et les entrepreneurs indépendants comme « sous-traitants ». La pièce A-1 révèle que Desjardins n’a pas versé la TPS/TVH aux nettoyeurs, mais qu’elle a plutôt déduit de la somme brute à payer les sommes au titre de l’impôt sur le revenu, de l’assurance-emploi et du Régime de pensions du Canada (RPC).

[12] Paragraphe 7 et annexe D de l’ECFP.

[13] Paragraphe 9 et annexe E de l’ECFP.

[14] La fonction de sous-traitant indépendant est répertoriée comme « sous-traitant ».

[15] Lignes 2 à 22, page 31 de la transcription de l’audition du présent appel, le 8 novembre 2021 (la « transcription »).

[16] De la ligne 20, page 44 à la ligne 2, page 45 de la transcription.

[17] En 2009, les personnes qui résidaient en Ontario étaient assujetties à la TPS et à la taxe de vente provinciale, mais pas à la TVH.

[18] Le paragraphe 15 de l’ECFP indique que les déclarations ont été déposées le 20 janvier 2016.

[19] Expression définie au paragraphe 296(2.1) de la Loi.

[20] Paragraphes 165(1) et (2) de la Loi.

[21] Paragraphe 168(1) de la Loi. Les règles du paragraphe 168(2) au paragraphe (9) de la Loi portent sur des circonstances particulières comme la contrepartie qui est payée ou échoit plus d’une fois.

[22] Paragraphe 123(1) de la Loi. Cette définition est soumise aux règles mentionnées aux articles 133 et 134 de la Loi.

[23] Paragraphe 123(1) de la Loi.

[24] Ibid.

[25] Les deux expressions sont définies au paragraphe 123(1) de la Loi.

[26] Paragraphe 123(1) de la Loi.

[27] Paragraphe 123(1) de la Loi.

[28] Paragraphe 165(1) de la Loi.

[29] Paragraphe 165(2) de la Loi.

[30] Paragraphes 165(1), (2) et (4) et les définitions de « province participante » et de « taux de taxe » au paragraphe 123(1).

[31] Avant le 1er juillet 2010, la TPS s’appliquait aux fournitures taxables effectuées en Ontario.

[32] Alinéa 296(1)b) de la Loi.

[33] Airport Auto Limited c. La Reine, 2003 CCI 683.

[34] Les exceptions sont aux alinéas 166a), b) et c) de la Loi et concernent une fourniture taxable par vente d’un immeuble et des fournitures déterminées effectuées par une municipalité ou un organisme désigné comme municipalité aux fins de l’article 259 de la Loi.

[35] Article 166 de la Loi.

[36] Paragraphe 123(1) de la Loi.

[37] Paragraphe 240(1) de la Loi. Les trois exceptions sont mentionnées aux alinéas 240(1)a), b) et c) de la Loi.

[38] Alinéa 240(1)a) et paragraphe 240(1.1) de la Loi.

[39] Alinéa 240(3)a) de la Loi.

[40] Paragraphes 165(1) et (3) de la Loi.

[41] Paragraphe 165(1) de la Loi et les définitions des expressions « activité commerciale » et « fourniture taxable » au paragraphe 123(1) de la Loi.

[42] Paragraphe 169(1) de la Loi.

[43] Élément B de la formule au paragraphe 169(1) de la Loi et la définition de l’expression « activité commerciale » au paragraphe 123(1) de la Loi.

[44] Paragraphe 221(1) de la Loi.

[45] Article 166 de la Loi.

[46] Paragraphe 238(1) de la Loi.

[47] Article 245 de la Loi. Le montant déterminant d’une personne est établi aux termes de l’article 249 de la Loi. Les règles par défaut sont soumises aux choix offerts aux articles 246 à 248 de la Loi.

[48] Article 251 de la Loi.

[49] Alinéa 265(1)g) de la Loi.

[50] Alinéa 266(2)e) de la Loi.

[51] Alinéa 238(1)a)(iii) de la Loi. Une règle différente s’applique à certaines institutions financières : alinéa 238(1)a)(i) de la Loi.

[52] Alinéa 238(1)a)(ii) de la Loi.

[53] Alinéa 238(1)b) de la Loi.

[54] Paragraphe 238(2) de la Loi.

[55] Paragraphe 245(1) de la Loi.

[56] Paragraphe 228(1) de la Loi.

[57] Alinéa 228(2)b) de la Loi.

[58] Alinéa 228(2)a) de la Loi. Des règles spéciales visent également des institutions financières désignées particulières aux paragraphes 228(2.1) et (2.3) de la Loi.

[59] Paragraphe 225(1) de la Loi.

[60] Paragraphe 169(1) de la Loi.

[61] Paragraphe 169(4) de la Loi et le Règlement sur les renseignements.

[62] Paragraphe 169(5) de la Loi.

[63] Paragraphe 225(4) de la Loi. L’expression « personne déterminée » est définie au paragraphe 225(4.1) de la Loi.

[64] Alinéa 225(3)a) de la Loi. L’alinéa 225(3)b) de la Loi impose des conditions supplémentaires si le ministre a autorisé le CTI dans le calcul de la taxe nette pour la période de déclaration antérieure.

[65] Paragraphe 296(2) de la Loi.

[66] Paragraphe 261(1) de la Loi.

[67] Alinéa 261(2)a) de la Loi.

[68] Alinéa 261(2)b) de la Loi.

[69] Alinéa 261(2)c) de la Loi.

[70] Paragraphe 261(3) de la Loi.

[71] Paragraphe 296(2.1) de la Loi.

[72] Étant donné que je n’ai pas de preuve en sens contraire, je présume qu’un trimestre des sommes annuelles équivaut par coïncidence aux paiements autorisés pour chacune des périodes de déclaration de 2010 à 2015.

[73] Les notes techniques qui accompagnent l’introduction du paragraphe 169(4) de la Loi indiquent ce qui suit :

Le présent paragraphe prévoit qu’un inscrit n’est pas autorisé à demander un crédit de taxe sur les intrants sauf si, avant d’en faire la demande, l’inscrit a suffisamment d’éléments de preuve pour étayer la demande. À cette fin, une facture envoyée à un inscrit par un fournisseur, qui contient suffisamment de renseignements permettant d’établir le montant du crédit, constituerait un élément de preuve suffisant.

[74] 2007 CAF 226.

[75] Ibid., paragraphe 4.

[76] Paragraphes 225(1), 238(2), 245(1) et alinéa 228(2)b) de la Loi.

[77] Alinéa 296(1)a) et paragraphe 299(1) de la Loi. Voir aussi les paragraphes 299(2) et (3) de la Loi.

[78] Ibid., paragraphe 15.

[79] Ibid, paragraphe 17.

[80] Ibid.

[81] Ibid., paragraphe 20.

[82] Johnston c. MNR, [1948] RCS 486, p. 489. Pour [traduction] « mettre en doute » une hypothèse de fait, l’appelante doit invoquer des éléments de preuve au dossier qui montrent que le fait est erroné ou qu’il n’existe pas.

[83] La Loi sur la TPS n’exige pas que l’appelante détermine si un fournisseur est un petit fournisseur et je peux difficilement comprendre comment l’appelante pourrait établir cela, plusieurs années après les faits.

[84] Paragraphe 123(1) de la Loi.

[85] Paragraphe 240(1) de la Loi.

[86] Alinéa 240(1)a) et paragraphe 240(1.1) de la Loi.

[87] Alinéa 240(3)a) de la Loi.

[88] Voir, par exemple, les motifs majoritaires et minoritaires de l’arrêt R. c. McIntosh, [1995] 1 RCS 686.

[89] Paragraphes 225(1), 238(2), 245(1) et alinéas 228(2)b) et 296(1)a) de la Loi.

[90] Systematix, paragraphe 28.

[91] Ibid., paragraphes 26 et 27.

[92] Paragraphes 165(1) et 221(1) de la Loi.

[93] 206 N.R. 188 (CAF).

[94] 84 DTC 6247 (C.F. 1re inst.).

[95] (1991), 126 N.R. 141 (CAF).

[96] Je ne vois pas très bien comment la norme de la « personne prudente et avisée » peut jouer si, comme l’enseigne la décision Venne, le terme « négligence » à l’alinéa 298(4)a) de la Loi fait référence à une faute lourde. La norme de faute lourde est toujours fondée sur la personne raisonnable dans les mêmes circonstances.

[97] 2017 CAF 195 (« Wynter »).

[98] 2018 CCI 52 (« Peck »).

[99] 2015 CSC 41.

[100] Ibid., paragraphe 60.

[101] Je n’ai aucune raison de conclure que Desjardins a consigné différemment les versements en 2009 par rapport aux versements ultérieurs présentés à la pièce A-1.

[102] Peck, par. 49, renvoyant à l’arrêt R. c. Briscoe, 2010 CSC 13, par. 24.

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