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Dossier : 2020-1939(GST)APP


ENTRE :

LAMARNIC & J LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Demande entendue le 22 février 2022, à Ottawa (Ontario)

Devant : L’honorable juge Randall S. Bocock

Comparutions :

Représentant de l’appelante :

Kanny Ng

Avocate de l’intimée :

Me Yvette Virok

 

ORDONNANCE

LA DEMANDE de prorogation du délai pour déposer un avis d’opposition à la cotisation établie en application de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), ch. E-15, dans sa version modifiée (la « LTA »), pour la période de déclaration allant du 1er octobre 2011 au 31 décembre 2011 est rejetée, sans dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de mars 2022.

« R.S. Bocock »

Le juge Bocock


Référence : 2022 CCI 35

Date : 20220311

Dossier : 2020-1939(GST)APP

ENTRE :

LAMARNIC & J LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

Le juge Bocock

La période de déclaration pertinente

[1] La demanderesse (« Lamarnic »), par l’entremise de son actionnaire principal et administrateur M. Kanny Ng (« M. Ng »), dépose la présente demande de prorogation du délai pour déposer un avis d’opposition en application de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), ch. E-15 (la « LTA »). L’opposition demandée porte sur la cotisation établie par le ministre à l’égard d’une déclaration de TVH pour la période de déclaration allant du 2 octobre 2011 au 11 décembre 2011 (« la période du 4e trimestre de 2011 »). Initialement, la période de déclaration précédente, soit celle allant du 1er juillet 2011 au 30 septembre 2011, ainsi que la suivante, celle allant du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, étaient visées par la demande. Au début de l’audience, les parties ont convenu que ces deux périodes de déclaration supplémentaires n’étaient plus en cause et ne seraient pas visées par la demande.

Le pouvoir que confère le législateur à la Cour

[2] Les extraits des dispositions législatives pertinents et soulignés, précisant les délais fixés pour le dépôt d’avis d’opposition aux termes de la LTA disposent de ce qui suit :

Opposition à la cotisation

301(1.1) La personne qui fait opposition à la cotisation établie à son égard peut, dans les 90 jours suivant le jour où l’avis de cotisation lui est envoyé, présenter au ministre un avis d’opposition, en la forme et selon les modalités déterminées par celui-ci, exposant les motifs de son opposition et tous les faits pertinents.

Prorogation du délai par le ministre

303(1) Le ministre peut proroger le délai pour produire un avis d’opposition dans le cas où la personne qui n’a pas fait opposition à une cotisation en application de l’article 301 [...], dans le délai par ailleurs imparti lui présente une demande à cet effet.

Conditions d’acceptation de la demande

303 (7) Il n’est fait droit à la demande que si les conditions suivantes sont réunies :

a) la demande a été présentée dans l’année suivant l’expiration du délai d’appel par ailleurs imparti pour faire opposition [...];

b) la personne démontre ce qui suit :

[...]

Prorogation du délai par la Cour canadienne de l’impôt

304(1) La personne qui a présenté une demande en application de l’article 303 peut demander à la Cour canadienne de l’impôt d’y faire droit après :

a) le rejet de la demande par le ministre;

b) l’expiration d’un délai de 90 jours suivant la présentation de la demande [visée au paragraphe 303(1)], si le ministre n’a pas avisé le contribuable de sa décision.

Toutefois, une telle demande ne peut être présentée après l’expiration d’un délai de 30 jours suivant l’envoi de la décision à la personne selon le paragraphe 303(5).

Acceptation de la demande

304(5) Il n’est fait droit à la demande que si les conditions suivantes sont réunies :

a) la demande a été présentée dans l’année suivant l’expiration du délai d’appel par ailleurs imparti pour faire opposition [...];

b) la personne démontre ce qui suit :

[...]

Éléments de preuve sur les dates de cotisation et la demande

[3] Nul ne conteste la date de l’avis de cotisation concernant la période du 4e trimestre de 2011, soit le 29 décembre 2017. Lamarnic et son actionnaire principal M. Ng n’ont rassemblé aucun élément de preuve indiquant que l’avis de cotisation n’avait pas été envoyé, et rien n’indiquait que cet avis avait été envoyé à la mauvaise adresse. Encore une fois, il est entendu qu’aucun avis d’opposition, conforme ou non, n’a été reçu par Lamarnic avant le 23 janvier 2020.

La demanderesse s’est concentrée à tort sur le fond de l’appel

[4] En représentant Lamarnic, l’intention de M. Ng était de faire valoir le bien-fondé de son appel lors de l’audition de la demande. La Cour a tenté de le dissuader à au moins deux reprises, mais il n’a pas profité de ce conseil. Son unique préoccupation a même semé la confusion dans l’esprit de l’avocat de la partie adverse, un jour ou deux avant l’audience. Cela a donné lieu à une demande d’ajournement de l’audience présentée par écrit par l’intimée avant l’audience, a permis à la Couronne de déposer une réponse et de débattre du bien-fondé, tel que M. Ng l’exigeait.

[5] Dans sa demande, l’intimée n’a pas suivi une première étape essentielle, enchâssée dans la LTA, soit le pouvoir de la Cour canadienne de l’impôt d’entendre une demande de prorogation du délai pour déposer un avis d’opposition, dont la « durée limitée » est primordiale. Après la tenue de l’audience, la Cour a rappelé aux deux parties la condition préalable à l’examen du bien-fondé de l’appel. Premièrement, la Cour doit avoir compétence, puis elle pourra se prononcer sur le fond de l’appel. L’intimée a pris acte de cette première étape, mais M. Ng ne l’a jamais fait. Et ce n’est pas parce que la Cour n’a pas essayé.

[6] M. Ng a continué à présenter à la Cour les arguments suivants, qui, selon lui, étaient impérieux :

  • a) Lamarnic a demandé des crédits de taxe sur les intrants pour la période du 4e trimestre 2011, dans le délai de quatre ans prévu au paragraphe 225(4) de la LTA.

  • b) Les représentants du ministre ont fourni des renseignements contradictoires sur la question de savoir si Lamarnic devait produire ses déclarations de TPS/TVH trimestriellement ou annuellement, ce qui a causé une importante confusion.

  • c) Les représentants du ministre n’ont pas aidé Lamarnic à déposer un avis d’opposition ou une demande de prorogation du délai pour déposer un avis d’opposition.

[7] Ces affirmations ne sont pas liées au critère essentiel à satisfaire pour surmonter le premier obstacle d’entendre les mêmes affirmations : Lamarnic a-t-elle déposé un avis d’opposition ou une demande de prorogation de délai pour ce faire avant les délais prévus? La Cour énumère maintenant les observations uniquement pour que M. Ng sache que la Cour en a tenu compte. Aussi délicatement que possible, la Cour souligne que l’on pas fait preuve d’une telle courtoisie à son endroit. M. Ng a refusé de donner suite à la cotisation, à l’opposition ou à la demande de prorogation, plus précisément les dates pertinentes ainsi que l’absence d’un avis conforme de la part de Lamarnic.

Le critère essentiel et les faits reformulés

[8] Les questions en litige dans la présente demande sont de savoir si Lamarnic a déposé un avis d’opposition pour la période du 4e trimestre de 2011 auprès du ministre dans le délai de 90 jours prévu au paragraphe 301(1.1), ou si elle a présenté une demande de prorogation du délai pour déposer un avis d’opposition dans le délai d’un an prévu à l’alinéa 303(7)a) [1] .

[9] Le délai de 90 jours pour déposer un avis d’opposition a expiré le 29 mars 2018. Le délai subséquent d’un an pour déposer la demande de prorogation de délai a expiré le 29 mars 2019. Pendant cette période, Lamarnic ou M. Ng n’ont pris aucune mesure auprès du ministre ou de la Cour canadienne de l’impôt; une opposition n’a été reçue qu’environ 10 mois plus tard, soit le 28 janvier 2020. Lamarnic ne nie pas la réception ou l’envoi de l’avis de cotisation, comme ce fut le cas dans certaines demandes [2] .

[10] En bref, M. Ng peut avoir communiqué avec l’ARC en réponse aux cotisations, et plus précisément celle d’importance en date du 29 décembre 2017, bien que cela semble également peu probable. De son propre aveu, M. Ng a communiqué avec l’ARC pour la première fois à la fin septembre 2019 concernant un chèque, bien au-delà des délais de 90 jours et d’un an prévus pour répondre de manière conforme à l’avis de cotisation. Quoi qu’il en soit, même si la communication erronée avait eu lieu avant les délais déterminants de 90 jours et d’un an, elle devait prendre la forme d’une demande de prorogation, et non d’une demande d’établissement d’une nouvelle cotisation, prévoir l’ajustement des périodes de déclaration et la suspension des recouvrements [3] .

[11] Reformulé simplement, Lamarnic était tenue de déposer un avis d’opposition pour la période de déclaration du 4e trimestre de 2011 en date du 29 décembre 2017 au plus tard le 29 mars 2018, ce qu’elle n’a pas fait. Elle devait présenter une demande de prorogation du délai pour déposer un avis d’opposition au plus tard le 29 mars 2019, ce qu’elle n’a pas fait non plus selon les éléments de preuve dont la Cour est saisie. Pour ces motifs, la demande est donc rejetée.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de mars 2022.

« R.S. Bocock »

Le juge Bocock



RÉFÉRENCE :

2022 CCI 35

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2020-1939(GST)APP

INTITULÉ :

LAMARNIC & J LTD. c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 22 février 2022

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :

L’honorable juge Randall S. Bocock

DATE DE L’ORDONNANCE :

Le 11 mars 2022

COMPARUTIONS :

Représentant de l’appelante :

Kanny Ng

Avocate de l’intimée :

Me Yvette Virok

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

[EN BLANC]

 

Cabinet :

[EN BLANC]

 

Pour l’intimée :

François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] Le délai de 30 jours prévu au paragraphe 304(1) pour présenter une demande de prorogation de délai à la Cour canadienne de l’impôt été prorogé par l’article 6 de la Loi sur les délais et autres périodes (COVID-19), LC 2020, ch. 11, art. 11. L’intimée a reconnu que cette question précise, mais théorique n’était pas contestée.

[2] Aztec Industries Inc. c. Canada [1995], 1 CTC 327, par. 12.

[3] Deetlefs c. La Reine, 2014 CCI 96, par. 10.

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