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Dossier : 2019-2458(IT)G

ENTRE :

1048547 ONTARIO INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2460(IT)I

ET ENTRE :

KOSTANTINOS SKOTIDAKIS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2463(IT)G

ET ENTRE :

JOHN SKOTIDAKIS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2464(IT)G

ET ENTRE :

ANTIGONI SKOTIDAKIS,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2467(IT)I

ET ENTRE :

KOSTANTINA SKOTIDAKIS,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appels entendus sur preuve commune, les 22 et 28 novembre 2022, à Montréal (Québec).

Devant : L’honorable juge Dominique Lafleur


Comparutions :

Avocat des appelants :

Me Michel Jasmin

Avocat de l’intimé :

Me Julien Dubé-Sénécal

 

JUGEMENT

Conformément aux motifs du jugement ci-joints, et vu les concessions faites par 1048547 Ontario Inc. au début de l’audition selon lesquelles les droits de licence de 99 111 $ n’étaient pas déductibles dans le calcul de son revenu d’entreprise :

  • (i)les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies en application de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2014 et 2015 de John Skotidakis (dossier numéro 2019-2463(IT)G) et d’Antigoni Skotidakis (dossier numéro 2019‑2464(IT)G) et l’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en application de la Loi sur le revenu pour 1048547 Ontario Inc. pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 décembre 2015 (dossier numéro 2019-2458(IT)G) sont rejetés. L’intimé a droit à un mémoire des dépens; et

  • (ii)les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies en application de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2014 et 2015 de Kostantina Skotidakis (dossier numéro 2019‑2467(IT)I) et de Kostantinos Skotidakis (dossier numéro 2019‑2460(IT)I) sont rejetés, sans dépens.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 28e jour de février 2023.

« Dominique Lafleur »

Mme la Juge Lafleur

Traduction certifiée conforme

Ce 26e jour d’avril 2024.

François Brunet, réviseur


Référence : 2023 CCI 24

Date : 20230228

Dossier : 2019-2458(IT)G

ENTRE :

1048547 ONTARIO INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2460(IT)I

ET ENTRE :

KOSTANTINOS SKOTIDAKIS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2463(IT)G

ET ENTRE :

JOHN SKOTIDAKIS,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2464(IT)G

ET ENTRE :

ANTIGONI SKOTIDAKIS,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé;

Dossier : 2019-2467(IT)I

ET ENTRE :

KOSTANTINA SKOTIDAKIS,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LE ROI,

intimé.


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Mme la Juge Lafleur

I. APERÇU

A. Cotisations

[1] 1048547 Ontario Inc (« Opco ») exploite une entreprise dénommée « Skotidakis Goat Farm » qui fabrique des produits laitiers, notamment des fromages et des yogourts. Les installations de fabrication, qui sont situées à Saint-Eugène (Ontario), ont une superficie de 150 000 pieds carrés. Opco achète du lait local au Canada et aux États-Unis et des fromages et de l’équipement divers en Europe. Les produits facturés par Opco sont vendus dans toute l’Amérique du Nord, y compris au Mexique. Les clients d’Opco se situent en Amérique du Nord. Ses recettes de ventes ont augmenté régulièrement au fil des ans et en 2022, elles avoisinaient les 200 millions de dollars. Actuellement, Opco compte environ 300 employés.

[2] Pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 décembre 2015, le ministre du Revenu national (« le ministre ») a établi la nouvelle cotisation d’Opco en application de la Loi de l’impôt sur le revenu, LRC 1985, ch. 1 (5e suppl.) modifiée (« LIR »), pour refuser la déduction de certains frais totalisant 496 297 $ et en autoriser d’autres totalisant 830 452 $ dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco.

[3] Les dépenses refusées consistaient en des droits de licence (« droits de licence ») totalisant 141 653 $ et des frais de déplacement (comprenant des repas et autres dépenses, que je dénomme collectivement les « frais de déplacement » dans ces motifs), engagés par divers membres de la famille Skotidakis et totalisant 354 644 $. Les droits de licence refusés consistaient en une pénalité de 99 111 $ pour paiement en retard des retenues sur la paie. À l’audience, Opco a admis que la somme de 99 111 $ consistant en une pénalité pour paiement en retard des retenues sur la paie, n’était pas déductible dans le calcul du revenu d’entreprise. Toutefois, le solde des droits de licence, totalisant 42 542 $, demeure controversé.

[4] Pour les années d’imposition 2014 et 2015, le ministre a établi la nouvelle cotisation de John Skotidakis (« John »), le président d’Opco, afin d’inclure dans le calcul de son revenu les sommes de 211 621 $ et de 156 696 $, respectivement, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR. Ces sommes constituent une partie des frais de déplacement de John, de son épouse Peggy et de sa mère Maria, qui ont été payés par Opco et dont la déduction a été refusée dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco.

[5] Pour les années d’imposition 2014 et 2015, le ministre a établi la nouvelle cotisation d’Antigoni Skotidakis (« Antigoni »), la trésorière et directrice des ressources humaines d’Opco, pour inclure dans le calcul de son revenu les sommes de 237 647 $ et de 181 737 $, respectivement, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR. Ces sommes constituent la part des frais de déplacement d’Antigoni, de son époux Kyriakos et de sa mère Maria, qui ont été payés par Opco et dont la déduction a été refusée dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco.

[6] Pour les années d’imposition 2014 et 2015, le ministre a établi la nouvelle cotisation de Kostantina Skotidakis (« Kostantina »), pour inclure dans le calcul de son revenu les sommes de 6 967 $ et de 19 624 $, respectivement, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR. Ces sommes constituent une partie des frais de déplacement de Kostantina, payés par Opco, et dont la déduction a été refusée dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco. À l’audience, l’intimé s’est dit d’avis que les avantages conférés à Kostantina devraient être inclus dans son revenu à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR. Subsidiairement, l’intimé s’est dit d’avis que les avantages ont été conférés à Kostantina en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement encore, en application du paragraphe 246(1) de la LIR.

[7] Pour les années d’imposition 2014 et 2015, le ministre a établi la nouvelle cotisation de Kostantinos Skotidakis (« Kostantinos »), le vice-président d’Opco, pour inclure dans le calcul de son revenu les sommes de 29 049 $ et de 18 549 $, respectivement, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR. Ces sommes constituent une partie des frais de déplacement de Kostantinos, qui ont été payés par Opco et dont la déduction a été refusée dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco. À l’audience, l’intimé s’est dit d’avis que les avantages conférés à Kostantinos devraient être inclus dans son revenu à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR. Subsidiairement, l’intimé s’est dit d’avis que les avantages ont été conférés à Kostantinos en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement encore, en application du paragraphe 246(1) de la LIR.

[8] John, Antigoni, Kostantina et Kostantinos sont frères et sœurs (je les dénommerai collectivement les « frères et sœurs » dans ces motifs). À l’audience, des quatre frères et sœurs, seul John a témoigné. Mme Josée Myre (contrôleuse financière d’Opco), M. Ralph Nahas (fiscaliste et conseiller du groupe Skotidakis), Chun-Xiang Bao (comptable professionnel agréé) et la vérificatrice de l’Agence du revenu Canada (« ARC ») qui a exécuté les vérifications des appelants, Mme Hua Lu, ont également témoigné.

B. Historique de la procédure

[9] Les cinq appels ont été entendus sur preuve commune les 22 et 28 novembre 2022.

[10] Dans une lettre datée du 16 novembre 2022, soit trois jours ouvrables avant la date prévue des appels, Me Michel Jasmin (qui n’était à l’époque avocat inscrit au dossier pour aucun des appelants) a demandé l’ajournement de l’audience, alléguant qu’il ne pourrait pas s’y préparer correctement.

[11] Le 18 novembre 2022, soit un jour ouvrable avant la date prévue des appels, l’avocat inscrit au dossier pour les appelants dans les appels 2019‑2464(IT)G, 2019-2463(IT)G et 2019-2458(IT)G, Me Robert Fragasso, a déposé une requête pour cesser d’occuper comme avocat en invoquant des motifs d’ordre éthique et de dégradation de la relation entre avocat et clients. Ce même jour, Me Jasmin a déposé une autre demande d’ajournement de l’audience, alléguant qu’il ne pouvait s’y préparer correctement, car il participait à une autre audience. Ce même jour également, la Cour a refusé à Me Jasmin sa demande d’ajournement.

[12] Le 21 novembre 2022, soit la veille de l’audition prévue des appels, Me Jasmin a déposé devant la Cour un document intitulé « Avis de représentation par avocat ». Ce même jour, Me Fragasso a retiré sa requête pour cesser d’occuper comme avocat puisque Me Jasmin était maintenant l’avocat inscrit au dossier des appelants dans les dossiers 2019-2464(IT)G, 2019-2463(IT)G et 2019-2458(IT)G.

[13] Au début de l’audience du 22 novembre 2022, Me Jasmin n’a pas demandé l’ajournement de l’audience, mais a proposé que la Cour l’ajourne. Selon Me Jasmin, comme au moins deux jours étaient nécessaires pour instruire les appels, il serait plus facile de les instruire ultérieurement, lorsque la Cour serait disponible pendant deux jours consécutifs. Toutefois, Me Jasmin a mentionné qu’il était prêt à poursuivre la procédure. L’avocat de l’intimé a rejeté la proposition de reporter l’audience à un autre jour.

[14] Vu que la Cour n’a pas considéré les motifs donnés par Me Jasmin comme suffisants pour accepter sa proposition d’ajourner l’audience, les appels ont été entendus le 22 novembre 2022, soit le jour fixé pour l’audition des cinq appels sur ordonnances délivrées par la Cour au début de mai 2021. Il est à noter que les appelants n’ont présenté aucun élément de preuve documentaire lors de l’audience du 22 novembre 2022, ni quand l’audience s’est poursuivie le 28 novembre 2022. Toutefois, l’intimé a présenté un recueil de preuves documentaires (pièces R-1 à R-19).

II. QUESTIONS EN LITIGE

[15] En l’espèce, la Cour doit trancher les questions suivantes :

  • (i)Pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 décembre 2015, et vu la concession faite par Opco lors de l’audience, selon laquelle les droits de licence de 99 111 $ consistant en une pénalité pour paiement en retard des retenues sur la paie, n’étaient pas déductibles dans le calcul de son revenu, est-ce qu’Opco est en droit de demander des déductions supplémentaires totalisant 397 186 $ (comprenant des frais de déplacement totalisant 354 644 $ et des droits de licence totalisant 42 542 $) dans le calcul de son revenu d’entreprise?

  • (ii)Pour les années d’imposition 2014 et 2015, les sommes totalisant 211 621 $ et 156 696 $, respectivement, devraient-elles être incluses dans le calcul du revenu de John à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR?

  • (iii)Pour les années d’imposition 2014 et 2015, les sommes totalisant 237 647 $ et 181 737 $, respectivement, devraient-elles être incluses dans le calcul du revenu d’Antagoni à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR?

  • (iv)Pour les années d’imposition 2014 et 2015, les sommes totalisant 6 967 $ et 19 624 $, respectivement, doivent-elles être incluses dans le calcul du revenu de Kostantina à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages en application du paragraphe 246(1) de la LIR?

  • (v)Pour les années d’imposition 2014 et 2015, les sommes totalisant 29 049 $ et 18 549 $, respectivement, doivent-elles être incluses dans le calcul du revenu de Kostantinos à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages en application du paragraphe 246(1) de la LIR?

III. CONCLUSION

[16] Pour les motifs qui suivent, et vu les concessions faites par Opco au début de l’audition, selon lesquelles les droits de licence de 99 111 $ n’étaient pas déductibles dans le calcul de son revenu d’entreprise :

  • (i)les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies en application de la LIR pour les années d’imposition de 2014 et 2015 de John (dossier numéro 2019-2463(IT)G) et d’Antigoni (dossier numéro 2019-2464(IT)G) et l’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie en application de la LIR pour Opco pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 décembre 2015 (dossier numéro 2019-2458(IT)G) sont rejetés. L’intimé a droit à un mémoire des dépens; et

  • (ii)les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies en application de la LIR pour les années d’imposition de 2014 et 2015 de Kostantina (dossier numéro 2019‑2467(IT)I) et de Kostantinos (dossier numéro 2019-2460(IT)I) sont rejetés, sans dépens.

IV. AUTRES FAITS PERTINENTS

[17] Une autre société, que j’appellerai « Holdco » aux présentes, possède toutes les actions émises et participatives en circulation du capital-actions d’Opco. Toutes les actions émises et sans privilège de participation en circulation du capital-actions d’Opco appartiennent à parts égales à John et à Antigoni.

[18] John et Antigoni possèdent toutes les actions sans privilège de participation du capital-actions d’Holdco, et toutes les actions émises et participatives en circulation d’Holdco sont possédées comme suit : John (36 %), Antigoni (20 %), Kostantina (20 %) et Kostantinos (24 %).

[19] John, Antigoni, Kostantina et Kostantinos sont tous des employés d’Opco. Plus précisément, John est le président d’Opco et la principale personne participant au développement de l’entreprise. Dans le cadre de ses fonctions au sein d’Opco, il se déplace beaucoup. Antigoni est responsable des ressources humaines. Elle embauche les nouveaux employés et traite d’autres questions liées aux ressources humaines. Kostantinos est le vice-président d’Opco. Kyriakos, l’époux d’Antigoni, est le directeur d’usine d’Opco. Aucun élément de preuve n’a été présenté à l’audience sur les fonctions exécutées par Kostantina au sein d’Opco.

[20] Enfin, vu la preuve, il est clair que Maria et Peggy ne sont pas des employées d’Opco.

V. THÈSES DES PARTIES

A. Les appelants

[21] Les appelants estiment qu’ils se sont acquittés du fardeau d’établir que les hypothèses de fait utilisées par le ministre pour établir les nouvelles cotisations en litige étaient fausses. Le témoignage de la vérificatrice de l’ARC était vague, hésitant et montrait qu’elle ne comprenait pas les faits. Il est clair que diverses dépenses ont été comptabilisées deux fois. Le témoignage de John était limpide et transparent. Tous les frais de déplacement payés par Opco ont été engagés en vue de tirer un revenu de l’entreprise, à savoir pour rencontrer des fournisseurs à l’étranger ou pour développer le marché des affaires d’Opco. Les frais de déplacement engagés par John, Antigoni, Kostantina ou Kostantinos n’étaient pas de nature personnelle et n’auraient pas dû être inclus dans le calcul de leur revenu en application de la LIR.

[22] De plus, les dépenses qui n’étaient appuyées par aucun document ou relevé de carte de crédit n’auraient pas dû être incluses dans le calcul du revenu de John et d’Antigoni comme l’a soutenu Mme Myre, vu que ni l’un ni l’autre n’étaient au courant de la discussion entre Mme Myre et la vérificatrice de l’ARC.

[23] Enfin, selon les appelants, le paragraphe 15(1) de la LIR ne s’applique pas à un actionnaire qui ne possède que des actions sans privilège de participation. Comme ni John ni Antigoni ne possèdent d’actions participatives dans Opco, ils ne doivent pas faire l’objet d’une cotisation en application du paragraphe 15(1) de la LIR.

B. L’intimé

[24] La thèse de l’intimé est la suivante :

  • (i)À l’égard d’Opco :

  • les frais de déplacement refusés n’ont pas été engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise Opco, et ont été refusés à juste titre en application du paragraphe 18(1)(a) de la LIR; et

  • la somme de 42 542 $, consistant en des droits de licence, n’a jamais été payée par Opco, n’a donc pas été engagée par Opco à des fins professionnelles et a été refusée à juste titre en application du paragraphe 18(1)(a) de la LIR.

  • (ii)À l’égard de John :

  • Opco a payé les frais de déplacement personnels pour John, pour son épouse (Peggy) et pour sa mère (Maria). Les frais de déplacement n’ont jamais été remboursés à Opco et n’ont jamais été inclus dans le revenu de John; par conséquent, ces sommes doivent être incluses dans le revenu de John, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR.

  • (iii)À l’égard d’Antigoni :

  • Opco a payé les frais de déplacement personnels pour Antigoni, pour son époux (Kyriakos) et pour sa mère (Maria). Les frais de déplacement n’ont jamais été remboursés à Opco et n’ont jamais été inclus dans le revenu d’Antigoni; par conséquent, ces sommes doivent être incluses dans le revenu d’Antigoni, à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, subsidiairement, à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR.

  • (iv)À l’égard de Kostantina :

  • Opco a payé les frais de déplacement personnels de Kostantina, et ces frais n’ont jamais été remboursés à Opco et n’ont jamais été inclus dans le revenu de Kostantina. Par conséquent, ces sommes doivent être incluses dans le revenu de Kostantina, à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR. Subsidiairement, ces sommes doivent être incluses dans le revenu de Kostantina à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, autrement, à titre d’avantages en application du paragraphe 246(1) de la LIR.

  • (v)À l’égard de Kostantinos :

  • Opco a payé les frais de déplacement personnels de Kostantinos, et ces frais n’ont jamais été remboursés à Opco et n’ont jamais été inclus dans le revenu de Kostantinos. Par conséquent, ces sommes doivent être incluses dans le revenu de Kostantinos, à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR. Subsidiairement, ces sommes doivent être incluses dans le revenu de Kostantinos à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR ou, autrement, à titre d’avantages en application du paragraphe 246(1) de la LIR.

[25] Les appelants ne se sont pas acquittés du fardeau de montrer à la Cour que les frais de déplacement refusés ont été engagés en vue de tirer un revenu de l’entreprise Opco. De plus, les appelants ne se sont pas acquittés du fardeau de montrer que les droits de licence étaient payés par Opco.

[26] D’une part, le témoignage de Mme Lu lors de l’audience était clair et fiable; de plus, les documents de travail présentés à titre de pièces R-8, R-9, R-10, R-11, R-12, R‑13, R‑14, R-15, R-16, R‑17, R-18 et R-19 concordent avec son témoignage.

[27] D’autre part, le témoignage de Mme Myre était vague, divergeait de celui de Mme Lu et manquait de crédibilité. Durant les années d’imposition visées par l’appel, Mme Myre était la contrôleuse financière d’Opco. Dans son témoignage, elle s’est montrée hésitante et ne s’est pas souvenue de ce qui avait été dit durant ses réunions avec la vérificatrice. Désignée pour s’occuper de la vérification, il est difficile de croire qu’à titre de contrôleuse financière d’Opco, elle ne pouvait pas faire la distinction entre les frais personnels et les frais professionnels.

[28] De plus, le témoignage de John n’a pas été crédible lorsqu’il a témoigné que tous les frais de déplacement refusés payés par Opco avaient été engagés à des fins professionnelles. Il n’a fourni aucune explication raisonnable ni aucun élément de preuve documentaire pour justifier la déduction de ces dépenses pour Opco. Il a simplement fait cette déclaration audacieuse en affirmant que tous les frais de déplacement refusés avaient été engagés à des fins professionnelles.

[29] Enfin, l’intimé a demandé à la Cour de tirer deux conclusions défavorables. Tout d’abord, comme Antigoni, Kostantina et Kostantinos ne sont pas venus témoigner à l’audience, il faudrait en conclure que leur témoignage aurait montré que les frais de déplacement refusés étaient des frais de nature personnelle et non professionnels. Ensuite, comme les appelants n’ont soumis aucun reçu ou élément de preuve documentaire pour appuyer la nature des frais de déplacement en litige, on devrait en conclure que ces frais étaient de nature personnelle et non engagés à des fins professionnelles.

VI. DISCUSSION

A. Question préliminaire : la compétence de la Cour

[30] Dans son témoignage, John a déclaré qu’après la vérification, Opco avait décidé de ne pas contester le refus de la déduction des divers frais de déplacement en litige. John a également déclaré qu’on ne l’avait jamais informé, durant la vérification, que les dépenses ainsi refusées seraient incluses dans le calcul de son revenu ou du revenu de ses frères et sœurs. Selon John, lui-même et ses frères et sœurs auraient dû être informés des conséquences fiscales du refus de la déduction des frais de déplacement dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco, mais la vérificatrice de l’ARC ne les a pas informés de ces conséquences.

[31] Toutefois, que la vérificatrice de l’ARC ait informé les frères et sœurs ou non n’est pas pertinent aux fins des appels auprès de la Cour. L’article 12 de la Loi sur la Cour canadienne de l’impôt, L.R.C. (1985), ch. T-2, prévoit que la Cour a compétence pour entendre les appels sur les questions découlant de l’application de la LIR. La compétence de la Cour «… est de juger la validité et l’exactitude d’une cotisation en se fondant les dispositions pertinentes de la loi [LIR] et sur les faits donnant lieu à la responsabilité légale du contribuable. En toute logique, la conduite du fonctionnaire du fisc qui autorise l’établissement d’une cotisation n’est pas pertinente pour déterminer cette obligation prévue par la loi » (Ereiser c. La Reine, 2013 CAF 20 au paragraphe 31).

B. Questions soulevées par les appels

[32] Pour tous les motifs qui suivent, que je développerai plus loin, après avoir examiné tous les éléments de preuve présentés durant l’audience, je conclus qu’Opco n’a pas établi, même à première vue, que le ministre s’est trompé, en présumant, lors de l’établissement de la nouvelle cotisation, que les frais de déplacement étaient de nature personnelle et n’avaient pas été engagés par Opco à des fins professionnelles, et que les droits de licence n’avaient pas été engagés par Opco.

[33] Je conclus également que les frères et sœurs n’ont pas établi, même à titre de preuve première vue, que le ministre s’était trompé en présumant, lors de l’établissement de la nouvelle cotisation, qu’ils avaient reçu un avantage d’Opco, soit à titre d’avantages conférés aux actionnaires en application du paragraphe 15(1) de la LIR, soit à titre d’avantages sociaux des employés en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR.

[34] Je conclus que les témoignages de Mme Myre et de John ont manqué de crédibilité et de fiabilité. En revanche, le témoignage de Mme Lu était crédible et fiable.

[35] De plus, les appelants n’ont soumis aucun élément de preuve documentaire pour appuyer leur témoignage selon lequel Opco avait engagé tous les frais de déplacement à des fins professionnelles qui ont été refusés et que ces frais n’étaient pas de nature personnelle pour les frères et sœurs. De plus, aucun élément de preuve n’a été présenté par les appelants durant l’audience à l’égard des droits de licence.

[36] La Cour doit aussi tirer les deux conclusions défavorables discutées au paragraphe 29, comme l’a demandé l’intimé.

[37] Par conséquent, la thèse de l’intimé doit être retenue dans ces appels.

(i) Nouvelle cotisation d’Opco pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 décembre 2015

[38] La première question en litige concernant cette nouvelle cotisation est de savoir si les frais de déplacement totalisant 354 644 $ ont été correctement engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise, et si ces frais de déplacement étaient déductibles dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco en application de la LIR.

[39] La seconde question en litige concernant cette nouvelle cotisation est de savoir si les droits de licence totalisant 42 542 $ ont été payés par Opco au receveur général et s’ils étaient déductibles dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco en application de la LIR.

[40] Les dispositions pertinentes de la LIR figurent à l’alinéa 9(1) et au paragraphe 18(1)(a) :

9 (1) Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, le revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise ou d’un bien pour une année d’imposition est le bénéfice qu’il en tire pour cette année.

[…]

18 (1) Dans le calcul du revenu du contribuable tiré d’une entreprise ou d’un bien, les éléments suivants ne sont pas déductibles :

  • (a)les dépenses, sauf dans la mesure où elles ont été engagées ou effectuées par le contribuable en vue de tirer un revenu de l’entreprise ou du bien;

[…]

[41] La LIR ne donne aucune définition du mot « bénéfice ». Dans la détermination du bénéfice, le contribuable est libre d’adopter toute méthode qui n’est pas incompatible avec a) les dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu, b) les principes dégagés de la jurisprudence ou les « règles de droit » établis; c) les principes commerciaux reconnus, l’objectif est d’obtenir une image fidèle du bénéfice du contribuable pour l’année visée (Canderel Ltée c. R, [1998] 1 RCS 147, aux paragraphes 53 et 54. De plus, des dispositions spécifiques de la LIR doivent être examinées pour déterminer si une dépense peut être réclamée à titre de déduction dans le calcul du revenu aux fins d’impôt sur le revenu.

[42] Pour les motifs qui suivent, comme Opco n’a pas présenté suffisamment d’éléments de preuve lors de l’audience, je conclus que les frais de déplacement totalisant 354 644 $ n’ont pas été engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise, mais étaient des frais de déplacement de nature personnelle des frères et sœurs et d’autres membres de la famille, et n’étaient donc pas déductibles dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco. L’appel concernant cette question en litige est donc rejeté.

[43] De plus, pour les motifs qui suivent, comme je conclus qu’Opco n’a pas présenté suffisamment d’éléments de preuve lors de l’audience, je conclus que les droits de licence de 42 542 $ n’ont pas été engagés par Opco et par conséquent, n’étaient pas déductibles dans le calcul du revenu d’entreprise d’Opco. L’appel concernant cette question en litige est donc également rejeté.

(ii) Frais de déplacement payés par Opco pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 décembre 2014

[44] Bien que l’année d’imposition d’Opco qui s’est terminée le 31 décembre 2014 n’est pas en cause dans cet appel, je conclus également que l’élément de preuve a montré que les frais de déplacement payés par Opco et totalisant 507 245 $ étaient des frais de déplacement de nature personnelle des frères et sœurs et d’autres membres de la famille.

(iii) Nouvelles cotisations des appelants (autres qu’Opco) pour 2014 et 2015

Nouvelles cotisations de John et d’Antigoni

[45] En ce qui concerne les nouvelles cotisations de John et d’Antigoni, la question en litige est de savoir si les frais de déplacement payés par Opco doivent être inclus dans le calcul de leurs revenus respectifs en tant qu’avantages conférés par Opco à titre d’actionnaires d’Opco en application du paragraphe 15(1) de la LIR.

[46] Selon le paragraphe 15(1) de la LIR, si à un moment donné un avantage est conféré par une société à un actionnaire de la société, la somme ou la valeur de l’avantage doit être incluse dans le revenu de l’actionnaire, sauf dans la mesure où l’avantage est réputé constituer un dividende ou si l’une des exceptions prévues aux paragraphes 15(1)(a) à (d) de la LIR s’applique. Dans ces appels, le montant de l’avantage n’est pas un dividende, et aucune de ces exceptions ne s’applique.

[47] Le paragraphe 15(1) de la LIR est ainsi rédigé :

15 (1) La valeur de l’avantage qu’une société confère, à un moment donné, à son actionnaire [...] est incluse dans le calcul du revenu de l’actionnaire [...] pour son année d’imposition qui comprend ce moment, sauf dans la mesure où [...]

[48] La Cour doit donc déterminer si un avantage a été conféré à John et à Antagoni par Opco et si cet avantage leur a été conféré à titre d’actionnaires d’Opco. Si tel est le cas, la Cour doit alors déterminer la valeur de l’avantage ainsi conféré.

[49] Trois catégories de frais de déplacement sont en litige en ce qui concerne John : (i) les frais désignés comme étant des frais personnels de John et de son épouse (Peggy) qui ont été payés par Opco avec une carte de crédit Amex aux noms de John et de Peggy : en 2014 pour la somme de 62 470,18 $ et en 2015 pour la somme de 75 220,43 $; (ii) les frais désignés comme étant des frais personnels de Maria (la mère des frères et sœurs) qui ont été payés par Opco avec une carte de crédit Amex au nom de Maria (et ventilés à parts égales entre John et sa sœur Antigoni) : en 2014 pour la somme de 4 753,35 $ et en 2015 pour la somme de 846,39 $; et (iii) les frais payés par Opco pour lesquels aucun relevé de carte de crédit n’a été produit à la vérificatrice (et ventilés à parts égales entre John et Antigoni) : en 2014 pour la somme de 144 397,03 $ et en 2015 pour la somme de 80 628,82 $.

[50] De même, trois catégories de frais de déplacement sont en cause en ce qui concerne Antigoni : (i) les frais désignés comme étant des frais personnels d’Antigoni et de son époux (Kyriakos) qui ont été payés par Opco avec une carte de crédit Amex aux noms d’Antigoni et de Kyriakos : en 2014 pour la somme de 88 496,56 $ et en 2015 pour la somme de 100 261,58 $; (ii) les frais désignés comme étant des frais personnels de Maria qui ont été payés par Opco avec une carte de crédit Amex au nom de Maria (ventilés à parts égales entre Antigoni et son frère John) : en 2014 pour la somme de 4 753,35 $ et en 2015 pour la somme de 846,39 $; et (iii) les frais payés par Opco pour lesquels aucun relevé de carte de crédit n’a été produit à la vérificatrice (ventilés à parts égales entre Antigoni et John) : en 2014 pour la somme de 144,397,03 $ et en 2015 pour la somme de 80 628,82 $.

[51] Les frais de déplacement payés par Opco pour lesquels, comme je l’expliquerai plus loin dans les présentes, j’ai constaté qu’ils n’avaient pas été engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise, mais qu’ils étaient des frais de déplacement de nature personnelle de John et d’Antigoni. Le paiement desdits frais de déplacement par Opco constitue une appropriation des fonds d’Opco au bénéfice de John et d’Antigoni. Je conclus donc qu’un avantage a été conféré par Opco à John et à Antigoni.

[52] De plus, pour les motifs que j’expliquerai plus loin dans les présentes, comme les appelants n’ont pas présenté suffisamment d’éléments de preuve lors de l’audience, je conclus qu’un avantage a été conféré à John et à Antigoni par Opco à titre d’actionnaires d’Opco, pour une somme égale à l’avantage inclus par le ministre dans le calcul de leurs revenus respectifs en application du paragraphe 15(1) de la LIR.

[53] Les nouvelles cotisations étaient raisonnables et les appels relatifs à ces questions en litige sont par conséquent rejetés.

Nouvelles cotisations de Kostantina et de Kostantinos

[54] En ce qui concerne les nouvelles cotisations de Kostantina et de Kostantinos, la question en litige est de savoir si les frais de déplacement payés par Opco ont été inclus dans le calcul de leurs revenus d’emploi respectifs en tant qu’avantages conférés par Opco à titre d’employés d’Opco en application du paragraphe 6(1) de la LIR.

[55] Selon le paragraphe 6(1)(a) de la LIR, sous réserve de certaines exceptions, la valeur de tout avantage que reçoit ou dont jouit le contribuable, ou une personne avec laquelle il a un lien de dépendance, au cours de l’année au titre, dans le cadre ou en raison de la charge ou de l’emploi du contribuable, doit être incluse dans le calcul de son revenu. Dans ces appels, aucune des exceptions ne s’applique.

[56] Le paragraphe 6(1)(a) de la LIR est ainsi rédigé :

6(1) Sont à inclure dans le calcul du revenu d’un contribuable tiré, pour une année d’imposition, d’une charge ou d’un emploi, ceux des éléments suivants qui sont applicables :

(a) la valeur de la pension, du logement et de tout autre avantage que reçoit ou dont jouit le contribuable, ou une personne avec laquelle il a un lien de dépendance, au cours de l’année au titre, dans le cadre ou en raison de la charge ou de l’emploi du contribuable, à l’exception des avantages suivants :

[…]

[Non souligné dans l’original.]

[57] En ce qui concerne Kostantina, une catégorie de frais de déplacement est en cause, à savoir les frais désignés en tant que frais personnels de Kostantina payés par Opco avec une carte de crédit Amex et totalisant 6 967 $ en 2014 et 19 624 $ en 2015.

[58] En ce qui concerne Kostantinos, une catégorie de frais de déplacement est en cause, à savoir les frais désignés en tant que frais personnels de Kostantinos payés par Opco avec une carte de crédit Amex et totalisant 29 049 $ en 2014 et 18 549 $ en 2015.

[59] Les frais de déplacement payés par Opco pour lesquels, comme je l’expliquerai plus loin, j’ai constaté qu’ils n’avaient pas été engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise, sont des frais de déplacement de nature personnelle de Kostantina et Kostantinos. Le paiement desdits frais de déplacement par Opco constitue une appropriation des fonds d’Opco au bénéfice de Kostantina et de Kostantinos. Je conclus donc qu’un avantage a été conféré par Opco à Kostantina et à Kostantinos.

[60] De plus, pour les motifs que j’expliquerai plus loin dans les présentes, comme les appelants n’ont pas présenté suffisamment d’éléments de preuve lors de l’audience, je conclus qu’un avantage a été conféré à Kostantina et à Kostantinos à titre d’employés d’Opco, en application du paragraphe 6(1)(a) de la LIR, pour la somme de 6 967 $ en 2014 et de 19 624 $ en 2015 pour Kostantina et pour la somme de 29 049 $ en 2014 et de 18 549 $ en 2015 pour Kostantinos.

[61] Les nouvelles cotisations sont raisonnables et les appels relatifs à ces questions en litige sont par conséquent rejetés.

(iv) Le fardeau

[62] En vertu du paragraphe 152(8) de la LIR, une cotisation faite en application de la LIR est réputée être valide et exécutoire malgré toute erreur, tout vice de forme ou toute omission dans cette cotisation.

[63] En règle générale, dans les appels en matière fiscale, le fardeau de preuve incombe à l’appelant. Le fardeau de réfuter les hypothèses de fait formulées par le ministre et de prouver, selon la prépondérance des probabilités, les faits justifiant sa position, incombe à l’appelant.

[64] Comme l’explique le juge L’Heureux-Dubé dans l’arrêt Hickman Motors Ltd. c. Canada, [1997] 2 RCS 336, aux paragraphes 92 à 95, la charge initiale de « démolir » les présomptions formulées par le ministre dans sa cotisation est imposée au contribuable. L’appelant s’acquitte de cette charge initiale de « démolir » l’exactitude des présomptions du ministre lorsqu’il présente au moins une preuve prima facie montrant que l’inexactitude desdites présomptions. Lorsque le contribuable présente une preuve prima facie», le fardeau de preuve est passé au ministre qui doit la réfuter et prouver les présomptions.

[65] Une preuve prima facie est celle qui est « étayée par des éléments de preuve qui créent un tel degré de probabilité en sa faveur que la Cour doit l’accepter si elle y ajoute foi, à moins qu’elle ne soit contredite ou que le contraire ne soit prouvé. Une preuve prima facie n’est pas la même chose qu’une preuve concluante, qui exclut la possibilité que toute conclusion autre que celle établie par cette preuve soit vraie (Stewart c. Canada, [2000] T.C.J. No 53 (QL), par. 23 (CCI), repris avec l’approbation du juge Trudel dans Amiante Spec Inc. c. Canada, 2009 CAF 139, par. 23).

[66] Plus récemment, la Cour d’appel fédérale a déclaré que le fardeau dans les appels en matière fiscale doit plutôt faire l’objet de l’approche suivante. Dans l’arrêt Eisbrenner v. Canada, 2020 CAF 93 (autorisation d’interjeter appel devant la Cour suprême du Canada rejetée, 2020 C.S.C. no 268), le juge Webb a déclaré :

[24] …Dans l’arrêt Sarmadi, j’ai examiné les différentes affaires dans lesquelles la question du fardeau de la preuve est examinée. J’ai également examiné le contexte d’un appel interjeté auprès de la Cour de l’impôt. Voici ma conclusion :

[61] À mon avis, il devrait incomber à un contribuable de prouver, selon la prépondérance des probabilités, les faits qu’il allègue dans son avis d’appel et qui sont niés par la Couronne. Dans la plupart des cas, ceci devrait mettre un terme à la discussion sur le fardeau de preuve parce que les hypothèses de fait du ministre dans le cadre de l’imposition d’une nouvelle cotisation au contribuable seraient généralement incompatibles avec les faits plaidés par le contribuable relativement aux faits substantiels sur lesquels la nouvelle cotisation a été fondée.

[62] Si, en imposant une nouvelle cotisation au contribuable, le ministre a présumé de certains faits qui ne sont pas incompatibles avec les faits allégués par le contribuable, il semblerait également logique d’exiger que le contribuable prouve, selon la prépondérance des probabilités, que ces faits présumés par le ministre (qui sont en litige et qui ne relèvent pas de la connaissance exclusive ou particulière du ministre) ne sont pas exacts. L’exigence qu’un contribuable réfute les faits présumés par le ministre dans le cadre de l’imposition d’une nouvelle cotisation ne fait que déplacer le fardeau sur la personne qui a connaissance (ou qui devrait avoir connaissance) des faits. Le fardeau passe également à la personne qui a indirectement affirmé, lors de la production de sa déclaration de revenus, certains faits qui seraient incompatibles avec les faits présumés par le ministre au moment d’imposer une nouvelle cotisation au contribuable.

[63] Lorsque tous les éléments de preuve ont été présentés, le juge de la Cour de l’impôt devrait alors (et seulement alors) déterminer si le contribuable s’est acquitté de ce fardeau. Si le contribuable a réfuté, selon la prépondérance des probabilités, les faits particuliers présumés par le ministre, en se fondant sur tous les éléments de preuve, aucun fardeau n’est déplacé sur le ministre de réfuter la preuve que le juge de la Cour de l’impôt a estimé avoir été établie par le contribuable. Soit le contribuable a réfuté les faits présumés, soit il ne l’a pas fait.

[25] Au paragraphe 36 de l’arrêt Sarmadi, j’ai également noté que si le ministre allègue un fait qui ne fait pas partie des faits présumés par le ministre lors de l’établissement de la cotisation d’un contribuable ou de la confirmation d’une cotisation, le ministre aura alors le fardeau de prouver ces faits (arrêt Canada c. Loewen, 2004 C.A.F. 146, au paragraphe 11, 2004 D.T.C. 6321).

[67] Je n’en dirai pas davantage sur le fardeau dont un appelant doit s’acquitter dans les appels en matière fiscale, car je conclus, au vu de l’insuffisance des témoignages rendus par les appelants lors de l’audience, qui est équivalente à une absence de témoignage, et du manque de crédibilité et de fiabilité que j’ai constaté à l’égard de ces témoignages, que les appelants n’ont aucunement satisfait au seuil de la norme prima facie, et encore moins à la prépondérance des probabilités, pour montrer que les présomptions formulées par le ministre lors de l’établissement des nouvelles cotisations étaient incorrectes.

(v) Examen de la preuve

[68] Dans ces appels, les appelants devraient avoir présenté un témoignage détaillé et convaincant, et des éléments de preuve à l’appui, dans la mesure du possible, pour expliquer pourquoi les frais de déplacement n’étaient pas de nature personnelle, mais engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise. Par exemple, les appelants auraient pu établir, selon la prépondérance des probabilités, de nouveaux faits non pris en compte par le ministre lors de l’établissement des nouvelles cotisations, en montrant que les frais de déplacement avaient été engagés à des fins professionnelles, ou en démontrant que les hypothèses de fait utilisées par le ministre pour établir les nouvelles cotisations étaient fausses. Toutefois, les appelants ne l’ont pas fait.

[69] Lorsque j’examine la crédibilité d’un témoin, je peux tenir compte des incohérences, de l’attitude et du comportement du témoin, des motifs qu’aurait le témoin pour rendre un faux témoignage et de la « saveur générale de la preuve ». Comme la juge Valerie Miller l’a affirmé dans la décision Nichols c. La Reine, 2009 CCI 334, 2009 DTC 1203 au paragraphe 23 :

[23] En matière de crédibilité, je peux tenir compte des incohérences ou des faiblesses que comporte le témoignage des témoins, y compris les incohérences internes (si le témoignage change pendant que le témoin est à la barre ou s’il diverge du témoignage rendu à l’interrogatoire préalable), les déclarations antérieures contradictoires et les incohérences externes (soit lorsque le témoignage est incompatible avec des éléments de preuve indépendants que j’ai acceptés). Il m’est ensuite loisible d’apprécier l’attitude et le comportement du témoin. Troisièmement, je peux rechercher si le témoin a des raisons de rendre un faux témoignage ou d’induire la Cour en erreur. Enfin, je peux prendre en compte la teneur générale de la preuve. C’est‑à‑dire que j’ai toute latitude pour rechercher si l’examen du témoignage à la lumière du sens commun donne à penser que les faits exposés sont impossibles ou hautement improbables.

[70] Ici la crédibilité et la suffisance des témoignages rendus lors de l’audience sont déterminantes (Landry c. La Reine, 2009 CCI 399, 2009 DTC. 1359, par. 7; Roy c. La Reine, 2006 DTC 226, 2008 CCI 3224). J’ai également examiné le caractère raisonnable dans l’ensemble des nouvelles cotisations pour décider d’accueillir ou non les appels.

[71] Aucun document d’appui n’a été présenté pour montrer que les frais refusés étaient engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise. Toutefois, je tiens à souligner qu’il n’y a aucune obligation de produire des pièces justificatives ou des reçus pour toutes les dépenses dont la déduction est réclamée, à condition que ces dépenses soient corroborées par un autre élément de preuve crédible (voir McMillan c. La Reine, 2011 CCI 393 (McMillan); Chrabalowski c. La Reine, 2004 CCI 644). Il n’est donc pas nécessaire de présenter chaque reçu, mais tout contribuable doit avoir à prouver tout d’abord, par d’autres moyens crédibles, que les frais ont été engagés, et qu’ils ont été engagés en vue de tirer un revenu de l’entreprise.

[72] J’ai tenu compte de ces principes lorsque j’ai examiné les éléments de preuve présentés Iors de l’audience de ces appels, et je conclus qu’aucun d’eux n’était crédible pour appuyer la position des appelants selon laquelle les frais refusés avaient été engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise.

Témoignage de Mme Myre et de Mme Lu

[73] Pour les motifs suivants, je conclus que le témoignage de Mme Myre était vague, non convaincant et non crédible. En revanche, je conclus que le témoignage de Mme Lu était crédible et fiable.

[74] La preuve a montré que Mme Myre, la contrôleuse financière d’Opco, a été désignée par John pour coordonner la vérification et tenir lieu de personne-ressource pour fournir les renseignements. Mme Myre a produit plusieurs relevés de carte de crédit à la vérificatrice. Mme Myre et la vérificatrice se sont rencontrées à trois ou quatre reprises.

[75] Je conclus que les éléments de preuve ont montré que la vérificatrice a examiné les relevés de carte de crédit soumis par Mme Myre et qu’elle a pu déterminer, conjointement avec Mme Myre et sur la base de la destination et des personnes qui voyageaient avec l’un ou plusieurs des appelants, quels étaient les frais de déplacement qui étaient engagés à des fins professionnelles et quels étaient ceux qui étaient de nature personnelle pour les frères et sœurs et autres membres de la famille. La vérificatrice a autorisé la déduction d’environ 200 000 $ de frais de déplacement sans autre document d’appui que les relevés de carte de crédit : par exemple, des frais de déplacement pour assister à Dubaï au salon professionnel annuel des produits laitiers et pour des voyages vers d’autres destinations comme Chicago, New York, Vancouver, San Diego et Washington. Toutefois, les frais de déplacement pour les voyages à Paris, Aruba, Nassau et Mont-Tremblant n’ont pas été autorisés, ni les règlements effectués à Vacances Sunwing, car la vérificatrice a conclu qu’il s’agissait de frais de nature personnelle payés par Opco au bénéfice des frères et sœurs et autres membres de la famille.

[76] Je conclus que les éléments de preuve ont montré que Mme Myre avait indiqué à la vérificatrice, durant cette vérification, qu’il n’y avait pas de documents d’appui (y compris des courriels, itinéraires, noms de personnes-ressources, détails de conférences, etc.) pour montrer l’objet de ces frais de déplacement refusés. Il y avait des relevés de carte de crédit pour certains frais de déplacement, mais pas pour tous.

[77] Je ne suis pas convaincue par le témoignage de Mme Myre selon lequel elle ne se souvenait plus si elle avait remis à la vérificatrice les documents d’appui autres que les relevés de carte de crédit pour les frais de déplacement. Si lesdits documents d’appui ont été remis à la vérificatrice durant la vérification, il n’y a aucune raison de ne pas les avoir présentés dans les éléments de preuve lors de l’audience des appels.

[78] Mme Lu a témoigné à l’égard de la vérification de plusieurs livres et documents d’Opco qu’elle a effectuée et des réunions qu’elle a tenues avec Mme Myre. Mme Lu a pris des notes contemporaines de ces réunions (annexe R‑9) qui appuient son témoignage.

[79] Pour l’année d’imposition d’Opco qui s’est terminée le 31 décembre 2015, de la somme de 586 812 $ en frais de déplacement réclamée à titre de déduction dans le calcul du revenu à des fins d’impôt sur le revenu d’Opco, Mme Lu a refusé un total de 354 644,06 $. Les frais de déplacement refusés comprenaient les éléments suivants : des frais de déplacement totalisant 161 257,63 $, déclarés par Opco sans aucun document d’appui ou relevé de carte de crédit, et des frais de déplacement totalisant 193 386,43 $, corroborés uniquement par des relevés de carte de crédit.

[80] Les frais de déplacement totalisant 161 257,63 $ déclarés par Opco sans aucun document d’appui ou relevé de carte de crédit comprenaient des frais payés par Opco avec les cartes de crédit Option MasterCard, Visa Desjardins et Visa. Selon le témoignage de Mme Lu, Mme Myre a admis lors de la vérification que ces frais étaient des frais personnels et devaient être ventilés à parts égales à John et à Antigoni. Toutefois, à l’audience, Mme Myre a témoigné que, n’ayant pas de relevés de carte de crédit, elle aurait été incapable d’établir si les frais étaient de nature personnelle ou professionnelle.

[81] Je le répète, j’estime que le témoignage de Mme Myre n’est pas crédible. Les notes prises à l’époque par Mme Lu (annexe R-9) indiquent que Mme Myre a déclaré que les cartes de crédit Option MasterCard, Visa Desjardins et Visa étaient des cartes de crédit personnelles. Il a également été établi à l’audience que les commentaires écrits à la main figurant dans l’annexe R-6 étaient de Mme Myre et que ces commentaires indiquaient clairement une ventilation de ces frais à parts égales entre John et Antigoni. À l’audience, aucun élément de preuve n’a été présenté pour montrer que ces frais étaient des frais professionnels; de plus, aucun élément de preuve n’a été présenté pour montrer que ces frais ne devraient pas être ventilés à parts égales entre John et Antigoni.

[82] Les frais de déplacement totalisant 193 386,43 $ déclarés par Opco et corroborés uniquement par des relevés de carte de crédit ont été imputés à deux cartes de crédit Amex; l’une de ces cartes Amex avait deux titulaires, à savoir John et Peggy, et l’autre carte Amex avait de nombreux titulaires, notamment les conducteurs de camion d’Opco, les frères et sœurs et autres membres de la famille (les époux ou épouses des appelants et la mère des appelants, Maria). La vérificatrice a examiné les relevés des cartes de crédit et a attribué les frais de déplacement aux titulaires, à l’exception des dépenses de Peggy, qui ont été attribuées à John, des dépenses de Maria, qui ont été ventilées à parts égales entre John et Antigoni, et des dépenses de Kyriakos, qui ont été attribuées à Antigoni.

[83] Pour l’année d’imposition d’Opco qui s’est terminée le 31 décembre 2014 et qui n’est pas en cause, les éléments de preuve montrent que Mme Lu a refusé un total de 507 245 $ pour le motif qu’il s’agissait de frais de déplacement personnels et non professionnels : des frais de déplacement totalisant 288 794,05 $, déclarés par Opco sans aucun document d’appui (et sans relevé de carte de crédit), et des frais de déplacement totalisant 218 451,36 $, étayés uniquement par des relevés de carte de crédit. Elle a appliqué à l’année 2014 le même raisonnement qu’à l’année 2015.

Témoignage de John

[84] Pour les motifs suivants, je conclus que le témoignage de John était vague, non convaincant et non crédible.

[85] Selon son témoignage, tous les frais cités dans les annexes en réponse aux avis d’appel étaient des frais professionnels d’Opco et ne doivent pas être considérés comme des frais de déplacement personnels des frères et sœurs et autres membres de la famille.

[86] Les frais de déplacement refusés incluaient les dépenses suivantes :

  • (i)Maria : Dépenses engagées à Saint-Martin et dans divers restaurants; toutefois, les éléments de preuve ont montré que Maria n’est pas une employée d’Opco et par conséquent, le témoignage de John selon lequel il s’agit de frais professionnels n’est pas crédible.

  • (ii)Kostantinos : Frais de déplacement engagés au Fairmont Tremblant à Mont-Tremblant, à Nassau et dans une jardinerie de Saint‑Eustache; aucun élément de preuve crédible n’a été présenté concernant l’objet de ces dépenses, et aucun document d’appui n’a été présenté à l’audience pour montrer que ces dépenses avaient été engagées par Opco à des fins professionnelles.

  • (iii)Kostantina : Frais de déplacement engagés à Mont-Tremblant et au Marriott’s Aruba Surf Club; aucun document d’appui présenté à l’audience. Toutefois, John a témoigné que Kostantina développait l’entreprise à Aruba, ce que je n’ai pas estimé crédible. De plus, aucun élément de preuve n’a été présenté concernant les fonctions de Kostantina au sein d’Opco. En outre, les éléments de preuve ont montré que la clientèle d’Opco se situait en Amérique du Nord (y compris au Mexique), et je conclus donc que les dépenses engagées à Aruba n’ont pas été engagées à des fins professionnelles.

  • (iv)Kyriakos : Frais de déplacement engagés par Kyriakos (l’époux d’Antigoni) à la Sépaq (Société des établissements de plein air du Québec); John a témoigné qu’une réunion des employés avait eu lieu à la Sépaq. Toutefois, aucun élément de preuve n’a été présenté à l’audience. Je conclus qu’il aurait été facile de produire des courriels ou un itinéraire qui aurait certainement été envoyé aux employés d’Opco, ainsi que l’ordre du jour de cette réunion des employés. Les frais engagés au Fairmont Mont-Tremblant, à Heraklion, à Santorin et à Paris ont été refusés. Aucun élément de preuve n’a été présenté lors de l’audience concernant l’objet de ces dépenses.

  • (v)Antigoni : Frais de déplacement payés à Vacances Sunwing et Air Canada; aucun élément de preuve crédible n’a été présenté lors de l’audience concernant l’objet de ces dépenses.

  • (vi)John : Frais de déplacement engagés au nom de John au Ritz-Carlton d’Aruba et au Ritz-Carlton de Grand Caïman ainsi que des dépenses engagées par l’épouse de John au magasin Holt Renfrew de Montréal et dans différents restaurants. Comme Peggy n’est pas une employée d’Opco, il n’est pas crédible que ces dépenses aient été engagées en vue de tirer un revenu d’entreprise pour Opco. Comme il a été mentionné précédemment, les éléments de preuve ont montré que la clientèle d’Opco se situait en Amérique du Nord, y compris au Mexique. Aucun élément de preuve n’a été présenté pour établir si Opco développait des affaires à Aruba et à Grand Caïman.

[87] Pour 2014, des types de dépenses similaires ont été refusés par la vérificatrice. Pour les mêmes motifs que pour l’année 2015, je conclus que le témoignage de John n’est pas crédible.

(vi) Conclusions défavorables

[88] Une conclusion défavorable peut être tirée du fait qu’une partie n’a pas appelé un témoin à comparaître, plus précisément si le témoignage aurait été essentiel pour établir un fait important (Imperial Pacific Greenhouses Ltée c. La Reine, 2011 CAF 79, par. 14).

[89] En l’espèce, le témoignage de tous les appelants était essentiel pour établir la nature des frais de déplacement engagés par Opco et refusés par la vérificatrice. Toutefois, je n’ai reçu aucune explication crédible justifiant l’absence d’Antigoni, de Kostantina et de Kostantinos à l’audience. Je dois donc tirer une conclusion défavorable de leur défaut de comparaître et du fait que leur témoignage aurait montré que les frais de déplacement étaient de nature personnelle et non liés aux activités d’Opco.

[90] De plus, je conclus également qu’il aurait été raisonnable de s’attendre à ce que certains documents d’appui, à savoir des courriels, des invitations aux réunions, des ordres du jour de réunions, etc., soient présentés à l’audience pour indiquer les fins de ces divers frais de déplacement.

[91] En application du paragraphe 230(1) de la LIR, Opco doit tenir à jour et avoir à sa disposition les renseignements détaillés et la documentation nécessaire à l’appui de ses allégations selon lesquelles les frais professionnels ont été engagés en vue de tirer un revenu de l’entreprise. Ce paragraphe est rédigé comme suit :

230 (1) Quiconque exploite une entreprise et quiconque est obligé, par ou selon la présente loi, de payer ou de percevoir des impôts ou autres montants doit tenir des registres et des livres de comptes (y compris un inventaire annuel, selon les modalités réglementaires) à son lieu d’affaires ou de résidence au Canada ou à tout autre lieu que le ministre peut désigner, dans la forme et renfermant les renseignements qui permettent d’établir le montant des impôts payables en vertu de la présente loi, ou des impôts ou autres sommes qui auraient dû être déduites, retenues ou perçues.

[92] Cette documentation aurait permis à la Cour de se prononcer sur la nature des frais de déplacement et de déterminer si les droits de licence ont été payés ou engagés par Opco. Une inférence défavorable peut aussi être tirée de ce manquement; cette inférence porte que les reçus ou autres documents d’appui n’auraient pas montré que les frais de déplacement ont été engagés par Opco en vue de tirer un revenu de l’entreprise, et que les droits de licence ont été payés par Opco (McMillan, par. 33).

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 28e jour de février 2023.

« Dominique Lafleur »

Mme la Juge Lafleur

Traduction certifiée conforme

Ce 26e jour d’avril 2024.

François Brunet, réviseur


RÉFÉRENCE :

2023 CCI 24

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :

2019-2458(IT)G

2019-2460(IT)I

2019-2463(IT)G

2019-2464(IT)G

2019-2467(IT)I

INTITULÉ :

1048547 ONTARIO INC c. SA MAJESTÉ LE ROI

KOSTANTINOS SKOTIDAKIS c. SA MAJESTÉ LE ROI

JOHN SKOTIDAKIS c. SA MAJESTÉ LE ROI

ANTIGONI SKOTIDAKIS c. SA MAJESTÉ LE ROI

KOSTANTINA SKOTIDAKIS c. SA MAJESTÉ LE ROI

LIEU DE L’AUDIENCE :

Montréal (Québec)

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 22 et 28 novembre 2022

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Dominique Lafleur

DATE DU JUGEMENT :

Le 28 février 2023

COMPARUTIONS :

Avocat des appelants :

Me Michel Jasmin

Avocat de l’intimé :

Me Julien Dubé-Sénécal

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

Me Michel Jasmin

 

Cabinet :

Me Michel Jasmin

Saint-Placide (Québec)

Pour l’intimé :

François Daigle

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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