Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2010-860(IT)G

ENTRE :

MARZEN ARTISTIC ALUMINUM LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appel entendu les 25, 26 et 27 février ainsi que les 3, 4, 5 et 6 septembre 2013, à Vancouver (Colombie-Britannique).

Devant : L’honorable juge G. A. Sheridan


Comparutions :

 

Avocats de l’appelante :

Me Steven M. Cook

Me Natasha Reid

Me Erin L. Frew

Avocats de l’intimée :

Me Michael Taylor

Me Selena Sit

 

JUGEMENT

          Conformément aux motifs du jugement ci-joints, les appels relatifs aux années d’imposition 2000 et 2001 sont accueillis en partie, et les nouvelles cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, étant entendu qu’une partie sans lien de dépendance aurait payé à Starline International Inc. un montant supérieur aux frais que cette dernière a payés à Starline Windows Inc., mais uniquement à hauteur de 32 500 $US dans chacune des années d’imposition 2000 et 2001.

          Compte tenu du succès limité de l’appelante en l’espèce, les dépens sont adjugés à l’intimée.

          Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juin 2014.

« G. A. Sheridan »

Juge Sheridan

 

Traduction certifiée conforme

ce 26e jour de novembre 2014.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


Référence : 2014 CCI 194

Date : 20140610

Dossier : 2010-860(IT)G

ENTRE :

MARZEN ARTISTIC ALUMINUM LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 


MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Sheridan

I. Introduction

[1]             Les présents appels résultent d’un redressement de prix de transfert qu’a effectué le ministre du Revenu national (le « ministre ») en vertu des alinéas 247(2)a) et c) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), relativement à des frais que l’appelante a payés à Starline International Inc. (« SII »), une société ayant son siège à la Barbade et lui appartenant en propriété exclusive. Dans le calcul de son revenu pour les années 2000 et 2001, l’appelante a déduit la somme de 4 168 551 $CAN et de 7 837 082 $CAN, respectivement, à titre de frais payés à SII.

[2]             En 2000 et en 2001, SII a payé à Starline Windows Inc. (« SWI »), une autre société membre du groupe d’entreprises de l’appelante, un montant total de 1 383 723 $US et de 1 811 992 $US, respectivement, pour le détachement de ses employés en vue de fournir certains services à SII.

[3]             En 2000 et en 2001, SII a déclaré des dividendes de 2 011 500 $CAN et de 5 299 620 $CAN, respectivement. L’appelante a inclus ces montants dans son revenu pour les besoins de l’impôt canadien dans les années d’imposition 2000, 2001 et 2002. Ces dividendes ont ensuite été déduits du revenu imposable de l’appelante conformément à l’article 113 de la Loi, compte tenu du fait qu’ils avaient été payés sur le surplus exonéré de SII.

[4]             Pour établir la nouvelle cotisation relative aux années d’imposition 2000 et 2001 de l’appelant, le ministre a refusé la déduction de tout montant excédant les frais que SII avait payés à SWI[1] :

 

2000

2001

Montant payé par l’appelante à SII

4 168 551 $

7 837 082 $

Montant payé par SII à SWI

(2 058 049 $)

(2 811 892 $)

Différence

 

2 110 502 $

5 025 190 $

[5]             Une pénalité relative au prix de transfert, d’un montant de 502 519 $CAN, a été imposée en application du paragraphe 247(3) de la Loi pour l’année d’imposition 2001 seulement.

II. Les témoins

A. Les témoins ordinaires de l’appelante

1)    M. Ron Martini

[6]             Au cours des années en question, M. Martini était le président et unique administrateur de l’appelante. Ce dernier a immigré au Canada à l’âge de 18 ans, en ayant à son actif que sept années de scolarité. Après avoir travaillé pendant deux ans comme soudeur, M. Martini et trois associés ont constitué l’appelante en société en 1970. Environ vingt ans plus tard, M. Martini et son épouse étaient devenus seuls propriétaires de l’entreprise et, en 1995, l’appelante était le plus gros fabricant de fenêtres en Colombie-Britannique.

[7]             M. Martini m’a paru être un homme dont les nombreuses années d’expérience dans l’industrie ont fait de lui un homme d’affaires compétent et avisé.

2)    M. Art Fabian

[8]             À l’instar de M. Martini, M. Fabian a aussi immigré au Canada et s’est lancé dans une carrière professionnelle fructueuse. Il a obtenu un baccalauréat ès sciences de l’éducation aux Philippines où, après avoir obtenu son diplôme, il a enseigné la physique au niveau secondaire. Il est ensuite devenu représentant commercial dans le secteur médical pour GlaxoSmithKline à Manille, où il a été régulièrement promu jusqu’en 1989, année où sa famille et lui ont immigré au Canada. Il a aussitôt commencé à travailler comme vendeur de chaussures à Vancouver et, à la fin de 1990, il occupait le poste de superviseur de secteur de l’entreprise. Il a quitté cet emploi pour vendre des fenêtres pour le compte d’une entreprise qui, peu après, a été achetée par l’appelante. En 1991, M. Martini a confié à M. Fabian la tâche de superviser l’entreprise pendant la période de transition. Grâce à ses antécédents dans les domaines des sciences, des ventes et de la gestion, M. Fabian n’a pas tardé à gravir les échelons jusqu’à devenir, comme M. Martini l’a décrit à l’instruction, son [traduction] « bras droit » dans les activités commerciales de l’appelante.

[9]             M. Fabian a été le premier témoin cité et il a passé un jour entier et la majeure partie de la matinée suivante à la barre. Il a expliqué de façon très détaillée, notamment, le commerce de la vente de fenêtres, les besoins différents du marché résidentiel des maisons unifamiliales et du marché des immeubles d’habitation condominiaux de grande hauteur et, surtout, la nature des diverses activités de l’appelante. Il a toutefois perdu de son éloquence quand est venu le temps d’expliquer le rôle joué par M. Csumrik par rapport aux fonctions de SII et de SWI.

3)    M. David Csumrik

[10]        M. Csumrik est un avocat ayant de l’expérience en comptabilité ainsi que d’impressionnants antécédents dans diverses opérations commerciales menées au Canada et aux États-Unis. Au moment de l’instruction, M. Csumrik était le dirigeant de Longview Associated Limited (« Longview »), une entreprise participant à l’établissement de sociétés commerciales internationales à la Barbade et fournissant à ces dernières des services de soutien sur le plan de la gestion et de l’administration.

[11]        Le témoignage de M. Csumrik m’a souvent donné l’impression que le récit qu’entendait la Cour n’était pas tout à fait complet. Sa crédibilité générale a été par ailleurs affaiblie par des contradictions entre son témoignage sous serment aux audiences et certaines observations écrites qu’il a fournies au cours de la vérification à propos du rôle qu’il jouait dans les fonctions de SII et de SWI. Il en sera davantage question plus tard.

B. Le témoin ordinaire de l’intimée

1)    M. Thomas Stasiewski

[12]        L’intimée a cité M. Thomas Stasiewski, un ancien employé de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») qui s’était chargé de la totalité de la vérification, à l’exception des étapes préliminaires, relativement aux années d’imposition 2000 et 2001 de l’appelante. M. Stasiewski est comptable général accrédité, et il est entré au service de l’ARC en 1975. Il a occupé divers postes dans le secteur de la vérification durant toute sa carrière; à l’époque où la vérification de l’appelante a débuté, soit en 2003, M. Stasiewski était en poste dans une section du Service des vérifications internationales qui s’occupait des questions relatives aux prix de transfert. J’ai trouvé que M. Stasiewski était un témoin digne de foi.

[13]        Même s’il était censé être au départ le représentant de l’intimée lors des interrogatoires préalables, M. Stasiewski a pris sa retraite avant que ces derniers aient lieu. Il a refusé de comparaître pour le compte de l’intimée à cause de politiques du Conseil du Trésor limitant le montant de sa rémunération. C’est la raison pour laquelle Mme Tanya Fleck, une autre vérificatrice de l’ARC, est devenue la représentante de l’intimée pour les interrogatoires préalables.

[14]        À l’instruction, l’appelante a demandé que M. Stasiewski soit exclu en tant que témoin du ministère public. Cette requête a été rejetée pour les raisons données aux pages 793 à 798 de la transcription.

[15]        Par souci de commodité, M. Stasiewski est appelé dans les présentes le « vérificateur principal » et Mme Fleck, la « vérificatrice représentante ».

C. Les témoins experts

1)    Le témoin expert de l’appelante : M. Barry MacDonald

[16]        L’appelante a cité comme témoin expert M. Barry MacDonald, associé du cabinet PricewaterhouseCoopers s.r.l./s.e.n.c.r.l. et fort d’une trentaine d’années d’expérience environ en matière de prix de transfert et de planification fiscale au niveau international. M. MacDonald a été dûment qualifié comme témoin expert pour l’appelante et son rapport d’expert a été déposé en preuve en tant que pièce A‑2 (le « rapport d’expert de l’appelante »).

2)    Le témoin expert de l’intimée : M. Oliver Rogerson

[17]        M. Oliver Rogerson, économiste en chef auprès de l’ARC et en poste à Ottawa, a été le témoin expert de l’intimée. M. Rogerson a entrepris sa carrière à l’ARC en 1999 et il se spécialise dans les analyses relatives aux prix de transfert.

[18]        Après que M. Rogerson eut été dûment qualifié comme témoin expert de l’intimée dans le domaine de l’analyse économique des prix de transfert, l’appelante s’est opposée à la recevabilité du rapport qu’il avait établi. Après que les avocats eurent présenté leurs observations, le rapport a été exclu pour les raisons données aux pages 798 à 807 de la transcription. Aucune objection n’a été formulée à l’égard du rapport d’expert de réfutation de M. Rogerson, et ce document a été dûment admis en preuve en tant que pièce R‑1 (le « rapport d’expert de réfutation de l’intimée »).

III. La preuve

A. Le contexte

[19]        Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits et un recueil conjoint de documents[2]. Divers passages des interrogatoires préalables ont été consignés en preuve lors des audiences.

[20]        Pendant toute la période en cause, l’appelante exploitait une entreprise de conception, de fabrication et de vente de produits de fenêtrage en aluminium et en vinyle (les « produits de fenêtrage »), à Langley (Colombie-Britannique). Son unique administrateur était M. Ron Martini. Ce dernier et sa famille contrôlaient directement ou indirectement l’appelante, SII et SWI. L’appelante, SII et SWI sont donc réputées avoir un lien de dépendance selon la Loi.

[21]        SWI était située dans l’État de Washington. Pour les besoins de l’impôt, elle était résidente des États-Unis, où elle a produit des déclarations de revenus pour les années d’imposition 1998 à 2001. M. Rick Stark en est devenu le directeur général en avril 1998.

[22]        SII, résidente de la Barbade pour les besoins de l’impôt, a été constituée en société à la Barbade par M. David Csumrik, lui aussi résident de ce pays, le 29 septembre 1998. Ce dernier a été le premier administrateur de cette société et, le 11 février 1999, il en est devenu l’administrateur-gérant. Deux autres administrateurs ont également été nommés à cette époque-là : M. Stark et M. Terry Vipond, gendre de M. Martini.

[23]        M. Csumrik était également le dirigeant de Longview. Ni M. Csumrik ni Longview n’étaient liés à l’appelante, à SII ou à SWI pour l’application de la Loi.

B. Les activités antérieures au 1er juillet 1999

1)    Les ventes directes de l’appelante aux États-Unis – de 1993 au début de 1998

[24]        En 1995, l’appelante était le plus gros fabricant de fenêtres en Colombie‑Britannique; la majorité de ses clients étaient situés dans le Lower Mainland et elle avait des succursales à Kamloops, à Kelowna et sur l’île de Vancouver. Quatre-vingt-dix pour cent de son chiffre d’affaires était attribuable au marché des maisons unifamiliales, et les dix pour cent restants aux immeubles de grande hauteur.

[25]        La majeure partie des ventes avaient lieu au Canada, mais, entre 1993 et le début de 1998, l’appelante a également tenté, avec un succès mitigé, de vendre des produits de fenêtrage directement à partir de ses installations de la Colombie‑Britannique à des clients situés sur le marché résidentiel des États‑Unis.

2)    Les activités de vente de SWI aux États-Unis – d’avril 1998 à juin 1999

[26]        En 1998, M. Martini a décidé de confier ce rôle à SWI. Cette dernière avait été constituée en société dans l’État de Washington quelque temps avant 1993 et elle avait été remise en activité le 21 septembre 1993 à titre de société de l’État de Washington, où elle est demeurée inactive jusqu’en 1998.

[27]        En avril 1998, SWI a ouvert un bureau de vente et une installation d’entreposage près de Seattle (Washington). M. Stark, directeur général d’expérience au bureau des ventes de l’appelante à Victoria, a été muté au bureau de SWI en vue d’y exercer les fonctions de directeur général. M. Stark a embauché et formé un effectif d’environ 20 employés en vue de fournir des services de vente, d’administration, de comptabilité, d’entreposage et de livraison pour le compte de SWI. Cette dernière avait sa propre assurance de biens et de responsabilité civile.

[28]        À l’instar de l’appelante au Canada, SWI a mis l’accent, dans l’État de Washington, sur le marché résidentiel. Elle achetait des produits de fenêtrage de l’appelante à un prix qui lui procurait une marge de 15 % à 18 %. SWI avait accès au système informatique de l’appelante, y compris à sa liste de prix. Le personnel de SWI sollicitait des commandes de produits de fenêtrage auprès de clients aux États-Unis et consignait les produits commandés directement dans le système de l’appelante afin qu’ils soient fabriqués à l’usine située en Colombie‑Britannique.

[29]        Au cours de l’exercice de l’année 1998, SWI a réalisé un chiffre d’affaires de 551 320 $US et subi une perte de 487 309 $US. M. Martini a demandé à M. Fabian d’examiner pourquoi l’entreprise ne parvenait pas à prendre pied sur le marché résidentiel dans l’État de Washington. Après avoir parlé de la situation avec M. Stark, M. Fabian a conclu que SWI était devancée par ses concurrents américains, plus gros et mieux établis.

[30]        À peu près à la même époque, MM. Martini et Fabian ont également rencontré l’avocat de l’appelante au cabinet Thorsteinssons LLP à Vancouver en vue de discuter de l’utilisation des pertes de SWI. Lors de son interrogatoire principal, M. Martini a expliqué que cet avocat avait [traduction] « […] suggéré que [s’il] avai[t] besoin d’un spécialiste de la mise en marché, il en connaissait un qui pouvait probablement, peut-être, [les] aider[3]. » Cette personne était M. David Csumrik.

3)    M. Csumrik et la société Longview

[31]        À l’époque des discussions de l’avocat avec M. Martini et M. Fabian, M. Csumrik vivait à la Barbade. Lors des quinze années précédant son déménagement dans ce pays en 1997, M. Csumrik avait pris part à diverses entreprises au Canada et aux États-Unis. Il avait investi et exercé les fonctions de président et chef de la direction dans une entreprise de Vancouver qui vendait des systèmes d’éclairage spécialisés à des salles de cinéma aux États-Unis. Ensuite, un associé et lui avaient créé une entreprise de développement et d’exploitation avec autorisation de logiciels. Son associé fournissait le savoir-faire technique, et M. Csumrik l’expertise en matière commerciale. Cette entreprise a mené en fin de compte à la vente de l’un de ses produits à Microsoft Windows pour un montant non dévoilé, une opération se chiffrant apparemment à 20 millions de dollars[4].

[32]        Après la vente, M. Csumrik a poursuivi ses activités comme consultant à Vancouver, concluant des contrats d’exploitation avec autorisation de logiciels et réunissant des capitaux d’investissement pour d’autres entreprises. Cherchant à investir une part des bénéfices tirés de la vente à Microsoft, M. Csumrik s’est ensuite joint à deux promoteurs immobiliers de Toronto. Cette entreprise s’est finalement révélée infructueuse, et M. Csumrik est retourné à Vancouver.

[33]        En 1996, il a collaboré avec son ancien associé spécialisé en haute technologie au lancement d’une entreprise de biotechnologie végétale. Pour entreprendre ce projet, il a fallu acquérir certains droits d’exploitation auprès du Carnegie Institution of Washington (« Carnegie »). Selon M. Csumrik, son associé [traduction] « […] a grandement aidé à les convaincre que nous ferions plus d’efforts que Monsanto pour exploiter la technologie[5] »; le rôle de M. Csumrik a consisté à négocier avec le directeur financier de Carnegie en vue de décrocher le contrat de licence.

[34]        M. Csumrik s’est adressé au cabinet Thorsteinssons LLP pour obtenir des conseils sur la façon de structurer la nouvelle entreprise de [traduction] « manière avantageuse sur le plan fiscal[6] ». Son associé et lui ont finalement décidé d’établir l’entreprise à la Barbade et, en 1997, M. Csumrik s’est installé dans ce pays où, selon ses dires :

[traduction]

[…] nous avons créé à la Barbade une entreprise appelée Linnaeus Inc., inscrit cette dernière à titre d’entreprise commerciale internationale à la Barbade, établi les comptes bancaires connexes et conclu les contrats de licence requis avec Carnegie, […] nous avons exercé et exerçons toujours nos activités sous le nom de Linnaeus Inc. à partir de la Barbade[7].

[35]        Au printemps de 1998, M. Csumrik a créé Longview, une entreprise qui, selon sa description, fournissait des [traduction] « services de comptabilité, d’administration d’entreprise, de secrétariat d’entreprise et de bureau, à guichet unique; comme un bureau intégré fournissant, comme je le dis, des services de comptabilité, du bureau, d’administration et de secrétariat d’entreprise[8] » à des entreprises constituées en société à la Barbade. Il a créé Longview après avoir rencontré un client à qui le cabinet Thorsteinssons LLP avait recommandé de faire appel à ses services et qui souhaitait constituer une société à la Barbade. Cela a été suivi de deux autres clients recommandés par le cabinet Thorsteinssons LLP et, par la suite, d’autres encore qui avaient entendu parler de Longview.

[36]        En contre-interrogatoire, M. Csumrik a fourni plus de détails sur les services de Longview : cette entreprise fournissait du personnel pour tenir les livres comptables et établir les états financiers de sociétés commerciales internationales, s’assurait que les immatriculations d’entreprise étaient à jour auprès des autorités barbadiennes, établissait les déclarations de revenus de la Barbade, fournissait du personnel pour répondre au téléphone et s’occuper du courrier, tenait les dossiers d’entreprise qu’il fallait pour exploiter la société, fournissait des services de renvoi juridique à la Barbade en vue d’établir des sociétés ou des fiducies additionnelles, et ouvrait des comptes bancaires à la Barbade ou ailleurs dans le monde, au besoin[9]. Les frais habituellement facturés pour ces services étaient de 30 000 $US par année.

[37]        Moyennant des frais annuels de 2 500 $US[10], M. Csumrik (par l’intermédiaire de Longview) fournissait également ses services personnels à titre d’administrateur-gérant à des sociétés clientes de Longview. À ce titre, il exécutait les tâches suivantes :

[traduction

R

À titre de directeur, je donnais des instructions au personnel pour qu’il s’acquitte de toutes les exigences de… des exigences quotidiennes de l’entreprise, prendre les commandes, traiter les commandes, régler les factures, répondre aux demandes de renseignements des clients. Je supervisais ensuite la société – j’étais le directeur général de l’entreprise qui était exploitée à la Barbade, ou à partir de la Barbade[11].

Q

Maintenant, le personnel, par exemple, ou les activités commerciales de l’entreprise, est-ce là une chose [que le client] vous fournirait? Est-ce que [le client] fournissait le personnel et vous le gériez? Ou est-ce que Longview fournissait… le personnel également?

R

Cela dépendrait des circonstances. Dans certains cas nous – Longview fournissait le personnel comptable, le personnel de bureau. Il est arrivé que nous fournissions des services de soutien à la clientèle, des services dans lesquels… les clients téléphonaient pour obtenir du soutien et ils appelaient une personne à la Barbade. Nous fournissions ce service. Dans d’autres cas, nous gérions le personnel de vente ou le personnel de soutien technique situé dans le monde entier. Nous le faisions à partir de la Barbade. Ce personnel relevait de nous, mais il était rémunéré soit à titre d’entrepreneur indépendant et/ou, s’il était aux États-Unis, il était rémunéré par une entreprise intermédiaire qui avait un lien de dépendance avec le groupe, pas…

Q

Quelque chose comme SWI.

R

Oui, exactement, oui[12].

4)    Les discussions entre l’appelante et M. Csumrik; la constitution en société de SII

[38]        À la fin de l’été de 1998, MM. Martini et Fabian ont rencontré M. Csumrik à Vancouver. Ce dernier a fait état des succès qu’il avait eus en affaires ainsi que de l’expérience qu’il avait acquise sur le plan de la gestion et des négociations au Canada et aux États-Unis. Pour leur part, MM. Martini et Fabian ont expliqué la nature de l’entreprise de l’appelante et les tentatives infructueuses pour pénétrer le marché du fenêtrage résidentiel dans l’État de Washington. Au cours des semaines qui ont suivi, ils ont donné à M. Csumrik ce qu’il a décrit comme un [traduction] « cours très condensé[13] » sur la fabrication des fenêtres, y compris une visite de l’usine de fabrication de l’appelante. M. Csumrik a également rencontré M. Stark pour prendre connaissance des activités de SWI dans l’État de Washington.

[39]        Peu après avoir rencontré MM. Martini et Fabian, M. Csumrik a constitué SII en société à la Barbade le 29 septembre 1998 et il en a été le premier administrateur. Ni lui ni M. Martini ne se sont souciés de la perte possible des frais de constitution en société d’environ 2 000 $ si les discussions ne portaient pas fruit. M. Csumrik a déclaré que l’entreprise pourrait toujours servir pour un autre client qui chercherait à créer une société à la Barbade.

[40]        Les discussions se sont poursuivies entre M. Martini et M. Csumrik, et il a été entendu que ce dernier s’attendait à être rémunéré pour l’aide, quelle qu’elle soit, qu’il pourrait éventuellement fournir. Avant la fin de 1998, M. Csumrik était arrivé à la conclusion que l’appelante concentrait ses efforts sur le mauvais marché. Il a conseillé à MM. Martini et Fabian d’orienter les efforts de l’appelante, qui s’était concentrée sur le marché résidentiel de l’État de Washington, vers le marché en plein essor des immeubles de grande hauteur dans le sud de la Californie, dans le but de cibler des promoteurs de l’Ouest canadien qui étaient actifs dans cette région. M. Csumrik a reconnu qu’il n’avait lui-même aucun contact avec de tels promoteurs et il n’a pas pu se souvenir comment il en était venu à savoir qu’ils avaient des projets immobiliers dans le sud de la Californie :

[traduction

Q

Donc, quand vous avez rencontré M. Fabian et M. Martini et que vous avez ensuite convenu de les aider et que vous avez entrepris d’établir la structure, vous leur avez suggéré de se concentrer sur le marché des immeubles de grande hauteur plutôt que sur le marché résidentiel. C’est là une des choses que vous avez suggérées en tant que stratégie de mise en marché, est-ce exact?

R

Oui.

Q

Et vous leur avez dit que quelques promoteurs canadiens souhaitaient faire de la construction aux États-Unis et que cela permettrait peut‑être à Marzen de prendre pied sur le marché américain. Est-ce exact là aussi?

R

Si j’ai dit « prendre pied » je n’ai pas… j’ai pensé que cela pouvait les aider… égaliser les chances par rapport à la concurrence, oui.

Q

Et vous leur avez expressément mentionné que Bosa et Pinnacle étaient deux promoteurs du Canada qui, à votre avis, se lanceraient dans des projets aux États-Unis.

R

Oui.

Q

Comment en êtes-vous arrivé à croire que Bosa et Pinnacle étendraient leurs services aux États-Unis?

R

Je ne sais pas si je l’ai lu dans les journaux, si je l’ai lu dans les revues spécialisées. Je ne sais même pas où j’ai pu trouver cette information, mais il n’en reste pas moins que je le savais.

Q

Mais vous n’aviez pas de contacts avec des représentants de Bosa ou de Pinnacle qui dataient de l’époque où vous faisiez de la promotion immobilière?

R

Non[14].

[41]        Comme il est énoncé au paragraphe 11 des présents motifs, ce témoignage contredit certaines observations écrites que l’appelante a faites au stade de la vérification. Ces documents avaient été soumis au vérificateur principal par l’avocat de l’appelante, à l’appui de la position de cette dernière selon laquelle ce vérificateur avait rejeté à tort les prétentions de l’appelante quant à l’étendue de la participation de M. Csumrik aux activités de SII et de SWI. Ces documents disaient de M. Csumrik qu’il avait des contacts utiles avec des promoteurs canadiens ayant des projets immobiliers aux États-Unis. Le premier document provenait de M. Csumrik :

[traduction]

Deux de ces promoteurs sont Pinnacle Group et Bosa Ventures, que je connaissais très bien depuis l’époque où j’avais travaillé comme avocat et homme d’affaires dans la région de Vancouver[15]. [Non souligné dans l’original.]

[42]        La description qui suit apparaît dans une lettre que l’avocat de l’appelante a envoyée au vérificateur principal :

[traduction]

M. Csumrik a une vaste expérience de la gestion d’équipes de vente d’autres produits aux États-Unis. Il a des contacts et des liens personnels importants avec de gros constructeurs canadiens qui ont pris pied sur le marché immobilier du sud de la Californie. C’est par l’entremise des contacts de M. Csumrik que la société a pu pénétrer le marché californien[16]. [Non souligné dans l’original.]

[43]        Comme M. Csumrik, l’appelante n’avait eu aucun contact antérieur avec de telles entreprises, mais M. Csumrik croyait que les antécédents fructueux de l’appelante dans le secteur du fenêtrage résidentiel en Colombie-Britannique pouvaient être utilisés à son avantage. M. Csumrik a également déclaré avoir conseillé à MM. Martini et Fabian qu’étant donné que le marché des immeubles de grande hauteur dans le sud de la Californie était fondamentalement différent du marché résidentiel de l’État de Washington, il faudrait que le personnel de vente de SWI adopte de nouvelles compétences et de nouvelles techniques de mise en marché. M. Csumrik a témoigné qu’il avait appris l’importance de cette tactique à l’époque où il faisait affaire avec des clients des États-Unis dans le cadre de son entreprise d’éclairage de salles de cinéma.

[44]        Le 11 février 1999, SII a adopté des résolutions organisationnelles suivant lesquelles l’appelante est devenue l’unique actionnaire de SII. MM. Stark et Vipond se sont joints à M. Csumrik à titre d’administrateurs de l’entreprise. M. Martini était au courant de l’intention qu’avait M. Csumrik de rester à la Barbade et savaient qu’il s’attendait à être rémunéré pour ses conseils en matière de mise en marché. Les deux parties souhaitaient conclure une entente et les discussions se sont poursuivies au sujet de la façon d’atteindre cet objectif.

[45]        M. Martini a demandé à M. Fabian de résumer ce qui était ressorti de leurs discussions des derniers mois avec M. Csumrik et, en particulier, de relever les options possibles. Dans l’étude de cas, datée du 5 avril 1999, qu’il a transmise à M. Martini[17], M. Fabian a [traduction] « chaudement recommandé » la troisième option, à savoir que l’appelante [traduction] « retienne les services d’une entreprise de mise en marché et de vente bien établie » en vue d’assurer la mise en marché de produits de fenêtrage aux États-Unis. M. Fabian a établi un second document daté du 26 avril 1999 et intitulé [traduction] « Étude des trois grands segments industriels qui auront une incidence directe sur le lancement fructueux de notre entreprise et qui renforceront la part de marché dans les États-Unis d’Amérique ».

[46]        Au début du printemps de 1999, M. Martini et M. Csumrik se sont entendus sur sa rémunération. Selon leur témoignage, ils ont conclu [traduction] « au moyen d’une poignée de main » que, si ses conseils se révélaient fructueux, M. Csumrik, en sa qualité personnelle, serait rémunéré d’une certaine façon par M. Martini et/ou l’appelante, à un moment indéterminé dans l’avenir. Selon le témoignage de M. Csumrik, ce vague arrangement initial ne l’inquiétait pas, car M. Martini et lui étaient des hommes d’affaires [traduction] « à l’ancienne », qui se faisaient mutuellement confiance, et il a ajouté que cela avait toujours été la manière de faire des affaires qu’il préférait.

[47]        À l’appui de sa prétention concernant la conclusion d’une entente de rémunération distincte avec M. Martini et/ou l’appelante, M. Csumrik a fait référence à des lettres datées du 5 janvier 2004[18] et du 2 juin 2008[19], respectivement, dans lesquelles M. Martini l’avait invité à profiter d’occasions d’affaires mettant en cause la vente de certains produits fabriqués par l’appelante ou d’autres entreprises sous le contrôle de M. Martini. Je signale que leur entente verbale n’a été consignée par écrit qu’après le début de la vérification, soit le 16 avril 2003. M. Csumrik a admis qu’au moment de l’instruction, il n’avait exploité aucune de ces occasions possibles, expliquant qu’en 2004 il était trop occupé par ses propres entreprises pour se lancer dans un autre projet et qu’il était également aux prises avec un litige matrimonial. Quant à la proposition de 2008, M. Csumrik a déclaré qu’à cause de la crise financière qui avait éclaté plus tard cette année-là aux États-Unis, ce projet – qu’il avait trouvé intéressant au départ – l’était nettement moins en fin de compte. Mais tant M. Csumrik que M. Martini ont déclaré que M. Csumrik avait encore la possibilité de profiter de ces occasions s’il décidait de le faire.

[48]        À la même époque où M. Martini et M. Csumrik discutaient de la façon dont il serait rémunéré, M. Martini recevait des conseils juridiques et comptables du cabinet Thorsteinssons LLP et d’autres conseillers professionnels à propos de la meilleure façon de structurer la nouvelle méthode de mise en marché. On a demandé à M. Martini en contre-interrogatoire quelles étaient, selon lui, les raisons d’établir SII à la Barbade :

[traduction

Q

Et vous croyez que c’était nécessaire parce que M. Csumrik vivait à la Barbade?

R

Non, il s’agissait là d’une structure que les avocats et les comptables avaient imaginée.

Q

Quelles étaient, selon vous, les raisons pour adopter cette structure?

R

La raison était que la Barbade avait un taux d’imposition inférieur au taux d’imposition canadien.

Q

Très bien, donc les revenus gagnés à la Barbade seraient imposés à un taux inférieur.

R

C’est exact.

Q

Et aussi je présume que vous deviez savoir que les revenus gagnés au Canada que… les revenus imposés au Canada à Marzen seraient réduits par les frais de mise en marché que Marzen paierait à une entreprise de mise en marché. Cet argent serait déductible.

R

Oui.

Q

Et vous saviez aussi que, si les revenus d’entreprise étaient gagnés à la Barbade par Starline International et que l’impôt était payé à la Barbade, sous le régime fiscal canadien, cet argent serait payé sous la forme… l’argent après impôt serait payé sous la forme d’un dividende à Marzen en tant que société mère canadienne.

R

C’est exact, oui.

Q

Et Marzen ne serait pas imposable sur les dividendes reçus au Canada.

R

Non.

Q

J’imagine qu’à cause de cela, la structure vous a paru très attrayante.

R

La structure était attrayante, mais, si nous ne vendions pas quelque chose, elle ne vaudrait rien[20].

[49]        Lors de l’interrogatoire principal, on a aussi posé des questions à M. Csumrik sur la décision de situer SII à la Barbade; jamais au cours de cet échange n’a-t-il confirmé que le fait de résider à la Barbade avait quelque chose à voir avec la décision de M. Martini de créer SII en société dans ce pays[21]. Quand M. Martini a eu l’occasion de fournir plus de détails sur cette décision en contre‑interrogatoire, il a reconnu sans détour que le souhait de M. Csumrik de rester à la Barbade n’avait pas pesé dans la balance :

[traduction

Q

Croyiez-vous qu’il était nécessaire d’avoir une entreprise à la Barbade pour que M. Csumrik vous prête assistance dans vos efforts de mise en marché?

R

Ce n’était pas nécessaire que ce soit à la Barbade, non, mais il se trouvait à la Barbade.

Q

Exact. Très bien. Croyiez-vous qu’il était nécessaire d’avoir une entreprise de mise en marché pour que M. Csumrik fournisse ses services à votre entreprise?

R

Je ne crois pas que c’était nécessaire pour eux, non.

Q

Mais vous avez accepté la structure qui vous a été proposée.

R

C’est exact[22].

[50]        L’avocat de l’intimée a également posé des questions à M. Martini sur ses attentes à l’égard des dividendes que génèrerait la structure si la stratégie de mise en marché se révélait fructueuse :

[traduction

Q

À l’époque où la structure a été conclue, vous attendiez-vous à ce que l’on déclare des dividendes dans la mesure où des fonds étaient disponibles?

R

Je m’attendais à cela, oui. Si je puis ajouter quelque chose, le genre de volume que nous obtenions, nous devions restructurer le Canada, nous devions dépenser des millions de dollars en matériel et en bâtiments, et les fonds étaient nécessaires dans ce pays.

Q

Je ne conteste pas le fait que vous aviez un usage pour ces fonds. Je vous demande seulement quelle était votre attente.

R

Très bien[23].

C. Les activités postérieures au 1er juillet 1999

1)    Les ententes et les arrangements conclus dans le cadre de la structure barbadienne au 1er juillet 1999

a)    L’entente conclue entre l’appelante et SWI

[51]        Le 1er juillet 1999, l’appelante a continué de fournir à SWI des produits de fenêtrage destinés à la revente, mais le coût qu’ils représentaient pour SWI avait changé. Dans le cadre de la structure barbadienne, l’appelante fournissait des produits de fenêtrage à un coût égal au prix de vente que SWI demandait aux clients des États-Unis, de sorte que SWI ne constatait aucun bénéfice. L’appelante évaluait ses ventes de produits de fenêtrage sur le marché des États‑Unis en fonction des ventes qu’elle faisait à SWI.

b)    Les quatre ententes conclues dans le cadre de la structure barbadienne

[52]        Le 1er juillet 1999, quatre ententes ont été conclues en vue de mettre en place la nouvelle structure de mise en marché des produits de fenêtrage de l’appelante aux États-Unis (la « structure barbadienne »).

(i) Entente de services de mise en marché et de vente – appelante/SII (« ESMMV »)[24]

[53]        L’ESMMV est l’opération contestée. Dans le préambule, SII est décrite comme une entité exploitant une [traduction] « entreprise de produits de mise en marché comme » les produits de fenêtrage de l’appelante.

[54]        Dans la clause 1.1 de l’ESMMV, SII convenait de fournir, notamment, les services suivants à l’appelante dans des pays autres que le Canada ou les Antilles, tout particulièrement aux États-Unis :

[traduction

a)

faire tous les efforts nécessaires pour accroître le chiffre d’affaires de l’entreprise de l’appelante en mettant en marché des produits de fenêtrage aux États-Unis;

b)

recevoir des offres d’achat de produits de Marzen d’éventuels acheteurs et les transmettre à l’appelante;

c)

établir et tenir des listes d’offres ou de commandes ainsi que des sommaires de rapports de vente quotidiens;

d)

transmettre, conformément aux directives de l’appelante, des avis aux éventuels acheteurs ayant passé une commande en vue de confirmer l’approbation, le rejet ou la modification de cette dernière, et envoyer ensuite, conformément aux directives données, des renseignements supplémentaires;

e)

transmettre des lettres de suivi aux acheteurs relativement aux demandes de renseignements particulières qui peuvent être faites au sujet d’une vente particulière de produits de Marzen;

f)

effectuer l’évaluation et l’analyse des ventes de Marzen par l’intermédiaire de SII, conformément aux directives de Marzen[25].

 

[55]        Aux termes de la clause 3.2, l’appelante convenait également d’avancer à SII [traduction] « les montants raisonnables que SII [pouvait] demander de temps à autre » en vue de l’aider à supporter les coûts liés à la fourniture de ses services à l’appelante. M. Csumrik a expliqué de la manière suivante l’effet de cette clause :

[traduction

[…] l’entente de mise en marché et de vente prévoyait que, si nous avions besoin de fonds de roulement, elle [l’appelante] devait les fournir. Nous n’avions donc aucun besoin de fonds de roulement, à part des montants très minimes[26].

[56]        Au terme de la clause 3.1, l’appelante convenait de payer à SII des frais mensuels égaux correspondant à la plus élevée des deux sommes suivantes : 100 000 $US ou 25 % des ventes brutes, par SII, de produits de fenêtrage.

[57]        En contre-interrogatoire, M. Martini a déclaré qu’il était chargé de déterminer les frais que l’appelante paierait aux termes de l’ESMMV, et il a expliqué de quelle façon il était arrivé à la formule de 25 % :

[traduction

Q

Et je crois que vous avez dit avoir décidé que 25 % c’était raisonnable en faisant une comparaison entre votre marge bénéficiaire brute canadienne et la marche bénéficiaire brute de Starline Windows en 1998.

R

C’est exact.

Q

Pourriez-vous passer de nouveau en revue pour moi ce processus décisionnel, s'il vous plaît?

R

Pour Marzen, le coût des ventes au Canada était de 14 %, de 14 à 15 %. C’était notre coût à nous, ici au Canada. Nous vendions donc dans un marché où tout le monde savait que nous n’avions pas à trouver de nouveaux clients, des clients répétitifs. J’ai jugé que, si nous nous installions dans le nouveau pays et s’il fallait que nous annoncions nos produits à des gens qui ne nous connaissaient pas, 25 % c’était raisonnable.

Q

Et à quel moment la marge bénéficiaire brute de 18 % que vous appliquiez chez SWI en 1998 est-elle entrée en ligne de compte dans cette décision?

R

Les 18 %, les 18 % que nous avons fini par utiliser comme marge bénéficiaire brute en 1998 n’ont pas été établis au préalable. Il s’agissait du résultat de nos ventes sur le marché; nous avons fini par obtenir une marge bénéficiaire brute de 18 %. Mais, avec une marge bénéficiaire brute de 18 %, nous avons quand même perdu 430 000 $ cette année-là.

Q

Je voudrais juste prendre un peu de recul pour être sûr de bien comprendre. La marge bénéficiaire brute de 18 % à laquelle vous faites référence dans SWI en 1998, comment ce chiffre a-t-il été déterminé?

R

Nous vendions une fenêtre à SWI. Elle l’achetait de nous, à notre prix plus quelques frais généraux et, ensuite, elle se tournait vers le marché et la revendait au prix qu’elle pouvait obtenir. C’est donc le marché qui fixe le prix. Ce n’est pas nous qui décidons ce que le client paiera. Et, en fin de compte, SWI a été capable d’obtenir 18 %.

Q

Il n’existait donc pas de formule pour déterminer quel prix Marzen facturerait à SWI pour le produit?

R

Il y avait une formule, le prix coûtant plus… j’oublie, plus quelques frais généraux. J’ai oublié ce qu’ils étaient, mais c’était presque au prix coûtant.

Q

Donc, ce que vous dites, c’est que, dans le cadre de cette structure, SWI réaliserait un bénéfice de 18 %.

R

C’est exact.

Q

Et cela n’était pas suffisant pour couvrir ses coûts.

R

Non, ça ne l’était pas[27].

[58]        Bien que M. Martini ait reconnu que les frais de mise en marché de 25 % étaient supérieurs au coût que supportait SWI dans le régime antérieur à juillet 1999, il a dit croire que l’appelante pouvait quand même réaliser un bénéfice à cause du volume accru des ventes. Il a ajouté qu’il ne s’était servi d’aucune entreprise comparable pour fixer la formule de détermination des frais parce qu’il n’avait pu en trouver aucune, mais il a aussi reconnu qu’il n’avait pas sollicité une aide professionnelle à cette fin. Il n’avait pas mis par écrit la justification de sa décision.

[59]        On a demandé à M. Martini en contre-interrogatoire si le statut de SII en tant que partie avec lien de dépendance avait eu une incidence sur le montant des frais prévus dans l’ESMMV :

[traduction

Q

En déterminant que vous étiez disposé à payer 25 % comme frais de mise en marché, le fait que l’entreprise que vous payiez était contrôlée par Marzen a-t-il influencé votre décision?

R

J’ai pensé qu’il s’agissait d’une décision sensée. Est-ce que cela répond à la question?

Q

Je n’en suis pas tout à fait sûr. Ce que je vous demande c’est, si pour décider que 25 % était un montant raisonnable que vous étiez disposé à payer, avez-vous tenu compte du fait que l’entreprise que vous payiez était contrôlée par Marzen, qu’elle était votre filiale et non pas une entreprise non liée?

R

J’en aurais probablement fait autant avec une entreprise non liée si c’était ce qu’on m’avait présenté.

Q

Maintenant, si vous aviez payé des frais de mise en marché à une entreprise non liée, vous n’auriez pas obtenu les mêmes résultats fiscaux avantageux, c’est-à-dire que Marzen pouvait déduire les frais, l’entreprise pouvait payer de l’impôt dans un autre pays et ensuite payer en retour un dividende à Marzen.

R

Non, cela n’aurait pas été le cas.

Q

Mais vous l’auriez fait de toute manière.

R

Je l’aurais fait parce que, par les temps qui courent, elle perdrait de l’argent; c’était donc avantageux des deux côtés[28].

(ii) L’entente concernant le paiement de prime prévu par de l’ESMMV

[60]        Conformément à un échange de lettres entre M. Martini et M. Csumrik[29] en août 2000, l’ESMMV a été modifiée afin de prévoir que l’appelante paierait à SII une prime unique de 10 % sur tous les contrats confirmés au sein du marché de la Californie, à condition que SII réalise des ventes nettes d’au moins 10 millions de dollars américains entre le 1er août 2000 et le 31 décembre 2001 (le « paiement de prime prévu par l’ESMMV »; les références faites dans la présente décision à l’ESMMV après la modification incluent ce paiement de prime).

[61]        M. Martini a déclaré qu’il avait autorisé la demande de M. Csumrik pour que l’appelante paie à SII le paiement de prime prévu par l’ESMMV, mais qu’il ignorait comment M. Csumrik était arrivé à la formule de 10 %. Interrogé sur la question lors de son interrogatoire principal, M. Csumrik a donné l’explication suivante :

[traduction

Q

Et lorsque vous avez fixé le montant de la prime de 10 %, quelle en a été la justification? Avez-vous procédé à une analyse quelconque?

R

Non. Non. Je savais que nos coûts seraient plus élevés. Je voulais que Starline International Inc. rehausse son niveau de rentabilité parce que je savais que cela paraîtrait mieux si cela devait arriver, et comme Marzen était propriétaire de SII, de toute façon, je n’obtenais aucune partie de cet argent et cela lui aurait été indifférent.

Q

Avez-vous prescrit en fin de compte à Starline Windows d’intensifier sa présence sur le marché de la Californie après que cette entente a été reconnue?

R

Je crois que nous avons ouvert un bureau de vente. Je ne me souviens pas si c’était à cause de cela ou si c’était à cause de l’ouverture d’un bureau de vente en Californie.

Q

Vous êtes toutefois convaincu qu’il y a un certain lien.

R

Je suis convaincu que cela aurait été… il y a un certain lien entre les deux[30]. [Non souligné dans l’original.]

[62]        M. Martini a déclaré qu’il n’avait aucune raison de penser que le montant de 10 % était déraisonnable, surtout depuis qu’il avait contré la demande de M. Csumrik en exigeant que l’on atteigne au cours de la période des ventes au moins 10 millions de dollars américains. En fin de compte, le total des ventes a nettement dépassé le minimum requis, ce qui a donné lieu à un paiement de prime prévu par l’ESMMV de 2 090 422 $US.

[63]        En contre-interrogatoire, on a demandé à M. Martini pourquoi les montants prévus par l’ESMMV et la prime de 10 % avaient été payés :

[traduction

Q

Vous conviendrez avec moi que, si la prime [le paiement de prime prévu par l’ESMMV de 10 %] reflétait les dépenses que SII avait engagées pour payer à SWI des travailleurs supplémentaires ou des efforts de mise en marché supplémentaires en Californie, que cette prime a servi à financer la mise en marché. Vous en convenez?

R

Oui.

Q

Et si – vous conviendrez également, je crois, que, si SII a dépensé moins que les 2 millions de dollars que vous avez payés à titre de prime sur le coût que SWI a supporté, que SII a reçu ce montant sous forme de revenu.

R

Oui.

Q

Et vous conviendriez aussi qu’aucune part de ces 2 millions de dollars n’a profité à M. Csumrik.

R

J’en conviens.

Q

Et, en fait, ne conviendriez-vous pas que la totalité des frais que Marzen a payés à SII en 2000 et en 2001, des frais qui, je crois, totalisent près de 12 millions de dollars canadiens, seul le montant de 32 500 $ par année a profité à M. Csumrik ou à Longview?

R

C’est exact.

Q

Et seuls les montants que SWI a facturés à SII pour recouvrer les frais liés au personnel des ventes ont profité aux vendeurs qui effectuaient les ventes.

R

C’est exact.

Q

Donc, quelle qu’ait été leur rémunération, peut-être un salaire, peut‑être une prime, le montant est payé au moyen du recouvrement des frais de SWI auprès de SII.

R

C’est exact.

Q

Et alors, ensuite, SII doit payer à SWI des frais pour les services administratifs, l’accès à des maquettes de présentation.

R

Oui.

Q

Ces caractéristiques-là. Mais tout le reste de l’argent, ce qui reste des frais de mise en marché payés à SII, il s’agit là d’un revenu pour SII.

R

Oui.

Q

Et cet argent ne profite aucunement aux personnes qui ont fait le travail de mise en marché et de vente, M. Csumrik ou les vendeurs.

R

Non[31]. [Non souligné dans l’original.]

(iii) L’entente de détachement de personnel – SII/SWI (« EDP »)[32]

[64]        Dans le préambule de l’EDP, SII est décrite comme ayant pour [traduction] « entreprise de mettre en marché des fenêtres et des portes conçues et fabriquées par [l’appelante] aux États-Unis et ailleurs ». Il y est précisé que SWI possède du [traduction] « personnel qualifié chargé de la vente et de la mise en marché de fenêtres et de portes que SII commercialisera. »

[65]        Aux termes de la clause 1.1 de l’EDP, SWI a convenu de [traduction] « fournir les services de personnel à titre exclusif (le “personnel détaché”) à retenir et à engager par SII pour la mise en marché des produits [de l’appelante] aux États-Unis et ailleurs (les “services”). » Aux termes de la clause 3.1, SII a convenu de payer à SWI des frais mensuels destinés à couvrir les frais totaux, pour SWI, de l’emploi du personnel détaché, plus des frais de gestion de 10 %.

[66]        Aux termes de la clause 1.2, SWI a convenu de [traduction] « veiller à ce que le personnel détaché auprès de SII pour la fourniture des services soit compétent et dûment qualifié »; aux termes de la clause 2.1, SII était [traduction] « seule chargée de la direction, de l’administration et de la gestion du personnel détaché ».

[67]        En contre-interrogatoire, on a demandé à M. Fabian si, selon l’EDP, SWI avait pour entreprise de fournir du personnel et de quelle façon il avait été déterminé que SWI toucherait un pourcentage additionnel de 10 % sur ses coûts réels :

[traduction

Q

[…] J’ai dit que SWI exploite maintenant une petite entreprise qui consiste à fournir des employés à quelqu’un d’autre dans un but lucratif.

R

Eh bien, là encore, en fin de compte, Maître, je dirais, quand vous avez dit « entreprise », je dirais plutôt qu’il s’agit d’une entreprise de personnel temporaire. Quand il y a un employé temporaire, quand vous avez besoin d’un employé temporaire. C’est davantage à ce genre d’entreprise que je pensais quand vous m’avez dit cela. Mais, ce cas-là n’est qu’accessoire, ces gens-là étaient embauchés et travaillaient pour SII et, par conséquent, SWI devrait en tirer un certain profit. Une affaire commerciale simple, toute simple, selon moi.

Q

Êtes-vous en train de dire qu’il y a eu une sorte de négociation dans laquelle SWI a demandé d’être rémunérée pour cela et dans laquelle SII a exprimé son accord?

R

Il n’y a pas eu de, rien de cela. Là encore, ce n’est pas vraiment son travail que de fournir, par exemple, une entreprise temporaire, une entreprise temporaire qui fournit des services de secrétariat ou de comptabilité. Ce n’est pas vraiment comme cela que ça fonctionne. Il y a un client existant, alors, là encore, probablement juste pour être rentable, il y a ce taux de 10 %[33].

(iv) L’Entente relative aux services administratifs et de soutien – SII/SWI (« ESAS »)[34]

[68]        Aux termes de l’ESAS, SWI a convenu de fournir certains services de secrétariat et d’autres services de soutien administratif à SII. Cette dernière a convenu de payer à SWI des frais mensuels, modifiés de temps à autre, de 23 000 $US (juillet 1999 à juin 2000), de 30 000 $US (juillet 2000 à juin 2001), et de 35 000 $US (juillet 2001 à décembre 2001).

[69]        Dans le préambule de l’ESAS, SWI est décrite comme ayant pour [traduction] « entreprise de fournir des services liés à la mise en marché et à la distribution de produits conçus et fabriqués par [l’appelante] ».

[70]        Aux termes de la clause 1.6, SWI était [traduction] « seule chargée de l’administration et de la gestion de ses employés, ce qui inclut la rémunération, la supervision, les mesures disciplinaires et toutes les autres questions découlant de la relation entre SWI et ses employés ».

(v) L’Entente relative aux services de livraison, d’entreposage, de réparation et d’entretien – Appelante/SWI (« ESLERE »)[35]

[71]        Aux termes de l’ESLERE, SWI est décrite comme étant liée à l’appelante et comme exploitant [traduction] « une entreprise d’entreposage, de livraison, de réparation et d’entretien, ainsi que des services de recouvrement concernant les produits de [l’appelante]. »

[72]        Aux termes de l’ESLERE, SWI a convenu de fournir certains services liés à la livraison, à l’entreposage, à la réparation et à l’entretien de produits de fenêtrage, ainsi que d’exécuter certaines fonctions d’exécution et de recouvrement par rapport aux factures. L’appelante a convenu de payer les montants figurant dans l’exposé conjoint des faits, à l’alinéa 22d). L’effet de cette entente était que l’appelante supportait la totalité des frais de SWI liés à ces services.

c)     Les ententes conclues entre SII et M. Csumrik/Longview

[73]        Aux termes d’une entente distincte, Longview a fourni à SII les services personnels de M. Csumrik à titre d’administrateur-gérant de SII moyennant une somme de 2 500 $US par année. Longview a fourni ses services de gestion et d’administration locaux en échange de la somme de 30 000 $US par année. Ces montants étaient conformes aux tarifs de Longview pour de tels services.

2)    Les services fournis par SII, SWI et M. Csumrik/Longview dans le cadre de la structure barbadienne

[74]        Lors de son interrogatoire principal, M. Martini a résumé ainsi le fonctionnement de la nouvelle structure de mise en marché :

[traduction

R

La nouvelle structure de mise en marché était que M. Csumrik, l’artisan du système de mise en marché, détacherait les gens qui travailleraient à [SWI]. [SWI] vendrait le produit aux États-Unis et l’achèterait de [l’appelante], et quand [SWI] recevrait les fonds du client, les mêmes fonds passeraient directement par l’entremise de [l’appelante] et ensuite [l’appelante] paierait des frais de 25 % à [SII] pour les coûts relatifs aux ventes[36].

[75]        Bien qu’il ait décrit M. Csumrik comme étant [traduction] « l’artisan » de la nouvelle structure, M. Martini a plus tard reconnu qu’il n’avait aucune connaissance personnelle de ce que M. Csumrik faisait réellement; il s’était fondé sur des rapports de M. Fabian et de M. Stark[37]. M. Stark, le directeur général de SWI, n’a pas été appelé à témoigner aux audiences.

[76]        M. Csumrik a déclaré qu’il communiquait régulièrement avec M. Fabian :

[traduction

Q

Quel était le but de ces conversations?

R

Le but de ces conversations – il faut comprendre qu’il y a une courbe d’apprentissage à suivre quand on commence à s’occuper d’une nouvelle entreprise. Je n’étais pas – je ne connaissais pas l’entreprise. M. Fabian, lui, la connaissait. Nous parlions donc de, par exemple, une commande arrive, quand est-ce qu’elle sera expédiée? Vous savez, quels sont les problèmes? Comment se fait-il que – que quelque chose ait été retourné? Comment allons-nous expédier, par exemple, cette grosse commande si l’on reçoit pour 3 millions de dollars de fenêtres? Il ne s’agissait pas de la poursuite d’une entreprise antérieure. C’était – vous savez, il était question d’étendre leurs capacités et, comme il s’agissait d’une entreprise tout à fait nouvelle, il y avait donc un processus d’apprentissage. Nous nous parlions probablement une fois par semaine, sinon davantage[38]. [Non souligné dans l’original.]

[77]        M. Fabian a déclaré qu’il s’occupait de près des activités quotidiennes de l’appelante. Il a expliqué en détail le processus complexe des soumissions, des commandes et des factures, ainsi que de la planification de la fourniture de fenêtres à des promoteurs d’immeubles de grande hauteur dans le sud de la Californie. Il en est ressorti que M. Fabian méritait la description de « bras droit » qu’avait faite de lui M. Martini. Comme l’illustre le témoignage qui suit, c’est lui qui supervisait la totalité des aspects relatifs aux ventes et à la mise en marché de l’appelante aux États-Unis, y compris les activités de M. Stark aux États-Unis et de M. Csumrik à la Barbade. Il a déclaré qu’il appelait habituellement M. Csumrik une fois par semaine :

[traduction

Q

Et de quoi parliez-vous à l’occasion de votre appel hebdomadaire?

R

Nous discutions de leur nouveau projet, et nous faisons aussi le point sur ce que M. Csumrik et son équipe faisaient pour mettre en application le concept et la stratégie que nous avions mis en place avec cette nouvelle entente de mise en marché. Et, aussi, il y avait des fois où il y avait des contradictions avec les livres, dans lesquels, par exemple, il fallait concilier les ventes avec ce que nous avions et ce qu’eux avaient et ce qu’avait Starline Windows Inc. Il fallait donc pour ainsi dire que nous fassions la conciliation et que nous nous assurions qu’il ne manquait rien ou que Starline Windows Inc. ou Starline International Inc. ne nous facturait pas un montant excédentaire[39].

[78]        Cependant, M. Fabian est aussi resté en étroite communication avec le directeur général de SWI, M. Stark :

[traduction

Q

Et quelle était l’étendue de vos interactions avec M. Stark?

R

J’ai beaucoup d’interactions avec M. Stark aussi, principalement parce qu’il n’était pas un technicien, il est en réalité un vendeur, un bon vendeur, ce qui fait qu’il me posait des questions sur des points techniques concernant les fenêtres. Et je lui demandais aussi comment il progressait par rapport à l’objectif visé dans le marché des immeubles de grande hauteur dans les secteurs que M. Csumrik lui aurait demandé de cibler, juste pour faire le point. Et, aussi, de me mettre au courant des ventes à venir actuelles ou de ce qui était prévu au programme afin que nous puissions savoir ou que je puisse savoir ce qui se passait et que je puisse transmettre cette information à M. Martini en fin de compte[40].

[79]        M. Fabian tenait aussi M. Martini au courant des progrès accomplis dans le sud de la Californie. Même s’il a été qualifié d’employeur [traduction] « non interventionniste », M. Martini gardait quand même un œil sur les ventes réalisées dans le cadre de la structure barbadienne, tout comme il le faisait avant le 1er juillet 1999. Les résultats des ventes consignés dans le [traduction] « livre rouge » de l’entreprise l’intéressaient particulièrement :

[traduction

Q

Donc est-ce que – quand vous dites le livre rouge, s’agit-il du sommaire que vous receviez?

R

Je recevais un sommaire mensuel, mais c’est… bien sûr, c’est une totalisation de tous les jours, oui, c’est cela.

Q

Donc, vous ne receviez pas le rapport hebdomadaire, vous obteniez un rapport qui prenait les résultats hebdomadaires et les accumulait, et cela s’appliquait chaque mois.

R

Oui, c’est ça.

Q

Et quelle était la valeur de ce livre rouge pour vous, ainsi que celle des renseignements qui s’y trouvaient?

R

Les renseignements étaient… c’est de cette façon que je pouvais dire quel était le rendement de l’équipe de vente. En fait, nous l’avons toujours eu depuis le début. Et, de plus, il nous permettait de planifier le travail qui s’en venait, qui s’en allait à la fabrication et ce qui – et si nous avions en fait assez de place ces jours-là[41]. [Non souligné dans l’original.]

[80]        Il ressort clairement du témoignage qui précède que M. Fabian se trouvait au cœur des activités de l’appelante tant avant qu’après le 1er juillet 1999. Cela étant, il savait très bien quelles étaient les activités du personnel de SWI au cours des deux périodes et, en contre-interrogatoire, on lui a demandé de comparer les fonctions de ce personnel, en se reportant aux ventes de SII et à ses obligations de mise en marché envers l’appelante aux termes de la clause 1.1 de l’ESMMV (voir le paragraphe 55 qui précède). Après avoir examiné chacun de ces éléments en contre-interrogatoire, M. Fabian a admis que, à l’exception de l’alinéa 1.1a), avant le 1er juillet 1999, SWI avait exécuté essentiellement les mêmes tâches que celles qui étaient maintenant confiées à SII aux termes de l’ESMMV :

[traduction

Q

Maintenant, nous venons tout juste de passer en revue une liste de six choses dont SII était responsable envers [l’appelante] aux termes de l’entente relative aux services de mise en marché et de vente. Il semble que toutes ces choses étaient faites auparavant par des employés de SWI, est-ce exact?

R

Que voulez-vous dire?

Q

Eh bien, la mise en marché des produits, la réception des commandes, leur transmission, l’établissement des calendriers, le résumé des ventes, la correspondance avec les acheteurs, toutes ces choses étaient faites par des employés de SWI avant que vous mettiez sur pied cette structure.

R

Par SII?

Q

Avant que SII entre en scène, toutes ces choses étaient faites par SWI.

R

Oui, elle le faisait effectivement, mais nous avons eu une perte de 487 000 $. Oui, elle le faisait, mais pas de manière efficace pour ce qui est était de…

Q

Oui. Mais mettons de côté l’aspect mise en marché. La réception des commandes, le rapprochement des rapports de vente, la correspondance avec les acheteurs, tout cela était fait par SWI.

R

C’est exact […][42].

[81]        Cependant, M. Fabian a ensuite ajouté que l’alinéa 1.1a) était de loin la plus importante des obligations de SII aux termes de l’ESMMV. À l’instar de M. Martini, M. Fabian a attribué à M. Csumrik, agissant pour le compte de SII, le mérite d’avoir conçu et mis en œuvre les services de mise en marché :

[traduction

[…] [À cause de la perte de 487 000 $] il nous fallait quelqu’un pour apprendre à M. Rick Stark à se concentrer sur les choses qu’il devait faire et, à l’époque où cela n’était pas en place […] M. Rick Stark ne réalisait rien. Ils savaient probablement que cela faisait partie de leur travail, mais personne ne leur montrait ce qu’il fallait faire. Personne ne les formait, personne ne les menait, personne ne les dirigeait; personne ne soutenait ces gens-là. C’est la raison pour laquelle M. Csumrik était venu me voir et a commencé à fournir des services de soutien, à mener ces gens, à les diriger, à leur dire, vous avez besoin d’engager des gens qui ont l’esprit technique, qui connaissent exactement ou qui peuvent s’asseoir avec le promoteur et discuter de projets sans se faire dire : « De quoi parlez-vous? » Il fallait aussi qu’ils s’assurent qu’il y avait un service à la clientèle, un service à la clientèle, un suivi. Il fallait que toutes ces choses soient faites.

Donc, chez SWI, avant 1999, ils savaient qu’il s’agissait là d’un élément de… il s’agissait d’un concept de mise en marché que n’importe quelle entreprise de mise en marché devait suivre. Cependant, […] M. Rick Stark et son groupe ne le faisaient pas de la bonne façon. C’est la raison pour laquelle nous avions besoin de quelqu’un comme directeur de la mise en marché, comme M. Csumrik qui pouvait mener cette entreprise de façon à pouvoir aller de l’avant et à commencer à gagner – commencer à faire des profits dans SWI[43].

[82]        Même si l’avocat de l’intimée a invité M. Fabian à exposer plus en détail ce que M. Csumrik faisait comme [traduction] « guide » il a été incapable de le faire. Cette imprécision était tout à fait incompatible avec les autres témoignages détaillés de M. Fabian et sa disposition naturelle à répondre entièrement aux questions chaque fois qu’il le pouvait.

[83]        De la même façon, M. Csumrik, qui avait décrit de manière franche et détaillée ses succès personnels antérieurs sur le plan des affaires, a eu peu de choses à dire sur les aspects pratiques de ses fonctions de meneur pour le compte de SII. À l’instar de M. Fabian, lui aussi a eu recours à des généralités pour décrire son rôle – en fait, son témoignage n’est devenu détaillé que lorsqu’il a expliqué ce qu’il ne faisait pas :

[traduction]

[…] Je n’étais pas – je ne faisais pas de vente. Je ne suis pas un vendeur. Je n’avais pas l’intention d’apprendre tous les tenants et les aboutissants des fenêtres elles-mêmes. Je n’avais pas l’intention de – je ne gagnais pas une commission d’intermédiaire. Ce n’était pas ce que je faisais. J’essayais seulement de dire [à M. Stark] comment faire des affaires là-bas et avec qui, selon moi, il devait faire des affaires, et aussi pourquoi je le pensais. Je pourrais donc dire que j’étais comme un mentor, un guide, un directeur[44].

[84]        Cependant, M. Csumrik a quand même donné quelques exemples précis de ses activités. Il a déclaré qu’il se préoccupait du fait que M. Stark ne serait pas en mesure de faire la transition entre la stratégie de ventes résidentielles, qui était basée sur des [traduction] « relations », et les exigences techniques que comportaient les ventes faites sur le marché des immeubles de grande hauteur. Il a dit que, pour cette raison, il a communiqué régulièrement avec M. Stark pour s’assurer qu’il restait concentré sur ces objectifs. M. Csumrik a donné un exemple de lettre[45] dans laquelle M. Stark a semblé [traduction] « revenir à ce qu’il faisait avant[46] », c’est-à-dire se concentrer sur le marché résidentiel de l’État de Washington. La réaction de M. Csumrik a consisté en fait à ignorer ce comportement parce que, comme il l’a dit : [traduction] « […] les ventes résidentielles ne m’intéressaient pas beaucoup. Ce qui m’intéressait c’était les immeubles de grande hauteur qui étaient des projets récemment vendus, et j’avais demandé [à M. Stark] une liste pour que je puisse l’examiner[47]. »

[85]        M. Csumrik a aussi décrit le rôle qu’il jouait en passant en revue le [traduction] « livre rouge » et il a donné des exemples d’occasions où il avait relevé des erreurs d’écriture qui s’étaient répercutées sur les obligations financières de SII envers SWI. Il a déclaré qu’il passait en revue les offres et que, s’il arrivait qu’il y ait des problèmes, il en parlait avec M. Stark. Un point faible de son témoignage était qu’il y avait peu d’éléments de preuve documentaire à l’appui de ses prétentions selon lesquelles il participait de près aux activités de SWI. M. Csumrik a expliqué que c’était parce qu’il se sentait plus à l’aise d’utiliser le téléphone ou le courrier électronique[48]. Les rares fois où il avait mis de telles communications par écrit, il a expliqué que c’était pour : [traduction] « […] dire les choses franchement, parce que je voulais constituer un dossier pour des raisons fiscales en général. […] en quelque sorte pour montrer simplement qu’il y avait, en général, des activités qui étaient menées à la Barbade[49]. »

[86]        Comme il a été mentionné plus tôt, M. Csumrik n’avait aucun contact parmi les promoteurs canadiens ayant des projets dans le sud de la Californie, ce qui restreignait sa capacité d’orienter des employés de SWI vers un client potentiel particulier :

[traduction

Q

Quel a été votre rôle dans le processus par lequel le personnel de vente s’est présenté chez Bosa et a conclu cette vente, a obtenu ce contrat?

R

Je n’ai pas participé directement à ce processus.

Q

Avez-vous dit à M. Stark ou à son coordonnateur de projet ou au personnel de vente ou à qui que ce soit d’autre ce qu’il fallait faire ou ce qu’il fallait dire à Bosa, ou à qui il fallait s’adresser?

R

Non.

Q

Et n’avez-vous pas parlé à quelqu’un chez Bosa et dit, par exemple, « Vous souvenez-vous de moi? Je crois que vous devriez jeter un coup d’œil à ces gars. Ils ont un bon produit. » Rien du genre?

R

Non.

Q

Donc, après avoir recommandé de cibler des promoteurs particuliers et des projets particuliers, vous avez laissé à l’équipe de vente le soin de se rendre sur place, de faire le travail sur le terrain et d’obtenir des résultats.

R

Oui, laissé à l’équipe de vente le soin de faire son travail, oui[50].

[87]        M. Csumrik a ensuite expliqué le degré de sa participation à l’égard de la poursuite de nouveaux projets une fois que la vente initiale avait été conclue, y compris la façon dont il en avait pris connaissance :

[traduction

Q

Ensuite, après le projet Horizon, il y a eu d’autres ventes, d’autres ventes à Bosa et d’autres ventes à d’autres promoteurs. Quel rôle avez-vous joué dans l’obtention de ces contrats-là?

R

Je n’étais pas un vendeur. Je n’ai pas participé à l’obtention d’un contrat quelconque.

Q

Avez-vous réorienté l’équipe de vente vers d’autres projets?

R

Oui.

Q

Et comment étiez-vous au courant de ces projets?

R

Là encore, si vous lisez les documents de l’industrie et – sur Internet, c’est comme ça que je le faisais parce que je me trouvais à la Barbade, les gens en parlaient, les projets en cours, etc., Bosa se lançant dans une grande expansion à San Diego, et ainsi de suite. Vous en entendez donc parler par les architectes. Je n’en ai pas entendu parler par les architectes de San Diego, mais les nouvelles font le tour. Donc, il s’agit simplement de… c’est-à-dire que vous le sauriez si vous étiez actif dans ce domaine.

Q

N’y avait-il personne chez Starline Windows Inc. ou Marzen qui pouvait également suivre ces projets et cette information?

R

Eh bien, M. Stark ne le faisait pas. J’ignorais s’il y avait quelqu’un d’autre dont les fonctions consistaient à faire ce travail, mais, ce ne faisait pas partie du niveau ou de la zone de confort de M. Stark.

Q

Maintenant, après avoir obtenu le premier contrat, celui d’Horizon, que savez-vous au sujet de la manière dont l’offre faite à Bosa pour le projet suivant a été reçue? En savez-vous quelque chose, à part le fait qu’un contrat a été obtenu?

R

Désolé, quelle était la question?

Q

Très bien. Eh bien, il me semble tout simplement qu’après – peut‑être après que Starline s’est occupée du projet Horizon, Bosa connaît un peu cette entreprise. Quand Bosa se lancera dans le projet suivant, peut-être qu’elle est plus réceptive à l’égard de Starline. Seriez-vous de cet avis?

R

On s’attendrait à ce que ce soit le cas.

Q

Et n’est-ce pas là la raison d’être de la stratégie de mise en marché?

R

Là encore, on espérerait avoir fait du bon travail dans le premier contrat et que le client serait satisfait du prix et du service et de la valeur qu’il avait tirés du premier contrat. On peut en effet espérer que cela aiderait à décrocher le deuxième contrat, oui.

D. La vérification; les « admissions » faites lors des interrogatoires préalables; le contre-interrogatoire du vérificateur principal; les recommandations du vérificateur principal au sujet de la pénalité à imposer

1)    La vérification

[88]        Étant donné que l’appelante a soulevé certaines questions au sujet des conclusions du vérificateur principal sur lesquelles les nouvelles cotisations ont été fondées et de la méthode suivie pour imposer des pénalités en vertu du paragraphe 247(3), il est utile de présenter un bref sommaire des aspects pertinents du processus de vérification.

[89]        La vérification a commencé sous la forme d’une vérification nationale, mais elle a plus tard été confiée au Service des vérifications internationales en raison de la nature internationale des activités de l’appelante. L’avis de la vérification a d’abord été envoyé à l’appelante par le prédécesseur du vérificateur principal, le 16 avril 2003[51]. Un peu plus d’un an plus tard, le dossier a été confié au vérificateur principal. Même s’il y avait eu au moins une réunion et quelques lettres échangées[52] entre l’ancien vérificateur et l’appelante, le vérificateur principal a déclaré que, lorsqu’il a pris en charge le dossier, il est [traduction] « reparti à zéro ».

[90]        Dans une lettre adressée à l’appelante et datée du 2 juin 2004, le vérificateur principal lui a demandé de fournir certains documents[53]. En réponse à cette demande, l’avocat de l’appelante a écrit au vérificateur principal pour décrire, notamment, les personnes morales en cause et leurs rôles, ainsi que ceux de M. Csumrik et de Longview[54]. L’appelante a finalement livré au vérificateur principal plusieurs boîtes de documents qu’il a déclaré avoir examinés avant d’arriver aux conclusions formulées dans son analyse fonctionnelle[55], son rapport de vérification[56] et sa lettre de proposition[57].

2)    L’interrogatoire préalable de la vérificatrice représentante : les « admissions »

[91]        Comme il a été mentionné plus tôt, même si c’est le vérificateur principal qui a exécuté la majeure partie de la vérification, il n’a pas été le représentant de l’intimée lors des interrogatoires préalables; ce rôle a incombé à la vérificatrice représentante. Dans ses remarques préliminaires, l’avocat de l’appelante a fait part à la Cour de son intention de montrer que certaines réponses que la vérificatrice représentante avait données au moment de l’interrogatoire préalable étaient assimilables à des admissions selon lesquelles quelques conclusions cruciales que le vérificateur principal avait tirées au stade de la vérification – notamment celles qui se rapportaient aux fonctions qu’accomplissaient SII, SWI ou M. Csumrik – étaient inexactes. À l’appui de ces dires, l’avocat de l’appelante a consigné en preuve certaines parties de l’interrogatoire de la vérificatrice représentante qui, à son avis, contredisaient les conclusions du vérificateur principal selon lesquelles :

[traduction

1.

il n’existait « aucune preuve » de services utiles fournis par SII [ce qui correspond à l’hypothèse 9kk)];

2.

la mise en marché des produits Starline Windows de l’appelante aux États-Unis a été faite « exclusivement » par des employés de SWI [ce qui correspond à l’hypothèse 9ii)];

3.

SII n’a fourni « aucun service à valeur ajoutée utile »;

4.

la valeur des services de M. Csumrik était de « zéro. ».

3)    Le contre-interrogatoire du vérificateur principal

[92]        Le vérificateur principal a souscrit aux réponses que la vérificatrice représentante a données et a reconnu que ces dernières nuançaient jusqu’à un certain point ses conclusions, mentionnées plus tôt. Il a toutefois soutenu que l’appelante avait quand même omis de fournir une preuve suffisante de ses prétentions quant au rôle joué par M. Csumrik, pour le compte de SII, à titre de concepteur et d’administrateur des activités de mise en marché que SWI avait mises en œuvre.

[93]        L’avocat de l’appelante a ensuite soumis au vérificateur principal certaines des observations écrites afin de déterminer pourquoi il persistait à [traduction] « soutenir avec acharnement que les documents de l’appelante ne prouvaient rien ». L’avocat de l’appelante a soumis au vérificateur principal certains des documents de l’appelante qui avaient été fournis lors de la vérification et qui décrivaient le rôle de M. Csumrik : deux documents établis par l’avocat de l’appelante[58] (appelés ici l’« onglet 54 » et l’« onglet 57, respectivement) et un document de M. Csumrik[59] (appelé ici l’« onglet 59 ») à l’étape de la vérification.

[94]        Pour ce qui est tout d’abord de la description que l’avocat a faite du rôle de M. Csumrik à l’onglet 54, ce document est une lettre de l’avocat de l’appelante datée du 9 juillet 2003, transmise en réponse à la demande de renseignements du vérificateur principal, au moment où ce dernier a pris en charge le dossier de l’appelante en juin 2003 :

[traduction

Q

Et, à l’avant-dernier paragraphe, on peut lire :

« Lors de notre récente réunion vous avez eu l’occasion de rencontrer et d’interroger David Csumrik, qui est l’administrateur-gérant de SII. M. Csumrik a une vaste expérience de la gestion d’équipes de vente d’autres produits aux États‑Unis. Il a des contacts et des liens personnels importants avec de gros constructeurs canadiens qui ont pris pied sur le marché immobilier du sud de la Californie. C’est par l’entremise des contacts de M. Csumrik que les entreprises ont pu pénétrer le marché de la Californie. » [Non souligné dans l’original.]

 

Vous avez donc examiné ces renseignements et vous les avez refusés.

R

Il n’y a aucune preuve à l’appui de ces renseignements.

Q

Vous n’y avez accordé aucun poids.

R

J’ai pris ces renseignements en compte, mais, sans éléments à l’appui, que pouvais-je en faire?[60] [Non souligné dans l’original.]

[95]        L’avocat de l’appelante a également passé en revue avec le vérificateur principal chacune des pages de l’onglet 59, la description de tâches que M. Csumrik avait personnellement rédigée et qui était jointe à la lettre de l’avocat au vérificateur principal, datée du 16 juin 2005. À partir du bas de la page 1, ainsi qu’aux pages 2 et 4 du document, M. Csumrik a décrit quelles étaient ses fonctions en tant qu’administrateur-gérant de SII.

[96]        À la page 3 de l’onglet 59, M. Csumrik a décrit ce qui [traduction] « de façon générale pourrait être appelé de la coordination de vente, des activités de mise en marché, ainsi que la supervision indirecte des [employés de SWI] détachés ». M. Csumrik a ensuite continué de décrire ses services de la manière suivante :

[traduction

[…] Là encore, comme vous le savez, ces services reflètent fidèlement les services que SII est obligée, par suite d’une entente, de fournir à […] [l’appelante]. Les fonctions de mise en marché et de vente sont assurées par le personnel de mise en marché et de vente, que [SWI] a détaché à SII.

La supervision de ces employés se fait de plusieurs façons, tout d’abord en étant constamment en communication avec le directeur général de SWI et, deuxièmement, en recevant et en passant en revue chaque semaine les « ventes du Livre rouge ». Ces ventes m’indiquent chaque semaine les commandes de chaque personne pour le mois en question, ventilées par territoire, et indiquent le montant de l’escompte par rapport au prix demandé. Rick et moi discutions ensuite de l’endroit et du moment précis de divers projets.

[97]        Après avoir passé en revue cette description avec le vérificateur principal, l’avocat de l’appelante lui a posé les questions suivantes :

[traduction

Q

[M. Csumrik] a donc donné une description générale de ce qu’il fait au deuxième et au troisième paragraphes, relativement à la coordination du personnel de vente. Êtes-vous d’accord pour dire que c’est ce qu’il fait?

R

C’est ce qu’il dit qu’il fait.

Q

Et vous n’acceptez pas que c’est le cas?

R

C’est là l’élément décisif, je crois. Nous ne l’acceptons pas. Aucune preuve ne l’étaye[61]. [Non souligné dans l’original.]

[98]        En revenant maintenant à l’onglet 59 pour la conclusion de l’explication de M. Csumrik au sujet du rôle qu’il jouait, ce dernier a écrit :

[traduction

De temps en temps, j’oriente l’équipe de mise en marché/vente vers des projets qui, à ma connaissance, sont envisagés. Vous savez peut-être qu’une part importante de notre expansion sur le marché américain vient du marché de la Californie, tout d’abord la région de San Diego/Carlsbad et, plus récemment, la région de San Francisco. Ce que vous ignorez peut-être c’est que des promoteurs de Vancouver ont montré la voie dans ces deux marchés. Deux de ces promoteurs sont Pinnacle Group et Bosa Ventures, que je connaissais bien depuis l’époque où j’avais travaillé comme avocat et homme d’affaires dans la région de Vancouver. Il est certain que mon expérience comme avocat et homme d’affaires a été fort utile dans le rôle que j’ai joué auprès de l’entreprise. Mes activités antérieures dans le domaine de la promotion immobilière m’ont certainement procuré l’expérience et l’expertise nécessaires pour comprendre le domaine et m’aider à jouer un rôle de chef de file à partir d’ici, à la Barbade. [Non souligné dans l’original.]

[99]        Un énoncé semblable figure au paragraphe 2 de la page 3 de l’onglet 57, où l’avocat de l’appelante décrit le rôle que jouait M. Csumrik :

[traduction]

[…] en plus d’exploiter la relation directe qu’il entretenait avec certains promoteurs immobiliers canadiens se lançant dans de grands projets en Californie, M. Csumrik était également chargé de coordonner les efforts de vente des employés que SII avait détachés aux États-Unis. […] [Non souligné dans l’original.]

[100]   Après que l’on eut passé en revue ces divers documents et après qu’on lui eut demandé ce qu’il en pensait, le vérificateur principal a déclaré ceci :

[traduction

Q

Et, une fois de plus, si l’on examine à la page 3 de la lettre la description de ce que fait M. Csumrik, à l’avant-dernier paragraphe, vous n’y avez accordé aucun poids?

R

Il n’y a aucune preuve. Je n’avais aucune preuve à l’appui de cela. Ce n’est qu’un simple énoncé[62]. [Non souligné dans l’original.]

4)    Les recommandations du vérificateur principal sur la pénalité à imposer

[101]   Une autre question dont a traité l’avocat de l’appelante lors de son contre‑interrogatoire du vérificateur principal a été la recommandation de ce dernier au Comité de revue des prix de transfert de l’ARC au sujet de la justification de l’imposition d’une pénalité en vertu de l’alinéa 247(4)a) de la Loi :

[traduction

Q

Et je pense que la dernière chose que je veux approfondir, c’est que vous avez dit dans votre témoignage que, si vous aviez reçu une réponse à votre lettre de proposition, vous auriez pu le rajuster.

R

Eh bien, j’aurais – il est certain que, si vous aviez eu des doutes au sujet de l’analyse fonctionnelle, nous aurions entendu votre point de vue sur la question.

Q

Maintenant, seriez-vous d’accord avec moi pour dire que la proposition de cotisation que vous avez établie met l’appelante dans la pire situation possible? Donc, vous avez simplement autorisé ou vous n’avez rien autorisé du tout au sujet des services fournis à l’appelante, à l’exception des frais qui sont engagés par SWI?

R

C’est exact.

Q

Vous n’avez accordé aucune valeur du tout à quoi que ce soit d’autre?

R

C’est exact.

Q

Et vous avez été en mesure d’imposer – seriez-vous d’accord pour dire que la limite pour imposer une pénalité est qu’il faut avoir plus de 5 millions de dollars en redressements?

R

Oui, je crois que c’est exact.

Q

Et, alors, pour l’année 2001, ce montant est tout juste supérieur à ce seuil, n’est-ce pas?

R

Je crois que oui si l’on examine ceci, oui, c’est le cas.

Q

Donc, s’il y avait – s’il y avait eu un crédit quelconque concernant les services que fournissait SII, ils auraient été inférieurs au seuil de 5 millions de dollars?

R

Si quelque chose avait changé dans la vérification, cela aurait bien pu être le cas[63]. [Non souligné dans l’original.]

[102]   Et, une fois de plus, à la fin du contre-interrogatoire du vérificateur principal, l’avocat de l’appelante a vérifié les conclusions de ce dernier au sujet de la valeur qu’il convenait d’attribuer aux services que l’appelante avait reçus aux termes de l’ESMMV :

[traduction

Q

M. Stasiewski, pour ce qui est des documents que nous avons passés en revue aujourd’hui et des observations, je voudrais vous faire remarquer qu’au cours de votre vérification, vous aviez en main une preuve claire et abondante des fonctions qu’exécutaient les parties, dont la participation de M. Csumrik, la nature de leurs relations, les montants payés par Marzen à SII, l’augmentation considérable des ventes aux États-Unis par suite de l’adoption de la nouvelle stratégie de mise en marché, ainsi que la valeur que Marzen a reçue grâce à la mise en œuvre de la stratégie. En conviendriez-vous avec moi?

R

J’avais une assez bonne idée de ce qui se passait.

Q

Et, en tenant compte de tout cela, vous avez conclu que la valeur que SII avait apportée, de pair avec les employés détachés qui exécutaient des services pour son compte, n’était pas supérieure aux montants que SII payait à SWI?

R

C’est exact[64]. [Non souligné dans l’original.]

E. Les résultats financiers découlant de la structure barbadienne

[103]   Les parties conviennent que les ventes des produits de fenêtrage sont passées de 551 320 $US en 1998 à 4 952 859 $US en 1999, à 11 983 554 $US en 2000 et à 13 230 737 $US en 2001. La quasi-totalité des ventes réalisées en 2000 et en 2001 ont été faites à deux promoteurs canadiens dans le sud de la Californie : Bosa Brothers et Pinnacle.

[104]   En 1999, en 2000 et en 2001, l’appelante a payé à SII, aux termes de l’ESMMV, des frais de 755 700 $US, de 2 803 326 $US et de 3 051 668 $US, respectivement. En 2001, l’appelante a également payé à SII une prime unique de 2 090 422 $US conformément au paiement de prime prévu par l’ESMMV. Les montants, en dollars canadiens, du total des frais payés en 2000 et en 2001, sont de 4 168 551 $CAN et de 7 837 082 $CAN, respectivement.

[105]   En 1999, en 2000 et en 2001, SII a payé à SWI des frais aux termes de l’EDP et de l’ESAS totalisant 606 732 $US, 1 369 721 $US et 1 811 922 $US. Les montants, en dollars canadiens, du total des frais payés en 2000 et en 2001 sont de 2 058 049 $CAN et de 2 811 892 $CAN, respectivement.

[106]   En plus des revenus tirés de ses ventes, SWI a inclus dans son revenu les frais reçus de SII aux termes des ententes relatives aux services de détachement de personnel et d’administration (y compris les montants relatifs au recouvrement du coût des employés, et non seulement la marge bénéficiaire brute de 10 %), ainsi que de l’appelante aux termes de l’entente de livraison et d’entreposage[65].

[107]   Dans ses états financiers, SWI a déduit les dépenses dont le coût avait été recouvré de SII, conformément à l’entente de détachement, ainsi que de l’appelante, conformément à l’entente de livraison et d’entreposage[66].

[108]   En 1999, en 2000 et en 2001, les bénéfices nets de SWI ont été de 274 032 $US, de 241 499 $US et de 733 432 $US, respectivement.

[109]   Pour calculer le revenu tiré des activités dans les années d’imposition 1999 à 2001, l’appelante a déduit à titre de dépenses les frais de mise en marché payés à SII. Dans son état des résultats, l’appelante a inclus des dividendes reçus de SII à titre [traduction] « [d’]autres revenus » et y a ajouté le revenu tiré des activités en vue de déterminer le revenu avant impôt. Les résultats financiers de l’appelante incluaient les montants suivants, exprimés en dollars canadiens :

 

[traduction]

 

Année 1999

 

Recettes

38 876 749 $

Marge brute

9 396 094 $

Revenus tirés des activités

43 377 $

Autres revenus (pas de dividende de SII)

24 108 $

Revenus avant impôts

67 485 $

 

 

Année 2000

 

Recettes

44 650 187 $

Marge brute

13 557 642 $

Revenus tirés des activités

450 290 $

Autres revenus (pas de dividende de SII)

1 988 037 $

Revenus avant impôts

2 438 237 $

 

 

Année 2001

 

Recettes

54 440 728 $

Marge brute

17 431 267 $

Revenus tirés des activités

(748 018 $)

Autres revenus (pas de dividende de SII)

5 560 931 $

Revenus avant impôts

4 812 913 $

[110]   Dans des années d’imposition 2000 et 2001, les frais de mise en marché payés à SII ont été la plus grosse dépense dans les états des résultats de l’appelante[67].

[111]   Les paragraphes 54 à 56 de l’exposé conjoint des faits montrent que les résultats financiers de SII en 1999, en 2000 et en 2001 incluaient les montants suivants (en dollars américains) :


 


[traduction]

 

Année 1999

 

 

Recettes

 

 

 

Frais de mise en marché

755 701 $

Dépenses

 

(674 986 $)

 

Revenu net

80 715 $

 

 

 

Année 2000

 

 

Recettes

 

 

 

Frais de mise en marché

2 850 174 $

 

Intérêts

5 072 $

Dépenses

 

(1 453 341 $)

 

Revenu net

1 401 905 $

 

 

 

Année 2001

 

 

Recettes

 

 

 

Frais de mise en marché

5 236 186 $

 

Intérêts

5 309 $

Dépenses

 

(1 847 106 $)

 

Revenu net

3 394 119 $

[112]   Entre 1999 et 2001, les bénéfices avant impôt de SII ont totalisé 4 876 739 $US (environ 7,3 millions de dollars canadiens)[68].

[113]   Selon les déclarations de revenus de société de la Barbade qu’elle a produites pour les années 1999 à 2001, SII a payé à la Barbade un montant total d’impôt sur le revenu de 121 985 $US[69] :

1999

2 086 $

2000

35 047 $

2001

84 952 $

TOTAL

121 985 $

[114]   Il est convenu qu’à partir du mois d’avril 2000, SII a commencé à déclarer et à payer des dividendes trimestriels à l’appelante, de la manière suivante (montants exprimés en dollars américains) :

 

[traduction]

 

Année 2000

 

 

24 avril

75 000 $

 

15 août

675 000 $

 

15 décembre

600 000 $

 

Total

1 350 000 $

(2 011 500 $CAN)

 

 

 

Année 2001

 

 

31 mai

360 000 $

 

26 juillet

375 000 $

 

22 octobre

175 000 $

 

31 décembre 

2 525 956 $

 

Total

3 435 956 $

(5 299 620 $CAN)

[115]   M. Csumrik a expliqué de quelle façon ces montants ont été déterminés et payés :

[traduction

Q

Avez-vous reçu des instructions sur le moment où déclarer un dividende, ou sur le montant qu’il devrait être?

R

J’informais – à la fin de chaque trimestre, je faisais savoir aux actionnaires quelle quantité d’espèces et de bénéfices non répartis était disponible au cas où ils voudraient que les administrateurs déclarent un dividende. Donc –

Q

Ce serait donc les actionnaires qui décideraient qu’un dividende serait déclaré?

R

Eh bien, en droit, ce sont les administrateurs qui le font. Mais je crois que nous avons consulté les actionnaires.

Q

Maintenant, si nous revenons simplement au dividende d’avril 2000, après que celui-ci a été déclaré, les bénéfices non répartis restants dans la société sont d’environ 3 000 $. Le 15 août 2000, vous ignoriez quels seraient les résultats financiers pour 2000, n’est-ce pas?

R

Non.

Q

Et vous ignoriez quels seraient les bénéfices non répartis à la fin de 2000.

R

Non.

Q

Mais vous avez pu payer un dividende de 675 000 $.

R

Oui, nous l’avons payé, c’est exact.

Q

Et sur quoi ce montant a-t-il été fondé?

R

Sur les résultats du premier trimestre terminé le 31 mars. Pardon, il s’agit probablement des deux premiers trimestres terminés le 30 juin. Nous aurions eu suffisamment de fonds en banque, ainsi qu’assez de bénéfices non répartis pour l’exercice en cours, une période de bénéfices de six mois, pour payer 675.

Q

Donc, si vous ignoriez les bénéfices non répartis pour cette année et s’il n’y avait pas de bénéfices non répartis de 1999, le montant serait fondé sur la quantité d’espèces disponibles et sur votre estimation des fonds de roulement qui étaient réellement nécessaires?

R

Non. Ce serait fondé sur les gains réels pour la période de six mois terminée le 30 juin 2000. C’était – nous n’avions essentiellement pas besoin d'un fonds de roulement parce que l’entente prévoyait que, s’il y avait un tel besoin, nous recevrions l’argent de Marzen. J’oublie de quel paragraphe il s’agissait dans l’entente administrative – désolé, je pense que c’était l’entente relative au détachement. Non, je m’excuse, l’entente relative à la mise en marché et aux ventes prévoyait que, si nous avions besoins de fonds de roulement, Marzen devait les fournir. Nous n’avions donc pas besoin d'un fonds de roulement, sinon des sommes très minimes[70].

 

IV. La disposition législative applicable

[116]   Les passages applicables du paragraphe 247(2) de la Loi sont les suivants :

247(2). Lorsqu’un contribuable […] et une personne non-résidente avec laquelle le contribuable […] a un lien de dépendance […] prennent part à une opération ou à une série d’opérations et que, selon le cas :

a)   les modalités conclues ou imposées, relativement à l’opération ou à la série, entre des participants à l’opération ou à la série diffèrent de celles qui auraient été conclues entre personnes sans lien de dépendance, […]

les montants qui, si ce n’était le présent article et l’article 245, seraient déterminés pour l’application de la présente loi quant au contribuable […] pour une année d’imposition ou un exercice font l’objet d’un redressement de façon qu’ils correspondent à la valeur ou à la nature des montants qui auraient été déterminés si :

c)   […] les modalités conclues ou imposées, relativement à l’opération ou à la série, entre les participants avaient été celles qui auraient été conclues entre personnes sans lien de dépendance; […]

V. Les questions en litige

[117]   Il est convenu que l’appelante et SII entretenaient un lien de dépendance aux termes de l’ESMMV. Les questions qui sont en litige dans les présents appels sont les suivantes :

1.       si les modalités imposées à l’égard de l’ESMMV conclue entre l’appelante et SII diffèrent de celles dont auraient convenu des personnes n’ayant pas de lien de dépendance;

2.       dans l’affirmative, quels redressements faudrait-il apporter au montant des frais que l’appelante a payés à SII aux termes de l’ESMMV de façon à ce qu’ils soient équivalents au prix qui aurait été payé si l’appelante et SII n’avaient eu aucun lien de dépendance; autrement dit, si l’appelante aurait payé à SII, aux termes de l’ESMMV, des frais supérieurs aux montants qu’aurait autorisés le ministre si elles n’avaient eu aucun lien de dépendance;

3.       si l’appelante est passible d’une pénalité au titre du paragraphe 247(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu à l’égard du redressement du prix de transfert pour son année d’imposition 2001.

[118]   Chacune de ces questions sera examinée séparément sous les rubriques suivantes.

A. Question no 1 : Si le prix que l’appelante a payé à SII aux termes de l’ESMMV diffère de celui qui aurait été payé si les deux n’avaient eu aucun lien de dépendance.

1)    La position de l’appelante

[119]   L’appelante est d’avis que, compte tenu de la structure de mise en marché que l’appelante et SII ont mise en place, les modalités que les parties ont adoptées au sujet des services fournis directement ou indirectement par SII ne diffèrent pas de celles dont des parties sans lien de dépendance auraient convenu. L’appelante soutient que la Cour doit prendre en compte à la fois les services directs qui ont été fournis par SII et les services indirects qu’ont fournis des employés de SWI aux termes des ententes de détachement conclues entre SWI et SII. En fait, l’appelante soutient que SWI et SII doivent être traitées comme une seule entité, qualifiée [traduction] « [d’]amalgame », dont les fonctions comprenaient le rôle joué par M. Csumrik. Comme nous le verrons plus loin, cette hypothèse de fait constituait le fondement du rapport d’expert de l’appelante et a éclairé sa démarche par rapport à l’analyse relative au prix de transfert.

[120]   Selon l’appelante, au moment de l’établissement de la structure barbadienne le 1er juillet 1999, SII – sous la direction de M. Csumrik et en collaboration avec SWI – a entrepris de mettre en marché les produits de fenêtrage de l’appelante aux États-Unis. M. Csumrik, agissant pour le compte de SII, a mis au point la stratégie de mise en marché utilisée dans le cadre de la structure barbadienne et a fourni, à l’appui de cette stratégie, des services continus de supervision et des conseils à SWI. L’appelante soutient qu’en raison de ces relations, SII et SWI doivent être considérées comme agissant comme une seule et même entité sous la direction de M. Csumrik pour l’exécution des obligations de SII envers l’appelante aux termes de l’ESMMV.

[121]   L’appelante soutient par ailleurs que « c’est au fruit qu’on connaît l’arbre », signalant que, dans le cadre de la structure barbadienne, l’appelante a réalisé un accroissement impressionnant des ventes, preuve en soi que le paiement des frais aux termes de l’ESMMV était justifié.

[122]   L’appelante a également fait valoir que les admissions de la vérificatrice représentante lors de l’interrogatoire préalable et le témoignage du vérificateur principal à l’instruction ont porté un grave coup aux hypothèses qui sous-tendent les nouvelles cotisations du ministre. Selon l’avocat de l’appelante, l’effet conjugué des réponses que la vérificatrice représentante a données lors de l’interrogatoire préalable et du contre-interrogatoire du vérificateur principal montre que ce dernier a été [traduction] « incapable de formuler un motif de refus quelconque »[71] sur la position de l’appelante lors de la vérification, à savoir que :

[traduction

1.         l’appelante a reçu des services de valeur appréciable aux termes de l’ESMMV;

2.         M. Csumrik a dirigé de manière continue l’équipe de vente de SWI;

3.         sans la direction et la participation de M. Csumrik, l’appelante n’aurait pas pris pied avec succès dans le marché des immeubles de grande hauteur[72].

[123]   L’appelante est d’avis que, dans ces circonstances, un homme ou une femme d’affaires raisonnable, se trouvant à la place de l’appelante et agissant sans lien de dépendance avec SII, aurait payé les frais prévus par l’ESMMV.

2)    La position de l’intimée

[124]   L’intimée est d’avis qu’aucune preuve ne montre que SII a fourni des services utiles ou que ces services auraient justifié, aux yeux d’une personne sans lien de dépendance, le paiement de la majorité des frais prévus par l’ESMMV.

[125]   L’intimée rejette du revers de la main le fait que l’appelante considère SII et SWI comme une seule et même entité dans le cadre de la structure barbadienne, faisant valoir que le principe des opérations entre personnes sans lien de dépendance requiert que l’on aborde l’analyse relative au prix de transfert sous l’angle de deux entités distinctes.

[126]   L’intimée soutient également que l’appelante ne s’est pas acquittée de son fardeau de prouver que les hypothèses sous-tendant les nouvelles cotisations étaient inexactes. En établissant une nouvelle cotisation à l’égard des années d’imposition 2000 et 2001 de l’appelante en vertu du paragraphe 247(2) de la Loi, le ministre a formulé les hypothèses générales suivantes, qui sont énoncées au paragraphe 9 de la réponse à l’avis d’appel :

[traduction

9uu)

les modalités établies ou imposées entre l’appelante, SWI et SII à l’égard de la structure de mise en marché de la Barbade étaient différentes de celles qui auraient été établies ou imposées si ces parties avaient agi sans lien de dépendance;

9vv)

une partie sans lien de dépendance n’aurait pas payé à SII les frais de mise en marché que l’appelante a payés dans les années d’imposition 2000 et 2001 pour les services que SII a fournis.

[127]   En effectuant un redressement au prix prévu par l’ESMMV, le ministre a conclu que seul le montant que SII avait payé à SWI aux termes de l’EDP et de l’ESAS était un montant fixé dans les conditions normales du marché et il a formulé les hypothèses additionnelles qui suivent :

[traduction

9ii)

la mise en marché des produits de l’appelante aux États-Unis a été exécutée exclusivement par les employés de SWI;

9kk)

SII n’a fourni aucun service à valeur ajoutée utile à la Barbade en vue de soutenir l’appelante ou SWI;

9pp)

les bénéfices attribués à la Barbade (les frais de mise en marché payés par l’appelante, moins les frais payés à SWI) n’ont pas été payés par SII pour supporter des coûts ou des dépenses que SII avait engagés ou pour rémunérer son administrateur-gérant, David Csumrik;

9ww)

dans les années d’imposition 2000 et 2001, une partie sans lien de dépendance n’aurait pas payé à SII des frais de mise en marché supérieurs à ceux que SII a payés à SWI;

[128]   Cependant, en réponse à l’argument que l’appelante a invoqué à l’instruction au sujet de l’effet des « admissions » faites par la vérificatrice représentante lors de l’interrogatoire préalable, l’intimée a reconnu que c’était M. Csumrik qui avait imaginé l’[traduction] « idée du changement de donne[73] » et qu’il a fourni quelques suggestions et conseils stratégiques utiles ainsi que fait le rapprochement des rapports sur les ventes sur une base hebdomadaire. Mais l’avocat de l’intimée a fait valoir qu’indépendamment de ces petites concessions, la preuve n’étayait pas la conclusion que M. Csumrik avait vraiment contribué, sous la forme de services à valeur ajoutée utiles, à mettre en marché des produits ou à générer des ventes.

[129]   L’avocat de l’intimée a fait remarquer qu’à la date des audiences, M. Csumrik n’avait reçu aucune rémunération pour ses efforts, sauf les frais que SII avait payés à Longview pour ses services de gestion et d’administration. Il n’avait aucune relation d’emploi ou contractuelle avec SII ni des actions ou un autre intérêt dans la société par l’intermédiaire desquels il pourrait tirer un avantage. L’intimée était d’avis qu’il est contraire au bon sens qu’un homme d’affaires et avocat d’expérience comme M. Csumrik fournisse ses services pour le compte de SII en échange d’une rémunération aussi faible.

[130]   La réponse de l’appelante à cet argument est que M. Csumrik devait être rémunéré pour ses efforts aux termes d’une entente distincte conclue entre M. Csumrik et l’appelante ou M. Martini.

[131]   Selon l’analyse de l’intimée, cette réponse donne lieu à un double paradoxe : plus l’appelante souligne la valeur singulière de la contribution de M. Csumrik à l’exécution, par SII, de ses obligations en matière de mise en marché pour justifier les frais payés à SII, plus il semble déraisonnable que M. Csumrik ait fourni de tels services en échange d’une rémunération qui ne soit que minime. Si, comme l’allègue l’appelante, le vrai avantage que représentait pour M. Csumrik le fait de créer une telle valeur pour SII était une entente de rémunération distincte conclue avec l’appelante ou M. Martini, cela ne fait que soulever la question de savoir pour quelle raison l’appelante a payé les frais à SII.

[132]   L’avocat de l’intimée a fait valoir que la quasi‑totalité des bénéfices réalisés par le groupe contrôlé que constituaient l’appelante, SWI et SII dans les années 1999 à 2001 l’a été par SII par suite des frais de mise en marché. L’avocat de l’intimée a fait remarquer que, dans les années d’imposition 1999, 2000 et 2001, l’appelante avait eu des bénéfices d’exploitation minimes suivis de pertes et que SWI avait réalisé des bénéfices d’exploitation fixes; pendant ce temps, SII avait réalisé des bénéfices d’exploitation qui avaient connu une hausse exponentielle.

[133]   En 2000 et en 2001, l’appelante a payé à SII la somme d’environ 13 millions de dollars canadiens, sur laquelle SII a payé à SWI des frais de 4,9 millions de dollars canadiens pour le détachement de son personnel administratif et de vente. Le solde restant – un peu plus de 7 millions de dollars canadiens – a été payé à SII pour les services de mise en marché prévus par l’ESMMV; tous ces frais ont été déduits du revenu canadien de l’appelante, à l’exception d’une partie remise à l’appelante à titre de dividendes versés sur le surplus exonéré.

[134]   L’avocat de l’intimée a pris acte de l’objection de l’avocat de l’appelante, à savoir qu’étant donné que l’appelante ne pouvait pas segmenter ses ventes au Canada et aux États‑Unis, il était impossible d’analyser son rendement, mais il a maintenu que le bon sens permettait d’inférer que les frais visés par l’ESMMV avaient été payés simplement pour profiter à l’appelante elle‑même.

3)    Analyse

a)    Introduction

[135]   La première tâche consiste à déterminer quels services SII a fournis à l’appelante aux termes de l’ESMMV. Pour les raisons données ci‑après, un grand nombre des hypothèses de fait que l’on trouve dans le rapport d’expert de l’appelante au sujet de la nature de la participation de M. Csumrik aux activités de SII et de SWI[74] ne sont pas fondées. Comme nous le verrons plus en détail à la question no 2, c’est là une des raisons pour lesquelles j’ai choisi de ne pas me fonder sur ce rapport.

[136]   Il ne fait aucun doute que SII, à elle seule, ne pouvait rien faire. Je souscris à l’argument de l’avocat de l’intimée selon lequel il s’agissait d’une coquille vide, sans personnel, sans actifs et sans biens incorporels ou propriété intellectuelle. La question de savoir si SWI a fourni du personnel de vente et de mise en marché à SII à un prix fixé dans les conditions normales du marché aux termes de l’EDP et de l’ESAS n’est pas en litige. Pour déterminer les services que SII a fournis, l’élément clé consiste donc à cerner le rôle qu’a joué M. Csumrik; plus précisément, en quelle qualité ce dernier a fourni quel service et à qui, ainsi que la mesure dans laquelle ses efforts peuvent être attribués aux services que SII était tenue de fournir à l’appelante aux termes de l’ESMMV.

b)    L’« idée du changement de donne » de M. Csumrik

[137]   Tant M. Martini que M. Fabian ont attribué à M. Csumrik le mérite de l’idée d’amener l’appelante à s’orienter vers le marché des immeubles de grande hauteur du sud de la Californie plutôt que vers le marché résidentiel de l’État de Washington; l’avocat de l’intimée a admis que c’était M. Csumrik qui était l’auteur de cette [traduction] « idée du changement de donne ». Même si cela est vrai, la preuve n’étaye cependant pas la conclusion selon laquelle M. Csumrik a fourni ce service pour le compte de SII.

[138]   À mon avis, M. Csumrik a mis au point ce conseil en sa qualité personnelle et l’a fourni directement à M. Martini/l’appelante. Premièrement, il y a la question du moment choisi : il est ressorti du témoignage des témoins de l’appelante qu’à l’automne de 1998, M. Csumrik avait conseillé à M. Martini et à M. Fabian que l’appelante change de marché et utilise des techniques de mise en marché différentes. L’avocat de l’appelante a fait valoir que M. Csumrik avait constitué SII en société dans l’espoir de s’en servir pour diriger les efforts de mise en marché de l’appelante, mais il ressort de la preuve que, lorsque M. Csumrik avait présenté la nouvelle stratégie de mise en marché, SII prenait la poussière sur une étagère à la Barbade, attendant que quelqu’un – selon le témoignage de M. Csumrik, peut‑être l’appelante ou peut‑être l’un des clients de la société Longview de M. Csumrik – en fasse usage.

[139]   À l’époque où SII est devenue un élément de la nouvelle structure de mise en marché le 1er juillet 1999, l’appelante avait déjà accepté les conseils de mise en marché que M. Csumrik avait fournis directement à M. Martini et avait décidé de cibler le marché des immeubles de grande hauteur du sud de la Californie. Il n’y a aucune preuve que M. Csumrik a transféré à SII un droit de propriété quelconque qu’il avait peut‑être sur cette idée. Pour ce qui est de ce dernier point, il s’agit là d’une des lacunes du rapport d’expert de l’appelante dont il sera question à la question no 2 : il était tenu pour acquis dans ce rapport que la stratégie de mise en marché était le bien [traduction] « incorporel de valeur » de SII[75], mais aucune conclusion n’y a été tiré quant à la question de savoir si ce bien appartenait au départ à M. Csumrik et avait été transféré à SII ou s’il avait été créé par M. Csumrik pour le compte de SII après le 1er juillet 1999.

[140]   Enfin, il y a la question de la rémunération de M. Csumrik. C’est l’appelante, et non SII, qui a trouvé M. Csumrik et qui s’est prévalue directement de ses conseils en matière de mise en marché. M. Martini a déclaré sans équivoque qu’aucune partie des frais prévus par l’ESMMV que l’appelante a payés à SII n’était destinée ni n’a été payée à M. Csumrik. C’est M. Martini, et non SII, qui avait convenu de rémunérer M. Csumrik personnellement pour ses conseils. À mon avis, la preuve étaye la conclusion selon laquelle, si l’on présume que M. Csumrik était à l’origine de l’idée du changement de donne, il l’a fournie à l’appelante en sa qualité personnelle et non pour le compte de SII. Il n’était donc pas nécessaire que l’appelante paie à SII des frais pour ces conseils.


c)     M. Csumrik à titre de promoteur de la stratégie de mise en marché de SII et d’administrateur des activités de mise en marché de SWI

[141]   L’élément suivant de l’argument de l’amalgame qu’invoque l’appelante est que M. Csumrik, agissant pour le compte de SII, a continué de mettre au point les conseils de mise en marché qu’il fournissait à l’appelante en collaboration avec M. Stark et s’est occupé de superviser de façon continue les employés de SWI afin de s’assurer qu’ils se conformaient à la nouvelle stratégie. À mon avis, cela surestime nettement le rôle que M. Csumrik a véritablement joué.

[142]   Premièrement, il n’y a guère d’éléments de preuve montrant quelles autres mesures de mise au point auraient été requises ou ont bel et bien été prises après que M. Csumrik a relevé pour l’appelante la nouvelle orientation-marché et la nouvelle stratégie à l’égard des ventes. Bien que les déclarations faites aux onglets 54, 57 et 59 de la pièce A‑1 donnent à penser que M. Csumrik entretenait des liens personnels avec les promoteurs canadiens qui avaient des projets sur le marché des immeubles de grande hauteur dans le sud de la Californie, à l’instruction, il a déclaré qu’il avait seulement entendu parler d’eux, et le lien entre eux et lui était apparemment aussi ténu que le fait d’avoir vécu à False Creek à une époque où ces promoteurs y avaient peut‑être des projets immobiliers. Plus important encore, il a contredit ses déclarations antérieures, admettant carrément qu’il n’avait aucun contact avec les divers promoteurs et ne pouvait donc pas orienter SWI vers des personnes en particulier au sein du marché des immeubles de grande hauteur. Il a également convenu en contre‑interrogatoire que, si la stratégie de mise en marché était efficace, il ne serait pas nécessaire du tout de convaincre le client de la capacité de SWI de « donner les résultats escomptés » après la conclusion fructueuse de la première vente.

[143]   Quant à la participation de M. Csumrik aux aspects pratiques de la conception de nouvelles techniques de vente pour le marché des immeubles de grande hauteur, il a expliqué qu’il avait appris l’importance de respecter les devis descriptifs et les exigences des codes du bâtiment à l’époque où il faisait affaire avec des clients des États‑Unis dans le cadre de son entreprise de systèmes d’éclairage de salles de cinéma. Cependant, on ne voyait pas très bien comment ce savoir serait transférable au commerce des fenêtres.

[144]   Lors de sa plaidoirie, l’avocat de l’appelante a cité le témoignage détaillé de M. Fabian dans lequel celui‑ci a décrit ce qui était nécessaire pour effectuer une vente technique afin de souligner la différence de techniques de vente entre le marché résidentiel et celui des immeubles de grande hauteur. M. Fabian a passé une bonne partie du temps à expliquer cette fonction; il l’a fait de manière détaillée et convaincante. Ce que j’ai retiré de son témoignage, c’est que seule une personne ayant une expertise et une expérience considérables du commerce des fenêtres pourrait concevoir et gérer ce que l’avocat lui‑même a qualifié de [traduction] « processus compliqué[76] ». Je ne crois pas que M. Csumrik ait dit qu’il possédait ces compétences; pas plus qu’il n’a expliqué comment il aurait pu contribuer à la mise au point de celles‑ci au‑delà de sa suggestion initiale selon laquelle SWI devait ajuster ses compétences en vue de répondre aux besoins de ses clients au sein du nouveau marché.

[145]   Pour ce qui est de la supervision que M. Csumrik a exécutée relativement aux employés de SWI, si tous l’ont qualifié de [traduction] « guide », personne n’a expliqué de manière satisfaisante ce que cela impliquait véritablement. M. Csumrik a déclaré avec franchise que ce qu’il savait du commerce des fenêtres il l’avait tiré du [traduction] « cours condensé » que lui avaient donné MM. Martini, Fabian et Stark. Il a reconnu avec franchise qu’il n’était pas un vendeur et qu’il ne souhaitait nullement le devenir.

[146]   En revanche, M. Martini et M. Fabian avaient gravi tous les échelons dans le commerce des fenêtres. M. Martini a décrit M. Fabian comme étant son bras droit; M. Fabian a décrit M. Stark comme un bon vendeur ayant de nombreuses années d’expérience dans le domaine. M. Stark n’a pas témoigné, mais il ressort de la preuve que M. Martini avait suffisamment confiance en lui pour confier à M. Stark, qui occupait le poste de directeur général sur l’île de Vancouver, la direction de la première initiative de SWI dans l’État de Washington en avril 1998; même après que cette entreprise eut obtenu des résultats décevants, M. Martini a gardé M. Stark au même poste lors de la mise en œuvre de la structure barbadienne ainsi qu’en tout temps au cours des années d’imposition ici en cause.

[147]   Compte tenu de ces éléments de preuve, il est peu probable qu’après avoir été informés de la nouvelle orientation‑marché et de la nécessité de recourir à des méthodes de ventes différentes, M. Stark et les employés chevronnés de SWI auraient eu à se faire dire à maintes reprises par M. Csumrik – un néophyte avoué dans le domaine – de se tourner vers des promoteurs canadiens et de veiller à répondre à leurs spécifications de produit. Il est plus probable que sous la direction de M. Stark ils ont adapté leurs compétences et leur expérience en matière de ventes résidentielles pour répondre aux besoins d’entités ayant des projets sur le marché des immeubles de grande hauteur dans le sud de la Californie.

[148]   Sous réserve des concessions de l’intimée, dont il est question plus en détail sous la rubrique qui suit, je ne souscris pas à l’argument de l’appelante selon lequel M. Csumrik a joué un rôle important, pour le compte de SII, dans la mise au point d’une stratégie de mise en marché ou dans la supervision continue des activités de SWI.

d)    M. Csumrik à titre de gérant des activités de mise en marché de SII

[149]   L’appelante a soutenu de plus que M. Csumrik participait activement, pour le compte de SII, aux activités quotidiennes concernant ses obligations en matière de mise en marché aux termes de l’ESMMV.

[150]   Quelle preuve y a-t-il de la participation quotidienne de M. Csumrik? M. Martini a admis avec franchise, pour sa part, qu’il n’avait aucune connaissance personnelle des fonctions ordinaires de M. Csumrik à la Barbade, et que, pour de telles informations, il se fiait à M. Fabian. Ce dernier a déclaré qu’il avait été en contact régulier avec M. Csumrik après le 1er juillet 1999 et que les rapports de vente – le [traduction] « livre rouge » – de SWI étaient dûment expédiés à la Barbade pour que M. Csumrik puisse les examiner avant qu’ils soient transmis à l’appelante. M. Csumrik a confirmé son témoignage.

[151]   Je ne suis pas du tout convaincue que M. Csumrik a fait plus qu’examiner superficiellement ces documents. Mais même si j’en venais à admettre que de telles mesures ont été prises, il n’existe aucune preuve de leur utilité commerciale. M. Martini a témoigné que l’appelante avait [traduction] « toujours » utilisé le système du [traduction] « livre rouge » pour surveiller les ventes et planifier les activités de fabrication découlant de ces commandes. Après le 1er juillet 1999, M. Fabian a continué de passer en revue le livre rouge, tout comme M. Stark – même M. Martini a gardé un œil dessus. La seule différence, après l’établissement de la structure barbadienne, a été que M. Csumrik devait passer en revue les mêmes renseignements avant de les envoyer à l’appelante. Dans l’ensemble, je suis convaincue par l’argument de l’avocat de l’intimée, selon lequel les renseignements étaient réacheminés par l’intermédiaire de la Barbade dans le but de donner l’impression que SII fournissait un service utile à l’appelante aux termes de l’ESMMV. En fait, comme l’illustrera le témoignage de M. Csumrik dont il est question ci‑après, l’un de ses principaux soucis semble avoir été de préserver les apparences.

[152]   Certaines des activités que l’appelante a attribuées à l’exécution, par M. Csumrik, des obligations de SII aux termes de l’ESMMV empiétaient sur les divers services de gestion qu’il fournissait à SII par l’intermédiaire de Longview. Par exemple, M. Csumrik a fait remarquer qu’il lui était arrivé de tomber sur des incohérences dans les chiffres de ventes ainsi que sur des erreurs d’écriture qui auraient fait augmenter erronément le montant des frais que SII payait à SWI aux termes de l’EDP ou de l’ESAS. Ce genre de surveillance n’est pas incompatible avec la description qu’il a faite des services que Longview fournissait habituellement à ses clients étrangers. Dans le même ordre d’idées, M. Csumrik a dit que Longview pouvait gérer le personnel de vente de ses clients aux quatre coins du globe à partir de la Barbade : [traduction] « [c]e personnel relevait de nous, mais […] s’il se trouvait aux États-Unis, il était rémunéré par une entreprise intermédiaire qui avait un lien de dépendance avec le groupe […][77] » et il a reconnu que cela [traduction] « ressemblait » à ce qui était fait pour SWI.

[153]   M. Csumrik a également fait remarquer que la raison principale pour laquelle il tenait un compte rendu de ses communications avec M. Stark était d’[traduction] « établir un dossier pour des raisons fiscales ». Il a développé cette déclaration quelque peu ambiguë en disant que c’était aussi [traduction] « en quelque sorte pour montrer qu’il y avait […] des activités qui étaient menées à la Barbade ». Considérée sous son angle le plus anodin, cette description de ses activités pourrait raisonnablement être considérée comme un élément des services de gestion d’entreprise que Longview était en mesure de fournir.

[154]   M. Martini a pris conscience la première fois de la possibilité de recourir à l’aide de M. Csumrik dans le contexte de la recherche de conseils juridiques concernant les pertes de SWI en 1998. Dans son étude de cas, qu’il a établie à la même époque environ, M. Fabian a recommandé que l’appelante retienne les services d’une [traduction] « entreprise de mise en marché et de vente établie ». Il ressort de la preuve que M. Csumrik ne répondait pas à ce critère, mais M. Martini a fait savoir qu’il était disposé à lui faire confiance sur la foi de la recommandation du cabinet Thorsteinssons. Pour sa part, M. Csumrik avait eu affaire à l’avocat de l’appelante et avait obtenu des conseils du cabinet Thorsteinssons au moment d’établir Longview; son premier client lui avait été recommandé par ce cabinet d’avocats. M. Csumrik avait une expertise et une expérience des entreprises commerciales internationales à la Barbade et était en mesure de fournir à ses clients, par l’intermédiaire de Longview, des services [traduction] « à guichet unique ».

[155]   M. Csumrik était donc bien placé pour favoriser l’établissement d’une entreprise commerciale internationale à la Barbade, mais son peu de disposition à déménager au Canada ou aux États‑Unis n’obligeait pas à établir SII dans ce pays. Jamais M. Csumrik n'a dit dans son témoignage que c’était pour cela que SII avait été établie à la Barbade; en contre‑interrogatoire, M. Martini a expressément rejeté cet argument. Il n’était pas non plus manifestement nécessaire que M. Csumrik fournisse ses services par l’intermédiaire d’une société située à la Barbade; M. Martini a convenu que M. Csumrik aurait pu les fournir directement à l’appelante ou à SWI. Il n’existe aucune preuve qui étaye la prétention de l’appelante selon laquelle la structure barbadienne [traduction] « […] était fondée sur l’obtention de la participation de M. Csumrik[78] ».

[156]   Malgré les conclusions qui précèdent, je reconnais que l’appelante a le droit de structurer ses activités commerciales d’une manière avantageuse sur le plan fiscal. Je ne sous-entends pas que M. Csumrik s’occupait de fournir des conseils de nature fiscale à l’appelante.

[157]   Dans l’ensemble, l’argument de l’appelante concernant la mesure dans laquelle M. Csumrik a participé à l’exécution de fonctions pour le compte de SII ne me convainc pas. Le mieux que l’on puisse dire, vu les concessions de l’intimée au sujet des admissions faites à l’interrogatoire préalable, c’est qu’en s’acquittant de ses fonctions à titre d’administrateur-gérant aux termes de l’entente conclue entre SII et Longview, M. Csumrik jetait aussi un coup d’œil à quelques documents de vente et fournissait quelques conseils stratégiques et suggestions à SWI pour le compte de SII.


e)     « C’est au fruit qu’on connaît l’arbre »

[158]   Enfin, l’appelante a soutenu que la preuve de la participation utile de M. Csumrik aux activités de SII et de SWI et, par conséquent, de la justification des frais prévus par l’ESMMV, est illustrée par l’augmentation des ventes qui a été réalisée en fin de compte sur le marché des immeubles de grande hauteur dans le sud de la Californie. Il s’agissait là d’une autre hypothèse factuelle clé qui sous‑tendait la démarche que M. MacDonald avait suivie dans le rapport d’expert de l’appelante, démarche décrite à la fois par M. MacDonald et l’avocat de l’appelante en ces termes : [traduction] « c’est au fruit qu’on connaît l’arbre ».

[159]   Certes, l’avocat a fait valoir que l’énorme augmentation des ventes réalisées aux États‑Unis entre le 1er juillet 1999 et le 31 décembre 2001 – une augmentation de plus de 2 000 % - devrait être une preuve suffisante que l’appelante en avait eu pour son argent aux termes de l’ESMMV grâce aux efforts conjugués de M. Csumrik, de SWI et de SII. La même hypothèse a été soumise au vérificateur principal lors de son contre‑interrogatoire :

            [traduction]

 

Q

Nous avons donc un nouveau plan de mise en marché et nous sommes passés de 500 000 [$US] ou 570 000 [$US] à [11 200 000 $US] et [12 200 000 $US] en 2000 et en 2001. Est-ce là une preuve de quelque chose?

R

Cela signifie simplement qu’ils sont arrivés sur le marché au bon moment et qu’ils – sont arrivés juste au moment où le marché commençait à prendre son essor aux États‑Unis.

Q

C’était donc un heureux hasard? Ce n’était qu’une question de « choix de moment »?

R

Je dis seulement qu’il y avait un certain nombre d’explications qui sont possibles[79].

[160]   Indépendamment de la réaction incrédule de l’avocat de l’appelante au témoignage du vérificateur principal, M. Csumrik avait déjà essentiellement dit la même chose en réponse aux questions de l’avocat lors de son interrogatoire principal. Quand on a interrogé M. Csumrik sur les ventes que l’appelante avait finalement réalisées sur le marché du sud de la Californie, il a qualifié les résultats de [traduction] « remarquables », mais il a expliqué ce succès de la manière suivante :

          [traduction]

 

Q

Et juste pour conclure, M. Csumrik, voulez-vous décrire les résultats généraux qui ont été obtenus dans le cadre de la nouvelle structure de mise en marché qui a été mise en œuvre?

R

Je dirais qu’au cours d’une période relativement courte, soit 2000 à 2005 ou 2007, ou quelle qu’elle ait été, il s’agissait de résultats remarquables. Vous savez, à ce moment, le marché immobilier – je vous dirais que le marché de l’immobilier était en expansion, il me rappelait – un peu le marché des logiciels à l’époque où je m’y trouvais. Il n’était pas nécessaire d’être bon, il suffisait d’être là. Ce que je veux dire c’était que – les choses bougeaient. Nous avons donc acquis une part de marché. J’ignore si nous l’avons acquise aux dépens d’autres entités ou si nous l’avons acquise parce que, à cette époque, en général, à San Diego, dans le sud de la Californie, le marché prenait de l’expansion, et c’était bon. C’était bien agréable[80]. [Non souligné dans l’original.]

 

[161]   Il ressort donc clairement de la propre preuve de l’appelante que l’accroissement des ventes était peut‑être juste une question de « moment bien choisi ». Je conviens avec l’avocat de l’appelante que les résultats financiers qui ont été réalisés dans le cadre de la structure barbadienne sont pertinents pour l’analyse relative au prix de transfert de pleine concurrence, mais, en soi, ils ne justifient pas les frais qui ont été payés aux termes de l’ESMMV et de l’Entente relative au paiement de prime prévu par l’ESMMV. Une autre faiblesse de l’argument selon lequel [traduction] « c’est au fruit qu’on connaît l’arbre » est qu’il néglige d’autres aspects du flux financier en 2000 et en 2001; par exemple, dans le cadre de la structure barbadienne, les frais payés à SII représentaient la plus grosse dépense de l’appelante, et de loin; pendant ce temps, en même temps que l’appelante déclarait des pertes découlant de ses activités, les bénéfices de SII produisaient de généreux dividendes pour l’appelante.

[162]   Décrivant cette situation comme un [traduction] « état de fait fantastique[81] », l’avocat de l’intimée a aussi fait état du témoignage de M. Csumrik selon lequel, comme la clause 3.2 de l’ESMMV exigeait que l’appelante fournisse, sur demande, des fonds supplémentaires à SII pour fournir ses services et que SII n’avait pas besoin de fonds de roulement, il était convaincu que les fonds excédentaires pouvaient être payés sous forme de dividendes aux trois mois. SII ne s’exposait donc à aucun risque; comme c’était le cas avant la structure barbadienne, le risque restait au Canada, chez l’appelante.

[163]   L’avocat de l’appelante a réfuté la prétention de l’intimée en faisant valoir que l’appelante était en mesure de payer les dividendes à cause de la clause 3.2. Il a aussi souligné le témoignage de M. Martini selon lequel les dividendes avaient servi à étendre les activités commerciales canadiennes de l’appelante en vue de répondre aux exigences entraînées par l’accroissement des ventes sur le marché des immeubles de grande hauteur dans le sud de la Californie[82].

[164]   Ces arguments contribuent peu à faire avancer la cause de l’appelante. Que cette dernière ait mis à profit les dividendes ne justifie guère les frais qu’elle a payés à SII aux termes de l’ESMMV. Quant à l’obligation qu’avait l’appelante de fournir des fonds suivant la clause 3.2 – sur demande et en sus des frais déjà imposés aux termes de l’ESMMV – l’argument de l’appelante ne dit pas comment cela serait acceptable aux yeux d’une partie sans lien de dépendance qui n’aurait pas la capacité de l’appelante de recouvrer de tels fonds grâce à des paiements de dividende.

[165]   L’argument de l’appelante à l’appui du paiement de prime de 10 % prévu par l’ESMMV est lui aussi peu convaincant. L’avocat de l’appelante a tout d’abord tenté de justifier la formule en soutenant que M. Csumrik avait joué un rôle actif dans sa négociation. À l’appui de cet argument, l’avocat de l’appelante a renvoyé la Cour à un échange de lettres entre M. Csumrik et M. Martini[83]. Pour sa part, M. Martini ignorait comment M. Csumrik était arrivé au montant de 10 %; quand la question lui a été posée, M. Csumrik a déclaré avec franchise :

[traduction]

Je voulais que [SII] rehausse son niveau de rentabilité parce que je savais que cela paraîtrait mieux si cela devait arriver, et comme [l’appelante] était propriétaire de SII, de toute façon, je n’obtenais aucune part de cet argent et cela lui aurait été indifférent[84]. [Non souligné dans l’original.]

[166]   L’avocat de l’intimée a qualifié cette déclaration d’admission [traduction] « accablante[85] » selon laquelle le montant des frais que l’appelante payait à SII aux termes de l’ESMMV était sans rapport avec la valeur des services qu’elle recevait. Les frais n’étaient payés au profit de personne; ils ne faisaient qu’être versés à SII et renvoyés à l’appelante.

[167]   L’avocat de l’appelante a réfuté l’interprétation que l’intimée a faite de la déclaration de M. Csumrik en faisant valoir que l’inférence logique qu’il fallait en tirer était que M. Csumrik voulait que SII paraisse bien parce que, si [traduction] « […] SII paraît bien, c’est grâce à la direction et à l’exploitation de M. Csumrik et cela améliore sa situation à l’égard d’occasions futures[86] ».

[168]   Tout d’abord, en réponse à l’argument de l’appelante concernant le paiement de prime prévu par l’ESMMV de 10 %, compte tenu de la totalité des autres éléments de preuve, il n’y a guère d’éléments dans les lettres[87] citées plus tôt qui dénotent que l’on négociait de manière sérieuse un prix pour les services. M. Csumrik n’a pas pu se souvenir exactement du besoin de ces fonds additionnels et a admis qu’il n’y avait aucune justification particulière qui sous‑tendait le montant de 10 %[88]. Mais, par-dessus tout, la manière dont l’avocat a caractérisé la déclaration de M. Csumrik n’avance pas la position générale de l’appelante : poussée à sa conclusion logique, elle renforce le fait que M. Csumrik devait être personnellement rémunéré pour ses services. Je souscris à la prétention de l’avocat de l’intimée, à savoir que ses efforts n’avaient rien à voir avec l’exécution des obligations de SII qui justifierait le paiement de frais aux termes de l’ESMMV.

[169]   Tout cela nous ramène au double paradoxe qu’a relevé l’avocat de l’intimée. M. Csumrik n’avait aucune relation, contractuelle ou d’autre nature, avec SII qui lui aurait donné droit à une part quelconque des frais prévus par l’ESMMV ou du paiement de prime prévu par l’ESMMV. Ces frais n’ont pas été payés dans l’intention de profiter à M. Csumrik personnellement; d’où le besoin de conclure avec M. Martini une entente de rémunération distincte.

[170]   Le principe de l’absence de lien de dépendance présume que les entreprises indépendantes [traduction] « […] compareront l’opération aux autres options dont elles disposent de manière réaliste, et elles ne la concluront que si elles ne discernent pas d’autre solution qui soit nettement plus attrayante ».

[171]   L’avocat de l’appelante a exhorté la Cour à faire preuve de bon sens au moment d’apprécier la preuve. M. Csumrik et M. Martini étaient des hommes chevronnés et qui avaient du succès dans leurs entreprises commerciales respectives. Si M. Csumrik, agissant pour le compte de SII, fournissait réellement les services de mise en marché cruciaux qu’on lui attribuait selon l’argument de l’appelante, pourquoi l’aurait-il fait pour rien de plus que la rétribution annuelle d’un administrateur-gérant? Le bon sens dicte qu’il ne l’aurait pas fait. Si l’on souscrit donc à la prétention de l’appelante, à savoir que M. Csumrik devait être payé personnellement pour ses efforts conformément à l’entente parallèle conclue avec M. Martini/l’appelante, il est insensé d’imaginer que M. Martini aurait également obligé l’appelante à payer à SII les mêmes services aux termes de l’ESMMV.

[172]   L’argument de l’avocat de l’intimée me convainc que la seule inférence que l’on peut tirer est que l’appelante a payé les frais à SII pour obtenir un avantage fiscal. La seule explication raisonnable du fait que l’appelante a convenu de payer SII aux termes de l’ESMMV était pour faire en sorte que les frais soient déclarés sous forme de bénéfices et ensuite renvoyés à l’appelante sous forme de dividendes versés sur le surplus exonéré. Pendant ce temps là, les frais de mise en marché pourraient être déduits du revenu aux fins de l’impôt canadien. Une partie sans lien de dépendance n’aurait pu profiter d’aucun de ces avantages attrayants.

[173]   Dans toutes les circonstances, l’appelante n’a pas réussi à démolir les hypothèses du ministre selon lesquelles :

          [traduction]

9uu)

les modalités établies ou imposées entre l’appelante, SWI et SII à l’égard de la structure de mise en marché de la Barbade étaient différentes de celles qui auraient été établies ou imposées si ces parties avaient agi sans lien de dépendance;

9vv)

une partie sans lien de dépendance n’aurait pas payé à SII les frais de mise en marché que l’appelante a payés dans les années d’imposition 2000 et 2001 pour les services que SII a fournis;

 

[174]   En conséquence, je conclus que les modalités de l’ESMMV différaient de celles dont l’appelante et SII auraient convenu si elles n’avaient pas eu de lien de dépendance et qu’une entité sans lien de dépendance n’aurait pas payé les frais de mise en marché que l’appelante a versés dans les années d’imposition 2000 et 2001 pour les services que SII a fournis.

B. Question n2 : Si, aux termes de l’ESMMV, l’appelante aurait payé à SII des frais supérieurs aux montants autorisés par le ministre s’il n’y avait pas eu entre elles de lien de dépendance

1)    Introduction

[175]   Après avoir répondu par l’affirmative à la question no 1, il reste à décider comment redresser le montant des frais que l’appelante a payés à SII aux termes de l’ESMMV de façon à ce qu’ils soient équivalents au prix qui aurait été payé si l’appelante et SII n’avaient eu pas de lien de dépendance.

[176]   Les deux parties se sont fondées sur les principes établis dans l’arrêt Canada c. GlaxoSmithKline, 2012 CSC 52 (C.S.C.), l’arrêt La Reine c. Capital Générale Électrique du Canada Inc., 2010 CAF 344 (CAF), et la décision Alberta Printed Circuits Ltd. c. La Reine, 2011 CCI 232 (C.C.I.) et elles ont attiré l’attention de la Cour sur les Principes de l’OCDE de 1995 ainsi que sur la circulaire d’information IC 87-2R de l’Agence du revenu du Canada.

[177]   Étant donné que la loi ne dit pas comment procéder à l’analyse qu’envisage le paragraphe 247(2), les tribunaux canadiens souscrivent à l’utilisation des Principes de l’OCDE. Ces derniers n’ont pas force de loi, mais sont plutôt destinés à servir d’outils pour aider à déterminer ce qu’une femme ou un homme d’affaires raisonnable aurait payé si les parties à une opération n’avaient pas eu entre elles de lien de dépendance[89].

[178]   Dans l’arrêt GlaxoSmithKline, la Cour suprême du Canada a confirmé que l’analyse relative au prix de transfert est fortement axée sur les faits; au moment d’apprécier les éléments de preuve, le juge de première instance doit garder à l’esprit « les fonctions et les rôles respectifs [des parties à l’opération impliquant un prix de transfert][90] ». D’autres indications figurent dans l’arrêt Générale Électrique (C.A.F.), où le juge Noël expose quelle est la marche à suivre pour appliquer les alinéas 247(2)a) et c) :

[54] Le principe sous-jacent au paragraphe 69(2) et aux alinéas 247(2)a) et c) est simple. Il s’agit dans tous les cas de déterminer le prix qui aurait été payé dans les mêmes circonstances si les parties à l’opération n’avaient pas eu de lien de dépendance. Cet exercice nécessite la prise en considération de toutes les circonstances qui influent sur le prix, qu’elles découlent de la relation ou d’autres facteurs.

[55] Cette interprétation découle du sens courant des mots et de l’objectif législatif, qui est de prévenir l’évitement fiscal résultant de distorsions de prix susceptibles de survenir dans le cadre de relations comportant un lien de dépendance, en raison des intérêts communs que partagent les parties liées. L’élimination de ces distorsions à l’aide de points de référence objectifs suffit à satisfaire à l’objectif législatif. Pour le reste, tous les facteurs qu’estimerait pertinents une personne sans lien de dépendance se trouvant dans la même situation que l’intimée devraient être pris en considération.

2)    Les rapports d’expert

[179]   Dans une analyse concernant le prix de transfert, la première étape cruciale est de déterminer l’opération dont il est question. Vu la divergence considérable que l’on relève dans la démarche que les témoins experts des parties ont suivie à l’égard de cette question, il est utile d’examiner leurs rapports avant de poursuivre l’analyse des éléments de preuve.

[180]   Le rapport d’expert de l’appelante reposait sur l’hypothèse que SWI et SII agissaient comme un [traduction] « amalgame » sous la direction de M. Csumrik. Cette démarche était sans nul doute influencée par la façon dont la lettre de directives formulait les questions auxquelles il devait répondre :

                

[traduction]

 

A.    À votre avis, quels sont les données et les facteurs économiques qu’il faut prendre en considération au moment de décider ce qu’une personne sans lien de dépendance, se trouvant dans la situation de [l’appelante], aurait convenu de payer pour les services décrits ci‑après [dans les hypothèses de fait présentées à M. MacDonald], fournis à [l’appelante] par [SWI] et [SII]?

B.     Compte tenu des données relevées au point A, quel est, selon vous, un éventail raisonnable de prix qu’une personne sans lien de dépendance, se trouvant dans la situation de [l’appelante] aurait convenu de payer pour les services, décrits ci‑après [dans les hypothèses de fait présentées à M. MacDonald], fournis à [l’appelante] par [SWI] et [SII][91]? [Non souligné dans l’original.]

[181]   M. MacDonald a dit avoir considéré SII et SWI comme une seule et même entité, qualifiée parfois d’amalgame, et que M. Csumrik était d’une certaine façon englobé dans ses fonctions, compte tenu des hypothèses qui sous‑tendaient le rapport d’expert de l’appelante[92] et des entretiens qu’il avait eus avec M. Csumrik, M. Martini et M. Fabian. En contre‑interrogatoire, M. MacDonald a résumé sa démarche à l’égard des fonctions de chacun des participants dans le cadre de la structure barbadienne :

            [traduction]

 

Q

Pour les besoins de votre opinion, cependant, je vous dirais que, parmi les intervenants que j’ai mentionnés, M. Csumrik, M. Stark, les préposés de vente et ainsi de suite, il n’importe pas vraiment de savoir laquelle de ces parties exécutait les tâches qui généraient les ventes. Êtes-vous du même avis?

R

Je pense que oui. J’examinais la structure de mise en marché globale de l’amalgame, et je l’ai examiné aussi avec les résultats financiers de l’amalgame en 2000 et en 2001.

Q

Très bien. Donc, lorsque vous examinez les deux entités, SII et SWI sous forme d’amalgame, vous les considérez essentiellement comme un seul et même fournisseur de services à Marzen, à l’appelante. Êtes‑vous d’accord?

R

C’est exact.

Q

Donc, il importe peu de savoir laquelle de ces deux entités ou qui de leurs employés utilisent les téléphones, présentent des projets aux promoteurs, lisent les revues spécialisées ou étudient des permis de construction, ou quoi que ce soit d’autre qu’ils auraient pu faire?

R

C’est exact[93].

[182]   M. MacDonald a reconnu en contre‑interrogatoire que la méthode de l’amalgame était contraire au principe des opérations entre parties sans lien de dépendance, qui consiste à traiter les membres d’un GEM (groupe d’entreprises multinationales) comme des entités distinctes. Il a de plus reconnu que l’appelante, SWI et SII étaient des entités juridiques distinctes, que des contrats avaient été établis entre l’appelante et SII, entre SWI et SII, ainsi qu’entre l’appelante et SWI, et que ces contrats attribuaient des fonctions différentes aux parties[94]. Cependant, il a conclu qu’il était approprié de regrouper SII et SWI sous le régime de l’ESMMV :

          [traduction]

R.        Parce que, si on se demande ce que des parties sans lien de dépendance feraient dans une situation comme celle entre Marzen et SII et l’amalgame, je crois qu’il est important d’examiner l’amalgame en se fondant sur les biens incorporels que celui‑ci possède sur le plan de la mise en marché, en se fondant sur l’entente de détachement et en se fondant sur le fait que SWI n’a pas de marge brute sur la revente de son stock. Elle n’en tire aucun bénéfice. Cela m’a amené à croire que les deux agissent de concert à titre de fournisseurs de services de mise en marché et qu’ils devraient être rémunérés sur leurs fonctions de distribution auxiliaire – leurs fonctions de vente, devrais-je dire. Ce sont donc ces faits qui m’ont mené à ma conclusion[95].

[183]   Le témoin expert de l’intimée, M. Rogerson, n’a pas souscrit à la méthode de l’amalgame qui a été suivie dans le rapport d’expert de l’appelante. Bien que le rapport que M. Rogerson a établi ait été exclu de la preuve[96], le rapport de réfutation de l’intimée[97] a été admis, et M. Rogerson a fourni à la Cour une analyse prudente et exhaustive au sujet des faiblesses qu’il avait relevées dans le rapport d’expert de l’appelante.

[184]   Dans l’ensemble, le témoignage de M. Rogerson me convainc que le rapport d’expert de l’appelante était fondamentalement vicié en ce sens qu’il considérait à tort que l’opération en cause était exécutée entre l’appelante et l’amalgame SWI/SII; traiter SWI et SII comme une seule et même entité était contraire au paragraphe 1.6 des Principes de l’OCDE de 1995, qui énonce : « […] le principe de pleine concurrence adopte la démarche consistant à traiter les membres d’un groupe multinational comme des entités distinctes et non comme des sous-ensembles indissociables d’une seule entreprise unifiée. »

[185]   La méthode de l’amalgame est incompatible aussi avec le témoignage des propres témoins de l’appelante, qui révèlent qu’eux-mêmes reconnaissaient et comprenaient les fonctions et la situation particulières des entités établies dans le cadre de la structure barbadienne ou prenant part à cette dernière. Pour ce qui est tout d’abord de M. Martini, quand il lui a été demandé en contre‑interrogatoire qui avait profité des frais payés aux termes de l’ESMMV et du paiement de prime prévu par l’ESMMV, il a fait une franche distinction entre M. Csumrik, SWI et SII en affirmant que seule SII était la bénéficiaire prévue de ces frais. Dans le même ordre d’idées, quand M. Fabian a été contre‑interrogé sur les modalités des clauses de relation que comportaient les quatre ententes, il a montré qu’il avait une idée claire des pouvoirs respectifs des parties :

          [traduction]

 

Q

La réalité c’est que toutes ces entreprises [l’appelante, SWI et SII] sont contrôlées par M. Martini et sa famille, est-ce exact?

R

Eh bien, non, c’est –

Q

C’est ce que l’on voit dans le tableau. [Annexe A de l’exposé conjoint des faits]. Ils peuvent s’organiser pour que ces – ils peuvent s’organiser pour que SWI et SII acceptent de faire tout ce qu’ils veulent qu’elles fassent.

R

Non, en fait, SWI est une entité commerciale distincte qui a sa propre identité, de sorte que [M. Stark] peut déclarer et faire ce qu’il veut. Donc, s’il change le prix de sa fenêtre et dit : « M. Rick Stark a déclaré qu’il veut vendre sa fenêtre à 10 % de moins », et là – il peut le faire. Il est – sa propre entreprise. Même si elle appartient à la famille Martini, c’est quand même une entreprise indépendante qui peut prendre des décisions par elle‑même.

Q

Très bien. Je vais seulement vous poser une question au sujet du paragraphe 4.1 de l’entente de détachement de personnel. Je vous laisse donc une minute pour la lire.

R

Très bien.

[…]

 

R

Donc, M. Fabian, ce paragraphe dit :

 

[traduction]

« Aucune disposition de la présente entente ne peut être interprétée comme créant une société de personnes ou une coentreprise, soit de façon générale soit à une fin précise quelconque, entre SWI et SII ou un ancien employé, ou bien une relation employeur‑employé entre SII et les employés de SWI. »

 

Ce paragraphe dit donc qu’il n’existe aucune société de personnes ou coentreprise entre SII et SWI, ni aucune relation d’emploi entre les travailleurs de SWI et SII. Êtes-vous d’accord avec moi?

R

Oui.

Q

Pourquoi était-il nécessaire d’inclure cette dénégation dans cette entente, le savez-vous?

R

Parce qu’ils ne sont pas associés. Starline Windows Inc. est une entreprise distincte. SII est une entreprise distincte. Il n’y a pas de société de personnes. Starline Windows Inc. n’est pas copropriétaire de SII et SII n’est pas copropriétaire ou coactionnaire de SWI. Telle est la situation[98].

[186]   En contre‑interrogatoire, des questions ont été posées à M. MacDonald au sujet du paragraphe 1.36 des Principes de l’OCDE de 1995, qui porte sur la nécessité de respecter les relations juridiques que le contribuable a mises en place :

          [traduction]

 

Q

Je vous demanderais simplement de revenir aux principes de l’OCDE et, plus particulièrement, au paragraphe 1.36… [qui] … dit, en partie :

 

« L’examen par l’administration fiscale d’une transaction entre entreprises associées doit se fonder sur la transaction effectivement intervenue entre les parties et les modalités de cette transaction, selon les méthodes utilisées par le contribuable dans la mesure où elles sont conformes à celles qui sont exposées aux chapitres II et III. Sauf dans des cas exceptionnels, l’administration fiscale ne devra pas faire abstraction des transactions effectives ni leur substituer d’autres transactions. »

 

Maintenant, seriez-vous d’accord pour dire que ce principe dit à une administration fiscale : vous devez respecter les relations juridiques que le contribuable a mises en place

R.

C’est ce que je comprends, oui.

Q

Et seriez-vous d’accord pour dire qu’un contribuable qui fixe ses propres prix de transfert devrait faire la même chose? L’inverse devrait s’appliquer.

R.

Le paragraphe 1.36 fait effectivement référence à des cas exceptionnels, et ce n’est donc pas une règle qui s’applique dans tous les cas, mais je crois – là encore, si l’on revient aux pratiques acceptées en matière de prix de transfert, cela – nous pouvons examiner un lot de transactions ainsi que les droits économiques et les circonstances fonctionnelles qui les entourent et, vous savez, il est possible qu’une partie fournisse des choses selon des conditions différentes. Nous avons donc tendance à examiner la totalité de l’entente lorsqu’elle est sensée, lorsqu’il existe un certain nombre d’éléments en cause. Cela n’est pas rare.

Q

Donc, ce qui est précisé dans ce principe, cela ne change pas votre opinion quant à l’exactitude de considérer SII et SWI, pour les besoins de votre étude du prix de transfert, comme une seule et même entité?

R

Eh bien, ce principe pourrait s’appliquer. Je ne le rejetterai pas. Je dirais qu’il s’agirait là d’une façon parmi d’autres d’examiner les opérations en cause. J’ai suivi une approche différente qui, à mon avis, est elle aussi raisonnable[99].

[187]   Lors du réinterrogatoire, l’avocat de l’appelante a renvoyé M. MacDonald aux paragraphes 1.42 et 1.43 des Principes de l’OCDE de 1995 et lui a demandé de répondre à des questions qui lui avaient été soumises en contre‑interrogatoire au sujet de l’obligation de procéder à une analyse entité par entité :

          [traduction]

 

Q

Et, je crois, la teneur des questions avait pour but de vous montrer que les principes de l’OCDE veulent que vous procédiez entité par entité.

R

Oui.

Q

Et vous avez dit dans ces circonstances que vous ne croyiez pas que c’était approprié. Je me suis demandé si vous pouviez consulter la section 1.42.

 

Jetez un coup d’œil à la section 1.42, et peut‑être à la section 1.43.

[…]

 

R

Oui, j’ai employé le terme « regroupement » dans ma réponse et l’OCDE a utilisé le terme « arrangement global » à la section 1.43, de sorte que l’effet est le même.

Q

Donc, seriez‑vous d’accord avec moi pour dire que ces principes reconnaissent expressément qu’il existe des circonstances dans lesquelles il faudrait combiner des entités et les traiter comme un amalgame?

R

Je suis d’accord[100].

[188]   L’avocat de l’appelante s’est fondé sur cet échange pour étayer son argument selon lequel les Principes n’exigent pas systématiquement qu’une approche entité par entité soit suivie. Cependant, un examen des paragraphes 1.42 et 1.43, les passages mentionnés plus tôt, révèle qu’il n’y est pas question d’entités. Il y est plutôt question des circonstances dans lesquelles il est approprié de regrouper des opérations entre entreprises associées, plutôt que de recourir à l’approche « opération par opération » que l’on utilise suivant le principe des entités sans lien de dépendance. Dans le même ordre d’idées, l’« arrangement global » dont M. MacDonald a parlé au sujet du paragraphe 1.43 a trait à la combinaison d’opérations. Rien dans les paragraphes 1.42 ou 1.43 ne donne à penser qu’il est approprié de regrouper des entités dans une analyse portant sur le lien de dépendance.

[189]   Dans son argumentation en réplique, l’avocat de l’appelante a également laissé entendre que la mention qui est faite au paragraphe 1.6 au fait de traiter des entreprises associées comme des entités distinctes doit être lue dans le contexte de l’approche de la « répartition globale selon une formule préétablie » qui est exposée sous la rubrique « Autres méthodes », au chapitre 3 des Principes de l’OCDE. Cette approche est une solution de rechange au principe de pleine concurrence. Le paragraphe 3.61 des Principes précise que les tenants de la solution de la répartition globale selon une formule préétablie la préfèrent parce que, notamment :

[…] un groupe multinational doit être envisagé en tant que tel ou sur une base consolidée pour bien refléter la réalité des relations commerciales entre les entreprises associées. Ils reprochent à la méthode reposant sur des comptabilités distinctes de n’être pas adaptée aux groupes très intégrés dans la mesure où il est difficile de déterminer la contribution de chacune des entreprises associées au bénéfice global du groupe multinational.

[190]   Selon l’avocat de l’appelante, le paragraphe 1.16 n’exige pas que, au moment de procéder à une analyse fonctionnelle, SWI et SII soient traitées comme des entités distinctes. L’emploi des termes « entreprises » et « entités » dans tous les Principes de l’OCDE de 1995 est plutôt délibéré et traduit la perspective économique d’entreprises associées dont les fonctions économiques sont liées, plutôt que la perspective juridique que préconise l’intimée. Il était donc admissible que le rapport d’expert de l’appelante traite SWI et SII comme un amalgame.

[191]   Cet argument ne me convainc pas non plus. Le chapitre portant sur l’approche de la « répartition globale selon une formule préétablie » montre que les pays membres de l’OCDE en ont rejeté l’utilisation dans le contexte des prix de transfert[101], en partie, parce qu’elle fait abstraction de l’approche des entités distinctes[102]. Tout en reconnaissant qu’il n’est pas toujours facile de séparer les fonctions de chaque entité, les Principes souscrivent néanmoins à son application[103].

[192]   M. Rogerson a relevé une autre lacune dans le rapport d’expert de l’appelante : bien qu’il soit fondé sur le modèle de l’amalgame, le rapport d’expert de l’appelante ne le suit pas de manière uniforme; de temps en temps, on décrit aussi que SWI et SII exécutent des fonctions distinctes : par exemple, SII agissant par l’entremise de M. Csumrik est décrite comme l’[traduction] « artisan » de la stratégie de mise en marché et SWI, sous sa direction, est qualifiée d’[traduction] « exécutrice[104] ».

[193]   Enfin, l’avocat de l’intimée a fait valoir qu’un grand nombre des hypothèses qui sous‑tendent les conclusions du rapport d’expert de l’appelante – en particulier, celles qui se rapportent au rôle de M. Csumrik[105] – étaient factuellement inexactes. Je souscris à cette prétention; comme il est énoncé au paragraphe 135 qui précède, certaines des contradictions importantes entre les hypothèses de fait de M. MacDonald et mes conclusions ont été relevées lors de l’examen des éléments de preuve à la question no 1.

[194]   En conclusion, après avoir entendu le témoignage de M. MacDonald et de M. Rogerson et examiné avec soin le rapport d’expert de l’appelante et le rapport de réfutation de l’intimée, je suis d’avis qu’il ne faudrait pas se fier au rapport d’expert de l’appelante, car il repose sur des questions qui ne déterminent pas comme il faut l’opération en cause, sur des présomptions qui, selon ce qui a été conclu, ne sont pas des faits, ainsi que sur une approche qui va à l’encontre du principe de pleine concurrence au sens où l’envisagent les Principes de l’OCDE de 1995.

3)    L’analyse

[195]   Dans une analyse en matière de prix de transfert, la première étape cruciale consiste à déterminer l’opération qui est en cause; en l’espèce, il s’agit de l’ESMMV (modifiée en vue d’inclure le paiement de prime prévu de 10 %) conclue entre l’appelante et SII. Le principe de pleine concurrence oblige à évaluer entité par entité les rôles et les fonctions des entités faisant partie de la structure barbadienne.

a)    Les hypothèses du ministre

[196]   Il est utile de commencer par réitérer les hypothèses du ministre au sujet du prix de pleine concurrence :

[traduction

9ii)

la mise en marché des produits de l’appelante aux États-Unis a été exécutée exclusivement par les employés de SWI;

9kk)

SII n’a fourni aucun service à valeur ajoutée utile à la Barbade en vue de soutenir l’appelante ou SWI;

9pp)

les bénéfices attribués à la Barbade (les frais de mise en marché payés par l’appelante, moins les frais payés à SWI) n’ont pas été payés par SII pour supporter des coûts ou des dépenses que SII avait engagés ou pour rémunérer son administrateur-gérant, David Csumrik;

9ww)

dans les années d’imposition 2000 et 2001, une partie sans lien de dépendance n’aurait pas payé à SII des frais de mise en marché supérieurs à ceux que SII a payés à SWI;

(Collectivement : les « hypothèses de prix du ministre ».)

[197]   Comme il a été mentionné plus tôt, à la question no 1, l’appelante a soutenu que le vérificateur principal avait rejeté à tort la position de l’appelante, selon laquelle :

[traduction

1.         l’appelante a reçu des services de valeur appréciable aux termes de l’ESMMV;

2.         M. Csumrik a dirigé de manière continue l’équipe de vente de SWI;

3.         sans la direction et la participation de M. Csumrik, l’appelante n’aurait pas pris pied avec succès dans le marché des immeubles de grande hauteur des États-Unis[106]. (Collectivement : les « prétentions de l’appelante »)

[198]   L’appelante n’a pas prouvé entièrement ses prétentions. Si l’on commence par le point (3) de ces dernières, il est possible que, sans l’idée de M. Csumrik de changer son orientation‑marché, l’appelante n’aurait pas pris pied sur le marché des États‑Unis, mais l’appelante ne m’a pas convaincue que la conceptualisation et la mise au point de la stratégie de mise en marché de M. Csumrik peuvent être attribuées à SII. Quant au point (1), si par [traduction] « valeur appréciable » l’appelante veut dire que la totalité du montant des frais prévus par l’ESMMV était justifiée, la preuve n’étaye pas une telle prétention.

[199]   Cependant, l’appelante est parvenue, jusqu’à un certain point, à réfuter en partie les présomptions susmentionnées. Comme il y a un certain chevauchement entre certains aspects des prétentions de l’appelante et des hypothèses du ministre, je les examinerai ensemble. Pour ce qui est du point (2) des prétentions de l’appelante, à savoir que M. Csumrik assurait la direction continue de l’équipe de vente de SWI, l’intimée a concédé que, contrairement à l’hypothèse formulée à l’alinéa 9ii), M. Csumrik, agissant pour le compte de SII, a assuré en partie la direction continue de l’équipe de vente de SWI en examinant les rapports de vente et en fournissant quelques conseils et suggestions stratégiques à SWI pour le compte de SII. Donc, contrairement à l’alinéa 9kk), il a fourni, pour le compte de SII, quelques services à valeur ajoutée à la Barbade en vue de soutenir l’appelante ou SWI.

[200]   Cependant, l’exécution de la plupart de ces services chevauchait les fonctions qu’il exécutait en sa qualité d’administrateur-gérant de SII par l’intermédiaire de Longview. Il s’ensuit donc que l’appelante a réussi à réfuter l’alinéa 9pp) – mais uniquement dans la mesure où les bénéfices attribués à la Barbade (les frais de mise en marché payés par l’appelante, moins les frais payés à SWI) ont été payés par SII pour rémunérer M. Csumrik dans son rôle d’administrateur-gérant, avec le soutien administratif de Longview.

[201]   Reste donc à examiner l’hypothèse, à l’alinéa 9ww), selon laquelle une partie sans lien de dépendance n’aurait pas payé à SII des frais de mise en marché qui seraient supérieurs à ceux que SII a payés à SWI. Compte tenu de la conclusion qui précède, cette hypothèse a été réfutée, mais, là encore, uniquement dans la mesure où les frais que l’appelante a payés à SII ont servi à payer les services fournis aux termes de l’entente que SII a conclue avec M. Csumrik/Longview.

b)    La détermination du prix de pleine concurrence

[202]   En établissant la nouvelle cotisation relative aux années d’imposition 2000 et 2001 de l’appelante et en rajustant le prix prévu par l’ESMMV, le ministre n’a pas tenu compte de la valeur des services que SII avait fournis à l’appelante aux termes de l’entente conclue avec M. Csumrik par l’intermédiaire de Longview.

[203]   Selon la position de l’intimée à l’instruction, l’avocat de cette dernière a fait valoir qu’il faudrait considérer l’opération conclue entre l’appelante et SII de la manière suivante :

         


[traduction]

 

         SII a signé une entente en vue de fournir des services à l’appelante [aux termes de l’ESMMV];

 

         SII a ensuite obtenu ces services de SWI et de M. Csumrik/Longview aux termes de contrats de sous‑traitance distincts (les ententes de détachement de personnel et d’administration conclues avec SWI, et la rétention des services de Longview);

         SII s’est servie des frais payés par l’appelante pour payer à SWI ses frais de détachement de personnel, ainsi que pour payer leurs frais à M. Csumrik/Longview;

         les frais de mise en marché que [l’appelante] a payés à SII comportaient trois éléments :

1. un prix lié à la nouvelle fourniture de services de SWI;

2. un prix lié à la nouvelle fourniture de services de M. Csumrik;

3. une majoration pour SII concernant la coordination de ces services[107].

 

[204]   Comme le ministre a présumé que les frais que SII a payés à SWI aux termes de l’EDP et de l’ESAS représentaient des montants de pleine concurrence, l’intimée a soutenu que la question se résumait à savoir :

[traduction]

 

[…] si l’élément des frais liés à la nouvelle fourniture de services de M. Csumrik, de même que tout montant servant de majoration à laquelle SII a droit, constitue un montant de pleine concurrence[108].

 

[205]   Comme il a été conclu que SII n’exécutait aucune fonction pour le compte de l’appelante aux termes de l’ESMMV, à part celles fournies pour son compte par SWI et M. Csumrik/Longview, il s’ensuit qu’il n’y avait aucune justification au paiement de l’élément « majoration » à SII.

[206]   L’analyse de l’intimée repose sur les Principes de l’OCDE de 1995, qui comportent des commentaires et une méthode pour déterminer si des prix de transfert correspondent à ce que des parties sans lien de dépendance auraient payés. Le paragraphe 1.6 des Principes résume ainsi l’application du principe de pleine concurrence :

En se référant, pour procéder à un ajustement des bénéfices, aux conditions qui prévaudraient entre entreprises indépendantes pour des transactions comparables et dans des circonstances comparables (c’est-à-dire pour des « transactions comparables sur le marché libre »), le principe de pleine concurrence adopte la démarche consistant à traiter les membres d’un groupe multinational comme des entités distinctes et non comme des sous-ensembles indissociables d’une seule entreprise unifiée. En procédant de cette manière, on met l’accent sur la nature des transactions entre les membres du groupe multinational et sur le fait de savoir si les conditions de ces transactions contrôlées diffèrent de celles qui seraient obtenues pour des transactions comparables sur le marché libre. Cette analyse des transactions contrôlées et des transactions sur le marché libre, appelée « analyse de comparabilité », est au cœur de l’application du principe de pleine concurrence.

[207]   Dans l’arrêt GlaxoSmithKline Inc., la Cour suprême du Canada a reconnu que le processus consistant à déterminer un prix de pleine concurrence est une tâche essentiellement comparative. La difficulté, bien sûr, consiste à trouver un substitut qui reproduit presque exactement les circonstances entourant l’opération en cause.

[208]   Bien que la version actuellement en vigueur des Principes de l’OCDE, soit les Principes de l’OCDE de 2010, n’impose pas d’ordre hiérarchique aux diverses méthodes de détermination des prix de transfert, dans la version qui s’applique aux années d’imposition en question, les Principes de l’OCDE de 1995, ces méthodes étaient catégorisées en deux groupes et classées en ordre décroissant de fiabilité, de la manière suivante :

1. Méthodes traditionnelles fondées sur les transactions :

         méthode du prix comparable sur le marché libre « Méthode du PCML ») – intimée [108] et [160] – valeur de M. Csumrik et de Longview

         méthode du prix de revente

         méthode du prix de revient majoré

2. Méthodes transactionnelles de bénéfices :

         méthode du partage des bénéfices

         méthode transactionnelle de la marge nette (« MTMN »)

[209]   Les experts des parties sont arrivés à des conclusions très différentes pour ce qui était de savoir laquelle de ces méthodes convenait le mieux pour déterminer un prix de pleine concurrence aux termes de l’ESMMV. Comme j’ai déjà refusé de me fonder sur le rapport d’expert de l’appelante pour les raisons mentionnées plus tôt, il n’est pas nécessaire d’analyser en détail l’argument de l’appelante concernant la bonne méthode à appliquer en l’espèce. Je signale toutefois pour mémoire que le témoin expert de l’appelante a conclu que la méthode transactionnelle de la marge nette (la « MTMN ») était celle qui mènerait au résultat le plus fiable. La MTMN évalue le caractère de pleine concurrence des prix de transfert dans une opération contrôlée en vérifiant les bénéfices nets de l’un des participants à l’opération par rapport à des entreprises tierces comparables.

[210]   Se fondant sur le rapport de réfutation de l’intimée établi par M. Rogerson, l’avocat de l’intimée a fait valoir qu’il faudrait appliquer dans les présents appels la méthode du PCML. Cette méthode compare le prix payé pour un service dans une opération conclue dans des conditions de non-concurrence au prix d’un service comparable dans une opération conclue dans des conditions de pleine concurrence. Selon cette méthode, un élément de comparaison soit interne soit externe peut être utilisé. Un élément de comparaison interne compare l’opération en question à une autre opération conclue entre l’une des parties à l’opération contrôlée et un tiers.

[211]   L’avocat de l’intimée a soutenu que l’opération conclue dans des conditions de pleine concurrence entre SII et M. Csumrik/Longview est une opération non contrôlée comparable qui pourrait servir de manière fiable d’élément de comparaison interne selon la méthode du PCML. M. Csumrik n’avait pas de lien de dépendance avec SII; il s’attendait à être rémunéré pour son travail, a négocié un prix et a fourni ses services en conséquence. Ce prix, 32 500 $US dans chacune des années d’imposition 2000 et 2001, est un prix comparable sur le marché libre (« PCML ») pour l’opération contrôlée entre l’appelante et SII.

[212]   Bien qu’il ait reconnu en contre‑interrogatoire que la méthode du PCML était la méthode de choix selon les Principes de l’OCDE de 1995, M. MacDonald en a rejeté l’utilisation dans le rapport d’expert de l’appelante, car il a conclu que l’on ne pouvait pas trouver un élément de comparaison fiable. Il a également exprimé l’avis que l’entente conclue entre SII et M. Csumrik/Longview n’était pas une méthode du PCML fiable parce qu’elle ne tenait pas compte de la rémunération que touchait M. Csumrik aux termes de l’entente distincte conclue avec M. Martini/l’appelante et dont, d’après M. MacDonald, on ne pouvait pas déterminer la valeur[109].

[213]   Cela aide peu la cause de l’appelante. Tout d’abord, il convient de signaler que la seule raison pour laquelle on n’a pas pu attribuer une valeur à l’entente parallèle conclue entre M. Csumrik et M. Martini/l’appelante est que, après quelque 15 ans, il n’avait toujours pas tiré avantage des occasions que cette entente était censée produire. Mais, en tout état de cause, la valeur de l’entente de rémunération distincte n’est pas pertinente à l’égard de l’application du PCML interne, comme l’a fait valoir l’intimée, parce que l’entente était conclue entre M. Csumrik personnellement et M. Martini/l’appelante. Elle n’avait rien à voir avec la fourniture des services d’administrateur-gérant de M. Csumrik à SII par l’intermédiaire de Longview. Cette situation est imputable à la confusion de rôles qui découle de la méthode de l’amalgame et des hypothèses non factuelles qui sous‑tendent le rapport d’expert de l’appelante.

[214]   En revanche, le rapport de réfutation de l’intimée de M. Rogerson, tout comme son témoignage, est exhaustif et clair dans son analyse du rapport d’expert de l’appelante. En plus des autres faiblesses que M. Rogerson a relevées dans le rapport d’expert de l’appelante, je souscris également à l’analyse qu’il a faite des erreurs et des incohérences relevées dans l’application de la MTMN dans le rapport d’expert de l’appelante, de même qu’à son opinion selon laquelle ces erreurs et ces incohérences faisaient que cette méthode était peu fiable. Comme j’ai déjà décidé de ne pas me fier au rapport d’expert de l’appelante, il n’est pas nécessaire de tout exposer en détail, mais je fais miens ici les arguments concernant la méthode suivie dans le rapport d’expert de l’appelante aux alinéas 157dd) à kk) de l’argumentation écrite de l’intimée.

[215]   L’argument de l’intimée selon lequel l’entente conclue entre SII et M. Csumrik/Longview sert de PCML interne fiable me convainc. Elle concorde avec les principes de l’OCDE de 1995, en ce sens qu’elle traite SWI et SII comme des entités distinctes et qu’elle respecte les relations juridiques créées dans le cadre de la structure barbadienne. De plus, cela reconnaît SII pour ce qu’elle était : [traduction] « une entité intermédiaire ou de facilitation qui met les services d’autres entités à la disposition de l’appelante[110] ». Je suis également persuadée qu’un homme ou une femme d’affaires raisonnable n’aurait pas payé à SII plus que le prix que M. Csumrik attribuait à ses propres services, par l’intermédiaire de Longview. Il est convenu que la valeur des services de M. Csumrik/Longview a été de 32 500 $US dans chacune des années 2000 et 2001.

[216]   Les appels relatifs aux années d’imposition 2000 et 2001 sont donc accueillis en partie, et les nouvelles cotisations sont déférées au ministre pour nouvel examen et nouvelles cotisations, étant entendu qu’une partie sans lien de dépendance aurait payé à SII un montant supérieur aux frais que SII a payés à SWI, mais uniquement à hauteur de 32 500 $US dans chacune des années 2000 et 2001.

C. La question no 3 – Les pénalités

[217]   Le ministre a imposé les pénalités prévues au paragraphe 247(3) de la Loi à l’égard de l’année d’imposition 2001 seulement. Les passages applicables de cette disposition sont les suivants :

247(3) Tout contribuable (sauf celui dont la totalité du revenu imposable pour l’année est exonérée de l’impôt prévu à la partie I) est passible, pour une année d’imposition, d’une pénalité égale à 10 % du montant déterminé à son égard pour l’année selon l’alinéa a), si l’excédent visé à l’alinéa a) est supérieur au montant visé à l’alinéa b) :

a) l’excédent éventuel :

(i)   du total de montants suivants :

(A) le redressement de capital du contribuable pour l’année,

(B) le redressement de revenu du contribuable pour l’année,

sur le total des montants suivants :

(ii) le total des montants représentant chacun la partie du redressement de capital ou du redressement de revenu du contribuable pour l’année qu’il est raisonnable de considérer comme se rapportant à une opération donnée si :

(A) l’opération est un arrangement admissible de participation au coût auquel prend part le contribuable ou une société de personnes dont il est un associé,

(B) dans les autres cas, le contribuable ou une société de personnes dont il est un associé a fait des efforts sérieux pour déterminer les prix de transfert de pleine concurrence ou les attributions de pleine concurrence relativement à l’opération et pour les utiliser pour l’application de la présente loi,

(iii) le total des montants représentant chacun la partie du redressement compensatoire de capital ou du redressement compensatoire de revenu du contribuable pour l’année qu’il est raisonnable de considérer comme se rapportant à une opération donnée si :

(A) l’opération est un arrangement admissible de participation au coût auquel prend part le contribuable ou une société de personnes dont il est un associé,

(B) dans les autres cas, le contribuable ou une société de personnes dont il est un associé a fait des efforts sérieux pour déterminer les prix de transfert de pleine concurrence ou les attributions de pleine concurrence relativement à l’opération et pour les utiliser pour l’application de la présente loi;

b) le moins élevé des montants suivants :

(i) 10 % du montant qui représenterait le revenu brut du contribuable pour l’année s’il n’était pas tenu compte du paragraphe (2), des paragraphes 69(1) et (1.2) ni de l’article 245,

(ii) 5 000 000 $.

[218]   Aux termes du paragraphe 247(3), la pénalité est égale à 10 % de la somme par laquelle le redressement du prix de transfert excède le moins élevé des montants suivants : a) le revenu brut du contribuable pour l’année et b) 5 millions de dollars. C’est donc dire qu’aucune pénalité ne sera imposée si ce seuil pécuniaire n’a pas été franchi.

[219]   En l’espèce, pour imposer une pénalité dans l’année d’imposition 2001, le ministre s’est fondé sur les calculs suivants :

 

 

 

            [traduction]

Tableau 1

Montant assujetti à la pénalité

Prix de transfert – Frais de mise en marché payés à des non‑résidents ayant un lien de dépendance

5 025 190 $

 

Tableau 2

Paragraphe 247(2)

Paragraphe 247(3)

Montant total des ventes

Rajustement en pourcentage des ventes

 

Redressement du prix de transfert

Moindre de 10 % des revenus et 5 000 000 $

Différence

Prise en compte de la pénalité

 

 

Fin de l’année d’imposition

 

A

B

C=A-B

D

D multiplié par 10 %

 

 

31/12/00

2 110 502 $

4 465 019 $

Zéro

Zéro

Zéro

44 650 187 $

4,7 %

31/12/01

5 025 190 $

5 000 000 $

25 190 $

5 025 190 $

502 519 $

54 440 728 $

9,2 %

 

 

 

 

Pénalité totale

502 519 $

 

 

[220]   Dans la présente affaire, si, après le nouvel examen et la nouvelle cotisation concernant l’année d’imposition 2001, le redressement du prix de transfert n’est pas supérieur au seuil prescrit, aucune pénalité ne sera imposée en vertu du paragraphe 247(3).

[221]   Si ce n’est pas le cas, il est nécessaire d’examiner le second aspect de la disposition que comporte la pénalité; selon la division 247(3)a)(ii)(B) et la division 247(3)a)(iii)(B), aucune pénalité n’est imposée dans le cas du redressement d’un prix de transfert qui se rapporte à une opération dans laquelle le contribuable a fait des « efforts sérieux » pour déterminer les prix de transfert de pleine concurrence et les utiliser pour l’application de la Loi.

[222]   Cependant, ces dispositions doivent être lues conjointement avec les dispositions déterminatives que contient le paragraphe 247(4). Ce dernier exige que le contribuable établisse ou obtienne des registres ou des documents étayant le prix de transfert en question avant la date limite de production de sa déclaration, et il permet au ministre d’en faire la demande au contribuable. Aux termes du paragraphe 247(4), si le contribuable néglige de fournir ces renseignements dans les 90 jours suivant la demande du ministre, il est réputé ne pas avoir fait des « efforts sérieux » pour déterminer et utiliser les attributions de pleine concurrence relativement à une opération.

[223]   L’alinéa 247(4)a) exige de plus que les registres ou les documents contiennent « une description complète et exacte, quant à tous les éléments importants » des éléments énumérés aux sous‑alinéas (i) à (vi); comme la disposition est rédigée de façon conjonctive, le contribuable est tenu de satisfaire à toutes ces exigences s’il veut éviter l’effet de la disposition déterminative :

(i) les biens ou les services auxquels l’opération se rapporte,

(ii) les modalités de l’opération et leurs rapports éventuels avec celles de chacune des autres opérations conclues entre les participants à l’opération,

(iii) l’identité des participants à l’opération et les liens qui existent entre eux au moment de la conclusion de l’opération,

(iv) les fonctions exercées, les biens utilisés ou apportés et les risques assumés dans le cadre de l’opération par les participants,

(v) les données et méthodes prises en considération et les analyses effectuées en vue de déterminer les prix de transfert, l’attribution des bénéfices ou des pertes ou la participation aux coûts, selon le cas, relativement à l’opération,

(vi) les hypothèses, stratégies et principes éventuels ayant influé sur l’établissement des prix de transfert, l’attribution des bénéfices ou des pertes ou la participation aux coûts relativement à l’opération;

[224]   Il y a, aux termes de l’ESMMV, deux montants de prix de transfert qui doivent être examinés au regard de ces dispositions : les frais visés par la formule de 25 % et le paiement de prime prévu par l’ESMMV de 10 %.

[225]   La question qui se pose en l’espèce est celle de savoir si les registres ou les documents que l’appelante a fournis à la suite de la demande du ministre en vertu de l’alinéa 247(4)c) satisfont aux exigences des sous-alinéas 247(4)a)(v) et (vi), précités. Nul ne conteste que le ministre a envoyé une demande écrite de documentation ponctuelle le 16 avril 2003[111] et que l’appelante y a répondu par une lettre datée du 9 juillet 2003[112] (la « réponse de l’appelante du 9 juillet 2003 », dont il a été question plus tôt dans les présents motifs, au paragraphe 94) L’appelante n’a pas contesté le sommaire qu’a fait l’intimée[113] de la teneur de la réponse du 9 juillet de l’appelante :

[traduction]

 

a.   une lettre d’accompagnement de l’avocat;

b.   les quatre ententes inter‑sociétés créant la structure barbadienne (l’ESMMV, l’EDP, l’ESAS et l’ESLERE);

c.   les lettres échangées entre SWI et SII au sujet de la majoration des frais de SWI aux termes de l’ESAS;

d.   les lettres échangées entre SII et l’appelante au sujet de l’entente relative au paiement d’une prime unique prévu par l’ESMMV de 10 %;

e.   l’étude sur les activités que M. Fabian a établie.

[226]   L’intimée est d’avis qu’aucun des documents accompagnant la réponse du 9 juillet 2003 de l’appelante ne répond aux exigences des sous‑alinéas 247(4)a)(v) et (vi) :

(v) les données et méthodes prises en considération et les analyses effectuées en vue de déterminer les prix de transfert, l’attribution des bénéfices ou des pertes ou la participation aux coûts, selon le cas, relativement à l’opération,

(vi) les hypothèses, stratégies et principes éventuels ayant influé sur l’établissement des prix de transfert, l’attribution des bénéfices ou des pertes ou la participation aux coûts relativement à l’opération;

[227]   Selon l’argument de l’intimée, le seul document qui effleure à peine ces questions est l’[traduction] « étude de cas » datée du 5 avril 1999[114], établie à la demande de M. Martini par M. Fabian au sujet de la manière d’accroître les ventes de SWI aux États‑Unis. L’avocat de l’intimée a fait valoir que, bien que l’étude de cas tienne pour acquis qu’il y avait des frais de mise en marché de 25 % dans les scénarios proposés, elle ne traite pas de la manière dont ce chiffre a été fixé. L’avocat de l’intimée a de plus signalé que, d’après le témoignage de M. Martini et de M. Fabian, à l’époque où l’étude de cas a été établie, aucune décision n’avait encore été prise au sujet du montant des frais de mise en marché. M. Martini a déclaré qu’il avait fixé la formule de 25 % en se fondant sur sa propre expérience des affaires ainsi que sur ses observations concernant le rendement de SWI sur le marché des États‑Unis avant l’entrée en vigueur de la structure barbadienne. Il a reconnu avec franchise qu’il n’avait en main aucun document montrant de quelle façon il était arrivé à des frais de mise en marché de 25 %. Il a ajouté qu’il n’avait pas pu trouver d’éléments de comparaison, mais a reconnu ne pas avoir sollicité de conseils professionnels pour l’aider dans cette tâche.

[228]   L’avocat de l’intimée a invoqué un argument semblable au sujet de la détermination de la formule de 10 % utilisée dans le paiement de prime prévu par l’ESMMV. Bien qu’il ressorte des lettres échangées entre M. Csumrik et M. Martini[115] que ce montant a été demandé et que M. Martini y a souscrit à la condition d’atteindre certains niveaux de vente, cela n’explique pas comment le montant de 10 % a été déterminé. Selon le témoignage de M. Csumrik, ce chiffre ne s’appuyait sur aucune justification.

[229]   L’intimée soutient qu’au vu de ce qui précède, l’appelante n’a pas satisfait aux exigences des sous‑alinéas 247(4)a)(v) et (vi) et est réputée ne pas avoir fait des efforts sérieux pour déterminer et utiliser les prix de transfert de pleine concurrence; de ce fait, elle est passible d’une pénalité à l’égard de l’année d’imposition 2001 en application du paragraphe 247(3).

[230]   L’appelante n’a traité que brièvement de la question des pénalités lors de sa plaidoirie. Les observations de l’avocat de l’appelante, en réponse à la position de l’intimée, sont reproduites ci‑dessous dans leur intégralité :

[traduction]

Mon collègue a laissé entendre que l’appelante n’a pas répondu aux exigences que prévoit le paragraphe 247(3) à l’égard de la documentation ponctuelle. Et nous sommes tout à fait en désaccord. La lettre que nous avons envoyée le 9 juillet 2003, qui je crois – datée du 9 juillet 2003 et qui figure à l’onglet 54. Je n’insisterai pas davantage sur ce point. Nous l’avons passé en revue, le contenu qui s’y trouvait. Et à la fin je signale :

« j’espère que ce qui précède constitue bien les renseignements dont vous avez besoin. S’il vous faut plus de détails sur les documents ci-joints, n’hésitez pas à me téléphoner. »

Nous n’avons rien entendu, rien du tout, pendant 11 mois[116].

[231]   Cela n’est pas suffisamment convaincant pour l’emporter sur la force de l’argument de l’intimée qui, selon moi, est logiquement présenté, et bien étayé par la preuve. En conséquence, s’il est nécessaire de tirer une conclusion au sujet de l’application du paragraphe 247(4) après que le ministre a procédé à son nouvel examen et à sa nouvelle cotisation, je conclus que l’appelante a omis de fournir des registres ou des documents qui répondent aux exigences du sous‑alinéa 247(4)a) et, plus précisément, que la réponse du 9 juillet 2003 n’est pas suffisante pour satisfaire aux exigences des sous‑alinéas 247(4)a)(v) et (vi). En conséquence, l’appelante est réputée ne pas avoir fait d’efforts sérieux pour déterminer et utiliser les prix de transfert de pleine concurrence et elle est passible d’une pénalité à l’égard de l’année d’imposition 2001, en application du paragraphe 247(3).

VI. Les dépens

[232]   L’avocat de l’appelante a fait valoir que, si les appels étaient accueillis, il faudrait lui accorder les dépens entre parties. Le motif principal de la demande de l’appelante était que le défaut du ministère public fédéral de s’assurer de la présence du vérificateur principal à l’interrogatoire préalable lui a occasionné des frais que l’on aurait pu facilement éviter.

[233]   Comme il a été mentionné plus tôt dans les présents motifs, le vérificateur principal, qui a pris sa retraite avant la tenue des interrogatoires préalables, a refusé de comparaître en tant que représentant de l’intimée aux interrogatoires préalables parce que la politique gouvernementale prescrivait qu’on dût lui payer moins que le plein salaire qu’il touchait avant de prendre sa retraite. Il a donc fallu choisir un autre représentant (une représentante, en l’occurrence) et les interrogatoires préalables ont été ajournés pendant une période d’environ quatre mois afin de permettre à la vérificatrice représentante de se préparer.

[234]   Pour demander des dépens spéciaux, l’avocat de l’appelante n’a imputé aucune faute à l’avocat de l’intimée ni au vérificateur principal pour la décision de ce dernier de ne pas comparaître. Son argument était que le ministère public fédéral devrait en être tenu responsable parce que le montant supplémentaire qu’il lui aurait fallu payer pour s’assurer de la présence du vérificateur principal était minime par rapport aux frais supplémentaires que l’appelante a dû payer en conséquence.

[235]   Comme l’avocat de l’appelante l’a fait valoir, à cause des actes du ministère public, l’appelante a été tenue, pour rien, de consacrer du temps à la question des « admissions » faites par la vérificatrice représentante ainsi qu’à leur effet sur les nouvelles cotisations du ministre. L’avocat de l’appelante a de plus soutenu que le refus du ministère public de financer la comparution du vérificateur principal l’avait obligé à déposer une requête visant à empêcher le vérificateur principal de témoigner à l’audience. L’avocat a ajouté que lorsqu’il :

[traduction]

 

[…] est parvenu à obtenir que M. Stasiewski [le vérificateur principal] se présente à la barre des témoins, […] même lorsqu’on lui a présenté des éléments de preuve convaincants selon lesquels il y avait une certaine direction, certaines activités avaient été entreprises, il était resté intransigeant au sujet de sa position selon laquelle il n’y avait aucune preuve que SII et SWI avaient fait une contribution quelconque. Il s’est donc livré à une longue bataille en pure perte[117]. [Non souligné dans l’original.]

[236]   Le second point sur lequel est fondée la demande de dépens spéciaux de l’appelante est [traduction] « le défaut du ministère public de fournir un rapport d’expert qui correspondait ne serait‑ce qu’aux normes minimales d’admissibilité[118] ». L’avocat de l’appelant a signalé que, bien qu’il eut ajouté au dossier le premier jour des audiences, au sujet de la croyance de l’appelante, [traduction] « que [le] rapport était fondamentalement vicié, [l’intimée] a persisté[119] ».

[237]   À mon avis, il n’y a aucun fondement à l’un quelconque des arguments qu’invoque l’appelante à l’appui de sa demande de dépens spéciaux. Tout d’abord, en ce qui concerne le rapport d’expert de l’intimée, bien que l’argument qu’invoque l’appelante en faveur de son exclusion ait été retenu, il était loisible à l’intimée de contester l’opposition de l’appelante à son admission, laissant ainsi à la Cour le soin de se prononcer sur son admissibilité.

[238]   Quant à la non‑comparution du vérificateur principal à l’interrogatoire préalable et aux prétentions de l’appelante quant aux conséquences qui en ont découlé, selon moi, l’avocat de l’appelante surestime, là encore, l’importance de l’affaire. L’appelante avait le choix de s’opposer à ce que le vérificateur principal soit appelé à témoigner et, en fin de compte, cette requête a été rejetée.

[239]   Quant au refus du vérificateur principal de souscrire aux observations de l’appelante à propos des rôles que jouait M. Csumrik, SWI et SII, il est tout simplement inexact de la part de l’avocat de l’appelante de dire que le vérificateur principal a eu un comportement [traduction] « intransigeant ». Le vérificateur principal a souscrit aux réponses de la vérificatrice représentante lors de l’interrogatoire préalable et ses réponses étaient conformes à l’engagement pris par l’intimée envers la Cour de ne revenir d’aucune manière sur la position adoptée par la vérificatrice représentante à l’interrogatoire préalable. Le vérificateur principal a reconnu que M. Csumrik, SWI et SII avaient peut‑être pris part un peu plus aux efforts de mise en marché de l’appelante que ce qu’il avait conclu lors de la vérification, mais il a persisté à dire qu’il n’y avait toujours pas assez d’éléments de preuve pour justifier les montants que l’appelante avait payés à SII. Après avoir examiné avec soin les mêmes documents et eu l’avantage additionnel d’entendre le témoignage sous serment des témoins de l’appelante, je dois dire que je suis arrivée à la même conclusion.

[240]   Pour les motifs énoncés ci‑dessus, la Cour n’a aucune raison d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour adjuger des dépens spéciaux.

[241]   Compte tenu du succès limité de l’appelante en l’espèce, les dépens sont adjugés à l’intimée.

VII. Conclusion

[242]   Conformément aux motifs du jugement ci‑joint, les appels relatifs aux années d’imposition 2000 et 2001 sont accueillis en partie, et les nouvelles cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, étant entendu qu’une partie sans lien de dépendance aurait payé à Starline International Inc. un montant supérieur aux frais que cette dernière a payés à Starline Windows Inc., mais uniquement à hauteur de 32 500 $US dans chacune des années d’imposition 2000 et 2001.

[243]   Compte tenu du succès limité de l’appelante en l’espèce, les dépens sont adjugés à l’intimée.

          Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour de juin 2014.

« G. A. Sheridan »

Juge Sheridan

 

Traduction certifiée conforme

ce 26e jour de novembre 2014.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :

2014 CCI 194

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2010-860(IT)G

INTITULÉ :

MARZEN ARTISTIC ALUMINUM LTD. ET SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Vancouver (Colombie-Britannique)

DATES DE L’AUDIENCE :

Les 25, 26 et 27 février 2013

Les 3, 4, 5 et 6 septembre 2013

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge G. A. Sheridan

DATE DU JUGEMENT :

Le 10 juin 2014

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l’appelante :

Me Steven M. Cook

Me Natasha Reid

Me Erin L. Frew

Avocats de l’intimée :

Me Michael Taylor

Me Selena Sit

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

          Pour l’appelante :

Noms :

Steven M. Cook

Natasha Reid

Erin L. Frew

Cabinet :

Thorsteinssons LLP

Vancouver (Colombie-Britannique)

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1]           Réponse à l’avis d’appel, paragraphe 8 et alinéa 9yy).

[2]           Pièce A-1.

[3]           Transcription, page 376, lignes 17 et 18.

[4]           Transcription, page 265, lignes 22 à 27.

[5]           Transcription, page 272, lignes 13 à 15.

[6]           Transcription, page 273, ligne 2.

[7]           Transcription, page 274, lignes 5 à 10.

[8]           Transcription, page 326, lignes 4 à 8.

[9]           Transcription, page 328, ligne 8, à la page 330, ligne 19.

[10]          Dans certains cas, les frais étaient plus élevés, mais la somme de 2 500 $ était le tarif habituel. Voir la transcription, page 335, lignes 22 à 25.

[11]          Transcription, page 327, lignes 9 à 15.

[12]          Transcription, page 327, ligne 16, à la page 328, ligne 7.

[13]          Transcription, page 279, lignes 5 et 6.

[14]          Transcription, page 340, ligne 5, à la page 341, ligne 5.

[15]             Pièce A-1, onglet 59.

[16]             Pièce A-1, onglet 54.

[17]          Recueil conjoint de documents, onglet 83.

[18]          Pièce A-1, onglet 49.

[19]          Pièce A-1, onglet 51.

[20]          Transcription, page 410, ligne 25, à la page 412, ligne 6.

[21]          Transcription, page 284, ligne 27, à la page 285, ligne 20.

[22]          Transcription, page 409, lignes 7 à 22.

[23]          Transcription, page 430, ligne 19, à la page 431, ligne 5.

[24]          Pièce A-1, onglet 1.

[25]          Pièce A-1, onglet 1, clause 1.1.

[26]          Transcription, page 359, lignes 14 à 17.

[27]          Transcription, page 417, ligne 17, à la page 419, ligne 10.

[28]          Transcription, page 424, ligne 13, à la page 425, ligne 12.

[29]          Pièce A-1, onglets 34 et 35.

[30]          Transcription, page 317, lignes 8 à 28.

[31]          Transcription, page 415, ligne 22, à la page 417, ligne 12.

[32]          Pièce A-1, onglet 2.

[33]          Transcription, page 182, ligne 25, à la page 183, ligne 18.

[34]          Pièce A-1, onglet 3.

[35]          Pièce A-1, onglet 4.

[36]          Transcription, page 386, lignes 12 à 19.

[37]          Transcription, page 406, ligne 25, à la page 408, ligne 3.

[38]          Transcription, page 310, ligne 25, à la page 311, ligne 12.

[39]          Transcription, page 107, ligne 20, à la page 108, ligne 5.

[40]          Transcription, page 108, lignes 6 à 19.

[41]          Transcription, page 396, ligne 19, à la page 397, ligne 8.

[42]          Transcription, page 170, ligne 20, à la page 171, ligne 13.

[43]          Transcription, page 171, ligne 13, à la page 172, ligne 9.

[44]          Transcription, page 301, ligne 24, à la page 302, ligne 4.

[45]          Pièce A-1, onglet 46.

[46]          Transcription, page 309, ligne 7.

[47]          Transcription, page 309, lignes 11 à 14.

[48]          Transcription, page 310.

[49]          Transcription, page 310, lignes 6 à 11.

[50]          Transcription, page 342, ligne 17, à la page 343, ligne 8.

[51]          Pièce A-1, onglet 52.

[52]          Pièce A-1, onglets 52, 53 et 54.

[53]          Pièce A-1, onglet 55.

[54]          Pièce A-1, onglets 57, 58 et 59.

[55]          Pièce A-1, onglet 65.

[56]          Pièce A-1, onglet 68.

[57]          Pièce A-1, onglet 64.

[58] Pièce A-1, onglets 54 et 57.

[59] Pièce A-1, onglet 59.

[60] Transcription, page 871, ligne 13, à la page 872, ligne 4.

[61] Transcription, page 895, ligne 21, à la page 896, ligne 2.

[62] Transcription, page 889, lignes 10 à 15.

[63]          Transcription, page 909, ligne 16, à la page 910, ligne 19.

[64]          Transcription, page 914, ligne 23, à la page 915, ligne 13.

[65]          Pièce A-1, onglets 70B, 70C et 70D.

[66]          Pièce A-1, onglets 70B, 70C et 70D.

[67]          Pièce A-1, onglets 69B et 69C.

[68]          Pièce A-1, onglets 71A, 71B, et 71C.

[69]          Pièce A-1, onglets 79A, 79B, et 79C.

[70]          Transcription, page 357, ligne 27, à la page 359, ligne 17.

[71]          Argumentation écrite de l’appelante, au paragraphe 91.

                 

[73]          Transcription, page 1081, lignes 1 à 9.

[74]          Pièce A-2, page 2, divisions 1.1f)(i)(4-15).

[75]          Transcription, page 568.

[76]          Transcription, page 1038, ligne 16.

[77]          Transcription, page 328, lignes 1 à 7.

[78]          Transcription, page 1035, lignes 9 et 10.

[79]          Transcription, page 890, ligne 28, à la page 891, ligne 10.

[80]          Transcription, page 323, lignes 3 à 17.

[81]          Transcription, page 1074, ligne 20.

[82]          Transcription, page 1123, lignes 7 à 21.

[83]          Pièce A-1, onglets 34 et 35.

[84]          Transcription, page 317, lignes 12 à 17.

[85]             Transcription, page 1098, ligne 22, à la page 1099, ligne 6.

[86]          Transcription, page 1126, lignes 4 à 7.

[87]          Pièce A-1, onglets 34 et 35.

[88]          Transcription, page 317, lignes 8 à 10.

[89]          Canada c. GlaxoSmithKline, aux paragraphes 20 et 21.

[90]          Au paragraphe 62.

[91]          Pièce A-2, page 1, paragraphe 1.1, points A et B.

[92]          Pièce A-2, page 2, divisions 1.1f)(i)(4-15).

[93]          Transcription, page 534, ligne 24, à la page 535, ligne 16.

[94]          Transcription, page 580, ligne 24, à la page 581, ligne 26.

[95]          Transcription, page 581, ligne 28, à la page 582, ligne 12.

[96]          Pour les raisons précisées dans la transcription, aux pages 798 à 807.

[97]             Pièce R-1.

[98]             Transcription, page 183, ligne 19, à la page 185, ligne 14.

[99]          Transcription, page 585, ligne 14, à la page 586, ligne 26.

[100]         Transcription, page 585, ligne 14, à la page 586, ligne 26.

[101]         Principes de l’OCDE de 1995, paragraphes 3.63 et 3.74.

[102]         Principes de l’OCDE de 1995, paragraphe 3.71.

[103]         Principes de l’OCDE de 1995, paragraphes 1.13 et 1.14.

[104]         Pièce A-2, page 4, paragraphe 11.

[105]            Pièce A-2, page 2, divisions 1.1f)(i)(4-15).

[106]         Argumentation écrite de l’appelante, au paragraphe 91.

[107]         Argumentation écrite de l’intimée, alinéa 139d).

[108]            Argumentation écrite de l’intimée, paragraphe 142.

[109]         Argumentation écrite de l’appelante, page 45, alinéa j).

[110]         Argumentation écrite de l’intimée, paragraphe 140.

[111]         Pièce A-1, onglet 52.

[112]         Pièce A-1, onglet 54.

[113]            Argumentation écrite de l’intimée, paragraphe 169.

[114]         Pièce A-1, onglet 83.

[115]         Pièce A-1, onglets 34 et 35.

[116]         Transcription, page 1126, ligne 23, à la page 1127, ligne 8.

[117]         Transcription, page 1046, lignes 9 à 15.

[118]         Transcription, page 1046, lignes 2 à 4.

[119]         Transcription, page 1046, lignes 7 à 8.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.