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Dossier : 2013-4768(IT)I

ENTRE :

MARIE T. OLNEY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

Appel entendu le 17 juillet 2014, à Calgary (Alberta).

Devant : L’honorable juge Campbell J. Miller


Comparutions :

Pour l’appelante :

L’appelante elle-même

Avocate de l’intimée :

Me Mary Softley

 

JUGEMENT

L’appel interjeté à l’encontre de la nouvelle cotisation établie sous le régime de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour l’année d’imposition 2011 est accueilli, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse une nouvelle cotisation en tenant compte de ce qui suit :

           1.      toutes les déductions de frais additionnels demandées au titre des frais médicaux, à l’exclusion des frais de téléphonie cellulaire et d’adhésion à la CAA, constituent des frais médicaux prévus au paragraphe 118.2(2) de la Loi;

           2.      tous les frais de déménagement, à l’exclusion des 2 201,05 $ payés pour le voyage de recherche d’un domicile, constituent des frais déductibles prévus à l’article 62 de la Loi.

J’accorde à l’appelante un montant global de 200 $ au titre des dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 29e jour d’août 2014.

Campbell J. Miller

Juge C. Miller

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de février 2016.

S. Tasset


Référence : 2014 CCI 262

Date : 20140829

Dossier : 2013-4768(IT)I

ENTRE :

MARIE T. OLNEY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]


MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge C. Miller

[1]             Mme Olney interjette appel, sous le régime de la procédure informelle, de la cotisation établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») pour l’année d’imposition 2011. Le ministre a refusé les frais de déménagement en se fondant sur l’article 62 de la Loi de limpôt sur le revenu (la « Loi ») et les frais médicaux en se fondant sur l’article 118.2 de la Loi.

Frais médicaux

-         Téléphonie cellulaire                             946,30 $

-         Entretien de la pelouse                         460,00 $

-         Soins personnels                                           1 894,00 $

-         Adhésion à la CAA                                76,56 $

-         Retouches de vêtements                                1 177,24 $

-         Entraîneur personnel                                     3 796,80 $

-         Entretien ménager                                         1 220,00 $

Frais de déménagement

-         Recherche d’un domicile à Calgary               2 201,05 $

-         Aide pour l’emballage                          200,00 $

-         Déménagement – entreposage                       1 333,34 $

-         Transport du véhicule à Calgary :

-         Repas                                                   348,85 $

-         Hébergement                                                 1 016,89 $

-         Taxi pour aller à l’aéroport                    26,00 $

-         Billet d’avion aller‑retour                     287,83 $

[2]             À l’instruction, l’intimée a reconnu la validité des déductions suivantes :

Frais de déménagement tous les frais déduits, à l’exclusion des frais du voyage de reconnaissance, s’élevant à 2 201,05 $, pour trouver un domicile à Calgary.

Frais médicaux entretien de la pelouse, soins personnels et entretien ménager.

[3]             Mme Olney est au nombre des victimes du thalidomide au Canada. Elle n’a presque pas de bras et elle a de petites mains avec juste trois doigts. Son médecin, le docteur Mongeau, a résumé son état en ces termes :

[traduction]

Il ne fait aucun doute qu’il s’agit d’un cas très grave de malformations et qu’elle souffre d’une déficience majeure : elle devrait être classée dans la catégorie 3.

[4]             Malgré cette déficience, Mme Olney s’est efforcée de mener une vie indépendante, en participant pleinement dans la société. Elle y est arrivée. Son témoignage était éloquent et sincère. Malheureusement, elle se sent harcelée et punie par le gouvernement du Canada du fait qu’on l’a questionnée sur les frais susmentionnés, ce qui la porte à croire que pareille attaque est abusive compte tenu de la part de responsabilité du gouvernement du Canada dans le dossier du thalidomide. Les sentiments de Mme Olney sont parfaitement compréhensibles, mais la Cour a pour tâche de déterminer si les frais en question entrent dans la définition des frais de déménagement et la définition des frais médicaux prévues par la Loi. La tâche de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »), et, en définitive, de la Cour, ne consiste pas, par sympathie pour M. Olney pour réprimander le gouvernement du Canada, à prétendre que les frais médicaux et les frais de déménagement sont assimilés à quelque chose d’autre que ce la Loi prévoit qu’ils sont.

[5]             En 2011, Mme Olney a quitté l’Ontario pour aller s’établir en Alberta et y travailler. Un cabinet comptable de renom avait jusqu’alors préparé ses déclarations de revenus et demandé la déduction de frais semblables à ceux dont elle demande la déduction pour 2011, la seule différence étant les frais de déménagement. Selon Mme Olney, les frais médicaux avaient toujours été acceptés. Après son déménagement en Alberta, ses déclarations de revenus auraient été acheminées au bureau fiscal de Winnipeg, au lieu de celui de Shawinigan. C’est à ce bureau de l’ARC que ses frais ont été mis en doute.

[6]             Compte tenu de ses besoins très particuliers, Mme Olney a fait un voyage à Calgary, pour y rejoindre son frère venu de Vancouver pour chercher un logement approprié. Elle a trouvé un appartement, mais, comme elle n’en était pas en fin de compte satisfaite, elle a déménagé dans un domicile plus permanent en 2013. Les frais de déplacement d’elle et de son frère pour aller à Calgary pour y chercher une résidence correspondent au montant de la déduction de 2 201,05 $ demandée par Mme Olney au titre des frais de déménagement.

[7]             Mme Olney a affirmé très clairement qu’elle avait pris toutes les mesures nécessaires pour vivre de manière indépendante sans avoir à engager des frais pour un préposé à temps plein. Mais cette situation présentait des inconvénients. Ainsi, elle ne pouvait se laver les cheveux seule, s’habiller avec des vêtements à manches longues ou comportant une fermeture éclair ou des boutons, entretenir la propriété ou faire la cuisine convenablement; elle devait souvent se rabattre sur des mets préparés. Elle a engagé des fournisseurs de services pour l’aider là où c’était possible et elle pouvait aussi compter sur les membres de sa famille et ses amis. J’ai l’impression qu’elle n’a pas simplement réussi à demeurer autonome, mais qu’elle a aussi réalisé dans une large mesure l’indépendance qu’elle souhaitait.

[8]             Pour ce qui est des frais médicaux contestés, je vais les décrire à tour de rôle.

Téléphonie cellulaire et adhésion à la CAA

[9]             Mme Olney a témoigné qu’elle avait besoin du téléphone cellulaire et de l’adhésion à la CAA pour les urgences automobiles, parce qu’elle était incapable de régler des problèmes mécaniques susceptibles de survenir lorsqu’elle se déplaçait en véhicule automobile.

Entraîneur personnel

[10]        En juillet 2010, le médecin de Mme Olney, le docteur Robert Esguerra, a écrit une lettre adressée [traduction] « À qui de droit » qui était rédigée ainsi :

[traduction]

Marie Olney est une patiente de ma pratique familiale depuis 2003. Mme Olney est une victime du thalidomide, un médicament dont l’utilisation par la mère pendant sa grossesse a entraîné une phocomélie. Ses deux bras sont très courts (environ sept pouces). Elle a de petites mains qui comptent chacune seulement trois doigts. Certains muscles sont absents de ses bras et de ses épaules, particulièrement du côté gauche. Par conséquent, elle manque de dextérité, de force et de capacité pour lever ses bras. Ses bras n’ont pas la même portée que ceux de la plupart des gens.

Cependant, Mme Olney réussit à vivre de façon autonome et heureuse en ayant recours à quelques services d’aide seulement, que j’ai d’ailleurs décrits dans une lettre antérieure. Par la présente lettre, je recommande que Mme Olney ait recours aux services d’un entraîneur personnel pour l’aider à maintenir son autonomie aussi longtemps que possible. Mme Olney utilise ses pieds et ses jambes pour accomplir bon nombre d’activités quotidiennes, notamment pour faire sa toilette, s’habiller et voir à ses soins personnels. Il est par conséquent essentiel que Mme Olney connaisse les exercices appropriés à faire régulièrement pour conserver la force et la flexibilité de son tronc et de ses jambes et qu’elle soit accompagnée d’une personne pouvant assurer sa sécurité lorsqu’elle fait ces exercices. Des soins particuliers doivent également lui être procurés pour s’assurer qu’elle maintient la capacité de ses bras et de son torse sans endommager son dos ou le surutiliser.

Mme Olney a déclaré dans son témoignage que son médecin lui a recommandé d’engager un entraîneur personnel; selon Mme Olney, un entraîneur personnel coûte moins cher qu’un physiothérapeute. Son médecin lui a donné quelques noms. Elle a engagé Marta Wein, qui venait chez elle pour lui faire faire l’entraînement nécessaire. Mme Olney a affirmé que Mme Wein avait fait des recherches pour comprendre comment l’aider. De plus, le médecin de Mme Olney aurait proposé le type d’entraînement susceptible de l’aider, et Mme Olney aurait communiqué cette information à son entraîneuse personnelle. Compte tenu du fait que Mme Olney a besoin de ses jambes, de ses pieds, de sa bouche et de son menton pour faire ses activités quotidiennes, elle a besoin d’exercices pour entretenir la force de son tronc et de ses jambes.

Retouches de vêtements

[11]        Mme Olney peut rarement acheter des vêtements qui ne nécessitent pas de retouches. Elle est incapable de coudre et de faire des retouches. Jusqu’en 2002, c’était sa mère qui s’occupait de faire les retouches, mais, au cours des dernières années, Mme Olney a dû engager quelqu’un pour faire faire les retouches nécessaires.

Analyse

[12]        En ce qui a trait aux frais médicaux, Mme Olney invoque principalement l’alinéa 118.2(2)b.1) de la Loi, qui est rédigé en ces termes :

118.2(2)b.1)    à titre de rémunération pour les soins de préposé fournis au Canada au particulier, à son époux ou conjoint de fait ou à une personne à charge visée à l’alinéa a), dans la mesure où le total des sommes payées ne dépasse pas 10 000 $ (ou 20 000 $ en cas de décès du particulier dans l’année) et si les conditions suivantes sont réunies :

(i)         le particulier, l’époux ou conjoint de fait ou la personne à charge est quelqu’un pour qui un montant est déductible en application de l’article 118.3 dans le calcul de l’impôt payable par un contribuable en vertu de la présente partie pour l’année d’imposition au cours de laquelle les frais sont engagés,

(ii)        aucune partie de la rémunération n’est incluse dans le calcul d’une déduction demandée pour le particulier, l’époux ou conjoint de fait ou la personne à charge en application des articles 63 ou 64 ou des alinéas b), b.2), c), d) ou e) pour une année d’imposition,

(iii)       au moment où la rémunération est versée, le préposé n’est ni l’époux ou conjoint de fait du particulier ni âgé de moins de 18 ans,

(iv)       chacun des reçus présentés au ministre comme attestation du paiement de la rémunération est délivré par le bénéficiaire de la rémunération et comporte, si celui-ci est un particulier, son numéro d’assurance sociale;

[13]        Les tribunaux ont toujours été conscients du fait que les dispositions comme celles relatives aux frais médicaux visent à fournir un allègement, et, par conséquent, elles sont interprétées de façon libérale et humaine. Voir par exemple les observations de l’ancien juge en chef Bowman dans la décision Radage v Canada[1], qui ont été citées par le juge Bowie dans la décision Zaffino c La Reine[2]. Dans l’affaire Zaffino, l’ARC avait avisé le contribuable de ce qui suit dans un avis de ratification :

[traduction] […] les soins de préposé sont des soins fournis par un préposé qui accomplit les tâches personnelles que la personne handicapée ne peut accomplir par elle-même. Selon la situation, ces tâches peuvent comprendre la préparation des repas, les services de ménage et de nettoyage et le transport. Toutefois, si une personne est employée pour effectuer une tâche en particulier, par exemple, pour fournir des services de ménage, la prestation de ces services n’est pas considérée comme des « soins de préposé ».

[14]        Le juge Bowie ne souscrivait pas à cette façon de considérer les « soins de préposé » et il a affirmé ceci :

Je dois avouer que s’il existe une logique dans cette analyse, celle-ci m’échappe. J’aurais cru que l’expression « soins de préposé » désigne la totalité des services fournis par un préposé et que si un service en particulier appartient à cette catégorie lorsqu’il est fourni avec d’autres services, il doit nécessairement appartenir à cette catégorie lorsqu’il est fourni seul. Le fait qu’un contribuable donné ait besoin d’obtenir commercialement seulement un des services ne modifie assurément pas la nature de ce service, le transformant de « soins de préposé » en autre chose.

[15]        Le juge Bowie s’est ensuite penché sur la question de la signification des mots « soins de préposé » :

Selon la définition du Canadian Oxford Dictionary, le mot « attendant » (« préposé ») désigne [traduction] « une personne employée pour servir d’autres personnes ou pour fournir un service » et parmi les nombreuses significations du mot « care » (« soins »), mentionnons [traduction] « le processus de s’occuper d’une personne…; la fourniture de ce qui est nécessaire pour la santé ou la protection ». L’expression « soins de préposé » utilisée dans la version française de la Loi a une signification tout aussi étendue […]. La signification ordinaire de l’expression, dans l’une ou l’autre langue officielle, englobe le genre de services de nettoyage que l’appelante réclame en l’espèce, comme l’admet l’intimée. Ces services ne peuvent alors pas être exclus de cette signification simplement parce que l’appelante a la chance d’obtenir les autres services de préposé dont elle a besoin d’autres sources, et ce, sans frais. Si le nettoyage de la maison est un « service de préposé » lorsqu’il est fourni avec d’autres services, il doit alors assurément être un « service de préposé » lorsqu’il est fourni seul.

[16]        Je vais maintenant examiner séparément les frais médicaux contestés.

Téléphonie cellulaire et adhésion à la CAA

[17]        Mme Olney a incité pour dire que, en raison de sa déficience, elle a besoin de ces services pour parer aux urgences. Je suis d’accord avec elle. Toutefois, la nécessité n’est pas le critère juridique retenu pour rendre des frais médicaux admissibles. Les frais médicaux doivent figurer dans l’énumération du paragraphe 118.2(2) de la Loi. Mme Olney a fait valoir, à juste titre, que le législateur ne peut pas prévoir tous les frais possibles. Par conséquent, il a établi des catégories énoncées en des termes généraux pour ainsi laisser aux tribunaux le soin de décider des situations cadrant dans ces catégories. Il n’est toutefois pas loisible à la cour de créer de nouvelles catégories – ce rôle est celui du législateur.

[18]        Les frais de téléphonie cellulaire et d’adhésion à la CAA peuvent‑ils être considérés comme des frais médicaux? Mme Olney a proposé qu’ils pouvaient être visés par l’alinéa 118.2(2)b.1) de la Loi – soins de préposé.

[19]        C’est sur cette disposition que le juge Bowie s’est appuyé pour accorder les frais de services d’entretien ménager dans la décision Zaffino et que l’intimée s’est appuyée pour admettre les frais d’entretien de la pelouse et de soins personnels. Il s’agit de frais payés pour les soins de préposé; autrement dit, les soins fournis par un préposé, une personne. Ni les frais de téléphonie cellulaire ni les frais d’adhésion à la CAA ne constituent un paiement fait à une personne pour des « soins de préposé », sinon cela équivaudrait à donner à ces mots une signification beaucoup trop élargie et difficilement justifiable. Je ne vois aucune disposition en vertu de laquelle les frais d’adhésion à la CAA seraient considérés comme des frais médicaux admissibles.

[20]        En ce qui a trait à la téléphonie cellulaire, la seule disposition qui pourrait s’appliquer est l’alinéa 118.2(2)m) de la Loi, qui est rédigé en ces termes :

m)      pour tout dispositif ou équipement destiné à être utilisé par le particulier, par son époux ou conjoint de fait ou par une personne à charge visée à l’alinéa a) et qui répond aux conditions suivantes, dans la mesure où le montant payé ne dépasse pas le montant fixé par règlement, le cas échéant, relativement au dispositif ou à l’équipement :

 

(i)         il est d’un genre visé par règlement,

(ii)        il est utilisé sur ordonnance d’un médecin,

(iii)       il n’est pas visé à un autre alinéa du présent paragraphe,

(iv)       il répond aux conditions prescrites quant à son utilisation ou à la raison de son acquisition;

[21]        Il faut se reporter à l’article 5700 du Règlement de l’impôt sur le revenu (le « Règlement ») pour savoir ce qui est prescrit. J’ai passé en revue tous les dispositifs mentionnés dans le Règlement et je n’en ai trouvé aucun qui pourrait comprendre un téléphone cellulaire.

[22]        Le téléphone cellulaire et l’adhésion à la CAA, même si Mme Olney en avait besoin, ne sont tout simplement pas des frais médicaux sous le régime de la Loi.

Entraîneur personnel

[23]        Les frais d’entraîneur personnel de Mme Olney peuvent être considérés comme des frais médicaux selon deux possibilités : l’alinéa 118.2(2)l.9) et l’alinéa 118.2(2)b.1) de la Loi.

[24]        Examinons d’abord l’alinéa 118.2(2)b.1) de la Loi. Comme nous l’avons vu précédemment lorsqu’il a été question des soins de préposé, ceux-ci sont en fait de l’aide apportée par une personne, et cette aide doit prendre la forme de soins fournis à Mme Olney. L’intimée a reconnu que les soins de préposé peuvent être fournis par plus d’une personne; d’où la concession faite à propos des frais relatifs aux soins personnels et à l’entretien de la pelouse. Il est difficile de comprendre pourquoi une personne qui tond le gazon fournit des « soins de préposé », tandis qu’un entraîneur personnel qui se rend au domicile de Mme Olney à la suite de la recommandation de son médecin n’en fournit pas.

[25]        L’alinéa 118.2(2)l.9) est ainsi rédigé :

l.9)       à titre de rémunération pour le traitement administré au particulier, à son époux ou conjoint de fait ou à une personne à charge visée à l’alinéa a) en raison de sa déficience grave et prolongée, si les conditions suivantes sont réunies :

(i)         en raison de la déficience du particulier, de l’époux ou conjoint de fait ou de la personne à charge, un montant peut être déduit en application de l’article 118.3 dans le calcul de l’impôt payable en vertu de la présente partie par un particulier pour l’année d’imposition au cours de laquelle la rémunération est payée,

(ii)        le traitement est prescrit par l’une des personnes suivantes et est administré sous sa surveillance générale :

(A)       un médecin en titre ou un psychologue, dans le cas d’une déficience mentale,

(B)       un médecin en titre ou un ergothérapeute, dans le cas d’une déficience physique,

(iii)       au moment où la rémunération est payée, le bénéficiaire du paiement n’est ni l’époux ou conjoint de fait du particulier, ni âgé de moins de 18 ans,

(iv)             chacun des reçus présentés au ministre comme attestation du paiement de la rémunération a été délivré par le bénéficiaire de la rémunération et comporte, si celui‑ci est un particulier, son numéro d’assurance sociale;

Il faut déterminer si les services fournis par Mme Wein constituaient un traitement. Je n’ai aucune difficulté à conclure que ce que l’entraîneuse personnelle de Mme Olney faisait pour que cette dernière conserve sa force, compte tenu du fait qu’elle n’avait pas de bras, constituait une forme de traitement d’une déficience physique. Mme Olney recevait une forme de traitement de réadaptation. La réadaptation sous-entend en fait le rétablissement à la vie normale par l’entraînement. Je ne peux imaginer de description plus appropriée de ce que Mme Olney tentait d’accomplir avec son entraîneuse personnelle. Je conclus également que, compte tenu du fait que le docteur Esguerra a recommandé à Mme Olney de recourir aux services d’un entraîneur personnel, ces services respectent l’esprit et la lettre d’un traitement pour ce qui est des frais médicaux prévus à l’alinéa 118.2(2)l.9) de la Loi.

[26]        La difficulté découlant de l’alinéa 118.2(2)l.9) réside dans le fait que le traitement doit être administré sous la « surveillance générale » du médecin. Mme Olney a témoigné que son médecin l’avisait du traitement approprié et qu’elle communiquait cette information à Mme Wein. Si l’on considère la situation d’un point de vue compatissant, cela constituerait une surveillance « générale ».

Retouche de vêtements

[27]        Mme Olney payait quelqu’un pour faire des retouches à ses vêtements. Ces frais entrent-ils dans la catégorie générale des soins de préposé? Si l’entretien ménager et la tonte du gazon sont admissibles au titre des frais médicaux, encore là, je ne vois aucune raison pourquoi des frais engagés par Mme Olney pour faire faire quelque chose qu’elle ne peut faire elle‑même et qui fait partie intégrante de sa vie normale ne seraient pas considérés comme des frais de soins de préposé. Le simple fait que les retouches de vêtements soient effectuées ailleurs que chez Mme Olney ne veut pas dire qu’il ne s’agit pas de soins de préposé. Si les retouches étaient effectuées par un préposé à temps plein, il n’y aurait pas de rajustement pour soustraire certains des frais du préposé dans la mesure où ils auraient trait aux retouches de vêtements. Je croirais qu’il s’agit de frais qui font bel et bien partie de ce qu’un préposé serait censé faire pour une personne comme Mme Olney. Je reconnais que cette approche se fonde peut-être sur un point de vue compatissant élargi, mais elle est conforme aux directives antérieures de la Cour.

Frais de déménagement

[28]        Les seuls frais de déménagement en litige sont ceux liés au voyage de recherche de domicile fait à Calgary pour trouver un logement convenable. Il est bien établi que l’article 62 de la Loi, la disposition qui décrit les frais de déménagement admissibles, n’autorise pas les frais de recherche d’un domicile. Comme le juge Beaubier l’a affirmé dans Robert T. Ball v Her Majesty the Queen[3], cette disposition s’applique uniquement aux frais de déménagement au sens ordinaire de ces mots, à savoir un déménagement physique. Ces frais n’incluent pas les frais engagés lors un voyage fait pour chercher un domicile.

[29]        Ce principe est-il suffisamment flexible pour qu’un contribuable ayant des besoins particuliers en ce qui a trait à l’acquisition d’un domicile puisse demander la déduction de frais de déménagement plus importants? Non, il n’offre pas cette latitude. Peu importe la nature du domicile recherché, un voyage de recherche d’un domicile n’est tout simplement pas une dépense de déménagement.

[30]        Mme Olney a ensuite laissé entendre que ces frais devraient être couverts au titre des frais médicaux. En toute déférence, je ne souscris pas à cette idée. Si ses frais à elle ne sont pas légitimement déductibles, je ne vois pas comment les frais engagés par son frère qui s’est joint à elle pour le voyage pourraient être déductibles au titre des frais médicaux.

[31]        L’alinéa 118.2(2)l.5) de la Loi inclut expressément dans les frais médicaux les frais de déménagement raisonnables mais, encore là, seulement selon ce qui est prévu au paragraphe 62(3) de la Loi. L’alinéa en question ne sert pas la cause de Mme Olney.

[32]        Enfin, Mme Olney croit que les frais peuvent être inclus dans les frais médicaux de soins de préposé. Compte tenu du fait que les frais du voyage fait en vue de trouver un domicile ne sont pas déductibles, tenter de les inclure dans la catégorie des soins de préposé ne serait pas différent d’inclure les frais de déplacement engagés pour toute autre raison comme des soins de préposé. Les frais de soins de préposé couvrent les honoraires d’un préposé pour les soins qu’il prodigue, non pour des frais de déplacement. La preuve relative à ces frais n’a pas été détaillée comme elle aurait pu l’être, mais je n’ai certes pas été convaincu que le montant de 2 201,05 $ a été payé à son frère pour lui prodiguer des soins. La preuve ne permet tout simplement pas d’établir que ce montant constitue des frais médicaux de soins de préposé.

[33]        L’appel est accueilli, et l’affaire est renvoyée au ministre pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse une nouvelle cotisation en tenant compte de ce qui suit :

a.           toutes les déductions de frais additionnels demandées au titre des frais médicaux, à l’exclusion des frais de téléphonie cellulaire et d’adhésion à la CAA, constituent des frais médicaux prévus au paragraphe 118.2(2) de la Loi;

b.           tous les frais de déménagement, à l’exclusion du montant de 2 201,05 $ engagé pour le voyage de recherche d’un domicile, constituent des frais déductibles prévus à l’article 62 de la Loi.

J’accorde à Mme Olney un montant global de 200 $ au titre des dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 29e jour d’août 2014.

Campbell J. Miller

Juge C. Miller

Traduction certifiée conforme

ce 29e jour de février 2016.

S. Tasset


RÉFÉRENCE :

2014 CCI 262

NO DU DOSSIER DE LA COUR :

2013-4768(IT)I

INTITULÉ :

MARIE T. OLNEY ET SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Calgary (Alberta)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 17 juillet 2014

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Campbell J. Miller

DATE DU JUGEMENT :

Le 29 août 2014

COMPARUTIONS :

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

Avocate de l’intimée :

Me Mary Softley

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l’appelante :

Nom :

s.o.

 

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous-procureur du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1]           1996 3 C.T.C. 2510.

 

[2]           2007 CCI 388.

 

[3]           1996 CarswellNat 1521, [1996] 3 C.T.C. 2178.

 

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