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Dossier : 2013-3788(IT)I

ENTRE :

MAHES PERERA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

Appels entendus le 28 mars 2014, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge K. Lyons

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Katie Beahen

 

JUGEMENT

          Les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2009 et 2010 de l’appelant sont accueillis en partie, sans frais, et l’affaire est déférée au ministre du Revenu national pour qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en tenant compte de ce qui suit :

 

a)       L’appelant a le droit de déduire les dépenses d’emploi suivantes :

 

 

2009

2010

Concédées

par le ministre

 

9 389,97 $

 

9 757,15 $

Frais de poste

3,42 $

42,53 $

Véhicule de location

325 $

 

Télémarketing

 

4 400 $

 

 

b)      La pénalité pour production tardive pour l’année d’imposition 2010 est annulée.

 

Les appels sont rejetés sur tous les autres points.

 

Signé à Vancouver (Colombie‑Britannique), ce 23e jour de septembre 2014.

« K. Lyons »

Juge Lyons

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30jour d’octobre 2014.

 

Espérance Mabushi, M.A. Trad.Jur.

 


Référence : 2014 CCI 280

Date : 20140923

Dossier : 2013-3788(IT)I

 

ENTRE :

 

MAHES PERERA,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 


MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lyons

[1]             Mahes Perera interjette appel à l’encontre de nouvelles cotisations établies par le ministre du Revenu national (le « ministre ») au titre de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

[2]             Les questions à trancher sont les suivantes :

a)       M. Perera a‑t‑il le droit de déduire les dépenses d’emploi qu’il affirme avoir supportées en 2009 et en 2010 en vue de tirer un revenu d’un emploi qu’il occupe en tant qu’employé-vendeur à commission?

 

b)     M. Perera est‑il passible d’une pénalité pour production tardive relativement à sa déclaration de revenus pour 2010?

 

[3]             M. Perera, l’unique témoin, a témoigné pour son propre compte.

I. Contexte factuel

[4]             En 2003, M. Perera a commencé à travailler pour la société RBC Assurances (la « RBC ») située au 111, avenue Grangeway, à Scarborough, en Ontario, en tant que vendeur à commission faisant la vente de polices d’assurance.

[5]             M. Perera a expliqué qu’un bureau avait été mis à sa disposition à la RBC exclusivement pour lui permettre de trouver des clients. Toutefois, il était censé travailler à l’extérieur du bureau et il travaillait à domicile ou dans sa voiture. Les vendeurs devaient avoir accès aux dossiers aux bureaux de la RBC, mais ils ne pouvaient pas sortir les dossiers des bureaux.

[6]             La RBC s’attendait à ce que M. Perera supporte certaines dépenses. Celui‑ci avait par exemple payé un montant important pour la publicité en 2009. M. Perera a également déclaré qu’il devait payer les fournitures qu’il utilisait à la RBC, notamment 2 $ pour un stylo.

[7]             Le formulaire T2200 – Déclaration des conditions de travail (le « formulaire »), rempli par la RBC, précise que M. Perera était tenu de payer ses propres dépenses, de travailler à l’extérieur du lieu d’affaires de la RBC, de payer ses propres frais afférents à un véhicule, de payer les fournitures qu’il utilisait dans son travail, de payer d’autres frais (les « frais divers ») pour lesquels il ne recevait pas d’allocation ni de remboursement ainsi que de payer les frais d’utilisation d’un téléphone cellulaire. Selon le formulaire, M. Perera recevait paiement d’une commission calculée en fonction du volume des ventes effectuées ou de contrats négociés.

[8]             En 2011, la RBC a congédié M. Perera, qui a été raccompagné pour quitter les lieux de la RBC, sans qu’on lui ait donné accès à ses dossiers ou à sa liste de clients[1]. Il a déclaré que certains documents dont il avait besoin pour justifier les dépenses déduites étaient restés aux bureaux de la RBC.

[9]             Lorsqu’il a produit ses déclarations de revenus pour les années d’imposition 2009 et 2010, M. Perera a déclaré un revenu de commissions de 47 177 $ et de 32 597 $, respectivement, et a demandé une déduction de dépenses d’emploi de 27 577 $ et de 23 075 $, respectivement[2]. À l’audience, environ 670 reçus ont été présentés. Il les avait placés dans un tiroir sans les mettre en ordre.

[10]        Les dépenses sont classées par le ministre de la manière suivante[3] :

Frais déduits

2009

2010

Véhicule à moteur

9 685 $

8 775 $

Repas, boissons, divertissement

2 400 $

2 100 $

Publicité et promotion

10 127 $

9 536 $

Stationnement

1 500 $

 

Fournitures

220 $

180 $

Téléphone

3 200 $

2 484 $

Location de voiture

325 $

 

Déplacement – 407

120 $

_______

 

________  

 

27 577 $

23 075 $

 

[11]        Du total des montants que l’appelant a déduits, le ministre a concédé que les montants de 9 389,97 $ pour 2009 et de 9 757,15 $ pour 2010 constituaient des dépenses d’emploi[4]. Les montants restants constituent les montants en litige (les « montants en litige »).

[12]        M. Perera a témoigné d’une manière franche et a honnêtement admis qu’il avait déduit par erreur des dépenses personnelles non déductibles.

II. Le droit

[13]        Un employé‑vendeur à commission ne peut déduire des montants de son revenu d’emploi que si le type de dépense est précisé à l’article 8 de la Loi[5]. Chaque paragraphe énonce que l’employé est tenu par son employeur, en vertu d’un contrat d’emploi, d’acquitter les dépenses supportées au cours de l’année dans l’exercice des fonctions de son emploi.

[14]        L’alinéa 8(1)f) de la Loi autorise la déduction de sommes dépensées jusqu’à concurrence du revenu de commission gagné[6]. En plus de ces conditions, l’employé doit avoir dépensé les sommes au cours de l’année pour gagner le revenu provenant de son emploi, et lorsqu’à la fois :

          a)       il a été employé au cours de l’année pour remplir des fonctions liées à la vente de biens ou à la négociation de contrats pour son employeur;

          b)      il était habituellement tenu d’exercer les fonctions de son emploi ailleurs qu’au lieu d’affaires de son employeur;

          c)       il recevait une rémunération consistant en tout ou en partie en commissions;

          d)      il ne recevait pas une allocation non imposable pour frais de déplacement.

[15]        Une dépense déterminée ne peut être déduite que si les conditions susmentionnées sont remplies et lorsque la dépense :

          a)       n’est pas une dépense, une perte ou un remplacement de capital ou un paiement au titre du capital;

          b)      n’est pas une dépense qui n’est pas déductible en vertu de l’alinéa 18(1)l) de la Loi;

          c)       n’est pas un montant énoncé au sous‑alinéa 8(1)f)(vii) de la Loi relativement à des frais pour droit d’usage d’une automobile;

          d)      est raisonnable compte tenu des circonstances.

[16]        L’application du critère de l’objet énoncé à l’alinéa 8(1)f) de la Loi est semblable, bien que non identique, à celle du critère de l’objet concernant les dépenses d’entreprise[7]. La Cour suprême du Canada, dans l’arrêt Symes c Canada, [1993] 4 RCS 695 (CSC), qui portait sur le dernier critère, souligne au paragraphe 68 que, lorsqu’il faut établir l’objet des actes, les tribunaux ne doivent pas se fonder uniquement sur les déclarations du contribuable, ex post facto ou quant à l’objet subjectif de la dépense. Les tribunaux doivent plutôt examiner aussi comment l’objet se manifeste objectivement, et l’objet est en définitive une question de fait à trancher en tenant compte de toutes les circonstances[8].

[17]        En ce qui concerne les frais afférents à un véhicule à moteur, l’employé est tenu, en vertu de l’alinéa 8(1)h.l) de la Loi, d’accomplir les fonctions de son emploi ailleurs qu’au lieu d’affaires de son employeur et d’acquitter, aux termes de son contrat d’emploi, les sommes qu’il a dépensées pour se déplacer dans l’exercice des fonctions de son emploi[9].

[18]        Pour ce qui est des frais de fournitures, le sous‑alinéa 8(l)i)(iii) de la Loi exige que les fournitures aient été consommées directement dans l’accomplissement des fonctions de la charge de l’employé et que l’employé ait été tenu de les payer[10].

[19]        Quant aux dépenses relatives aux aliments, aux boissons et au divertissement, le paragraphe 8(4), l’article 67 et les alinéas 67.1a) et b) de la Loi prévoient ce qui suit :

8(4) La somme dépensée par un cadre ou un employé pour son repas ne peut être incluse dans le calcul du montant d’une déduction en vertu de l’alinéa (1)f) ou h) que si le repas a été pris au cours d’une période où les fonctions de ce cadre ou de cet employé l’obligeaient à être absent, durant une période d’au moins douze heures, de la municipalité dans laquelle était situé l’établissement de l’employeur où il se présentait habituellement pour son travail et à être absent, le cas échéant, de la région métropolitaine où cet établissement était situé.

[…]

67 Dans le calcul du revenu, aucune déduction ne peut être faite relativement à une dépense à l’égard de laquelle une somme est déductible par ailleurs en vertu de la présente loi, sauf dans la mesure où cette dépense était raisonnable dans les circonstances.

a) la somme réellement payée ou à payer;

b) la somme qui serait raisonnable dans les circonstances.

III. Analyse

[20]        M. Perera a le fardeau d’établir une preuve à première vue selon laquelle les montants que le ministre a refusé de déduire peuvent être considérés comme des dépenses d’emploi. Pour ce faire, M. Perera doit démolir les hypothèses exactes formulées par le ministre afin de démontrer que les nouvelles cotisations sont erronées.

[21]        M. Perera soutient essentiellement que les dépenses comprenant les montants en litige ont été supportées pour trouver des clients afin de gagner un revenu d’emploi, qu’il a beaucoup travaillé pour cela et que, par conséquent, il devrait avoir droit à un montant raisonnable à titre de dépenses d’emploi[11].

Dépenses personnelles

[22]        La première étape pour appliquer le critère de l’objet prévu à l’alinéa 8(1)f) de la Loi est de déterminer les montants déduits qui constituent des dépenses personnelles. À cet égard, la Cour suprême du Canada a cité, dans l’arrêt Symes, au paragraphe 70, les commentaires suivants du professeur Brooks :

[traduction] Lorsqu’une personne aurait engagé une dépense particulière même si elle ne travaillait pas, il y a de bonnes raisons de penser que cette dépense sert une fin personnelle. Par exemple, pour obtenir un revenu d’une entreprise une personne en affaires doit être nourrie, vêtue et logée. Toutefois, puisque ce sont des dépenses qu’une personne ferait même si elle ne travaillait pas, on peut supposer qu’elles servent un objet personnel – demeurer en vie, être vêtu et se protéger de la pluie.

[23]        Après avoir examiné la décision rendue dans l’affaire Symes, la Cour a conclu, dans la décision Arthurs c La Reine, 2003 CCI 636, [2004] 1 CTC 2948, que les frais pour des repas pris avec d’autres acteurs afin de se constituer un réseau, les frais pour le nettoyage à sec, les lunettes, les billets de cinéma, la location de films, l’inscription à un club de culture physique et les tenues décontractées sont des dépenses personnelles non déductibles[12].

[24]        En ce qui concerne les frais d’habillement (de Tigre géant, les tenues décontractées de chez Walmart et Town shoes) et les frais de nettoyage à sec (600 $ pour des vestons), je suis d’accord avec l’avocate de l’intimée sur le fait que, bien que M. Perera dût s’habiller convenablement pour le travail, les dépenses concernant l’apparence personnelle se rapportent aux choix qu’il a faits pour se préparer pour le travail. Je conclus que les dépenses concernant les vêtements qu’il porte habituellement au travail, les tenues décontractées et le nettoyage à sec n’ont pas été supportées pour gagner un revenu d’emploi et sont des dépenses personnelles non déductibles.

[25]        M. Perera a reconnu que les montants en litige comprennent certaines dépenses personnelles qu’il a déduites par erreur à un moment où il était malade et ne pouvait pas exercer ses activités comme il faut. Il a présenté environ 670 reçus provenant du tiroir où il les avait conservés. Il a admis que les reçus concernant les vitamines, le réseau GO[13], les inscriptions à des clubs de culture physique et les soins de spa pour lui et pour son épouse se rapportaient à des dépenses personnelles. Sans qu’il ait désigné d’autres articles précis, il a admis lors du contre‑interrogatoire qu’il pourrait y avoir ou qu’il [traduction] « y a peut‑être » dans les montants en litige des dépenses personnelles qu’il a déduites. Il a déduit des montants concernant des articles d’épicerie, un aspirateur, un appareil Magic Bullet (selon le reçu, l’article a été retourné au magasin), le scellement d’une voie d’accès pour autos, le nettoyage à sec pour des vêtements de son épouse, des vêtements pour dames de chez J’adore, des articles ménagers de chez Bouclair, le montant total pour le câble, la ligne téléphonique résidentielle, Internet et d’autres articles en plus des articles précis mentionnés ci‑dessous[14].

[26]        Les demandes de déduction ayant trait à un grand nombre de dépenses personnelles peuvent créer un doute quant aux dépenses déduites par un contribuable. Dans la décision Chrabalowski c La Reine, 2004 CCI 644, [2005] 1 CTC 2054, le contribuable avait produit un grand nombre de reçus qui n’étaient pas organisés d’une façon ordonnée concernant la promotion, la représentation, le véhicule, le stationnement et les fournitures et dont les frais étaient inclus dans un grand nombre de déductions non justifiées, invraisemblables ou déraisonnables. Comme dans la décision Chrabalowski et selon la conclusion de la Cour, M. Perera était tenu de consigner et de conserver des reçus distincts appropriés, mais il ne l’a pas fait, ce qui a rendu difficile la distinction entre les dépenses personnelles et les dépenses liées à l’emploi.

[27]        Selon les éléments de preuve produits et la jurisprudence, à part la concession par le ministre de 50 % des dépenses pour Internet et les conclusions que j’ai tirées ci‑dessous, M. Perera n’a pas réussi à établir une preuve à première vue qu’il avait supporté les montants en litige pour gagner un revenu d’emploi. Je conclus qu’il s’agit de dépenses personnelles. À mon avis, c’est à juste titre que le ministre a refusé la déduction des montants.

[28]        M. Perera a témoigné qu’il avait dû louer une voiture en 2009 pour son travail, parce que ses véhicules n’étaient pas fiables. Je conclus qu’il s’agit d’une explication plausible dans la situation de M. Perera. Par conséquent, la somme de 325 $ est accordée à titre de dépense déductible[15].

Fournitures

[29]        M. Perera a déduit 220 $ pour 2009 et 180 $ pour 2010 pour des fournitures dans ses déclarations de revenus. Il a déclaré dans son témoignage qu’il avait utilisé des fournitures de la RBC et qu’il avait dû payer une partie de ces fournitures. Il avait aussi acheté une imprimante et un ordinateur portatif d’occasion qu’il utilisait à la maison pour son travail. Il avait également supporté des frais de poste pour envoyer à Ottawa des documents concernant son travail.

[30]        L’avocate de l’intimée a soutenu que l’imprimante et l’ordinateur portatif constituaient une dépense en capital.

[31]        Je reconnais, et je tiens à souligner, que l’alinéa 8(1)f) de la Loi exclut expressément les déductions concernant des articles dont le paiement est fait au titre du capital. Toutefois, compte tenu des éléments de preuve de M. Perera, y compris le formulaire qui établit qu’il est tenu de payer les fournitures, j’accepte que les frais de poste de 3,42 $ pour 2009 et de 42,53 $ pour 2010 étaient des fournitures et qu’ils sont déductibles en tant que dépenses d’emploi.

Frais afférents à un véhicule à moteur

[32]        M. Perera a déduit 8 185 $ pour 2009 et 8 055 $ pour 2010 en tant que frais afférents à un véhicule à moteur[16]. M. Perera a témoigné qu’il avait déduit des frais concernant seulement deux des quatre voitures qui étaient en son nom, mais qu’il n’avait pas fourni de registre de kilométrage. Il a déclaré que les montants déduits au titre des frais afférents à un véhicule à moteur sont fondés sur des estimations de la consommation hebdomadaire d’essence de 80 $ pour 2009 et de 50 $ pour 2010 pour une période de 11 mois pour chacune de ces années[17].

[33]        L’avocate de l’intimée a soutenu que, compte tenu des frais déduits par l’appelant, il était difficile de déterminer la partie des frais qui avaient été supportés relativement à son emploi, parce que les montants déduits étaient en grande partie fondés sur des estimations, et que l’appelant ne pouvait pas étayer ses demandes de déduction. Elle m’a renvoyée à la décision Glawdecki c La Reine, 2010 CCI 650, [2010] ACI no 522 (QL), dans laquelle la Cour a souligné que l’obstacle lié à la preuve n’était pas facile à surmonter en l’absence de la tenue d’un registre de kilométrage pour les frais supportés.

[34]        Étant donné l’absence de documents pertinents et d’autres éléments de preuve pour étayer les demandes de déduction pour des frais afférents à un véhicule, en dehors des montants concédés par le ministre, je conclus que M. Perera n’a pas réussi à établir une preuve à première vue qu’il a dépensé les montants dans l’accomplissement de ses fonctions lors de déplacements qu’il a effectués dans l’exercice des fonctions de son emploi en application de l’alinéa 8(1)h.1) de la Loi. Je conclus que c’est à juste titre que le ministre a refusé la demande de déduction de ces montants.

Stationnement

[35]        M. Perera a déduit des frais de stationnement de 1 500 $ pour 2009. Lors du contre‑interrogatoire, il a admis que les cinq derniers reçus, à la pièce A‑2, à l’onglet 29, se rapportaient aux frais mensuels de stationnement aux bureaux de la RBC. En ce qui a trait aux 49 reçus restants[18], il a initialement admis que ceux‑ci concernaient le stationnement aux bureaux de la RBC ou à des bureaux adjacents, et il a plus tard déclaré qu’il n’était pas certain.

[36]        L’avocate de l’intimée a soutenu que les frais en question étaient des dépenses personnelles supportées par tout employé qui conduit un véhicule pour se rendre à l’établissement de son employeur et pour en revenir.

[37]        En l’absence de tout autre élément de preuve, je conclus que les frais de stationnement pour 2009 concernent sa présence au bureau de la RBC et qu’ils constituent une dépense personnelle. Le ministre a refusé à juste titre la demande de déduction concernant le montant pour 2009.

Repas, boissons et divertissement

[38]        M. Perera a demandé, sous cette rubrique, une déduction de 2 400 $ pour 2009 et de 2 100 $ pour 2010. Il a déclaré que les repas achetés pour un groupe de personnes concernaient des activités à caractère commercial, mais il ne pouvait pas donner les noms des clients qui avaient participé à ces activités. Il a affirmé qu’il rencontrait ses clients à des restaurants et que, souvent, il ne pouvait signer un contrat que s’il achetait le repas de midi et parfois une boisson. Lors du contre‑interrogatoire, il a admis que certains repas et certaines boissons alcoolisées avaient peut‑être été achetés pour la famille ou pour des amis, et qu’il ne pouvait pas distinguer les montants personnels des montants liés à son emploi.

[39]        M. Perera a reconnu que la majorité des frais de repas concernaient des repas individuels qu’il avait pris à des restaurants à service rapide. Il a expliqué que les reçus faisant état de repas individuels étaient pour des aliments et des boissons qu’il avait consommés alors qu’il attendait l’arrivée de clients au restaurant, et soutient que cela se rapporte à sa capacité à générer des revenus de commissions. En me conformant aux principes énoncés dans l’arrêt Symes, je conclus que ces frais constituent des dépenses personnelles.

[40]        Selon le formulaire, M. Perera n’était pas tenu de se déplacer en dehors de la municipalité du lieu d’affaires de la RBC pour 12 heures ou plus. M. Perera a déclaré que les renseignements figurant dans le formulaire étaient incorrects, parce qu’il devait aller rencontrer les clients qu’on lui recommandait, quel que soit l’endroit où ils se trouvaient en Ontario. Étant donné que M. Perera n’a pas appelé Joe DeLuca, directeur commercial chez RBC, en tant que témoin indépendant afin qu’il puisse confirmer que le formulaire n’avait pas été correctement rempli relativement à cette question, je dois rejeter la preuve de M. Perera sur ce point et tirer une conclusion défavorable selon laquelle le formulaire a été correctement rempli.

[41]        L’intimée soutient qu’à part les montants concernant les repas de groupe, les boissons et les billets donnés en cadeau à des tiers, pour lesquels l’intimée a concédé que 50 % sont déductibles et raisonnables dans les circonstances, les montants restants se rapportent à des repas individuels et des boissons consommés par M. Perera, et les frais de divertissement ne sont pas étayés[19]. En outre, étant donné que le formulaire rempli par la RBC montre que M. Perera n’était pas tenu de se rendre en dehors de la municipalité où était située la RBC pour plus de 12 heures, les repas qu’il a consommés ne sont pas déductibles au titre du paragraphe 8(4) de la Loi.

[42]        Compte tenu des éléments de preuve, j’accepte que l’intimée a refusé à juste titre la demande de déduction au titre des frais de repas, de boissons et de divertissement pour les montants restants.

[43]        En ce qui concerne l’achat de boissons alcoolisées à la LCBO et au magasin The Beer Store, l’appelant a témoigné qu’il prenait une caisse de bière et rencontrait des clients pour discuter des assurances. Il a également expliqué qu’il avait pris l’habitude d’apporter une caisse de bière à un garage où ses clients consommaient la bière en attendant que leurs véhicules soient réparés. En réponse aux questions posées par l’avocate de l’intimée, l’appelant a admis que le whiskey et le brandy figurant sur les reçus servaient pour sa consommation personnelle et que [traduction] « peut‑être », selon les jours, il y avait des reçus pour d’autres alcools se rapportant à sa consommation personnelle.

[44]        L’intimée a fait une concession de 50 % pour les achats d’alcool pour les clients, à l’exception d’articles que l’appelant a reconnu avoir consommés, et a refusé la déduction du montant restant. À la lumière de la preuve, je conclus que l’intimée a refusé à bon droit la demande de déduction du montant restant.

Publicité et promotion

[45]        Les montants en cause sont de 10 127 $ pour 2009 et de 9 536 $ pour 2010. M. Perera a déclaré qu’en 2009, il avait fait de la publicité 16 fois. En 2010, il a dépensé 2 100 $, mais lors du contre‑interrogatoire, il ne pouvait pas se souvenir du nombre de publicités qu’il avait faites. Selon son témoignage, il avait embauché quatre étudiants pour faire du télémarketing. M. Perera n’a produit en preuve qu’un reçu qui comportait un nom, une signature et un numéro de téléphone d’un télévendeur confirmant que des services totalisant 4 400 $ avaient été rendus à M. Perera en 2009.

[46]        L’avocate de l’intimée a concédé, en totalité, les montants concernant la publicité faite par des tiers. Toutefois, les montants restants ont été refusés parce que M. Perera n’a pas réussi à fournir d’éléments de preuve adéquats et fiables à l’appui du reste des dépenses.

[47]        J’accepte les éléments de preuve de M. Perera en ce qui a trait au télémarketing pour 2009, mais seulement pour le montant de 4 400 $, tel qu’il a été étayé par le reçu signé. Toutefois, étant donné que M. Perera n’a pas produit de reçus ni fourni d’explications adéquates pour les montants restants, je conclus que l’intimée a refusé à bon droit la demande de déduction pour le reste des montants relatifs à cette catégorie de dépenses.

Pénalité pour production tardive

[48]        Pour l’année d’imposition 2010, le ministre a imposé une pénalité pour production tardive en application du paragraphe 162(1) de la Loi. M. Perera a contesté cette pénalité[20].

[49]        Selon le témoignage fait à l’audience, la déclaration de revenus pour 2010 a été reçue par l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») le 10 mai 2011[21], il y avait un montant dû et la date de production de la déclaration était le 2 mai 2011.

[50]        M. Perera a déclaré qu’il croyait avoir produit la déclaration de revenus pour 2010 à l’échéance. Il a témoigné que, de 2009 à 2011, il était très malade et avait eu de graves problèmes de santé lorsqu’il travaillait à la RBC. L’intimée a admis que M. Perera avait été placé sous le régime d’invalidité de longue durée en raison de ses fonctions cognitives.

[51]        La Cour reconnaît que le contribuable peut se prévaloir du moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable en matière d’imposition de pénalités s’il démontre que des mesures raisonnables ont été prises afin de se conformer à la loi. Dans la décision Rupprecht c La Reine, 2007 CCI 191, [2006] ACI no 586 (QL), la Cour a souligné, au paragraphe 24, que, dans la décision Bennett v The Queen, la Cour a soutenu que le contribuable peut invoquer le moyen de défense de la diligence raisonnable contre une pénalité pour production tardive, mais qu’un degré élevé de diligence est exigé de la part du contribuable. Plus récemment, la Cour a réitéré le fait que le moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable peut être invoqué lorsque des mesures raisonnables ont été prises pour se conformer à la loi[22].

[52]        Je suis convaincu que, compte tenu de la maladie de M. Perera, celui‑ci a pris des mesures raisonnables et a fait preuve de diligence raisonnable pour tenter de se conformer à l’obligation de produire sa déclaration pour 2010. J’estime qu’il serait déraisonnable d’imposer une pénalité pour production tardive.

[53]        En résumé, l’appel est accueilli en partie, étant donné que la pénalité pour production tardive pour l’année d’imposition 2010 est annulée et que M. Perera sera autorisé à déduire les dépenses d’emploi additionnelles suivantes :

 

2009

2010

Concédées par le ministre

9 389,97 $

9 757,15 $

Frais de poste

3,42 $

42,53 $

Véhicule de location

325 $

 

Télémarketing

 

4 400 $

 

 

[54]        Les appels sont rejetés sur tous les autres points.

Signé à Vancouver (Colombie‑Britannique), ce 23e jour de septembre 2014.

« K. Lyons »

Juge Lyons

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 30jour d’octobre 2014.

 

Espérance Mabushi, M.A. Trad.Jur.

 

 

 


RÉFÉRENCE :

2014 CCI 280

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2013-3788(IT)I

Intitulé :

MAHES PERERA c. SA MAJESTÉ LA REINE

LIEU DE L’AUDIENCE :

Toronto (Ontario)

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 28 mars 2014

Motifs du jugement :

L’honorable juge K. Lyons

DATE DU JUGEMENT :

Le 23 septembre 2014

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

Avocate de l’intimée :

Me Katie Beahen

 

Avocats inscrits au dossier :

Pour l’appelant :

Nom :

S/O

Cabinet :

 

Pour l’intimée :

William F. Pentney

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 



[1]               Quelques semaines après le congédiement, les bureaux de la RBC ont déménagé.

 

[2]              M. Perera a déclaré un revenu provenant de la RBC de 47 230 $ pour 2009 et de 32 652 $ pour 2010. Ces montants ont été inclus dans le revenu de commissions. Je tiens à souligner que le revenu de commissions de 32 652 $ figurant au paragraphe 18 de la réponse est erroné.

 

[3]              Les montants sont arrondis à la valeur inférieure.

 

[4]              Les montants concédés comprennent le montant total pour le téléphone cellulaire, pour la publicité étayée par des factures et/ou des reçus délivrés par un tiers ainsi que pour des réparations sur un véhicule à moteur. L’intimée a également admis 50% des frais pour chacune des catégories suivantes : repas et boissons pris en groupe, déplacement, boissons alcoolisées, billets donnés en cadeau à des tiers, essence ordinaire pour un véhicule à moteur et Internet.

 

[5]              Le paragraphe 8(1) de la Loi précise les types de dépenses. Le paragraphe 8(2) de la Loi prévoit la restriction générale qui est libellée ainsi : « Seuls les montants prévus au présent article sont déductibles dans le calcul du revenu d’un contribuable tiré, pour une année d’imposition, d’une charge ou d’un emploi ».

 

[6]        L’alinéa 8(1)f) de la Loi est libellé ainsi :

:

[…]

f)          lorsque le contribuable a été, au cours de l’année, employé pour remplir des fonctions liées à la vente de biens ou à la négociation de contrats pour son employeur, et lorsque, à la fois :

(i)         il était tenu, en vertu de son contrat, d’acquitter ses propres dépenses,

(ii)        il était habituellement tenu d’exercer les fonctions de son emploi ailleurs qu’au lieu d’affaires de son employeur,

(iii)       sa rémunération consistait en tout ou en partie en commissions ou autres rétributions semblables fixées par rapport au volume des ventes effectuées ou aux contrats négociés,

(iv)       il ne recevait pas, relativement à l’année d’imposition, une allocation pour frais de déplacement qui, en vertu du sous‑alinéa 6(1)b)(v), n’était pas incluse dans le calcul de son revenu,

les sommes qu’il a dépensées au cours de l’année pour gagner le revenu provenant de son emploi (jusqu’à concurrence des commissions ou autres rétributions semblables fixées de la manière prévue au sous‑alinéa (iii) et reçues par lui au cours de l’année) dans la mesure où ces sommes n’étaient pas :

(v)        des dépenses, des pertes ou des remplacements de capital ou des paiements au titre du capital, exception faite du cas prévu à l’alinéa j),

(vi)       des dépenses qui ne seraient pas, en vertu de l’alinéa 18(1)l), déductibles dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année, si son emploi relevait d’une entreprise exploitée par lui;

(vii)      des montants dont le paiement a entraîné la réduction du montant qui serait inclus par ailleurs dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année en application de l’alinéa 6(1)e);

[7]              C’est‑à‑dire, s’il s’agit des sommes dépensées par le contribuable pendant l’année pour gagner un revenu d’emploi.

 

[8]              Aux paragraphes 20 et 24 de la décision Leriche c La Reine, 2010 CCI 416, 2010 DTC 1279, le juge D’Arcy a souligné, dans son examen de l’arrêt Symes, que le paragraphe 9(1) de la Loi autorisant la déduction de dépenses d’entreprise et la présence du critère de bénéfice et le paragraphe 18(1) de la Loi, qui limite les montants à déduire, ne constituent pas des facteurs mentionnés à l’alinéa 8(1) f) de la Loi.

 

[9]         L’alinéa 8(1)h.1) est libellé ainsi :

 

8(1)h.1)           dans le cas où le contribuable, au cours de l’année, a été habituellement tenu d’accomplir les fonctions de son emploi ailleurs qu’au lieu d’affaires de son employeur ou à différents endroits et a été tenu, aux termes de son contrat d’emploi, d’acquitter les frais afférents à un véhicule à moteur qu’il a engagés dans l’accomplissement des fonctions de sa charge ou de son emploi, les sommes qu’il a dépensées au cours de l’année au titre des frais afférents à un véhicule à moteur pour se déplacer dans l’exercice des fonctions de son emploi, sauf s’il a, selon le cas :

(i)         reçu une allocation pour frais afférents à un véhicule à moteur qui, par l’effet de l’alinéa 6(1)b), n’est pas incluse dans le calcul de son revenu pour l’année,

(ii)               demandé une déduction pour l’année en application de l’alinéa f);

 

[10]        L’alinéa 8i) de la Loi est libellé ainsi :

           

            8(i)       [...]       les sommes payées par le contribuable au cours de l’année au titre :

 

[…]

 

(iii)       du coût des fournitures qui ont été consommées directement dans l’accomplissement des fonctions de la charge ou de l’emploi et que le contrat d’emploi du cadre ou de l’employé l’obligeait à fournir et à payer,

 

[11]             Selon l’intimée, un grand nombre des montants en litige concerne des dépenses personnelles non déductibles. En outre, certaines dépenses n’ont pas été supportées, et, si elles l’ont été, M. Perera n’était pas tenu par la RBC de les acquitter dans l’accomplissement des fonctions de son emploi, et elles n’étaient pas raisonnables. Aussi, M. Perera n’était pas tenu de s’absenter pour au moins 12 heures consécutives du lieu où il devait habituellement se présenter pour travailler. Par conséquent, il n’avait pas le droit de déduire des frais de repas.

 

[12]             La Cour a minutieusement examiné la différence entre les dépenses personnelles et les dépenses d’entreprise et a appliqué le critère du « à défaut de » aux besoins que la dépense satisfait. Dans la décision Gaouette v Canada, [2004] 2 CTC 2851, la Cour a conclu que les dépenses pour le nettoyage à sec, pour se faire couper les cheveux et pour la manucure étaient des dépenses personnelles.

 

[13]             Il y avait 20 reçus : deux de 170 $ chacun, un de 90,50 $ et dix‑sept d’environ 45 $ chacun.

 

[14]             Pièce A-2.

 

[15]             Il n’était pas certain si les frais en question avaient été déduits au titre de l’alinéa 8(1)f) ou 8(1)h.1) de la Loi. Toutefois, étant donné que le formulaire établit que l’appelant est tenu d’acquitter [traduction] « diverses » dépenses, les frais ont été considérés comme des frais déduits au titre de l’alinéa 8(1)f) de la Loi.

 

[16]             Pour obtenir ces chiffres, j’ai fait la soustraction entre les montants figurant dans la réponse du ministre et les montants déduits au titre de frais de stationnement pour chaque année, étant donné que ceux‑ci sont traités sous une rubrique distincte.

 

[17]             Concernant les quatre véhicules inscrits à son nom, sa fille et son fils utilisaient chacun un véhicule, mais son épouse ne conduisait aucun des véhicules.

 

[18]             Principalement des montants de 2,50 $, de 3 $ et de 4 $.

 

[19]             Par exemple, M. Perera avait déduit des frais pour des billets de cinéma en tant que dépense de divertissement pour ses clients. Lors du contre‑interrogatoire, il n’a pas pu expliquer comment il avait obtenu les billets en question de ses clients ou des receveurs de billets.

 

[20]             Le paragraphe 162(1) est ainsi libellé :

 

Toute personne qui ne produit pas de déclaration de revenu pour une année d’imposition selon les modalités et dans le délai prévus au paragraphe 150(1) est passible d’une pénalité égale au total des montants suivants :

 

a) 5 % de l’impôt payable pour l’année en vertu de la présente partie qui était impayé à la date où, au plus tard, la déclaration devait être produite;

 

b) le produit de 1 % de cet impôt impayé par le nombre de mois entiers, jusqu’à concurrence de 12, compris dans la période commençant à la date où, au plus tard, la déclaration devait être produite et se terminant le jour où la déclaration est effectivement produite.

 

[21]             T1 générale 2010 – Déclaration de revenus et de prestations, pièce R‑2.

 

[22]             Tuck c La Reine, 2012 CCI 332, 2012 DTC 1274, au paragraphe 25.

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